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Le terrorisme et le Canada

Le terrorisme ne date pas d'hier. Des spécialistes ont relevé des épisodes de terrorisme au Moyen-Orient pendant le Moyen Âge et même avant. Depuis la fin du 19e siècle, les actes de terrorisme sont fréquents.

Terrorisme

Le terrorisme est l'emploi, par des individus ou des groupes, de violence ou de menaces de violence à l'égard de civils ou de biens. Pour parvenir à des fins politiques, le terroriste cherche à semer la terreur en commettant des assassinats, des attaques à la bombe, des détournements d'avion et des enlèvements. Certains pays utilisent le terrorisme contre leur propre population ou celles de pays ennemis, mais ces actes ne sont pas reconnus comme des actes terroristes par le droit international ni le droit canadien. En réalité, peu d'organisations extrémistes violentes accepteraient de se faire qualifier de « terroriste », un terme à connotation politique et très négative. La plupart de ces organisations se décrivent comme des défenseurs de la liberté et des combattants contre l'injustice.

Le terrorisme ne date pas d'hier. Des spécialistes ont relevé des épisodes de terrorisme au Moyen-Orient pendant le Moyen Âge et même avant. Depuis la fin du 19e siècle, les actes de terrorisme sont fréquents. De 1880 à 1910, des anarchistes ont assassiné plusieurs dirigeants mondiaux, dont le président William McKinley et le roi d'Italie Umberto 1er. En 1893, des anarchistes ont fait exploser une bombe au Teatro Liceo de Barcelone, faisant 22 morts et 50 blessés. En 1914, une organisation nationaliste de la Bosnie a assassiné le prétendant au trône austro-hongrois et sa femme, déclenchant une série d'événements qui ont mené à la Première Guerre mondiale. Depuis, le terrorisme est employé par des groupes religieux, nationalistes et idéologiques, de droite comme de gauche.

En dépit de son passé relativement paisible, le Canada n'est pas à l'abri du terrorisme. Des centaines d'actes terroristes y ont été commis. En sol canadien, des organisations terroristes étrangères ont recueilli des fonds, planifié des opérations et lancé des attaques. Par ailleurs, des citoyens canadiens ont commis des actes terroristes à l'étranger. Malgré les centaines d'attaques perpétrées par des Canadiens ou contre des Canadiens, le terrorisme a rarement fait avancer la cause de ceux qui y ont eu recours.

Le terrorisme en sol canadien

En 1923, les Fils de la liberté lancent ce qui est probablement la première campagne terroriste au Canada. Résidents de la Colombie-Britannique, ils sont un groupe dissident des DOUKHOBORS, une secte religieuse qui refuse de se soumettre à l'autorité de l'État. Contrairement aux Doukhobors orthodoxes, de nature pacifique, les Fils de la liberté ont recours à la violence pour protester contre l'ingérence du gouvernement dans leur vie privée, qui se manifeste par l'éducation obligatoire ainsi que par l'enregistrement obligatoire des naissances, des décès, des mariages et de la propriété foncière. Ils sont à l'origine d'explosions et d'incendies visant des écoles, des maisons, des commerces, des lignes de chemin de fer et des lignes électriques. En 40 ans, les Fils de la liberté se livrent à des centaines d'attaques contre le gouvernement, les sociétés de chemin de fer et d'électricité et contre les Doukhobors, que les fanatiques jugent trop matérialistes. L'événement le plus dramatique est l'attaque à la bombe d'un pylône électrique, en 1962, dans le sud-est de la Colombie-Britannique. Les attaques sont moins nombreuses après 1962, année où 36 Fils de la liberté sont reconnus coupables d'incendie criminel ou de complot en vue de provoquer un incendie criminel et condamnés à douze ans d'emprisonnement. Leurs attaques sont rares dans les années 1970 et 1980.

Environ 300 actes terroristes sont perpétrés en sol canadien dans les années 1960. Ils sont presque tous commis par les Fils de la liberté ou par le FRONT DE LIBÉRATION DU QUÉBEC (FLQ). Pour faire avancer la cause de l'indépendance du Québec, les membres du FLQ lancent une série d'attentats à la bombe contre le gouvernement fédéral, la Société canadienne des postes, les Forces armées, la GENDARMERIE ROYALE DU CANADA, la SOCIÉTÉ RADIO-CANADA, les CHEMINS DE FER NATIONAUX DU CANADA et la Bourse de Montréal. Leur but est de causer des dégâts matériels, mais six personnes perdent la vie et bien d'autres sont blessées.

En octobre 1970, le FLQ enlève le délégué commercial de l'Angleterre à Montréal James Cross, et le ministre du Travail du Québec, Pierre LAPORTE. Le gouvernement du Québec demande alors l'aide de l'armée canadienne pour résoudre la crise. Le gouvernement fédéral, dirigé par Pierre Trudeau, impose la LOI DES MESURES DE GUERRE et suspend les libertés civiles, permettant ainsi aux forces policières d'arrêter des centaines de personnes sans inculpation. Laporte meurt par étranglement et ses ravisseurs sont condamnés pour meurtre et enlèvement. Cross est finalement libéré et ses ravisseurs s'envolent pour Cuba en échange de sa libération. Deux ans plus tard, le FLQ a cessé ses activités. D'autres groupes revendiquent toutefois des attaques terroristes en son nom dans les années 1970 et 1980.

Au début des années 1980, Direct Action, un groupuscule anarchiste, entreprend une campagne de violence contre la pollution, la pornographie et l'industrie de l'armement. Ses activités sont financées par la fraude et le vol à main armée. Il cible, entre autres, un poste électrique de BC Hydro sur l'île de Vancouver et l'usine torontoise de Litton Systems, spécialisée dans la fabrication de composants de missiles de croisière. Quelques membres du groupe, agissant sous le nom de Wimmin's Fire Brigade, commettent également des attentats à la bombe incendiaire contre trois clubs vidéo pour adultes du Grand Vancouver. En tout, Direct Action a blessé dix personnes et cause plus de 10 millions de dollars de dégâts. Les actions du groupe cessent après l'arrestation en janvier 1983 des cinq têtes dirigeantes de l'organisation, surnommées les Squamish Five. Après avoir plaidé coupables, les activistes sont condamnés à des peines d'emprisonnement de quatre à huit ans.

Dans les années 1980 et 1990, des attaques sont perpétrées par des groupes extrémistes issus d'organismes de protection des droits des animaux et de protection de l'environnement. Le bras canadien du Front de libération des animaux libère des animaux de plusieurs laboratoires de recherche avant d'y mettre le feu ou de les vandaliser. Un groupe se faisant appeler « the Justice Department » envoie à des guides de chasse ou à des détaillants de fourrures des menaces de mort accompagnées de lames de rasoir couvertes de mort-aux-rats ou de sang prétendument infecté par le VIH. Des terroristes écologiques détruisent en Colombie-Britannique, en 1995, un pont forestier construit au coût de 2 millions de dollars et causent 5 millions de dollars de dommages à une installation d'exploitation forestière de l'Alberta en 1997.

Le terrorisme international au Canada

La majorité des actes terroristes perpétrés au Canada ont été commis par des Canadiens dans le cadre de revendications nationales. Quelques incidents de nature internationale sont également survenus en sol canadien.

Les premiers incidents terroristes internationaux au Canada remontent aux fenians, juste avant l'avènement de la Confédération. La confrérie des fenians est une organisation nationaliste irlandaise créée en 1850 qui défend, par la force, l'indépendance de l'Irlande par rapport à l'Empire britannique. En 1865, les rangs de la cellule américaine de l'organisation sont grossis par l'arrivée d'anciens combattants de la Guerre de Sécession qui vient de prendre fin. Les membres ne s'entendent pas sur les tactiques à utiliser : certains sont pour les assassinats et autres actes terroristes et d'autres préconisent une guerre armée conventionnelle contre les forces canadiennes ou britanniques.

En 1866, les Fenians lancent une série de raids peu concluants contre des cibles au Nouveau-Brunswick, dans l'Est et dans l'Ouest canadien. Ils détruisent des ponts, coupent des fils télégraphiques, endommagent ou volent des biens privés et engagent le combat avec les milices locales. Ces incidents ne réussissent qu'à raviver l'appui de la population envers la Confédération, qui offrirait une sécurité accrue aux colonies. En 1868, Thomas D'Arcy MCGEE, membre du Parlement et fondateur de la Confédération, est assassiné, fort probablement par un fenian agissant sans autorisation de la confrérie. Par la suite, les attaques de la confrérie sont infructueuses. Sa tentative d'invasion au Québec en 1870 échoue et, en 1871, le groupe rate son dernier raid au Manitoba.

La fréquence des incidents terroristes internationaux augmente au Canada dans les années 1960. De 1960 à 1980, une soixantaine d'actes terroristes internationaux sont commis en sol canadien. À l'aéroport industriel d'Edmonton, en 1965, un groupe de protestation contre la guerre du Vietnam dynamite trois jets de l'armée de l'air américaine, détruisant deux avions et tuant un garde. En 1968, à Toronto et à Sarnia, des activistes anti-guerre commettent des attentats à la bombe contre des maisons appartenant à des dirigeants d'entreprises fournissant des armes et d'autre matériel de guerre à l'armée américaine. Dans les années 1960, des extrémistes croates commettent des attentats à la bombe contre l'ambassade de Yougoslavie à Ottawa ainsi que ses consulats à Toronto et à Montréal. De 1966 à 1980, des Cubains anti-Castro commettent plusieurs attentats à la bombe au Canada contre des missions diplomatiques de leur pays et tuent ainsi une personne en 1972. Des lettres piégées sont envoyées à l'ambassade d'Israël à Ottawa et à son consulat à Montréal en 1972. Dans les années 1980, des terroristes arméniens tirent sur deux diplomates turques; l'un est tué et l'autre reste paralysé. Les mêmes terroristes prennent en otage l'ambassadeur de Turquie, tuant un garde canadien au cours de l'opération. En 1986, des extrémistes SIKHS blessent par balle un député de l'État indien du Punjab en visite sur l'île de Vancouver.

L'attaque qui a été de loin la plus meurtrière de cette période est l'attentat à la bombe contre un vol d'Air India en 1985. Des extrémistes sikhs de la Colombie-Britannique, déterminés à se tailler une patrie sikhe indépendante dans la province indienne du Punjab, réussissent à faire passer deux valises remplies d'explosifs dans deux avions commerciaux. Une bombe explose au sol pendant le transfert d'une des valises à l'aéroport de Narita, près de Tokyo, tuant deux personnes et en blessant quatre autres. L'autre bombe explose alors que l'avion du vol 182 d'Air India se trouve au large de la côte irlandaise et tue les 329 passagers. Cette attaque terroriste est la plus meurtrière que le monde ait connue avant celle du 11 septembre 2001. Trois conspirateurs sont inculpés, mais un seul est condamné. En 2006, le gouvernement canadien nomme une commission chargée d'enquêter sur l'attentat et de formuler des recommandations pour le renforcement des efforts antiterroristes canadiens. La commission a tenu des audiences de septembre 2006 à février 2008, mais on attend toujours la publication de son rapport final.

Des organisations terroristes internationales ont recruté des membres, fait de la propagande et produit de faux documents en sol canadien. Elles ont aussi mis à profit leur présence en sol canadien pour financer leurs activités par la collecte de fonds, le vol et la fraude. Un très petit nombre d'immigrants au Canada ont été connus comme membres de groupes terroristes ou comme extrémistes de l'Afrique du Nord, du Moyen-Orient et de l'Asie méridionale.

Al-Qaeda et les événements du 11 septembre 2001

Dans les années 1990, le Canada abrite au moins deux groupes liés à l'organisation terroriste islamiste Al-Qaïda. Une cellule du Groupe islamique armé, un groupe algérien allié à Al-Qaïda, opère à Montréal pour amasser des fonds par le vol et la fraude. Plusieurs de ses membres ont reçu un entraînement dans des camps d'Al-Qaïda en Afghanistan, dont Ahmed Ressam, arrêté à Port Angeles, dans l'État de Washington, en décembre 1999, en possession d'explosifs et de détonateurs dissimulés dans le coffre de son véhicule. Ressam, surnommé par les médias le Millennium Bomber (terroriste du millénaire), comptait faire sauter l'aéroport international de Los Angeles aux environs du 1er janvier 2000. À Toronto, un autre groupe était dirigé par Ahmed Said Khadr, un ami du chef d'Al-Qaïda, Osama ben Laden. Khadr a recueilli des fonds au Canada pour financer des attaques islamistes à l'étranger, comme l'attentat à la bombe contre l'ambassade d'Égypte à Islamabad en 1995, qui a fait 18 morts et 75 blessés.

Les attaques perpétrées par Al-Qaïda à New York et à Washington le 11 septembre 2001 ont fait 3000 morts, dont deux douzaines de Canadiens. Le Canada a réagi en envoyant des troupes en Afghanistan et dans le golfe Persique dans le cadre de la campagne antiterroriste internationale menée par les États-Unis. À l'automne 2001, le Parlement a voté en faveur de la LOI ANTITERRORISTE, visant à accroître la sévérité des peines pour les auteurs d'actes de terrorisme, à faciliter le blocage ou la saisie des avoirs financiers des personnes soupçonnées de terrorisme et à restreindre l'accès du public aux renseignements critiques sur le plan de la sûreté. De plus, la nouvelle loi a élargi le champ d'action des forces policières en matière de surveillance, d'arrestation et de détention de suspects. En novembre 2002, ben Laden a fait savoir que le Canada faisait désormais partie de la liste des pays visés par les attaques terroristes d'Al-Qaïda.

La coalition, menée par les États-Unis en Afghanistan, a démantelé les camps d'entraînement d'Al-Qaïda et perturbé l'organisation, ce qui rend difficile la préparation de nouvelles attaques. Toutefois, Al-Qaïda a déjà entraîné un grand nombre de terroristes, membres d'autres organisations qui demeurent en contact avec elle par l'intermédiaire d'un réseau terroriste international. Ces derniers embrassent sa cause en commettant des attentats dans plusieurs villes, dont Bali (2002), Madrid (2004) et Londres (2005).

Al-Qaïda inspire aussi des terroristes canadiens et de plusieurs autres pays. En 2004, la police a arrêté Momin Khawaja, un homme né à Ottawa qui avait travaillé avec des islamistes britanniques à la préparation d'un attentat à la bombe au Royaume-Uni. En 2008, Khawaja a été la première personne à être condamnée en vertu de la Loi antiterroriste canadienne. En 2006, 18 personnes (surnommées Les 18 de Toronto) ont été arrêtées par la police à Toronto et inculpées de complot dans le but de commettre des attaques terroristes. Selon la police, le groupe avait l'intention de faire exploser des camions piégés à la Bourse de Toronto et au quartier général de la région de Toronto du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS). Les 18 de Toronto comptaient également prendre d'assaut les édifices du parlement à Ottawa pour prendre des otages et décapiter le premier ministre. Sept des accusés ont été relâchés après la suspension des accusations qui pesaient contre eux. Les onze autres ont été jugés coupables.

Le contre-terrorisme

De nombreuses directions du gouvernement fédéral participent à la lutte contre le terrorisme au Canada. Le SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ (SCRS) a pour mandat d'enquêter sur d'éventuelles menaces terroristes. L'application des lois antiterroristes canadiennes est du ressort de la Gendarmerie royale du Canada (GRC). Le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE) est mandaté pour enquêter sur les risques de financement du terrorisme au Canada. L'Agence des services frontaliers du Canada, le ministère de la Sécurité publique et le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration font usage d'attestations de sécurité pour renvoyer du Canada toute personne qui n'a pas l'autorisation de séjourner au pays ou qui représente une menace sérieuse. Le MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL, en collaboration avec d'autres pays, combat le terrorisme en partageant des renseignements et en aidant à l'élaboration d'accords internationaux concernant des actes de terrorisme précis.

Au ministère de la Défense nationale, le Chef du renseignement de la Défense dirige une organisation qui analyse les menaces terroristes pouvant compromettre l'efficacité des Forces canadiennes. Le Centre de la sécurité des télécommunications Canada (CSTC) recueille des renseignements en surveillant les télécommunications avec l'étranger et d'autres communications électroniques échangées par des terroristes. Le Canada reçoit beaucoup de renseignements dans le cadre d'ententes de partage conclues avec ses pays alliés, plus particulièrement les États-Unis, l'Angleterre et l'Australie. En outre, la Deuxième Force opérationnelle interarmées (FOI 2), un groupe d'intervention spécialisé des Forces canadiennes, est entraînée pour mener des opérations de contre-terrorisme au pays et à l'étranger.