La compagnie de chemin de fer du Canadien Pacifique (CP) a été constituée en personne morale en 1881. Sa vocation, à l’origine, est de construire un chemin de fer transcontinental, comme promis à la Colombie-Britannique lors de son entrée dans la Confédération (voir Histoire du chemin de fer au Canada). Le chemin de fer, achevé en 1885, relie l’est du Canada à la Colombie-Britannique, en plus de jouer un rôle important dans le développement de la nation. Bâti dans des conditions dangereuses par des milliers de travailleurs, dont 15 000 travailleurs temporaires chinois , le chemin de fer facilite la communication et le transport à travers tout le pays. Au cours de sa longue histoire, le CP diversifie ses activités. En effet, il ouvre des hôtels , lance des compagnies maritimes et aériennes, et développe des entreprises minières et de télécommunication (voir Industrie du transport maritime; Industrie du transport aérien). En 2001, le CP se divise en cinq compagnies distinctes et indépendantes, et la compagnie de chemin de fer du Canadien Pacifique redevient, comme elle l’était à l’origine, une compagnie ferroviaire. Le CP comme on le connaît aujourd’hui possède 22 500 km de voies ferrées au Canada et aux États-Unis. Il s’agit d’une société cotée en bourse. Ses titres se négocient à la Bourse de Toronto et à celle de New York sous le symbole CP. En 2020, le CP a déclaré un revenu total de 7,71 milliards de dollars.
Cet article est l’article complet sur le chemin de fer du Canadien Pacifique. Si vous souhaitez lire un résumé en langage simple, veuillez consulter : Chemin de fer du Canadien Pacifique (résumé en langage simple).
Terres autochtones
En 1870, la toute nouvelle nation du Canada achète la Terre de Rupert à la Compagnie de la Baie d’Hudson. Il s’agit d’un immense territoire qui s’étend vers le nord et l’ouest. Un an plus tard, la Colombie-Britannique fait son entrée dans la Confédération notamment parce qu’on lui a promis qu’un chemin de fer transcontinental la relierait au reste du Canada dans un intervalle de dix ans (voir Histoire du chemin de fer au Canada.) Pour construire le chemin de fer et encourager la colonisation le long de celui-ci, le gouvernement considère qu’il est nécessaire de supprimer le titre autochtone sur ces terres (voir Territoire autochtone). Le Canada, qui est assujetti aux modalités de la Proclamation royale, est responsable à la fois de la protection des peuples autochtones et de la préservation des droits qu’ils ont sur leurs territoires traditionnels non cédés.
Afin d’obtenir les terres requises pour la construction du chemin de fer, une série de traités, connus sous le nom de traités numérotés, sont négociés. Entre 1871 et 1877, les traités numérotés 1 à 7 sont conclus. Ils renforcent la prétention du Canada aux terres situées au nord de la frontière entre les États-Unis et le Canada. Les traités permettent la construction d’un chemin de fer national et ouvrent les terres des Territoires du Nord-Ouest à la colonisation agricole.
Les négociateurs du gouvernement font diverses promesses aux peuples des Premières Nations en échange de leur territoire traditionnel. Ces promesses, présentées verbalement et par écrit dans le texte des traités, concernent notamment l’octroi de droits spéciaux relativement aux terres visées par les traités, le versement de paiements en espèces et la distribution d’outils de chasse et de pêche, et de fournitures agricoles. Les modalités des traités soulèvent la controverse et donnent lieu à des contestations. Encore aujourd’hui, les répercussions socioéconomiques et juridiques des traités numérotés se font ressentir au sein des communautés autochtones.
Un impératif national
La compétition pour l’obtention du contrat fort lucratif de construction du chemin de fer transcontinental est féroce. C’est finalement Sir Hugh Allan , magnat du transport maritime et promoteur du chemin de fer, qui l’obtient en 1872. Toutefois, Sir Hugh Allan fait également don de près de 350 000 $ à la campagne électorale du Parti conservateur. Lorsque l’affaire est dévoilée au public, en 1873, le gouvernement de sir John A. Macdonald est obligé de démissionner (voir Scandale du Pacifique).
John A. Macdonald revient au pouvoir en 1878 en faisant de l’achèvement du chemin de fer un point de sa Politique nationale. Le contrat de construction finit par être accordé à un groupe d’intérêts dirigé par Donald A. Smith, J. J. Hill et George Stephen. L’incorporation du CP a lieu le 16 février 1881. Les difficultés de sa construction et les délais très courts imposés garantissent à la compagnie des prestations généreuses, dont 25 millions de dollars en espèces, 25 millions d’acres (environ 10 millions d’hectares) de terres le long de la voie ferrée, 37 millions de dollars en couverture des coûts d’arpentage ainsi qu’un monopole de 20 ans sur le transport vers le sud jusqu’aux États-Unis. À cause des coûts de construction élevés, le CP recevra plus tard 22,5 millions de dollars supplémentaires sous forme de prêts, en vertu du Railway Relief Act de 1884.
Ces mesures font à l’époque l’objet de vives dénonciations de la part d’intérêts concurrents et restent litigieuses lors du développement des Prairies (voir Histoire de la colonisation des Prairies canadiennes). Néanmoins, l’expansion américaine vers l’ouest incite John A. Macdonald et ses conservateurs à faire de l’achèvement du chemin de fer un impératif national.
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Construction
Sous la direction de W. C. Van Horne, la construction dans les plaines progresse à pas de géant. Sandford Fleming recommande de faire passer la voie ferrée par le col Yellowhead, mais on décide, en 1881, d’emprunter un tracé passant plus au sud à travers le col Kicking Horse. Les difficultés rencontrées durant la construction à travers les rochers et les tourbières du Bouclier canadien équivalent presque à celles de la construction à travers les montagnes de la Colombie-Britannique. Ces difficultés exigent des prouesses d’ingénierie.
Les difficultés de recrutement d’une main-d’œuvre adéquate en Colombie-Britannique sont à l’origine du recours controversé à des milliers de travailleurs chinois (voir Histoire de la migration de la main-d’œuvre au Canada.) Plus de 15 000 ouvriers chinois travaillent à la construction du chemin de fer du Canadien Pacifique. Ils travaillent dans des conditions difficiles et pour un maigre salaire. Ils ont grandement souffert, et les historiens estiment qu’au moins 600 d’entre eux sont morts pendant qu’ils travaillaient pour le CP. L’embauche de travailleurs chinois est controversée, particulièrement en Colombie-Britannique, où les politiciens s’inquiètent des répercussions économiques et culturelles de leur présence.
Le saviez-vous?
Une fois le chemin de fer du CP terminé, en 1885, le gouvernement adopte la Loi de l’immigration chinoise, qui stipule que toute personne d’origine chinoise doit payer une « taxe d’entrée » en arrivant au Canada. Il vote aussi l’Acte du cens électoral, qui interdit aux personnes de race mongole ou chinoise de voter (voir Droit de vote au Canada).
La ligne qui longe la côte du Pacifique est achevée le 7 novembre 1885 avec la pose du « dernier crampon » à Craigellachie, dans le col Eagle , en Colombie-Britannique. Le premier train de voyageurs direct quitte Montréal le 28 juin 1886 et arrive à Port Moody, en Colombie-Britannique, le 4 juillet.
Le saviez-vous?
Même si certaines parties du chemin de fer ne sont pas tout à fait terminées, la section reliant Callander à Port Arthur (Thunder Bay), en Ontario, sert au transport de troupes vers l’ouest lors de la Rébellion du Nord-Ouest .
Consolidation de l’entreprise
Durant les travaux de construction, le CP s’implique dans la vente et la colonisation de terres (1881), l’acquisition de la Dominion Express Company (1882) et la transmission de messages commerciaux par télégraphe (1882). Il fournit ses propres voitures-lits et voitures-restaurants, et construit des hôtels pour les touristes (p. ex., au lac Louise, en Alberta) et des restaurants le long de la voie ferrée dans les montagnes de l’Ouest. Cette entrée dans l’industrie touristique lui sera profitable pour le développement ultérieur de ses hôtels, de ses paquebots et de ses lignes aériennes à l’étranger (voir Hôtel, Tourisme).
Le saviez-vous?
Au cours des premières décennies du 20e siècle, le poste de porteur de voitures-lits était l’un des seuls emplois offerts aux hommes noirs au Canada. Les porteurs de voitures-lits étaient des employés de compagnies ferroviaires qui avaient la tâche de répondre aux besoins des passagers tout au long du voyage en train. Bien que ce travail apportait respect et prestige aux hommes noirs dans leur communauté, il exigeait de longues heures et procurait un maigre salaire. De plus, les porteurs pouvaient être congédiés soudainement et ils étaient souvent traités de façon raciste.
Une fois la construction achevée, le CP doit relever l’énorme défi que représente l’expansion de ses activités pour assurer sa rentabilité. Malgré la colonisation rapide le long de ses voies ferrées, pendant de nombreuses années, la densité démographique de l’Ouest canadien ne suffit pas à rentabiliser la compagnie. Elle s’emploie donc activement à encourager le commerce sur la côte du Pacifique. Dans les jours qui suivent l’arrivée du premier train sur la côte, en 1886, des navires affrétés par le CP accostent dans les ports avec des chargements de thé, de soie et de curiosités en provenance du Japon. En 1891, la compagnie a déjà conclu un contrat avec le gouvernement britannique pour le transport du courrier impérial de Hong Kong vers la Grande-Bretagne, via le Canada. L’achat de trois navires de haute mer transportant passagers et fret en résulte. Il s’agit des tout débuts de la flotte actuelle.
Hôtels
En 1900, la chaîne d’hôtels de montagne s’étend jusque dans les principales villes du pays avec, en tête, l’Hôtel Vancouver (1887), le Château Frontenac de Québec (1893) et la Place Viger de Montréal (1898) (voir Hôtel, Tourisme). D’autres services sont créés à la même époque. En 1889, le CP construit une voie ferrée qui, au départ de Montréal , traverse le Maine jusqu’à Saint John, ce qui lui donne un accès direct à un port sur l’Atlantique ouvert à l’année.
Construction de la voie ferrée
Le CP cherche à s’approprier le trafic des États de l’Ouest américain en construisant une ligne vers le Dakota du Nord (1893) et en prenant le contrôle de ce qui est maintenant la Soo Line Railroad Company aux États-Unis. Il étend son réseau de voies secondaires pour attirer le trafic vers la ligne principale est-ouest. Des colonies s’ établissent rapidement le long des lignes secondaires construites dans le sud du Manitoba , en Saskatchewan entre Regina et Prince Albert (1890) et, en Alberta , de Calgary jusqu’à Strathcona (Edmonton), au nord, en 1891.
Mines
En 1898, l’expansion dans la région minière de Kootenay, dans le sud de la Colombie-Britannique, implique l’obtention d’une charte ferroviaire qui inclut une fonderie à Trail , en Colombie-Britannique. C’est le point de départ de l’engagement du CP dans les secteurs des mines et de la métallurgie avec la création, sous son contrôle, de la Cominco Ltd, en 1906. (En 2001, Cominco est achetée par Teck, une autre compagnie minière.)
Flotte
La compagnie améliore sa flotte du Pacifique. Elle acquiert, en 1903, la compagnie maritime Beaver Line, qui desservira l’Atlantique Nord. En 1914-1915, après avoir acheté en 1909 la Allan Line , une compagnie très ancienne, elle fonde les Canadian Pacific Ocean Services. Après 1921, l’entreprise se fait connaître sous le nom de la Canadian Pacific Steamships Limited.
Expansion et concurrence
Entre 1899 et 1913, le CP fait passer son réseau ferroviaire d’environ 11 200 à 17 600 km. Plus de la moitié des nouvelles voies se trouvent dans les provinces des Prairies parce que le CP veut installer des lignes secondaires dans les zones qui en ont besoin. Il souhaite ainsi rester compétitif dans le cadre du développement des réseaux ferroviaires transcontinentaux du Chemin de fer Canadien du Nord et du Grand Trunk Pacific Railway.
L’étendue même de son expansion, principalement orchestrée par son président T. G. Shaughnessy (1899-1918), nécessite d’énormes ressources, mais le maintien de la Politique nationale et de ses tarifs substantiels lui garantit pour longtemps des prix élevés dans l’Ouest.
Les attaques dont ces prix sont l’objet en 1896 contribuent au renversement des conservateurs. Les libéraux réduisent les prix en signant en 1897 la Convention du Nid-de-Corbeau et, conformément à la Loi sur les céréales du Manitoba de 1900, exigent que l’on équipe les voies de plateformes de chargement pour les fermiers. Le Chemin de fer Canadien du Nord obtient une charte pour mettre en valeur les immenses plaines du Nord, laissées en friche par le CP.
L’apparition d’un nouveau concurrent, le Canadien National (CN), créé par l’État canadien entre 1917 et 1923, représente un défi de taille pour le CP. Le CN vient renflouer le Grand Trunk Pacific, le Chemin de fer Canadien du Nord, l’ Intercolonial et les Canadian Government Railways, qui sont au bord de la faillite. Le CN entre en concurrence avec le CP dans les secteurs de l’hôtellerie, des télégraphes, des lignes maritimes, des services express et des services ferroviaires.
Deuxième Guerre mondiale
Malgré cette concurrence massive et appuyée par le gouvernement, le CP survit comme entreprise commerciale. Pendant la Deuxième Guerre mondiale, il fournit non seulement du transport, mais produit aussi des armes et du matériel dans ses propres ateliers. Sa flotte marchande est alors réquisitionnée pour le transport militaire et il perdra 12 navires.
Lignes aériennes
Les Lignes aériennes du Canadien Pacifique (devenues ensuite CP Air) font leur apparition en 1942 des suites de l’achat par Grant McConachie de la Yukon Southern Air Transport et d’autres compagnies aériennes. Après 1947, sous la direction de Grant McConachie, CP Air devient un transporteur international qui dessert l’Extrême-Orient, l’Australasie, une bonne partie de l’Amérique du Sud et plusieurs pays d’Europe (voir Aviation). En 1987, Pacific Western rachète CP Air pour former les Lignes aériennes Canadien International. Plus tard, il s’agrandit encore avec l’achat de Wardair . Un marché très concurrentiel et des règlements imposés par le gouvernement entraînent des changements importants dans l’industrie du transport aérien dans les années 1990. En 2000, Air Canada prend le contrôle des Lignes aériennes Canadien International.
Diversification
Jusqu’à la fin des années 1950, les différents intérêts du CP dans d’autres secteurs sont perçus comme secondaires par rapport à ses activités ferroviaires. À partir de cette époque, la direction de la compagnie adopte une politique de diversification en assurant la rentabilité de chacune de ses exploitations. Dès lors, des activités qui relevaient de certains départements de l’organigramme du CP deviennent des compagnies autonomes. C’est notamment le cas de Marathon Realty Co. Ltd. (1963), qui reprend la gestion du parc immobilier à l’exception des bâtiments directement liés au transport ferroviaire; de CP Hotels Ltd. (1965); et de CP Oil & Gas Ltd. (1958), qui deviendra la Pancanadian Energy Corporation.
À la même époque, les intérêts non liés au secteur des transports sont regroupés dans une société de portefeuille nommée Canadian Pacific Enterprises Limited. Fondée en 1962, cette société laisse les secteurs des transports ferroviaire, aérien, maritime et routier à la société mère. En 1968, un nouveau programme d’identification des compagnies attribue les noms de CP Rail, CP Navigation, CP Transport et CP Air aux différents modes de transports.
En 1967, son département des communications fusionne avec celui du CN pour former une nouvelle compagnie conjointe, du nom de CNCP Télécommunications Ltée (voir Télécommunications). En 1990, CNCP devient Unitel Communications Inc., vendue plus tard à d’autres fournisseurs de communications.
En 1971, pour souligner l’élargissement de ses activités, la compagnie remplace son nom original par celui de Canadien Pacifique Ltée (CPL).
Restructuration
En 1996, la compagnie est restructurée. Le chemin de fer du Canadien Pacifique devient une filiale de la compagnie plutôt que l’une de ses divisions (dans les faits, le CP était exploité de manière indépendante, sans interfinancement d’autres divisions). La compagnie vend également plusieurs de ses entreprises, dont Marathon Realty (1996), ainsi que ses intérêts dans Laidlaw Inc. (1997).
En 2001, la compagnie se divise en cinq compagnies indépendantes : le Chemin de fer Canadien Pacifique, CP Navigation, PanCanadian Energy Corporation, Fording Coal et Canadian Pacific Hotels (renommée la Fairmont Hotels & Resorts Inc.). Après cette restructuration, le CP redevient exclusivement une compagnie ferroviaire.
En 2002, la fusion de PanCanadian avec l’Alberta Energy Company Limited fait de la nouvelle entité, Encana, l’une des premières sociétés pétrolières du monde. CP Navigation est vendu à un conglomérat allemand en 2005 et intègre ainsi la compagnie maritime Hapag-Lloyd. Quant à Fording Coal, Teck Cominco en fait l’acquisition en 2008.