Un clipper de l’Alberta est un type de système de basse pression qui se forme en Alberta ou à proximité, du côté est des Rocheuses. C’est un orage qui se déplace rapidement, d’où le nom « clipper », évoquant le voilier du 19e siècle renommé pour sa rapidité. Selon la province dans laquelle le système approche la frontière du Canada et des États-Unis, on parlera parfois d’un « Saskatchewan screamer », d’un « Manitoba mauler » ou d’un « Ontario scary‑o ». On dit parfois un clipper canadien ou tout simplement un clipper. Ces orages surviennent principalement en décembre et en janvier, mais ils sont également fréquents en automne et au printemps. Il s’en forme entre 5 et 20 par saison.
Formation
Les clippers de l’Alberta se forment à l’est des montagnes Rocheuses, sur le versant abrité des vents dominants. La formation se produit après l’arrivée d’un système de basse pression sur la côte ouest. À mesure que ce système se déplace vers l’est, il entraîne des vents de plus en plus forts sur la montagne. Il en résulte un creux dynamique, c’est-à-dire une zone de basse pression sur le versant abrité des montagnes. Le mouvement antihoraire du système pacifique est alors transféré à ce nouveau système. Tandis qu’il grandit, il demeure stationnaire un certain temps, puis il commence à se déplacer rapidement sur le continent.
Le saviez-vous?
Les systèmes de basse pression se forment quand l’air s’élève de la surface du sol vers la haute atmosphère, le plus souvent parce que l’air se réchauffe. On les appelle des systèmes de basse pression parce qu’il y a moins de pression atmosphérique au centre du système qu’autour. Dans son ascension, l’air entraîne l’humidité venant de la surface, qui peut ainsi former des nuages et entraîner des précipitations. L’air entourant le système se déplace vers celui-ci afin de combler le vide créé. En raison du mouvement de rotation de la Terre, l’air qui se déplace vers l’intérieur tourne autour de la zone qu’il remplit. Dans l’hémisphère nord, le sens de la rotation est anti-horaire. La rotation de l’air est souvent la principale source des vents qui accompagnent un système de basse pression.
Caractéristiques
Les clippers de l’Alberta sont typiquement pauvres en humidité. Cela vient du fait que la plus grande partie de la vapeur d’eau contenue dans le système du Pacifique est tombée sous forme de pluie ou de neige au moment où l’air s’élevait sur les montagnes Rocheuses. Ces précipitations résultent d’un processus appelé refroidissement adiabatique. À mesure que l’air s’élève au-dessus des Rocheuses, il prend de l’expansion car la pression atmosphérique décroît avec l’altitude. Cette expansion entraîne une perte d’énergie qui se traduit par un refroidissement de l’air. Puisque l’air froid contient moins de vapeur d’eau, la vapeur se condense en eau et en cristaux de glace qui deviennent des précipitations. En redescendant sur le versant est des Rocheuses, l’air est réchauffé par le processus opposé, le réchauffement adiabatique. Toutefois, la plus grande partie de son humidité ayant été perdue dans les précipitations, l’air devient très sec. Ce vent chaud et sec qui redescend les montagnes, parfois appelé un chinook, peut contribuer à former un clipper.
Trajectoire et évolution
Une fois formé, un clipper albertain typique se déplace sur le continent à une vitesse avoisinant 35 km/h, avec un rapide mouvement de rotation de l’air autour de son centre. Son trajet est influencé par le courant-jet polaire, le système de vents dominant dans la haute atmosphère au-dessus de l’Amérique du Nord. La plupart des clippers de l’Alberta se déplacent vers l’est et le sud-est, soit vers le centre-sud du Canada, et parfois jusqu’au centre-nord ou au nord-est des États-Unis, puis finalement jusqu’à l’océan Atlantique. Ce déplacement prend habituellement entre trois et cinq jours. Puisque la trajectoire du courant-jet varie selon les saisons et les cycles atmosphériques, le système peut suivre des routes différentes. Certains clippers peuvent se rendre vers le sud aussi loin qu’en Arkansas et en Caroline du Sud, et vers le nord jusqu’au nord de l’Ontario et du Québec. Dans l’ensemble, moins de 1 clipper albertain sur 10 atteint le sud des Grands Lacs. Ceci se produit généralement pendant un épisode de La Niña, un phénomène climatique qui amène le courant-jet polaire à pénétrer beaucoup plus au sud qu’il ne le fait habituellement.
Effets
Dans la plupart des cas, les clippers de l’Alberta ont moins d’impact météorologique que la moyenne des orages. Comme ils se déplacent rapidement et sont pauvres en humidité, les précipitations qui les accompagnent sont faibles et réparties sur de grandes étendues. Toutefois, il en va autrement s’ils ont l’occasion de se charger d’une quantité importante d’humidité. Ceci arrive souvent, par exemple, lorsqu’ils traversent les Grands Lacs. Lorsque l’« effet de lac » est présent, les régions proches peuvent recevoir jusqu’à 30 cm de neige. Cette neige tombe principalement au nord du passage du système. Les clippers entraînent aussi des vents qui peuvent dépasser 65 km/h, créant des conditions de blizzard si la neige est présente. Ces vents apportent un froid vif. Les températures peuvent baisser de 16 °C en 10 à 12 heures.
Changement climatique
Les effets du changement climatique sur les systèmes météorologiques locaux sont complexes et incertains. Néanmoins, il est possible d’identifier certaines tendances qui pourraient affecter l’Alberta dans le futur. Certains de ces effets ont déjà commencé à se manifester. Premièrement, à l’échelle planétaire, le réchauffement tend à favoriser l’évaporation, ce qui amène plus d’humidité dans l’atmosphère. Ainsi, il se pourrait que les clippers de l’Alberta apportent plus de précipitations dans le futur. Deuxièmement, les clippers de l’Alberta pourraient être influencés par un phénomène appelé amplification polaire, ou arctique. En quelques mots, cela veut dire que l’Arctique se réchauffe plus rapidement que le reste de la planète. Puisque le mouvement de l’air dans l’atmosphère est lié à la différence de température entre les pôles et l’équateur, le réchauffement de l’Arctique affecte le mouvement planétaire de l’air. L’amplification polaire tend à ralentir le mouvement de l’air de l’ouest vers l’est dans des régions comme l’Amérique du Nord. Ceci pourrait ralentir légèrement les clippers de l’Alberta, dont les précipitations se concentreraient sur des zones plus réduites. Ces orages pourraient ainsi devenir plus puissants. L’amplification polaire semble aussi responsable de changements de la forme du courant-jet. Ceci, à son tour, affecte les trajectoires des clippers. Troisièmement, on prévoit que les vastes phénomènes climatiques El Niño et La Niña pourraient devenir plus fréquents et prononcés si les températures mondiales continuent de s’accroître. Ceci affecte aussi la trajectoire du courant-jet. Lorsque La Niña est actif, les clippers tendent à se déplacer davantage vers le sud. D’un autre côté, durant les périodes d’El Niño, les clippers voyagent plus directement vers l’est. Ces effets combinés pourraient modifier le comportement des clippers de l’Alberta dans le futur.