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Cartographie au Canada : 1600–1763

La cartographie au Canada commence dans les années 1600 avec les travaux de Samuel de Champlain. En 1613, il produit la première carte d’allure moderne de l’est du Canada et, en 1632, il crée ses cartes les plus complètes. Pendant la majorité des années 1600 et 1700, les Français sont les principaux cartographes de ce qui allait devenir le Canada. Parmi les exceptions importantes, on compte les cartes de l’Arctique réalisées par les Anglais (voir aussi Cartographie au Canada : années 1500) et le travail de cartographie de la baie d’Hudson effectué notamment par Henry Hudson. La guerre de Sept Ans (1756-1763) interrompt l’activité cartographique au Canada.

Carte de Samuel de Champlain de l’est du Canada (1613)

Samuel de Champlain

En 1613, Samuel de Champlain publie la première carte d’allure moderne de l’est du Canada (voir aussi Cartographie du Canada : années 1500). Elle se base à la fois sur ses explorations et celles d’Henry Hudson. En 1616, il a déjà exploré et dressé la carte de régions allant aussi loin vers l’ouest que la baie Georgienne. Pour les autres régions, il utilise les cartes des Autochtones et leurs récits oraux (voir aussi Cartographie au Canada : cartographie autochtone). Ses observations sont réalisées grâce à la boussole, à des mesures de la latitude et à l’estimation des distances. Outre ses six cartes à petite échelle, celle de 1632 étant la plus complète, Champlain dresse 23 cartes à grande échelle et des plans illustrés de lieux situés entre Cape Cod et Montréal.

Missionnaires jésuites

De la mort de Samuel de Champlain en 1635 jusqu’aux années 1670, de tous les explorateurs, ce sont les missionnaires jésuites qui fournissent le plus de renseignements géographiques aux cartographes européens. En 1649, ils ont déjà exploré l’est des Grands Lacs. Les cartes produites par le père Nicolas Sanson en 1650 et en 1656, le père François-Joseph Bressani en 1657 et le père François Du Creux en 1660 ont toutes résisté au temps sous forme imprimée. C’est sur ces cartes qu’on reconnaît pour la première fois les Grands Lacs.

Des levés cartographiques effectués par les pères jésuites Claude Allouez et Claude Dablon mènent à la première carte réaliste du lac Supérieur et du nord du lac Michigan en 1672. Le père Jacques Marquette et Louis Jolliet tracent pour la première fois le cours du Mississippi en 1673. Au même moment, le père Pierre Raffeix et d’autres réalisent une série de cartes du pays haudenosaunee situé dans le nord de l’État de New York.

Une des rares cartes de l’époque à n’être pas exécutée par les jésuites est celle réalisée par le sulpicien Bréhant de Galinée en 1670. Il y illustre des détails d’un voyage entrepris avec François Dollier de Montréal à Sault Ste. Marie, en passant par les Grands Lacs inférieurs. Les méthodes d’observation nécessaires à l’élaboration de toutes ces cartes sont les mêmes que celles utilisées par Samuel de Champlain. En 1632, les jésuites commencent à observer, puis à chronométrer les éclipses lunaires pour déterminer les longitudes à l’ouest de Paris et de Rome.

Fin des années 1600

De 1670 à la fin du siècle, la cartographie du Canada est surtout associée à Louis Jolliet et à Jean-Baptiste-Louis Franquelin, le dessinateur le plus doué des deux. Hydrographe du roi à Québec de 1686 à 1697 et de 1701 à 1703, il enseigne l’hydrographie et tient à jour les cartes de la Nouvelle-France.

Les cartes manuscrites d’explorateurs comme René-Robert Cavelier de La Salle, de Louis Jolliet et d’ingénieurs topographes militaires sont compilées en grandes quantités, expédiées en France et mises à la disposition de cartographes professionnels. Les cartographes en chef de la cour de France, comme Vincenzo Coronelli et Guillaume Delisle, établissent en partie leurs cartes imprimées sur les données fournies par Jean-Baptiste-Louis Franquelin.

Les cartes de Vincenzo Maria Coronelli (1688-1689) et de Guillaume Delisle (1703) résument le mieux la cartographie au Canada à la fin du 17e siècle. La carte de Delisle est la première à comporter une grille relativement moderne des longitudes, établie d’après les observations d’une éclipse de Lune effectuées à Québec en 1685 par Jean Deshayes.

Au cours du 17e siècle, la cartographie à grande échelle se limite évidemment à la vallée du fleuve Saint-Laurent. Les premiers plans cadastraux, qui indiquent les limites des propriétés, l’emplacement des bâtiments, etc., sont ceux des seigneuries établis par Jean Bourdon en 1641. En 1660, celui-ci dresse également un plan de Québec. La carte du Saint-Laurent est dressée par Louis Jolliet et Jean-Baptiste-Louis Franquelin en 1685, puis grandement améliorée par Jean Deshayes en 1685-1686.

Début des années 1700

Les levés imprimés de Jean Deshayes (1702) donnent naissance à une carte du fleuve Saint-Laurent qui sert de référence, mais d’autres, plus précises, sont effectuées par Testu de la Richardière de 1730 à 1741 et Gabriel Pellegrin de 1734 à 1755. La production de plans cadastraux se poursuit au 18e siècle. L’un des plans les plus remarquables est celui réalisé par Jean-Baptiste Decouagne en 1709. Les cartes et les plans sont tous produits par des arpenteurs et des ingénieurs militaires compétents qui utilisent les instruments et les méthodes d’arpentage les plus récents.

Au 18e siècle, les relations de plus en plus tendues entre la France et l’Angleterre accroissent l’activité des ingénieurs militaires français. L’ingénieur Gaspard-Joseph Chaussegros de Léry et son fils, qui porte le même nom, relèvent avec assez d’exactitude le tracé des Grands Lacs inférieurs. Ils dressent aussi des cartes du Québec et des plus importantes fortifications de Louisbourg jusqu’à Détroit.

Sur la côte est, Joseph Bernard de Chabert effectue un des premiers levés hydrographiques précis en 1750-1751. En 1750, il construit à Louisbourg le premier observatoire du Canada, destiné aux observations astronomiques et au calcul des longitudes.

Carte de Jacques-Nicolas Bellin et de Pierre Gaultier de Varennes et de La Vérendrye représentant le Canada à l’ouest du lac Supérieur (1752)

Pendant que les ingénieurs et les arpenteurs qualifiés dressent les cartes des postes stratégiques et des établissements de la Nouvelle-France, des amateurs dressent des cartes de l’intérieur sans autres instruments que la boussole. Les premières cartes de la région à l’ouest du lac Supérieur sont issues des résultats des expéditions de Pierre Gaultier de Varennes et de La Vérendrye après 1731. La carte du nord du Québec est exécutée par un jésuite, le père Pierre-Michel Laure. Ces cartes représentent un réseau reconnaissable de lacs et de rivières.

Au 18e siècle, peu de cartes sont imprimées jusqu’à ce que Jacques-Nicolas Bellin devienne ingénieur en chef et géographe du dépôt des cartes, plans et journaux du ministère de la Marine française. En 1744, il publie 28 cartes dans l’Histoire et le Journal du père Pierre-François-Xavier de Charlevoix. Ce sont les premières cartes imprimées du Canada, dressées à partir de données récentes, depuis celles de Guillaume Delisle réalisées 40 ans plus tôt.

Au cours des années suivantes, Jacques-Nicolas Bellin met régulièrement ses cartes à jour. Jean-Baptiste Bourguignon D’Anville, un autre grand cartographe, a, comme Jacques-Nicolas Bellin, accès aux documents originaux. Il produit une série d’excellentes cartes entre 1746 et 1755. Ces deux cartographes publient des brochures où ils expliquent la provenance de l’information et la fiabilité de leurs cartes.

Bellin's Map of Canada (1755)

Cartographie anglaise

Avant 1763, les premières cartes anglaises du Canada se limitent à l’Arctique et à la côte de la baie d’Hudson. La carte de la rive est de la baie et du détroit dressée par Henry Hudson en 1612 est rapidement remplacée par celles de Thomas James (1633) et de Luke Fox, qui représentent toute la baie. John Thornton en dresse une carte plus exacte pour la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH) en 1685.

La CBH ne fait plus faire de cartes jusqu’à ce qu’Arthur Dobbs critique l’insuccès des explorations de la compagnie. À partir de 1741, les expéditions de Christopher Middleton (1743), John Wigate (1746) et Henry Ellis (1748) qui se rendent jusqu’à la baie Repulse, au nord, produisent une excellente série de cartes.

En 1756, la guerre de Sept Ans interrompt l’activité cartographique en Nouvelle-France. La Carte de l’Amérique septentrionale, produite par Jacques-Nicolas Bellin en 1755, est la dernière carte française de l’Amérique du Nord. Elle renferme les données les plus récentes sur le Canada avant la défaite des Français. Le Canada avait été cartographié assez grossièrement, mais de façon reconnaissable, environ jusqu’à 102° O., au Manitoba actuel et le long de la côte ouest de la baie d’Hudson jusqu’au cercle arctique.

Légende des photos :

Carte de Samuel de Champlain de l’est du Canada (1613)

En 1613, Samuel de Champlain publie la Carte geographique de la Nouvelle Franse, première carte d’allure moderne de l’est du Canada.

Carte de Jacques-Nicolas Bellin et de Pierre Gaultier de Varennes et de La Vérendrye représentant le Canada à l’ouest du lac Supérieur (1752)

Cette carte du cartographe Jacques-Nicolas Bellin, basée sur les voyages de Pierre Gaultier de Varennes et de La Vérendrye, est une des premières cartes du Canada représentant l’ouest du lac Supérieur. Elle démontre leur connaissance de plusieurs lacs, dont le lac Winnipeg (lac Gouinipique) et le lac des Bois.

Carte du Canada de Jacques-Nicolas Bellin (1755)

La Carte de l’Amérique septentrionale du cartographe Jacques-Nicolas Bellin, créée en 1755, montre la connaissance qu’avaient les Européens du Canada avant que celui-ci passe des Français aux Anglais après la fin de la guerre de Sept Ans.