Adam Dollard des Ormeaux, soldat, colon français (né le 23 juillet 1635 en France; mort en mai 1660 près de Carillon, en Nouvelle-France). Adam Dollard des Ormeaux était commandant de garnison à Ville-Marie. Il a mené un groupe de Français aux côtés d’alliés algonquins et hurons-wendats à la bataille du Long-Sault contre les Haudenosaunee. On a longtemps considéré Adam Dollard des Ormeaux comme un héros et un martyr s'étant sacrifié pour la défense de Ville-Marie. Cependant, de récentes études ont jeté un doute sur la nature héroïque de sa conduite.
Émigration en Nouvelle-France
On en sait très peu sur la vie d’Adam Dollard des Ormeaux en France. Il reçoit probablement une formation militaire et exerce un leadership dans l’armée française avant d’émigrer en Amérique du Nord. (Voir Peuplement de la Nouvelle-France.) Il serait arrivé à Ville-Marie en 1658 à l'âge de 22 ans. En 1659, il est commandant de la garnison de Ville-Marie, titre qu’il partage avec Pierre Picoté de Belestre. Paul de Chomedey, sieur de Maisonneuve, lui confère une terre d'environ 30 arpents.
Bataille du Long-Sault
Selon le récit traditionnel de la bataille du Long-Sault, Adam Dollard des Ormeaux rassemble une troupe armée pour intercepter des guerriers haudenosaunee qui menaçaient Ville-Marie. Il regroupe 16 volontaires français, 40 Hurons-Wendats et 4 Algonquins. ( Voir Relations entre les Autochtones et les Français.)
Les Hurons-Wendats sont dirigés par le chef Annahotaha. Ceux-ci sont pour la plupart fidèles aux Français et ont l’habitude des combats contre les Haudenosaunee. Les quatre Algonquins, eux aussi guerriers aguerris, ont pour chef Witiwiweg. Par contre, les volontaires français sous le commandement d’Adam Dollard des Ormeaux sont beaucoup moins expérimentés.
Au printemps 1660, les guerriers hurons-wendats partent de Québec et rejoignent leurs alliés algonquins à Trois-Rivières. Ils se dirigent vers Ville-Marie pour y retrouver les Français. Ces derniers savent que les Haudenosaunee quittent leur territoire de chasse d’hiver au nord et longent la rivière des Outaouais vers le sud. Les Relations des Jésuites décrivent comment les Français et leurs alliés autochtones décident d'intercepter les Haudenosaunee avant qu'ils ne puissent atteindre la vallée du fleuve Saint-Laurent. (Voir Basses terres du Saint-Laurent.)
Après dix jours de canotage, le groupe trouve un endroit pour tendre une embuscade aux Haudenosaunee. Repéré par ces derniers, il se réfugie dans un fort algonquin abandonné. Les Haudenosaunee tentent de négocier avec les Français et leurs alliés autochtones. Les Hurons-Wendats et les Algonquins, plus expérimentés, favorisent la négociation, mais les Français se méfient des Haudenosaunee et croient à une ruse.
Le fort abandonné n’est pas plus qu'une simple palissade. Il serait situé le long de la rivière des Outaouais, à peu près à mi-chemin entre Ottawa et Montréal. On ne connaît pas l’endroit précis de la bataille, mais on suppose qu’elle a eu lieu près de Carillon.
Les Haudenosaunee assiègent les Français et leurs alliés pendant dix jours. Au cours de cette période, près de 500 Oneidas et Kanien’keha:ka (Mohawks) apportent du renfort aux 200 guerriers onondagas. Les combats sont intenses, mais les Français et leurs alliés autochtones ont l'avantage des armes à feu, du fort et de leur expérience militaire. Les Hurons-Wendats exhibent même la tête coupée d'un chef onondaga au-dessus du mur de la palissade pour narguer les assaillants.
Le chef huron-wendat Annahotaha veut entreprendre des pourparlers alors que la situation s’envenime pour les défenseurs. Deux Hurons-Wendats et un Oneida vont donc discuter avec les Haudenosaunee. Au même moment, des Hurons-Wendats adoptés par les Haudenosaunee s‘approchent du fort et convainquent un bon nombre des leurs de déserter, faisant valoir qu'ils seraient mieux traités par les Haudenosaunee que par les Français. Alors que les Hurons commencent à déserter le fort, les Français ouvrent le feu sur les Haudenosaunee, brisant ainsi la trêve. Ces derniers reprennent l’attaque et foncent sur la palissade avec des hachettes. Ils font des brèches dans les murs et tuent le chef Annahotaha. Afin de retarder l’assaut des Haudenosaunee, Adam Dollard des Ormeaux aurait lancé un baril de poudre à canon sur les assaillants. Le baril rebondit sur une branche d’arbre et tombe dans le fort. L’explosion tue ou blesse gravement les derniers défenseurs. On ne sait pas si Dollard des Ormeaux meurt sur le coup, mais la bataille est perdue. Quelques alliés autochtones survivent, mais aucun Français ne revient en vie. (Voir Guerres iroquoises.)
Débat sur la représentation historique de Dollard des Ormeaux
Selon la tradition historique, c’est grâce à Adam Dollard des Ormeaux qu’une attaque des Haudenosaunee sur Ville-Marie est évitée. Ainsi, on dépeint souvent son sacrifice et son martyre comme un exemple de bravoure et d'héroïsme. En particulier, l’ouvrage Histoire du Montréal de Dollier de Casson, découvert au 19e siècle, fournit une interprétation patriotique et religieuse des actes accomplis par Adam Dollard des Ormeaux à la bataille du Long-Sault.
Depuis les années 1930, les recherches historiques mettent en doute la représentation héroïque de l'homme et de la bataille. On souligne que ni Adam Dollard des Ormeaux ni les alliés ne savaient qu’un groupe important de guerriers haudenosaunee se trouvait dans les environs de Ville-Marie. Ils pensaient plutôt aller attaquer des groupes beaucoup plus restreints de chasseurs haudenosaunee pour leur dérober leurs peaux de castor et commercer ensuite avec des membres de la nation Odawa. Quant au nombre de victimes haudenosaunee, 14 auraient été tués et 19 blessés. Les pertes chez les Haudenosaunee ne sont donc pas assez lourdes pour justifier le fait que ces derniers ont renoncé à attaquer Ville-Marie. Si l’on juge que la désertion des Hurons-Wendats lors de la bataille était un acte de lâcheté, l'historien Bruce Trigger souligne par ailleurs l'échec répété des Français pour les soutenir contre leurs ennemis. Les Hurons-Wendats n’étaient donc pas prêts à se battre jusqu'à la mort pour les Français.
Héritage
On accorde une grande importance aux exploits accomplis par Adam Dollard des Ormeaux lors des guerres iroquoises du 17e siècle. De nombreux endroits au Québec sont donc nommés en son honneur. Une banlieue de Montréal, puis des rues, des lacs, des parcs et des rivières partout au Québec prennent le nom d’Adam Dollard des Ormeaux et Daulac (nom attribué par certains historiens).
Le célèbre artiste Alfred Laliberté a sculpté une grande et impressionnante statue d'Adam Dollard des Ormeaux. Celle-ci se trouve dans le parc Lafontaine à Montréal. La mort héroïque d‘Adam Dollard des Ormeaux au Long-Sault est également représentée sur un bas-relief du monument à Maisonneuve (œuvre de Louis-Philippe Hébert) érigé sur la Place d'Armes dans le Vieux-Montréal.