Vere Brabazon Ponsonby, 9e comte de Bessborough, gouverneur général du Canada de 1931 à 1935 (né le 27 octobre 1880 à Londres, au Royaume-Uni; décédé le 10 mars 1956 à Stoughton). Il a été le premier gouverneur général à recevoir au Canada un monarque étranger en cours de règne, le premier à arborer un étendard vice-royal pour le Canada et le premier à voir sa cérémonie d’installation radiodiffusée.

Famille et éducation
Lord Bessborough est le fils aîné d’Edward Ponsonby, 8e comte de Bessborough, un aristocrate anglo-irlandais, et de Blanche Vere Guest, fille de Sir Josiah John Guest, 1er baronnet, propriétaire de Dowlais Iron Company (la plus grande usine sidérurgique au monde au milieu du XIXe siècle), et de Lady Charlotte Bertie, traductrice et éditrice de littérature galloise. Le grand-oncle d’Edward Ponsonby, Henry Frederick Ponsonby (1825-1995), secrétaire particulier de la reine Victoria, qui commande un bataillon des Grenadier Guards au Canada de 1862 à 1863, est un invité fréquent du gouverneur général à l’époque de la Confédération, Lord Monck.
Le comte de Bessborough fait ses études secondaires à la Harrow School et obtient un baccalauréat ès arts du Trinity College de Cambridge en 1901. Il est admis au barreau en 1903.
Carrière politique, militaire et commerciale
Lord Bessborough siège au London County Council de 1907 à 1910. Il est député de Douvres à la Chambre des communes britannique de 1913 à 1920. Il sert également pendant la Première Guerre mondiale lors de la bataille de Gallipoli. De 1906 à 1920, il est connu sous le nom de vicomte Duncannon, un titre de courtoisie hérité de son père.
À la mort de son père en 1920, il devient le 9e comte de Bessborough et entre à la Chambre des lords. Dans les années 1920, il entreprend une carrière dans le domaine des affaires et finit par siéger au conseil d’administration de plus de 20 sociétés, notamment en tant que président du chemin de fer de São Paulo et coprésident d’Unilever. En tant que vice-président du conseil d’administration de De Beers, le comte de Bessborough reçoit un diamant de 5,6 carats qui devient la pièce maîtresse du diadème Bessborough qu’il commande comme cadeau de mariage pour sa femme.

Mariage et enfants
Le 25 juin 1912, le comte de Bessborough épouse Roberte Poupart de Neuflize (1892-1979), fille du banquier et cavalier français Jean Frédéric André Poupart de Neuflize, 4e baron de Neuflize, et de Madeleine Dollfus-Davillier, petite-fille de l’industriel du textile français Jean Dollfus.
Le couple a trois enfants avant la nomination du comte au poste de gouverneur général. Son fils aîné, Frederick « Eric » Edward Neuflize Ponsonby, 10e comte de Bessborough (1913-1993), devient politicien, dramaturge et acteur amateur et se produit au Ottawa Little Theatre pendant le mandat de son père comme gouverneur général. Il visite le Canada à plus d’une douzaine de reprises, et raconte longuement ses voyages au Canada dans son autobiographie de 1962, Return to the Forest. Son deuxième fils, l’honorable Desmond Neuflize Ponsonby (1915-1925), meurt dans un accident d’équitation à l’âge de 10 ans. Sa fille, lady Moyra Blanche Madeleine Brown (1918-2016), est infirmière. Elle est vice-président du Royal College of Nursing au Royaume-Uni de 1970 à 1985 et surintendante en chef d’Ambulance Saint-Jean de 1970 à 1983.
Le 14 août 1931, lady Bessborough donne naissance à son fils cadet à l’hôpital Royal Victoria de Montréal, moins de cinq mois après l’assermentation de lord Bessborough en tant que gouverneur général. L’honorable George St. Lawrence Neuflize Ponsonby est le premier enfant né d’un consort vice-royal au Canada. Il est nommé en l’honneur de son parrain, le roi George V et du fleuve Saint-Laurent. « Bébé Bessborough », comme le surnomme la presse, fait des apparitions publiques au Canada avec ses parents, notamment lors de revues militaires. Il meurt dans un accident de voiture en 1951.
Gouverneur général du Canada
Lord et lady Bessborough arrivent à Halifax le 4 avril 1931. La cérémonie d’installation du nouveau gouverneur général a lieu à Province House, à Halifax, et est radiodiffusée pour la première fois. Le photographe canadien d’origine arménienne Yousuf Karsh prend des photos officielles des Bessborough qui sont largement publiées, contribuant ainsi au lancement de la carrière de l’homme politique. Témoignant de l’indépendance de la Couronne canadienne établie par le Statut de Westminster, le comte de Bessborough arbore un drapeau vice-royal typiquement canadien sur lequel figure un lion héraldique au-dessus du mot « Canada », et crée ainsi un précédent qui se perpétue jusqu’à nos jours.
Le 27 août 1931, le comte de Bessborough reçoit le roi Prajadipok (Rama VII) et la reine Rambhai du Siam [aujourd’hui la Thaïlande], les premiers monarque et consort étrangers en cours de règne à visiter le Canada. Le roi du Siam et le gouverneur général se rendent ensemble en calèche aux Chambres du Parlement. Lord Bessborough organise une réception à Rideau Hall en l’honneur du roi et de la reine de Siam, à laquelle assistent le premier ministre R.B. Bennett et William Lyon Mackenzie King, chef de l’opposition à l’époque. Parmi les autres personnalités politiques de premier plan présentes figurent le futur premier ministre britannique Winston Churchill, le prince et la princesse Takamatsu du Japon et l’explorateur polaire australien Sir Hubert Wilkins.
Le comte de Bessborough voyage d’un bout à l’autre du Canada, rencontrant des Canadiens de tous horizons et faisant la promotion de Scouts Canada. En 1932, il ouvre la Conférence coloniale et impériale à la Chambre des communes, l’un des premiers rassemblements internationaux d’envergure à Ottawa. La même année, il inaugure le nouveau canal Welland et reçoit des doctorats honorifiques en droit de l’Université de Toronto, de l’Université d’Ottawa, de l’Université McGill et de l’Université de l’Alberta. Le 30 mai 1931, lord Bessborough accepte que l’hôtel du chemin de fer du Canadien Pacifique à Saskatoon soit nommé en son honneur (aujourd’hui le Delta Bessborough). L’ouverture de l’hôtel est retardée jusqu’en 1935 en raison des difficultés financières causées par la crise des années 1930.

La crise des années 1930
Le comte de Bessborough admire l’ingéniosité et le courage des Canadiens pendant la crise des années 1930. Dans un discours qu’il prononce à Shawbridge (aujourd’hui Prévost), au Québec, il dit ceci : « Ayant vu le Dominion durant cette période, je crois avoir eu l’occasion d’apprécier les Canadiens beaucoup plus que je ne l’aurais pu en période de prospérité. Rien n’est plus encourageant et positif que le calme et la ténacité avec laquelle les Canadiens ont vaqué à leurs occupations quotidiennes au cours de la difficile période, en faisant preuve d’une confiance suprême en la destinée de leur pays. » Lord Bessborough rencontre les travailleurs en grève, écoute leurs préoccupations et inspecte les foyers et les soupes populaires pour les chômeurs. Il insiste pour qu’on réduise de 10 % son salaire de gouverneur général, conformément aux réductions budgétaires imposées à l’ensemble de la fonction publique fédérale.
Communications
Le mandat du comte de Bessborough en tant que gouverneur général est marqué par une utilisation accrue de la radio et du téléphone. Il fait notamment installer une ligne téléphonique directe entre Rideau Hall et le Cabinet du premier ministre. Lord Bessborough donne la sanction royale à la loi qui crée la Société Radio-Canada/Canadian Broadcasting Corporation. Il inaugure le premier réseau téléphonique transcanadien en 1932 en contactant chaque lieutenant-gouverneur à partir de son cabinet de travail à Rideau Hall.
Personnalité et image publique
Le chroniqueur et député britannique Henry « Chips » Channon décrit le comte de Bessborough comme étant « correct, chaleureux, à la mode et courtois », mais le futur gouverneur général canadien Vincent Massey le décrit plutôt comme étant « collet monté ». Tandis que les gouverneurs généraux précédents acceptent, et adoptent, le caractère relativement informel de la vie publique au Canada par rapport au Royaume-Uni, lord Bessborough et son secrétaire particulier, Sir Alan « Tommy » Lascelles, s’attendent à ce que les formalités soient respectées. Ce dernier rédige un guide de l’étiquette à l’intention du personnel de lord Bessborough.

En 1934, à l’occasion du centenaire de la ville de Toronto pendant le week-end de la fête de Victoria, le comte de Bessborough aurait reproché au maire William J. Stewart de ne pas l’avoir accueilli officiellement devant l’hôtel de ville, contrairement à l’actrice torontoise Mary Pickford à qui l’on réserve un accueil enthousiaste. Des informations selon lesquelles le comte aurait dit au maire de « retourner à son spectacle Mary Pickford » sont largement diffusées dans la presse. L’« incident Mary Pickford », tel que le décrit le Toronto Daily Star, suscite la controverse. Luke Teskey, candidat pour la Fédération du Commonwealth coopératif dans York-Sud, déclare, « Le poste de gouverneur général ne devrait pas être attribué à un homme qui a une idée préconçue de sa supériorité sur ses concitoyens. »
Contrairement aux gouverneurs généraux qui le précèdent, le comte de Bessborough ne s’intéresse ni aux sports d’hiver ni aux sports d’été. Un ancien aide de camp se souvient : « Il ne pratiquait aucun jeu, ni à l’intérieur ni à l’extérieur. Il ne regardait même pas les autres jouer. Seul le bridge l’intéressait. » On retire du domaine de Rideau Hall la piste de toboggan commandée par lord Dufferin et on réduit à deux par année les activités de patinage. Au lieu de cela, les Bessborough organisent fréquemment des parties de bridge, des réceptions et des bals. L’amour de la famille Bessborough pour le théâtre amateur incite le comte à parrainer le Festival national d’art dramatique.
Festival national d’art dramatique
En 1933, le gouverneur général Bessborough préside à Ottawa le premier Festival national d’art dramatique. Il vise à promouvoir le théâtre amateur au Canada, ainsi qu’à soutenir et à honorer les acteurs, metteurs en scène, producteurs, scénographes et dramaturges canadiens. La meilleure pièce, jugée par des jurés canadiens anglais et français, reçoit le trophée Bessborough. Le Festival national d’art dramatique rassemble des Canadiens qui s’adonnent au théâtre amateur et favorise la collaboration interprovinciale dans les arts. Le festival, rebaptisé Théâtre Canada, se poursuit jusqu’en 1978.
Fin de carrière
Après son retour au Royaume-Uni en 1935, le comte de Bessborough reprend ses occupations dans le milieu des affaires et devient président de la Corporation of Foreign Bondholders et président de Rio Tinto. Il publie également des lettres de son arrière-grand-mère Henrietta dans Lady Bessborough and Her Family Circle (1940) et édite deux volumes de journaux de sa grand-mère lady Charlotte Schreiber (1950-952).
Pendant la Deuxième Guerre mondiale, la famille Bessborough rend visite aux soldats canadiens blessés dans les hôpitaux militaires britanniques et reçoit les troupes canadiennes chez elle. Le comte de Bessborough contribue à la création du ministère britannique des Affaires étrangères pour venir en aide aux réfugiés français pendant la Deuxième Guerre mondiale et devient président de la Société Franco-Britannique. Il est décoré de la grand-croix de la Légion d’honneur en 1950.