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Canadiens d’origine croate

La Croatie est un pays du sud-est de l’Europe. Il est cerné par la Slovénie, la Hongrie, la Serbie, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro et la mer Adriatique. Les deux premiers Croates à poser le pied sur la terre maintenant appelée Canada étaient des marins dalmates. L’un d’eux faisait partie de l’équipage de Jacques Cartier lors de son troisième voyage (1541-1542), et l’autre, un mineur, accompagnait Samuel de Champlain dans ses explorations (1604-1606). Le recensement de 2016 fait état de 133 970 personnes d’origine croate au Canada (55 595 de réponses uniques et 78 370 de réponses multiples).

 Histoire

 À travers les années, le dénombrement des immigrants croates au Canada s’est avéré une tâche difficile (voir Immigration au Canada). Cette difficulté a été causée par le fait que, depuis les 10e et 11e siècles, la Croatie a fait partie tour à tour de la dynastie hongroise, du Saint Empire romain germanique, de l’Empire austro-hongrois (jusqu’à la Première Guerre mondiale), du royaume de Serbie, de Croatie et de Slovénie (1918 à 1929), du royaume de Yougoslavie (1929 à 1941) et de l’État indépendant de Croatie (1941 à 1945). De 1945 à 1992, la Croatie a été une des républiques de la République socialiste fédérative de Yougoslavie. En 1992, la Croatie est devenue une nation indépendante.

Avant 1918, les immigrants croates figuraient dans la même catégorie que les Autrichiens et les Hongrois et, après l’instauration officielle de la Yougoslavie en 1929, ils ont été classifiés avec les Yougoslaves. On estime qu’environ deux tiers des émigrants qui ont quitté l’ex-Yougoslavie (dissoute en 1992) étaient Croates (voir aussi Casques bleus canadiens dans les Balkans ; Bataille de la poche de Medak). Il demeure difficile de déterminer avec certitude le nombre de Croates immigrés à titre de réfugié lors du conflit de 1991-1993.

Lors du recensement de 2006, 65 305 personnes ont déclaré être d’origine yougoslave, cependant, certaines de ces personnes seraient possiblement nées en Croatie. Le recensement fait état de 110 880 citoyens déclarant leur origine ethnique comme étant croate (56 955 de réponses uniques et 54 475 de réponses multiples), ce qui pourrait comprendre des Yougoslaves, des Slaves, des Balkans et d’autres groupes. Par ailleurs, 56 955 personnes ont déclaré le croate comme étant leur langue maternelle (première langue apprise) lors du recensement de 2006, mais il est probable que de nombreuses autres personnes d’origine croate de la deuxième ou de la troisième génération se soient incluses dans la catégorie des Canadiens anglais ou ont déclaré être Yougoslaves (voir Langues immigrantes au Canada).

Au 19e siècle et au début du 20e siècle, les Croates sont en majeure partie des paysans catholiques, surtout ceux des régions intérieures de la Slavonie, de Zumberak et de Zagorje. La population du littoral Adriatique (l’Istrie, Primorje et la Dalmatie) est plus variée, car elle inclut des musulmans (voir Islam) et un mélange social de commerçants, de marins, de pêcheurs, de bûcherons et de bergers. La plupart des immigrants croates proviennent de la région comprise entre cette côte et la capitale, Zagreb.

Migration et peuplement

Les Croates ont servi dans les corps militaires autrichiens envoyés par le gouvernement français pour aider à défendre la Nouvelle-France (1758-1859) et ont participé aux premières pêcheries au saumon de la Colombie-Britannique, ainsi qu’à la ruée vers l’or du Cariboo des années 1860 et à la ruée vers l’or du Klondike de la fin des années 1890.

Avant la Première Guerre mondiale, environ 4000 Croates ont immigré au Canada. Au cours de la principale période de migration, qui s’étend tout au long du 20e siècle, environ 80 000 Croates ont immigré au Canada. Entre 1928 et 1939, il en est venu près de 12 000. Après la Deuxième Guerre mondiale, plus de 100 000 immigrants en provenance de la Yougoslavie, dont la majorité était Croate, ont constitué le troisième plus grand groupe d’immigrants au Canada. La principale raison de leur venue était la recherche de meilleures conditions de vie, mais dans les années 20 et après la Deuxième Guerre mondiale, de nombreux Croates ont émigré pour protester contre la situation politique de leur pays. Beaucoup de nouveaux arrivants sont issus de la classe urbaine et professionnelle des plus grandes villes de la Croatie : Zagreb, Rijeka, Karlovac, Split et Zadar.

Parmi les 29 établissements croates fondés au Canada avant la Première Guerre mondiale, 14 se trouvent en Colombie-Britannique. D’autres Croates se sont fixés en Saskatchewan, en Alberta et dans le Nord et le sud de l’Ontario. Dans les années 20, quelque 171 établissements ont vu le jour dans les villes minières et industrielles, dans les régions pionnières forestières et agricoles du Canada, ainsi qu’à Windsor, à Toronto et à Montréal. Les immigrants de l’après-guerre se sont établis en majorité dans les grandes villes, surtout à Toronto et à Montréal. La plupart des immigrants croates de l’après-guerre nés à l’étranger font partie de la main-d’œuvre industrielle, tandis que ceux qui sont nés au Canada sont actifs dans les secteurs des professions libérales, du travail de bureau et des services.

Vie sociale et collective

Pour les immigrants des première et deuxième vagues, la vie collective tournait autour de cercles fondés sur la parenté, héritage de la structure familiale et communale des zadrugas paysannes. Ils ont créé des sociétés d’aide mutuelle et des organismes d’entraide, par exemple la Croatian Fraternal Union of America, qui a ouvert son premier local canadien à Ladysmith en 1903 et qui comptait 10 000 membres en 1971. D’autres réseaux ont été parrainés par des partis politiques comme le Croatian Peasant Party des années 20, qui a fondé la Croatian Peasant Society en 1930. Dans les années 30, le Parti communiste et les organisations monarchistes yougoslaves ont appuyé d’autres activités sociales, culturelles et politiques. Depuis la Deuxième Guerre, les organismes ont proliféré : les United Croats of Canada, la Federation of Croatian Societies in Canada et les sociétés culturelles croates. Plus récemment, le folklore et les groupes de danse croates ont bénéficié d’une certaine visibilité lors des festivals folkloriques multiculturels des communautés ethniques urbaines.

Avec la dissolution de l’ancienne République yougoslave en 1992, la Croatie a été officiellement reconnue comme État indépendant. Au Canada, de nombreux Croates ont été fiers de célébrer leur indépendance si longtemps attendue.

Religion, vie culturelle et éducation

Bien qu’incapable de desservir les communautés isolées des régions pionnières dans les années 20 et dans les années 30, l’Église catholique a joué un rôle important dans la vie des immigrants croates au Canada depuis 1950. C’est l’année de la fondation de la première paroisse catholique croate à Windsor. Actuellement, toutes les villes canadiennes comprennent des paroisses croates, sans oublier les centres culturels et les salles communautaires parrainés par des partis politiques et des sociétés d’aide mutuelle. Les communautés croates se sont aussi dotées d’importants journaux qui représentent un large spectre de factions politiques allant de l’extrême gauche à la droite (voir aussiJournaux). On trouve par exemple le Hrvatski Glas (La Voix croate), fondé en 1929 et parrainé par la Croatian Peasant Society, et Borba (Le Combat), organe du Parti communiste fondé en 1930, qui sont encore publiés de nos jours. Ce dernier a ensuite été publié sous le nom de Jedinstvo (Unité), puis de Nase Novine (Nos nouvelles). Les autres journaux nationalistes sont : Nas Put (Notre façon), Hrvatski Put (La façon croate) et Nezavisna Drzava Hrvatska (L’État indépendant de Croatie). La communauté des immigrants croates a aussi produit plusieurs écrivains notoires, notamment le poète Alan Horiç, honoré pour ses œuvres L’Aube assassinée et Blessure au flanc du ciel. D’autres se sont également illustrés dans les domaines du ballet, de la musique classique et des beaux-arts. Parmi les personnalités célèbres canadiennes d’origine croate figurent les joueurs de hockey Frank et Peter Mahovlich et Joe Savic, les patineurs artistiques Val et Sandra Bezic et le boxeur George Chuvalo..

Langue

Les familles ont assuré la préservation de la langue croate jusque dans les années 1950, époque où des écoles privées extrascolaires ont été mises sur pied par les dirigeants communautaires et les organismes. Dans les années 1970, un réseau d’écoles de langue croate établi aux États-Unis s’est étendu au Canada, et quelques universités ont instauré des cours de culture et de langue croates. En 1989, l’Université de Waterloo a ouvert le premier département canadien à étudier la langue et la culture croates. Plusieurs universités canadiennes ont des associations d’étudiants croates. Les compétences linguistiques et les traditions culturelles se sont quelque peu perdues dans le processus d’assimilation, particulièrement dans les petites communautés isolées établies dans les années 20 et dans les années 30. Cependant, l’augmentation récente du nombre d’immigrants croates dans les grandes villes a encouragé les responsables communautaires à accorder plus d’importance au maintien de la culture croate. Lors du recensement de 2016, 51 090 Canadiens ont déclaré le croate comme étant leur langue maternelle (première langue apprise). Ceci représente 0,1 % de la population canadienne totale.