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Bataille de la rivière Mississinewa

La bataille de la rivière Mississinewa est considérée comme la première véritable victoire américaine de la guerre de 1812. En décembre 1812, les troupes américaines dirigées par le général William H. Harrison se sont battues contre les Miami alliés des Britanniques, des peuples autochtones qui occupaient traditionnellement les terres que l’on appelle maintenant l’Indiana, l’Illinois, l’Ohio, le Wisconsin et le Michigan. Cette bataille a eu lieu à la suite d’attaques lancées par les Autochtones contre les colonies américaines de Fort Wayne et Fort Harrison sur le territoire de l’Indiana. L’objectif principal de la bataille était de supprimer la menace d’attaques contre les Américains.

Contexte historique

De toutes les troupes auxquelles les Américains sont confrontés au cours de la guerre de 1812, les troupes autochtones sont celles qu’ils craignent le plus. Spécialistes des raids et des techniques de guérilla, les guerriers autochtones avaient instauré un climat de terreur dans l’exécution de ces tactiques et tant leur nombre que leur force semblaient se décupler aux côtés des troupes britanniques. En septembre 1812, des guerriers autochtones, notamment des peuples Shawnee, Delaware et Potawatomi, lancent une attaque contre la colonie de Pigeon Roost, faisant vingt morts. Le 6 septembre 1812, des troupes de guerriers potawatomi et miami s’en prennent au Fort Wayne, mais sont repoussées. Une contre-attaque est ordonnée et les Américains brûlent plusieurs villages potawatomis et miamis en guise de représailles. Les Américains défendent également avec succès le Fort Harrison, qui a été attaqué par les Miami et d’autres nations autochtones.

Le général américain William Henry Harrison, commandant de l’armée du Nord-Ouest, planifie alors une attaque offensive. Après avoir obtenu la permission du secrétaire de la Guerre, Harrison ordonne au lieutenant-colonel John B. Campbell d’accompagner une expédition dans la région de la rivière Mississinewa, où l’on trouve surtout des villages miamis. Harrison est convaincu que Mississinewa est le lieu où les troupes autochtones peuvent se réapprovisionner avant de lancer d’autres attaques en Ohio, plus précisément entre St. Mary’s et les rapides Miami (aujourd’hui rapides Maumee). Campbell a comme consigne de ne pas blesser les chefs autochtones, dans la mesure du possible, par peur de lourdes représailles. On lui demande également d’épargner les femmes et les enfants afin qu’on puisse les « relocaliser » en Ohio.

Expédition à Mississinewa

Au début du mois de novembre, Campbell rassemble ses hommes en Ohio, soit 600 hommes d’infanterie à cheval, dragons et volontaires du Kentucky, et prend la direction de fort Greenville pour préparer les prochaines opérations. Les hommes quittent forts Greenville le 14 décembre, bravant le froid cinglant de l’hiver, de la neige jusqu’aux cuisses. Les conditions rigoureuses ont été jugées excellentes pour traverser les rivières gelées — les Autochtones ne pouvant ainsi remarquer leurs déplacements. Cependant, ni Harrison ni Campbell ne savent composer avec la dure réalité : une traversée au cours de laquelle les soldats doivent se frayer un chemin parmi les blocs de glace.

Menés par un guide autochtone, ils marchent jour et nuit jusqu’à ce qu’ils atteignent leur première cible, le village du chef indien Silver Heel, situé sur les berges de la rivière Mississinewa. Avant même d’avoir pu déclencher une attaque-surprise, les Américains sont bien vite découverts et les guerriers autochtones du village parviennent à fuir. Alors que les troupes américaines préparent leur campement, un soldat qui s’est éloigné des abords du village est tué d’une balle tirée par un guerrier autochtone.

Deux autres villages miamis sont pillés, des dizaines d’Autochtones tués ou faits prisonniers par Campbell et ses hommes, qui avancent vite en dépit de l’hiver brutal. La peur des engelures susceptibles de paralyser l’expédition force Campbell à se raviser quant à la probabilité de poursuivre les affrontements. Le 17 décembre, les Américains retournent au village de Silver Heel; là où une menace bien plus grave que les engelures les attend.

Trois cents guerriers autochtones lancent une contre-attaque pour reprendre le village, récupérer leurs réserves d’hiver et libérer leurs familles emprisonnées. Prenant part à de rudes combats, les troupes autochtones réussissent à s’emparer du campement militaire temporaire au nord du village. Le corps des Bourbon Blues du Kentucky est au cœur de la mêlée où des affrontements à main nue ont lieu entre les faucons de guerre et les baïonnettes.

Campbell fait appel aux hommes des groupes de réserve pour appuyer la principale attaque par davantage d’armes. Bien vite, les guerriers autochtones se retrouvent sur la défensive, dépassés par le nombre d’adversaires. Quand il apparaît que leur assaut ne permettra pas de déloger les Américains, ils commencent à se replier. Campbell ordonne qu’une charge de la cavalerie menée par deux capitaines, Johnston et Trotter, inflige une cuisante défaite aux Autochtones. Selon l’un des témoins, peu d’hommes obéissent à Campbell et passée la première charge, la poursuite des Autochtones s’essouffle. Pourtant, la bataille de la rivière Mississinewa est une rude bataille où les tirs fusent et où le sang coule à flots. Les Américains recensent 8 morts et 48 blessés, les Autochtones comptent 48 morts et des dizaines de blessés ou prisonniers.

Les Américains se replient sur fort Greenville

Après s’être emparé du village de Silver Heel, Campbell réfléchit à l’utilité de lancer d’autres expéditions pour attaquer des villages de la nation Miami. Le village auquel il pense se trouve à 20 milles du campement. Lorsque la bataille prend fin, Campbell apprend de l’un des prisonniers que le chef de guerre Shawnee Tecumseh, à la tête d’une centaine d’hommes, se trouve à proximité et qu’il se dirige vers le village de Silver Heel. Mais comme de nombreux soldats américains ont succombé aux rudes conditions climatiques, que plus d’une centaine de chevaux ont péri, que les réserves de munition s’amenuisent, Campbell ordonne à ses troupes de reprendre le chemin de fort Greenville.

La plupart des montures étant mortes, les hommes doivent marcher, même les blessés. En plus de ce fardeau, Campbell doit retourner au fort avec des captifs autochtones. Le retour est un véritable enfer, les températures sont glaciales, et les hommes, frigorifiés, avancent lentement. Campbell ordonne que les poneys des Autochtones soient montés par des Autochtones, ce qui lui vaut le mépris de ses hommes pour qui le bétail représente une forme de butin de guerre. Ces prisonniers autochtones sont cependant le dernier rempart contre des représailles : la possibilité que des guerriers autochtones suivent leurs traces étant bien réelle, Campbell fait savoir qu’advenant le cas où lui et ses hommes sont attaqués, les blessés seront tués.

Sur le point de succomber à la faim, les hommes de Campbell sont sauvés par les renforts menés par le capitaine Adai et prennent le chemin du retour vers fort Greenville. Campbell a perdu 60 pour cent de ses effectifs, morts ou blessés, soit en raison de la guerre, soit à cause du mauvais temps. Il ne parvient jamais à atteindre le village qui se trouve à 20 milles de la rivière Mississinewa. Les hommes de Campbell ont certes fait preuve de courage et d’habileté dans la défense de leur position, mais ils ne réussissent pas vraiment à empêcher les guerriers autochtones de poursuivre la guerre dans la région.