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Effondrement du pont de la rivière de la Paix

Le spectaculaire pont suspendu enjambant la rivière de la Paix, au sud de Fort St. John, en Colombie-Britannique, a été inauguré à l’été 1943, en remplacement d’un traversier sur la route de l’Alaska. Le pont a relié les rives de la rivière pendant 14 ans, et ce, jusqu’à ce qu’il s’effondre, étonnamment, sans blesser quiconque, à la suite d’un glissement de terrain sous l’une de ses culées.

Le spectaculaire pont suspendu enjambant la rivière de la Paix, au sud de Fort St. John, en Colombie-Britannique, a été inauguré à l’été 1943, en remplacement d’un traversier sur la route de l’Alaska. Le pont a relié les rives de la rivière pendant 14 ans, et ce, jusqu’à ce qu’il s’effondre, étonnamment, sans blesser quiconque, à la suite d’un glissement de terrain sous l’une de ses culées.

Route de ravitaillement en temps de guerre

En pleine Deuxième Guerre mondiale, le pont suspendu est construit en moins de neuf mois par la Dufferin Paving Company et la John A. Roebling’s Sons (renommée pour la construction du pont de Brooklyn, à New York). La route de l’Alaska est une route de service importante reliant la route à relais du Nord-Ouest, série de pistes d’atterrissage du Nord canadien servant à acheminer des avions et d’autres fournitures vers l’Alaska et l’Union soviétique.

Sur l’autoroute, l’approche du côté nord du pont traverse une terrasse alluviale gravelée jusqu’à la culée massive de béton, construite sur du schiste, une roche sédimentaire. La culée supporte une courte travée d’approche et sert de point d’ancrage aux câbles qui maintiennent en suspension la travée nord, longue de 142 m, et la travée centrale, longue de 284 m. Les travées du côté sud étant similaires, le pont mesure au total 640 m. En 1946, le pont et l’autoroute sont intégrés au réseau routier du Nord-Ouest du gouvernement canadien, entretenu par le Corps de Génie royal canadien.

Désastre de 1957

Le 15 octobre 1957, le pont est fermé à la circulation vers 23 h en raison d’une subsidence (mouvement) du schiste sous la culée nord. Au cours des 12 heures qui suivent, un glissement de terrain sur la berge nord déplace de plusieurs mètres vers la rivière un million de mètres cubes de schiste et le massif d’ancrage. La force excessive exercée sur les câbles porteurs mène à la rupture des suspentes de la travée latérale, qui supportent le poids du tablier du pont à partir des câbles de suspension. La travée latérale et les suspentes s’effondrent dans la rivière, mais les pylônes du pont suspendu, bien qu’endommagés, tiennent bon. Des centaines de spectateurs, présents en raison de l’important bouchon de circulation sur la route de l’Alaska en direction sud, assistent à la rupture de l’important lien routier avec le sud du Canada. Personne n’est blessé.

Une semaine plus tard, la circulation est rétablie au moyen d’un traversier pendant trois semaines, jusqu’à ce que la rivière gèle. Entretemps, on désigne le nouveau pont ferroviaire situé à 5 km en amont comme « passage temporaire ». On lui ajoute un tablier et un cadre porteur, puis des glissières de sécurité pour protéger la voie simple de circulation. Des unités de l’Armée canadienne contrôlent le trafic en permanence. La partie sud du détour vers le pont ferroviaire traverse la rivière Pine au moyen d’un simple pont à chevalets en bois, qui, après avoir été sévèrement endommagé lors d’une inondation, est remplacé par le pont Bailey, un pont modulaire militaire fait d’acier. Les approches nord et sud ont toutes deux dû être déplacées, élargies et gravelées. Le détour est en place pendant deux ans, soit jusqu’à ce que le pont suspendu soit remplacé.

Remplacement par des poutres à treillis

Les coûts directs de l’effondrement du pont comprennent le démantèlement de la structure défaillante (la rivière gelée sert de plateforme de travail) et la construction du nouveau pont. Le nouveau pont en poutre à treillis, plus traditionnel, mesure 30 m de plus que l’ancien pont suspendu, mais réutilise les piliers de ce dernier. En 2014, il tient toujours debout. L’usine de purification de gaz naturel, située tout juste au nord-est du pont, a dû interrompre ses activités le temps que son alimentation en eau de la rivière, rompue par le glissement de terrain, soit détournée et remplacée.

Les coûts indirects de l’effondrement se font ressentir tout au long de l’autoroute et aussi loin qu’à Whitehorse. La circulation est interrompue pendant une semaine, puis est ralentie par le détour de 10 km passant par le pont ferroviaire. Les difficultés d’approvisionnement des magasins, des motels et des stations-services nuisent aussi à l’exploration gazière et pétrolière près de Fort Nelson. Au total, on estime les coûts direct et indirect de l’effondrement à environ 146 millions de dollars (en 2011).

Le glissement de terrain sur la berge nord de la rivière résulte de l’érosion du schiste après qu’il ait été déstabilisé et exposé pendant la construction de l’approche du pont et de l’alimentation en eau de l’usine de gaz naturel. Des schistes similaires, nommés « schistes argileux », ont depuis posé des difficultés aux ingénieurs de fondations dans les Plaines intérieures. La défaillance du pont démontre qu’un incident de relativement faible envergure peut entraîner d’importantes répercussions.

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