Aux petites heures d’une matinée d’octobre en 1922, le gendarme Robert McBeath vient d’arrêter un conducteur en état d’ivresse sur la rue Granville. C’est une tâche de routine pour ce gendarme de vingt-quatre ans, mais elle va lui coûter la vie, cette vie qu’il a risquée quelques années plus tôt dans des circonstances qui lui valurent la Croix de Victoria, lors de la bataille de la Somme.
Tôt dans la matinée du 9 octobre 1922, le gendarme Robert McBeath et son partenaire, le détective R. Quirk, repèrent un homme qui conduit sa voiture de manière dangereuse sur la rue Granville, près de la rue Davie. Lorsque le conducteur n’obéit pas à l’ordre de s’arrêter, les officiers sautent sur le marchepied de la voiture et Robert McBeath procède à l’arrestation de l’individu. Alors que le jeune gendarme passe un coup de téléphone dans une cabine publique du coin pour obtenir un fourgon cellulaire, le conducteur, Fred Deal, sort un pistolet et tire sur Robert McBeath. Il blesse également le détective Quirk, qui réussit cependant à le prendre en chasse, en échangeant des coups de feu, avant que le tireur ne parvienne à s’échapper. Quirk survit à la fusillade, mais Robert McBeath décédera à l’hôpital St. Paul’s. Il avait 24 ans.
C’est seulement sept ans plus tôt que Robert McBeath, alors âgé de seize ans, réussit à convaincre un recruteur près de chez lui, à Kinlochbervie, en Écosse, qu’il a dix-huit ans et qu’il peut donc se joindre aux Seaforth Highlanders. En novembre 1917, lors de la bataille de la Somme, Robert McBeath a déjà deux années d’expérience du feu. Ses camarades du Seaforths subissent alors de lourdes pertes, cloués au sol par les tirs intenses de plusieurs nids de mitrailleuses. Le caporal suppléant McBeath se porte volontaire pour attaquer seul les mitrailleuses. Armé seulement d’un fusil-mitrailleur Lewis et d’un revolver, il prend d’assaut le premier nid de mitrailleuse et y neutralise tous les soldats ennemis. Rejoint par un tank, il attaque ensuite successivement les quatre autres nids, les réduisant tous au silence. Les soldats ennemis restants, craignant d’être attaqués par une force surnuméraire, se replient sous le couvert d’un tunnel, mais Robert McBeath les y poursuit courageusement et tue le premier d’entre eux qui essayait d’engager le combat. Trois officiers et trente soldats se rendent finalement à l’Écossais solitaire. Son héroïsme lui vaudra la Croix de Victoria.
Il lui vaudra également la reconnaissance de sa nation et à son retour à la vie civile, Robert McBeath reçoit en cadeau un lopin de terre agricole en Écosse. Mais à l’époque, c’est un jeune homme qui ne tient pas en place et il vend la ferme pour aller tenter sa chance au Canada. Sa chance l’abandonne ce matin d’octobre au coin des rues Granville et Davie, mais les Vancouvérois lui offrent les plus belles funérailles jamais organisées dans la jeune ville. Aujourd’hui encore, son histoire est racontée aux écoliers de sa ville natale, Kinlochbervie, en Écosse, où un monument a été érigé en l’honneur du gendarme de Vancouver et du héros décoré de la Croix de Victoria.