Bruno Roy, écrivain, romancier, essayiste, poète, enseignant, orphelin, activiste (né le 16 février 1943, à Montréal au Québec, décédé à Montréal le 6 janvier 2010). Écrivain prolifique, Bruno Roy est également reconnu comme porte-parole et président du Comité des orphelins et orphelines institutionnalisés de Duplessis (COOID). (Voir aussi Orphelins de Duplessis.)
Enfance
Abandonné tout bébé, Bruno Damase Roy, du nom de son grand-père maternel, aboutit à la Crèche de l'Hôpital de la Miséricorde à Montréal pour deux ans. De là, on l’envoie à la Crèche Saint-Paul pendant cinq ans. En 1950, alors âgé de sept ans, il se retrouve au Mont-Providence, institut médicopédagogique accueillant les orphelins dits éducables.
Quatre ans plus tard, on transforme le Mont-Providence en hôpital psychiatrique, tel que le stipule le décret du Conseil des ministres de Maurice Duplessis. Dès lors, on affuble les orphelins du faux diagnostic de malades mentaux. (Voir aussi Psychiatrie). Cela permet de recevoir plus de subventions fédérales-provinciales par jour pour un enfant. Pour un malade mental on obtient 2,25 $ alors que pour un orphelin on ne reçoit que 0,70 ¢. Maintenant considérés comme des arriérés ces enfants ne sont presque pas instruits, ne recevant que l’équivalent d’une troisième année primaire. Ces laissés-pour-compte, baptisés Orphelins de Duplessis, car Maurice Duplessis est alors le premier Ministre du Québec, sont désormais des pupilles de l’État.
Ce bel enfant qu’est Bruno Roy a une intelligence vive malgré ses retards affectifs, cognitifs, intellectuels et relationnels propres aux enfants négligés. Sa personnalité attachante lui attire des appuis notables. C’est ainsi que Sœur Olive-des-Anges le prend sous son aile. Il en est de même de Madelaine Dauphinais-Rolland, visiteuse bénévole au Mont-Providence avec son mari Roger Rolland. Bruno Roy est membre de la chorale et lors d’un concert, Madelaine Rolland le pointe du doigt, ce qui fera dire à Bruno Roy, quand il écrit à Roger Rolland en 1987 lors de la mort de son épouse : « Je ne te l'apprends pas : Madeleine, c'est celle qui m'a pointé du doigt; celle qui, au Mont-Providence, m'a reconnu, celle qui m'a nommé aux autres et à toi, et, puis-je le dire aujourd'hui, celle qui m'a nommé à moi-même... Toutefois, si Madeleine m'a choisi, je pense que tu es celui auquel je me suis identifié. »
Dans son autoportrait, Bruno Roy cite le neuropsychiatre Boris Cyrulnik, « démocratiseur » de la résilience, qui décrète à propos de son parcours :
Avant d'en arriver au monde de la parole, le petit Bruno Roy avait probablement acquis une résilience préverbale. Peut-être un goût pour la beauté qui apparaît dès les premiers mois. [...] L'acquisition de ce comportement de charme, témoin précoce d'un style relationnel et d'une manière de résoudre les conflits, constitue à coup sûr un des principaux facteurs de résilience. [...] Peut-être les adultes ont-ils été ravis de tendre la main à cet enfant-là?
Formation
Les Rolland invitent Bruno Roy chez eux à Ville Mont-Royal lors de ses congés. Ils insistent pour que Bruno Roy soit scolarisé. C’est ainsi qu’à 15 ans, en 1958, il se retrouve à l'Orphelinat Saint-Georges de Joliette, dirigé par les Clercs de Saint-Viateur (voir Joliette). En un an, il rattrape ses dernières études primaires et une partie de ses études secondaires qu’il termine avec succès au Collège Louis-Querbes de Berthier.
En 1964, il entre au noviciat des Clercs de Saint-Viateur à Joliette, puis va à Rigaud faire son École normale et y obtient son brevet A d'enseignement. Il étudie ensuite à l’Université de Montréal pour acquérir un baccalauréat en pédagogie (1969) et à l’Université du Québec à Montréal pour se procurer un baccalauréat en études littéraires (1976).
Tout en enseignant aux niveaux secondaire, collégial et universitaire, c’est de l'Université du Québec à Montréal qu’il obtient une maîtrise en études littéraires (1981) et de l'Université de Sherbrooke qu’il détient un doctorat en études françaises [littérature (1992)]. Sa thèse de doctorat s'intitule Chanson québécoise : dimension manifestaire et manifestation(s) : (1960-1980).
En plus de sa vocation d’enseignant, Bruno Roy écrit une trentaine de livres, romans, récits, journaux, plus de 200 textes d’opinion et une télésérie Les orphelins de Duplessis (1997). Cet écrivain prolifique se dit écrivain qui enseigne plutôt qu’enseignant qui écrit. Il croit aussi qu’écrire, c’est naître et qu’enseigner, c’est séduire. En tant qu’écrivain, depuis 1982, il occupe nombre de postes au sein du conseil d’administration de l’Union des écrivaines et écrivains québécois (UNEQ). De 1987 à 1996, puis de 2000 à 2004, il en devient président. On lui doit la Maison des écrivains (siège social de l’UNEQ), sa participation à la mise sur pied du programme Copibec, une société sans but lucratif qui gère les droits d’auteur, et à la création du Festival international de littérature.
Comité des orphelins et orphelines institutionnalisés de Duplessis
Homme d’une énergie débordante, Bruno Roy devient, malgré lui, le porte-parole des Orphelins de Duplessis. C’est l’orphelin Réjean Hinse, qui l’appelle pour lui demander de devenir le représentant du groupe. Bruno Roy refuse d’abord, mais Réjean Hinse est tenace. À son sixième appel pour le convaincre, il lui dit : « Toi, tu existes, tu enseignes, tu écris, tu fais partie de l’Union des écrivains, tu as une famille, on te voit à la TV, alors que nous on a été exploités toute notre vie, on ne compte pas. On n’existe pas, même pas pour toi notre compagnon d’enfance. » Bruno Roy se rend compte que son attitude est tout à fait inadmissible, et accepte. En 1994, il devient donc porte-parole et président du Comité des orphelins et orphelines institutionnalisés de Duplessis (COOID).
Et s’amorce une série de démarches, dont un recours collectif, et d’innombrables combats pour la dignité afin d’obtenir une reconnaissance des sévices subis par les Orphelins de Duplessis et de démontrer la collusion entre l'Église, l'État et les médecins au détriment des enfants qui leur sont confiés. En 2001, Bruno Roy finit par obtenir que le gouvernement du Québec verse une compensation moyenne de 25 000 $ à chaque orphelin de Duplessis.
Vie personnelle
En 1970, Bruno Roy, qui n’a pas connu de famille et se décrit comme hors père, décide de fonder sa propre famille et épouse Luce Michaud. Ils auront les jumelles Catherine et Isabelle.
Prix et distinctions
Récipiendaire de nombreux prix, Bruno Roy a reçu le plus beau cadeau pour perpétuer sa mémoire. En 1999, le Département des lettres du Collège André Laurendeau, où il a enseigné, crée le prix Bruno-Roy pour encourager la relève littéraire chez les étudiantes et les étudiants.