Éditorial

Les soldats canadiens et la libération des Pays-Bas

Dans les derniers mois de la Deuxième Guerre mondiale, les Canadiens ont eu pour tâche de libérer les Pays-Bas de l’occupation nazie. En avril 1945, la  Première Armée canadienne a commencé par les régions au nord et à l’ouest des Pays-Bas, où beaucoup souffraient des pénuries de nourriture et de carburant dans ce que l’on surnomme l’« hiver de la faim ». Plus de 1000 militaires canadiens sont morts en service lors de ces derniers efforts pour libérer la nation. Les Néerlandais ont accueilli leurs libérateurs canadiens avec joie et gratitude et continuent d’honorer leur sacrifice aujourd’hui.

Libération des Pays-Bas

Un char du 8e hussards Princesse Louise (Nouveau-Brunswick) en route vers le Zuider Zee passant par Putten, Pays-Bas, le 18 avril 1945.

(photo prise par le capitaine Jack H. Smith, ministère de la Défense nationale du Canada, avec la permission des Bibliothèque et Archives Canada / PA-131042)

Libération des Pays-Bas

En avril 1945, la Deuxième Guerre mondiale tire à sa fin en Europe (voirJour de la Victoire en Europe). Les forces alliées ont traversé le Rhin et se dirigent désormais vers l’Allemagne. Sur leur flanc gauche, cependant, il existe une garnison allemande d’environ 120 000 hommes aux Pays-Bas, y compris ce qui reste de la Première Armée de parachutistes d’élite. Le commandant Bernard Montgomery ordonne donc aux Canadiens de les évacuer. Leur objectif est « d’ouvrir la route de ravitaillement vers le nord en passant par Arnhem, puis de dégager le nord-est de la Hollande, la ceinture côtière vers l’est en direction de l’Elbe, et l’ouest de la Hollande. » Le Premier Corps canadien reçoit l’ordre de déloger les forces allemandes dans l’ouest des Pays-Bas, tandis que le Deuxième Corps canadien se charge de la côte allemande et de la partie nord-est des Pays-Bas.

Célébration aux Pays-Bas, en 1945
Les troupes canadiennes pendant les célébrations en Hollande, en 1945.
(avec la permission du ministère de la Défense nationale/PA-146284)

1er Corps canadien dans l’ouest des Pays-Bas

Dans l’ouest des Pays-Bas, la tâche du 1er Corps canadien consiste à assurer la sécurité de la zone située au nord de la Meuse, où l’on trouve notamment les villes d’Amsterdam, de Rotterdam et de La Haye. Les Néerlandais habitant dans cette région souffrent de l’« hiver de la faim » de 1944 à 1945, alors que les réserves de nourriture et de carburant se font rares. Quelque 20 000 personnes meurent durant la famine, tandis que d’autres sont obligées de se nourrir de bulbes de tulipes et de betteraves à sucre pour survivre.

L’hiver de la faim : Henk van Duren

C’est alors que les années de famine ont commencé en Hollande : l’hiver de la faim. C’était l’hiver 1944-1945. Puis les gens de l’ouest sont venus en charrettes à bras et en vieux vélos. Ils sont venus dans le nord-est où nous avons grandi pour y trouver de la nourriture. Et c’était dur à croire, vous savez. Beaucoup d’agriculteurs donnaient de la nourriture aux gens, de la nourriture et d’autres choses, et ils leur permettaient de passer la nuit dans la grange. Je me souviens de mon oncle, qui accueillait parfois jusqu’à 20 personnes dans sa grange. Mais l’hiver a été rude, c’était un hiver très rude, en 1944-1945. Nous avons vu des gens mourir. Il y avait ces trois frères. Ils ont continué leur route et ils devaient avoir 13, 10 et 8 ans environ. Quelques jours plus tard, ils sont revenus et le deuxième garçon, celui du milieu, reposait mort sur un chariot. (Écoutez l’entrevue complète que Henk van Duren a accordée au Projet Mémoire.)


Henk van Duren

Henk van Duren lors d’un événement du Projet Mémoire, le 15 août 2012, à Waterloo, en Ontario.

(avec la permission de Henk van Duren et du Projet Mémoire)

Le 1er Corps canadien commence son assaut sur Arnhem le 12 avril. Après deux jours de combats d’une maison à l’autre, la ville est libérée. Un officier décrit plus tard la ville comme « l’un des sites les plus tristes que j’aie vus pendant cette guerre, car bien que la destruction ait été très loin d’être totale, chaque bâtiment était détruit à différents degrés. »

Trois jours plus tard, ils prennent contrôle de la ville d’Apeldoorn (qui est maintenant jumelée à Burlington, en Ontario). D’immenses célébrations suivent la libération de la ville, des drapeaux flottant des maisons et des magasins. Le 1er Corps canadien perd plus de 500 soldats dans la région entre le 11 et le 17 avril, mais il capture des milliers de soldats allemands et atteint un grand nombre de ses objectifs. À la fin avril, les Allemands sont repoussés vers ce qui est alors connu sous le nom de la ligne Grebbe, allant de Wageningen à la mer du Nord en passant par Amersfoort. Les Canadiens sécurisent ainsi la route d’approvisionnement se rendant au nord par Arnhem et libèrent une grande partie de l’ouest des Pays-Bas.

Le 28 avril, les Allemands conviennent d’une trêve, autorisant l’entrée des vivres destinés à la population affamée derrière la ligne Grebbe. Le lendemain, les bombardiers alliés y larguent 510 tonnes de nourriture. Le 2 mai, les Canadiens commencent à transporter 1000 tonnes de nourriture par route dans la région. Les Néerlandais affamés sont soulagés, bien qu’ils ne soient libérés qu’à la fin officielle de la guerre, en mai.

Les gens d'Ermelo libérés par l'escadron “B” du Strathcona's,  le 17 avril 1945.
Image: Robert Greene/Historica Canada

2e Corps canadien au nord-ouest

Dans le nord-est des Pays-Bas, le Deuxième Corps canadien avance rapidement. La 4e Division franchit le canal de Twente et s’empare d’Almelo le 5 avril. Elle tourne ensuite vers l’est et entre en Allemagne, en direction de la ville d’Oldenburg. Sur la route, la division capture les villes de Sogel et de Friesoythe (que les membres des Highlanders d’Argyll et de Sutherland rasent entièrement pour venger la mort de leur commandant).

De retour dans le nord des Pays-Bas, la 2e Division canadienne atteint Groningen le 13 avril. C’est là qu’ils rencontrent une résistance féroce de la part des troupes SS allemandes. Les tireurs d’élite sont partout, et les mitrailleuses criblent les Canadiens de balles alors qu’ils avancent dans les rues. Le 16 avril, après quatre jours de combats, en grande partie de pièce en pièce, les Allemands capitulent. La 2e Division sécurise ainsi la plus grande ville du nord des Pays-Bas et fait 2400 prisonniers au prix de 206 victimes.

Deux jours après la libération de Groningen, la 3e Division canadienne atteint la mer du Nord, ayant capturé Zutphen, Deventer, Zwolle et Leeuwardenon en chemin. Après avoir libéré la majeure partie du nord-est des Pays-Bas, le 2e Corps canadien se dirige vers l’est en direction des villes allemandes d’Emden, Wilhelmshaven et Oldenburg.

Le saviez-vous?
Après la libération, de milliers de Néerlandaises (1 886) ont épousé des soldats canadiens. Si vous souhaitez en savoir plus sur ces "épouses de guerre", consultez Épouses de guerre et Arrivée des épouses de guerre et de leurs enfants au Canada.


Fin de la guerre en Europe

À la fin avril, il est clair que la guerre en Europe touche à sa fin. Le 4 mai, les soldats canadiens reçoivent un message leur demandant de mettre fin à toutes les opérations et leur indiquant qu’un cessez-le-feu entrera en vigueur à 8 heures le lendemain matin. Le 7 mai, la guerre en Europe prend officiellement fin (voirJour de la Victoire en Europe).

Stuart Johns du 22e Régiment blindé canadien, les Canadian Grenadier Guards, se souvient du moment où la guerre a pris fin pour lui :

Le soir du 4, nous avons appris qu’un cessez-le-feu avait été mis en place, et notre unité a reçu l’ordre de se rendre dans un petit hameau [près d’Oldenburg] et d’y maintenir simplement cette position. Il n’y a eu ni cloches ni feux d’artifice, mais la guerre a pris fin pour nous à huit heures le matin du 5 mai. Tout était très calme, et il n’y a pas eu de célébration visuelle ni quoi que ce soit entre nous. Tout le monde était soulagé. On s’est assis autour et on n’a rien fait du reste de la journée. Voilà comment nous avons célébré le Jour de la Victoire en Europe. (Écoutez l’entrevue complète avec Stuart Johns dans le cadre des Témoignages d’anciens combattants du Projet Mémoire.)

Stuart Johns

Stuart Johns avec l'un des tanks des Canadian Grenadier Guards (unité de réserve d'infanterie).

(avec la permission du Projet Mémoire)

Sacrifice et commémoration

La libération des Pays-Bas a coûté cher aux Canadiens. Plus de 7600 personnes ont perdu la vie au cours des neuf mois qu’il a fallu pour libérer le pays ; plus de 1000 soldats meurent en avril seulement. Les victimes sont inhumées au Cimetière de guerre canadien d’Adegem (Belgique), au Cimetière de guerre canadien de Bergen-op-Zoom (dans le sud-ouest des Pays-Bas), au Cimetière de guerre canadien de Groesbeek (près de Nijmegen), au Cimetière de guerre canadien de Holten (nord-est des Pays-Bas), ainsi qu’au cimetière militaire de la forêt Reichswald et au cimetière du Rheinberg (Allemagne de l’Ouest). Les Néerlandais continuent de commémorer leurs libérateurs canadiens et de célébrer le lien qui unit les deux pays en organisant des défilés et en s’occupant des tombes des soldats canadiens tombés au combat.

Adriana Ouborg

Adriana Ouborg (au centre) avec sa sœur, Willemina Seywerd (à gauche) et une amie (à droite).

(avec la permission du Projet Mémoire)

Adriana Ouborg, Arnhem

Un lien très important s’est formé là-bas et, chaque année, beaucoup de Hollandais ouvrent leur porte à des Canadiens qui sont revenus aux Pays-Bas pour voir où était leur famille, ou encore pour visiter les tombes, car celles-ci sont très bien entretenues par les Hollandais. En fait, des groupes d’enfants d’école ont régulièrement pour tâche de prendre soin des tombes et d’apporter des fleurs. Ça se fait encore aujourd’hui, et les tombes sont bien entretenues. Un lien est ainsi créé de cette manière entre la Hollande et le Canada.