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Théâtres d'été en français

On connaît peu d'exemples anciens de productions estivales au Canada, surtout si on s'en tient à une acception stricte de la notion de théâtre d'été, excluant les masques, réceptions et pageants liturgiques.

Théâtres d'été en français

On connaît peu d'exemples anciens de productions estivales au Canada, surtout si on s'en tient à une acception stricte de la notion de théâtre d'été, excluant les masques, réceptions et pageants liturgiques. Un festival de théâtre d'été en français a lieu à Montréal, en 1904, quand, à l'occasion des fêtes de la Saint-Jean, le Monument-national présente Un abonné de la campagne de Conrad Gauthier, la Salle Poiré accueille Diplomatie conjugale de Germain Beaulieu et le Théâtre-national, Une volupté nouvelle de Louis-Napoléon Sénécal et La Justice des hommes d'Ernest Trouille. L'Annuaire du théâtre de 1908 cite par ailleurs Le Cur n'a pas d'âge d'une dame Casgrain à l'Hôtel Bel-Air de l'Île d'Orléans, en juillet 1907. Il faut par ailleurs mentionner l'exemple donné par le théâtre Brae Manor fondé à Knowlton, en 1936, par Filmore et Marjorie Sadler, et associé à l'école de théâtre du Montreal Repertory Theatre auquel il a survécu jusqu'en 1956. On y a vu jouer Christopher PLUMMER, au temps où il était membre de la troupe.

L'Équipe de Pierre Dagenais présente Le Songe d'une nuit d'été de William Shakespeare dans les jardins de l'Ermitage, à Montréal, en août 1945; Mario Duliani, qui avait été directeur de la section française du Montreal Repertory Theatre, monte un spectacle dans son Théâtre de Laval-sur-le-Lac en août 1947 et, le même mois, les Compagnons de Saint-Laurent (voirLEGAULT, Émile) jouent Les Précieuses ridicules et Le Médecin malgré lui au Chalet du Mont-Royal. Dans les Laurentides, la Jeune Scène monte De l'autre côté du mur au St. Adele Lodge au cours de l'été de 1952, Henri Norbert fonde le Théâtre de Sun Valley, en 1953, et Paul Hébert met en scène La Mégère apprivoisée de Shakespeare au club de curling de l'Hôtel Chantecler de Sainte-Adèle, pendant l'été de 1956. Ce théâtre poursuit ses activités pendant plusieurs années.

Les lieux de productions estivales commencent alors à se multiplier. La compagnie Escale se produit en 1957 au Centre d'art à Percé, dirigée par Susanne Guité, notamment avec la collaboration de Jacques Kanto de 1960 à1964; le Théâtre de la Fenière joue dans une grange de Loretteville en 1958, il est ensuite déplacé à L'Ancienne-Lorette; dans L'Estrie, le Théâtre de La Marjolaine voit le jour en 1960, avec Marjolaine Hébert, Hubert Loiselle, ainsi que d'autres dont Louis-Georges Carrier à compter de 1962; en 1964, c'est le tour de The Piggery à North Hatley, un théâtre anglophone qui fait occasionnellement place à des productions de Pierre GAUVREAU et Monique Lepage. Durant les années 60, on inaugure également le Théâtre des Marguerites de Jean DUCEPPE à Joliette, L'Égrégore à Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson et le chapiteau du Théâtre du nouveau monde à Repentigny.

Assez souvent, ces théâtres vont et viennent, au gré du succès assez volatile des sites de vacances d'été. Mais certains ont acquis une stabilité remarquable. Un rapport du Théâtre de Marjolaine révèle, p. ex., que, durant les 20 premières années, on y a créé 15 uvres québécoises, donné de l'emploi à 5 compositeurs, 8 metteurs en scène, 11 décorateurs et 117 acteurs ayant interprété 1200 rôles devant355 000 spectateurs. Et si on y joue le plus souvent des pièces légères, elles ont fréquemment des titres prestigieux comme Pygmalion ou Ubu Roi. Les théâtres d'été du Québec, qui ont pour plusieurs d'entre eux dépassé le stade des granges et des moulins d'occasion, atteignent actuellement 1 000 000 $ de chiffre d'affaires et ont l'avantage de compter sur un tourisme interne. Hors Québec, le théâtre estival mise beaucoup sur le tourisme externe, comme La Sucrerie de Conrad Lamadeleine à Casselman, en Ontario, de 1988 à 1996, et les cafés-théâtres du village acadien de Mont-Carmel, sur l'Île-du-Prince-Édouard, depuis 1985, et du pays de la Sagouine de Bouctouche, au Nouveau-Brunswick, depuis 1992.