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Déchets dangereux

On peut définir les déchets comme étant des substances qui ne sont plus utiles à leur producteur ou à leur propriétaire.

Déchets dangereux

On peut définir les déchets comme étant des substances qui ne sont plus utiles à leur producteur ou à leur propriétaire. Quant aux déchets dangereux, ce sont des substances résiduaires dont l'élimination dans l'environnement pourrait comporter des risques pour la santé humaine, mettre en danger les ressources naturelles ou agricoles ou causer d'autres désagréments. L'élimination de tels déchets devrait s'effectuer de manière à ce que les risques qu'ils présentent pour la population, les ressources ou le bien-être soient acceptables et minimes.

Des progrès en matière de politique environnementale, tant à l'échelle internationale que canadienne, font que l'on accepte maintenant de façon officielle le concept (ou principe) de la précaution. Ce concept intègre, d'une part, la ligne de conduite qu'ont adoptée les scientifiques depuis longtemps lorsqu'ils évaluent des dangers et des risques éventuels, à savoir d'énoncer des hypothèses pessimistes pour évaluer des répercussions environnementales, et, d'autre part, l'élaboration de politiques environnementales qui permettent d'assurer une meilleure protection de l'environnement.

Environnement terrestre
Au XIXe siècle, on se rend compte qu'il faut procéder à l'ÉLIMINATION DES DÉCHETS avec beaucoup de prudence et selon des règles déterminées, ne serait-ce que pour éviter la propagation des maladies. La variété toujours plus grande de marchandises offertes à la consommation engendre des déchets de plus en plus dangereux. On estime qu'un million de personnes produit de 50 000 à 250 000 tonnes de déchets dangereux par année.

Problèmes posés par l'élimination

Les sites d'enfouissement ordinaires ainsi que les usines de traitement des eaux usées ne permettent pas d'éliminer convenablement les nombreux déchets dangereux, particulièrement ceux qui résultent des procédés industriels. Le déversement de substances chimiques dangereuses non traitées peut avoir des conséquences graves. Des effluents liquides n'ayant pas été traités adéquatement avant d'être déversés dans les rivières et les ruisseaux ont causé des problèmes aux collectivités en aval, et des sites d'enfouissement de substances chimiques ont causé de graves problèmes de santé aux personnes vivant à proximité.

Les substances chimiques enfouies laissent parfois échapper des vapeurs dans l'atmosphère, et les liquides mal entreposés peuvent s'infiltrer dans le sol, atteindre les EAUX SOUTERRAINES et contaminer des sources d'eau potable situées très loin du lieu d'entreposage. De plus, de nombreux produits et produits de dégradation demeurent dans l'environnement et entrent dans le cycle de l'eau, étant ainsi transportés sur de très grandes distances.

Les effets insidieux de faibles concentrations de certaines substances chimiques dans l'environnement rendent difficile l'établissement de limites d'exposition pour l'être humain. Les effets de certaines substances chimiques cancérigènes ou mutagènes prennent parfois plusieurs années à se manifester, et il est souvent impossible d'attribuer des problèmes de santé à une cause déterminée.

Traitements

Il est possible de traiter de nombreux déchets dangereux en vue de les rendre relativement inoffensifs pour l'être humain ou l'environnement. Les diverses méthodes de traitement comprennent le recyclage, les réactions physiques ou chimiques, l'incinération (dégradation à haute température), la biodégradation, la solidification, l'enfouissement en profondeur dans des formations géologiques ou l'entreposage à long terme.

Le recyclage, qui est de loin la méthode à privilégier pour les substances chimiques réutilisables (huiles, solvants, etc.), permet de créer des entreprises viables dans plusieurs pays, dont le Canada. Certaines substances peuvent être transformées chimiquement en matières stables non toxiques. Par exemple, on peut neutraliser certains acides en obtenant de la saumure moins toxique ou les faire précipiter sous forme de sels insolubles qu'on enfouira par la suite.

Les déchets chimiques organiques peuvent être adéquatement incinérés dans des fours conçus à cette fin et pourvus d'épurateurs qui ne laissent échapper que du dioxyde de carbone et de la vapeur d'eau en quantité appréciable dans l'atmosphère. Ainsi, même les substances chimiques rémanentes comme les biphényles polychlorés (voir BPC) peuvent être détruites en toute sécurité dans des établissements bien réglementés, à condition que la durée et la température de l'incinération soient suffisantes pour provoquer une décomposition totale et que la formation et l'émission de produits recombinants fassent l'objet de vérifications adéquates. Il est possible de précipiter par électrofiltrage ou d'éliminer par ramonage d'autres substances chimiques dangereuses que rejettent habituellement les cheminées (par exemple les cendres aéroportées et d'autres particules fines, les acides et les alcalis).

Bon nombre d'entreprises recourent aux bactéries pour traiter les déchets liquides biodégradables avant de les déverser dans les eaux de surface. Il est possible d'incorporer les déchets de métaux lourds (comme les liqueurs de galvanoplastie) à une masse semblable à du béton qui, une fois enfouie, résiste au lessivage. À certains endroits, on injecte les déchets liquides (notamment la saumure) dans des formations souterraines perméables recouvertes d'une couche rocheuse imperméable (injection en puits profonds).

Les usines qui traitent adéquatement les déchets dangereux sont nettement insuffisantes dans le monde. Au Canada, un grand pas a été accompli le 11 septembre 1987, lorsque la première usine intégrée et complète de traitement de déchets dangereux en Amérique du Nord a ouvert ses portes à Swan Hills, en Alberta, et ce, avec le plein appui de la population locale. Cet établissement à la fine pointe de la technologie peut traiter et éliminer en toute sécurité la plupart des déchets dangereux de la province. D'autres provinces cherchent à implanter d'autres usines afin de traiter les 5,9 millions de tonnes de déchets toxiques produits chaque année sur le territoire canadien.

Déchets radioactifs

Aucune méthode pratique de détoxication ne permet encore de neutraliser certains types de déchets dangereux, comme les matières radioactives (bien que celles-ci puissent être incorporées à une matrice, comme le verre, afin de réduire leur diffusion dans l'environnement). L'élimination des déchets radioactifs de faible activité peut parfois se faire par enfouissement, dans des tranchées superficielles ou par immersion en mer. Cette méthode présente des risques acceptables pour la santé humaine.

On ne peut, par contre, éliminer de cette manière les déchets fortement radioactifs, tels que les barres de combustible, qui doivent être entreposés en attendant leur traitement éventuel (par exemple le retraitement en vue de récupérer le plutonium fissible) ou être placés dans des dépôts souterrains permanents, comme c'est vraisemblablement le cas pour le combustible irradié provenant des réacteurs nucléaires canadiens. La plus grande prudence s'impose lors du choix de ces sites d'enfouissement, car on doit tenir compte de toutes les possibilités de fuite qui pourraient compromettre la santé humaine et de toutes les perturbations qui pourraient menacer l'intégrité de ces sites, comme l'activité tectonique ou un geste humain fortuit.

Gestion des déchets dangereux

Même s'il est actuellement possible de traiter la plupart des déchets pour les éliminer en toute sécurité, il arrive (pour des considérations économiques à court terme) que nombre d'entre eux ne soient pas traités, parce que la réglementation ne les vise pas. Il est rare que les coûts de traitement adéquat des déchets soient compris dans les coûts de production si la réglementation ne le prévoit pas. Cependant, à moins que les prescriptions en la matière ne soient appliquées uniformément à l'échelle internationale, les pays dont les lois relatives à la protection de l'environnement sont plus strictes pourraient être économiquement défavorisés sur le plan des exportations. Même là où des mesures ont été prévues pour abolir les pratiques dangereuses en matière d'élimination des déchets, l'élimination illégale peut encore constituer un problème. C'est pourquoi il est essentiel d'accorder une attention accrue à l'application de la réglementation.

Milieu marin

Les avis sont partagés sur l'utilisation de l'océan pour entreposer les déchets. Pour certains, il s'agit d'une zone inutilisée qui pourrait servir à éliminer des déchets, en raison de sa grande capacité d'assimiler les matières sans effets nocifs. D'autres sont fermement convaincus de la nécessité de conserver le plus possible le milieu marin dans son état originel, parce qu'il serait difficile de pallier une perturbation majeure de ce vaste et complexe ÉCOSYSTÈME. La première conception s'appuie sur une situation historique, lorsque la population mondiale était moins dense et les agglomérations urbaines moins étendues et lorsque les activités anthropiques (à savoir les activités réalisées par des êtres humains) étaient moins importantes qu'aujourd'hui. La seconde conception est en passe de devenir la plus répandue et consiste à adopter une attitude de plus en plus prudente.

Intendance de l'environnement

Sources marines
Le déversement délibéré de matières dans le milieu marin est généralement régi par la Convention internationale sur la prévention de la pollution des mers résultant de l'immersion de déchets, ratifiée en 1972 et mieux connue sous le nom de Convention de Londres sur l'immersion des déchets. Cette convention dresse une « liste noire » de substances (les composés organohalogénés, les composés du mercure et du cadmium, les plastiques indestructibles, les huiles et les déchets hautement radioactifs) qu'il est interdit de rejeter dans le milieu marin sauf à l'état de traces dans des matières par ailleurs tolérées. Une « liste grise » dénombre les substances pouvant s'avérer dangereuses (dont les composés de l'arsenic, du plomb, du cuivre et du zinc ainsi que les cyanures, les fluorures et les pesticides) et qui réclament des précautions particulières lorsqu'il s'agit d'évaluer les risques que présente leur immersion en mer et d'en établir les modalités.

La Convention prescrit également les modalités et les critères selon lesquels les autorités nationales sont en mesure de déterminer quelles matières peuvent être immergées, en quels lieux et les méthodes pour ce faire. Les parties à la Convention (pays signataires) doivent édicter des lois nationales appropriées qui sont en accord avec les dispositions de la Convention et les appliquer. Cette législation fait partie de Loi canadienne sur la protection de l'environnement (partie VI), et les permis d'immersion en mer sont émis en vertu de cette loi.

Depuis plusieurs années, des négociations sont en cours en vue d'apporter des modifications importantes à la Convention de Londres, notamment quant à la façon de déterminer s'il est opportun d'immerger certaines matières. On a proposé que ces modifications soient adoptées au cours d'une conférence diplomatique en 1996, entraînant ainsi la modification la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Les changements proposés prévoient le remplacement des listes grise et noire par une liste restreinte de matières dont l'élimination en mer serait envisageable, mais sous réserve d'une évaluation de ses répercussions sur le milieu marin et de l'existence de solutions de rechange en matière de traitement, de recyclage et d'élimination.

Le déversement par les navires d'hydrocarbures, de liquides nocifs transportés en vrac, de substances dangereuses emballées, d'eaux usées sanitaires ou d'ordures est régi par la Convention internationale de 1973 pour la prévention de la pollution par les navires (MARPOL, 1973/1978). Cette convention, qui réunit un relativement grand nombre de signataires (95, dont le Canada), s'applique à la plus grande partie du tonnage de la marine marchande mondiale (environ 93 p. 100).

La fréquence et la gravité des déversements d'hydrocarbures dans le milieu marin ont conduit à l'adoption, en 1990, de la Convention internationale sur la préparation, la lutte et la coopération en matière de pollution par les hydrocarbures (OPRC, 1990). En modifiant sa Loi sur la marine marchande, en 1993, le Canada a ratifié son adhésion à la Convention en 1994, et celle-ci est entrée en vigueur en mai 1995. L'OPRC vise plus particulièrement l'état de préparation et d'intervention en cas de pollution par les hydrocarbures, et les parties signataires étudient la possibilité de l'étendre aux substances chimiques dangereuses.

Le déversement direct et indirect (par l'intermédiaire des cours d'eau) de substances dans les eaux côtières a occasionné à plusieurs reprises la contamination des zones littorales par des substances chimiques métalliques et organiques, particulièrement dans les baies où l'échange d'eau avec le large des côtes est restreint. Divers secteurs des côtes est et ouest du Canada et plusieurs baies et fjords de l'Arctique ont ainsi été touchés.

Il est toutefois difficile de déceler la pollution que de nombreuses substances causent à grande échelle en raison, d'une part, de l'énorme capacité d'absorption de l'océan et, d'autre part, de l'étendue des zones occupées par des mers marginales (par exemple le GOLFE DU SAINT-LAURENT et la BAIE DE FUNDY). Les activités anthropiques terrestres constituent la source la plus importante des matières qui se déversent dans l'océan, et les eaux de ruissellement sont leur principale voie d'acheminement. Les effets cumulatifs des contaminants déversés sont manifestes si l'on considère l'incidence et la répartition dans l'océan de certains métaux lourds, de radionucléides et de composés organiques artificiels comme les BPC. Il est important de souligner qu'il ne suffit pas de déceler la présence de substances contaminantes, il faut aussi évaluer les dangers réels que représente le rejet de ces contaminants dans l'environnement en fonction de leurs effets néfastes sur la santé humaine, les ressources et les agréments.

Concept de la précaution

Une approche plus globale de la gestion des déchets dangereux intègre trois principes distincts : la justification des pratiques, la réduction des risques pour la santé humaine et l'environnement et la minimisation des préjudices à un degré raisonnable compte tenu du contexte socioéconomique. La justification exige que les avantages pouvant découler de la production et de l'utilisation éventuelles d'une nouvelle substance soient évalués en regard des désavantages (par exemple les risques que cette substance présente pour la santé humaine ainsi que l'ampleur et les risques des dommages environnementaux qu'ils pourraient représenter). Cette évaluation permet de déterminer si un investissement de la part de l'industrie lui permettra d'en retirer un bénéfice net global. Il convient d'établir des limites sûres d'exposition aux produits et aux déchets que génère l'industrie pour les êtres humains et de s'assurer que le rejet de matières dangereuses dans l'environnement n'enfreint pas les prescriptions, peu importe la voie d'exposition. Enfin, il faut évaluer toutes les solutions de rechange en ce qui concerne la production, le transport, la diffusion et l'élimination des produits et des déchets dangereux, de manière à ne retenir que celles qui réduisent les risques d'exposition, dans la mesure où elles tiennent compte des conditions techniques, économiques et sociopolitiques. En termes de protection contre les radiations, ces trois principes s'appliquent aux pratiques et sont respectivement désignés justification, respect des doses limites et optimisation.

Substances interdites

La tendance actuelle qui consiste à prendre davantage de précautions a conduit à des démarches en vue de conclure une convention internationale interdisant ou éliminant progressivement la production de certaines catégories de substances, dont les « substances organiques rémanentes ». Celles-ci se distinguent par leur toxicité, leur rémanence et leur capacité de s'accumuler dans les organismes vivants. Plusieurs pays ont déjà interdit la production de DDT et de BPC, et on peut s'attendre à ce que le nombre de ces substances augmente si la tendance actuelle se maintient dans le cadre des négociations internationales.

Problèmes d'élimination

On se sert depuis longtemps des océans, délibérément et accidentellement, pour éliminer les déchets domestiques et industriels. Parmi les effets indésirables que peuvent avoir les déchets éliminés dans le milieu marin, on compte les risques pour la santé humaine (par exemple l'exposition des baigneurs aux agents pathogènes); le fait d'entraver l'exploitation légitime de la mer (par exemple la pêche); la dégradation de la qualité de l'eau de mer, ce qui rend cette dernière moins propice aux activités récréatives, au dessalement et à d'autres utilisations; ainsi que l'amenuisement, moins tangible que d'autres effets, de l'attraction que suscite le milieu marin sur le plan esthétique.

Sources de contamination

Les principaux types d'élimination délibérée de déchets dans l'océan comprennent le déversement direct, depuis la terre ferme, par des émissaires d'évacuation ou d'autres canalisations, l'immersion, l'incinération ou le rejet de déchets solides ou liquides par des navires et des plates-formes situées au large ou le long des côtes. Les matières déversées sur terre ou dans les réservoirs d'eau douce (lacs ou rivières) peuvent également atteindre indirectement la mer par le ruissellement en surface.

Au Canada, les déchets déversés ordinairement dans la zone côtière par les canalisations ou les émissaires sont constitués d'eaux usées sanitaires et de résidus de l'affinage des métaux, du raffinage des hydrocarbures, de la transformation des aliments et de la fabrication de pâtes et papiers. Au Canada, comme dans d'autres pays côtiers, les centrales électriques et d'autres établissements industriels rejettent également dans la mer la chaleur de leur eau de refroidissement.

L'atmosphère achemine également certains des déchets que l'on retrouve dans l'océan. Les substances volatiles, ou celles dont la pression de vapeur est importante, qui proviennent d'activités terrestres peuvent se répandre dans l'atmosphère et être transportées sur des distances plus ou moins importantes, occasionnant souvent une contamination à grande échelle des milieux terrestre et marin. Ce phénomène s'est notamment produit durant la période d'essais d'armes nucléaires, au cours des années 50 et 60. Plus récemment, on se préoccupe particulièrement du transport à grande distance de composés organiques relativement volatils. Ces substances ont en effet tendance à s'accumuler dans des régions froides comme l'Arctique en raison d'un processus mondial de volatilisation.

Sources terrestres

Contrairement à l'immersion en mer, le déversement dans l'océan à partir de sources terrestres n'était, jusqu'à tout récemment, régi par aucun accord international. Le principal accord régional sur le déversement de déchets à partir de sources terrestres est la Convention de Paris. Elle vise l'Est de l'Atlantique Nord et les zones côtières adjacentes et a été ratifiée par la plupart des pays d'Europe occidentale. La législation canadienne en la matière comprend la Loi sur les pêches, la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, la Loi sur la protection des eaux navigables et la Loi sur la prévention de la pollution des eaux arctiques (voir DROIT DE L'ENVIRONNEMENT).

La fin de l'année 1995 marque la ratification d'un second accord international, connu sous le nom de Déclaration de Washington, qui répond essentiellement aux recommandations adoptées par la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement (CNUED) en 1992. Cette déclaration est assortie du Programme d'action mondiale (PAM) pour la protection du milieu marin contre la pollution due aux activités terrestres. Plus complète que les Lignes directrices de Montréal, comme le montre le choix du terme « activités » au lieu de celui de « sources », cette déclaration prescrit aux pays signataires, dont le Canada, d'élaborer des programmes d'action nationaux afin de prévenir, de réduire et d'enrayer la pollution du milieu marin par les activités d'origine tellurique. Ces activités comprennent non seulement le déversement de contaminants, mais aussi la dégradation matérielle des zones côtières et des bassins hydrographiques.