Science du son et étude de sa génération, de son adaptation, de son utilisation et de ses effets. Les applications de cette science sont multiples, souvent dans des secteurs plutôt inattendus. La médecine, la défense, les pêches et naturellement la musique ne sont que quelques-unes des disciplines qui ont profité des efforts faits pour percer les mystères du son.
L'un des pionniers au Canada dans ce domaine fut Oswald Michaud, chercheur et professeur d'acoustique au Conservatoire national de Montréal, dès 1928. Toutefois, les premières recherches effectuées au Canada dans le domaine de l'acoustique le furent dans le domaine connexe des ultra-sons. Ces travaux commencèrent à l'Université de l'Alberta dans les années 1920, sous la direction de R.W. Boyle. Vers 1930, R.W.Boyle fut employé par le Conseil national de recherches (CNR) et devint dirercteur de la division de la physique et du génie. Au fil des ans, les études du CNR ont exploré une vaste gamme de sujets comme l'acoustique des bâtiments, l'audiométrie, le bruit des machines, le développement des amortisseurs de bruit, la propagation du son en plein air, les effets sur les structures du son à haute intensité, les appareils pour guider les non-voyants et la musique électroacoustique. Durant les années 1980, les travaux des chercheurs du CNR et d'autres, ont tiré au clair certains caprices du son autant dans une salle de concert comme dans une salle de séjour.
L'étude de l'acoustique des salles, comme branche autonome de la science, a débuté au tournant du XX<sup>e</sup> siècle. À partir de 1950, des percées importantes ont permis de commencer à quantifier certains des aspects les plus importants de l'acoustique de la salle de concert. L'un des chefs de file dans ce domaine est John Bradley du CNR. Les travaux effectués par J.Bradley dans des salles canadiennes et européennes ont abouti à une évaluation systématique des salles, base indispensable pour décider en connaissance de cause de ce qui est important ou non dans une salle de concert. L'une des découvertes les plus significatives des années 1980 découle d'une telle étude. Des travaux indépendants effectués en Grande-Bretagne, au Danemark et au Canada, ont jeté un éclairage nouveau sur les effets de la diffusion acoustique. Il en résulte que la diffusion considérée à une époque comme l'essence d'une bonne acoustique, peut s'avérer être la cause d'effets non désirés. Il a été découvert que les salles de concert dont les plafonds sont hautement favorables à la diffusion, ne sont pas aussi puissantes à l'arrière qu'elles le sont à l'avant. Ces découvertes sont parfaitement vérifiées et ont servi, dans les années 1990, à créer de meilleures salles de concert. Les relevés qui ont mené à cette découverte établissent un nouveau niveau de certitude dans la conception et l'évaluation des auditoriums.
La conception de haut-parleurs est un autre secteur où des études systématiques ont aidé à l'appréciation de la musique. Floyd Toole fut l'un des premiers à établir une corrélation entre les dimensions quantifiables des haut-parleurs et les préférences des auditeurs. Le titre de l'une de ses premières communications sur le sujet, « Changer une opinion en fait » résume l'objectif de la recherche acoustique telle qu'appliquée à la musique. Les études de ce dernier sur la détection de la résonance et du timbre sont exhaustives et fournissent maintenant des guides de conception quantifiables qui permettent de fabriquer des haut-parleurs de meilleure qualité.
Une meilleure compréhension du comportement des sons et de la façon dont nous les percevons a amené les interprètes et les acousticiens, traditionnellement réticents, à utiliser l'électroacoustique pour corriger les salles et les théâtres qui laissent à désirer. L'application la plus poussée se retrouve au studio d'enregistrement moderne : chaque musicien est isolé acoustiquement de ses partenaires et maintient sa cohésion avec les autres musiciens grâce aux signaux sonores que l'ingénieur du son envoie dans ses écouteurs.
En 1949, Jean Papineau-Couture inclut des cours d'acoustique dans le programme d'études du CMM à titre de discipline directement reliée à la composition. Il continua d'enseigner cette matière à l'Université de Montréal de 1953 à 1970, année où il fut remplacé par Louise Gariépy. Cependant, de façon générale, la recherche sur l'acoustique musicale s'est limitée aux quelques individus dont l'intérêt transcendait le problème du financement de leurs travaux. La musique électroacoustique prit beaucoup d'importance pendant les années 1970. Stimulés par l'activité du pionnier Hugh Le Caine au CNR, et surtout par sa mise au point d'instruments électroniques au début des années 1950, les compositeurs introduisirent cette discipline dans plusieurs universités (voir Musique électroacoustique). Durant les années 1980, Richard Armin conçut un violoncelle électrique à corps plein, un des premiers du genre. Au CNR même, l'ordinateur continue d'être mis au service du compositeur afin de faciliter l'assemblage, la réaudition et la révision du matériau thématique. Vers la fin des années 1970, John Walsh a mis au point à Vancouver un des premiers programmes permettant de simuler les propriétés acoustiques d'une salle avant sa construction. Ceci permet aux acousticiens et aux architectes d'« entendre » quelle sonorité aura une salle de concert alors qu'elle est encore sur la table à dessin.
Les ramifications de la science acoustique portant sur l'interaction des ondes sonores et des êtres humains sont peut-être celles qui offrent le plus d'intérêt. En médecine, on se penche sur le langage et l'ouïe. On a effectué des études sur les processus du langage et sur les troubles psychophysiologiques qui y sont reliés à lUniversité Dalhousie, l'Université McGill, l'Université de la Saskatchewan, l'Université de Western Ontario et l'Université de Calgary. Les études sur les troubles auditifs et, plus particulièrement, la mise au point de protocoles de mesure audiométrique jouent un rôle croissant dans l'évaluation de l'environnement de travail où le bruit peut causer la surdité. Les musiciens d'orchestre et de musique populaire sont souvent exposés à des niveaux sonores qui peuvent causer, et causent en effet, une baisse de l'audition. Plusieurs agences de réglementation fédérales et provinciales oeuvraient dans ce domaine dans les années 1970 et ont établi des normes pour protéger l'ouïe des travailleurs et de la population en général. Des normes de bruit visant les besoins particuliers du musicien restent encore à établir.
Le bruit en tant que pollution est devenu le thème de projets d'étude dans presque toutes les universités canadiennes, dans diverses agences gouvernementales et dans des sociétés de consultation privées. Certains projets étudient sous cet angle les milieux urbains, notamment ceux de Montréal, Toronto, Woodstock, Calgary et Vancouver. Un projet qui offre un intérêt spécial est celui du World Soundscape (« paysage sonore »), mis sur pied par R. Murray Schafer à l'Université Simon Fraser, et qui a donné lieu, entre autres réalisations, à une enquête sur la réglementation du bruit au Canada. Les travaux de recherche sur les ultra-sons, auxquels nous avons fait allusion précédemment, étudient le comportement des ondes sonores à des fréquences supérieures aux fréquences audibles à l'oreille humaine. Les ultra-sons sont maintenant couramment utilisés en médecine, par exemple dans l'appareil mis au point à l'Université Lakehead pour mesurer les dimensions internes du coeur.
En rapport étroit avec la recherche, on a mis au point des méthodes standard de mesure acoustique, des définitions de critères subjectifs de qualification du « bruit » et on a établi des limites de bruit. Thomas Northwood et ses collègues du CNR ont contribué à développer des procédés uniformes pour mesurer la transmission du son au travers des murs, des planchers, etc. Les contributions significatives de T.Northwood à la connaissance de l'acoustique des édifices furent reconnues en 1982 quand la médaille Wallace Clement Sabine lui fut attribuée. Cette dinstinction, qui n'a été décernée que huit fois et dont Thomas Norhwood est le premier récipiendaire canadien, est ainsi nommée pour honorer l'homme qui a dessiné le Symphony Hall de Boston et qui est considéré comme le père de l'acoustique architecturale moderne.
À cause du caractère international de la communauté des chercheurs en acoustique, il est pratiquement impossible d'identifier les projets exclusivement canadiens. Dans la plupart des cas, les chercheurs canadiens sont en contact étroit avec leurs collègues des États-Unis, de Grande-Bretagne et d'ailleurs. Ils font rapport de leurs travaux à des assemblées de l'Acoustical Society of America et ils publient leurs articles dans la revue de cette société ou dans l'une des revues internationales d'acoustique. Les contacts entre les acousticiens canadiens ont été favorisés par l'Association canadienne de l'acoustique. Ce groupe est issu d'un modeste comité créé par Thomas Northwood in 1962. En 1990, l'association compte approximativement 400 membres qui se réunissent annuellement. Elle publie une revue trimestrielle, Acoustique canadienne / Canadian Acoustics. James Parrott, bibliothécaire à l'Université de Waterloo, a entrepris en 1972 la préparation d'une bibliographie sur l'acoustique et sur d'autres sciences dans leur rapport avec la musique. Cette bibliographie a pour titre Bibliotheca Harmonicorum.
Bibliographie
R. Murray SCHAFER, The Book of Noise (Vancouver 1970).
Gilles TREMBLAY et autres, Le Bruit, 4<sup>e</sup> pollution du monde moderne (Montréal 1970).
L.L. DOELLE, Environmental Acoustics (New York 1972).
A Survey of Community Noise By-Laws in Canada, Soundscape Document n<sup>o</sup> 4 (Vancouver 1972).
T.D. NORTHWOOD dir., Benchmark Papers in Architectural Acoustics (New York 1977).
L. CREMER et H.A. MULLER, Principles and applications of Room Acoustics (Londres 1979).
Périodiques
Applied Acoustics (Londres).
Acustica (Stuttgart).
Acoustique canadienne / Canadian Acoustics (Ottawa).
J of the Acoustical Soc. of America (New York).