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Emma Goldman

Emma Goldman, anarchiste, activiste antiguerre, auteure, organisatrice (née le 27 juin 1869 à Kovno, dans l’Empire russe [aujourd’hui Kaunas, en Lituanie]; décédée le 14 mai 1940 à Toronto, en Ontario). Anarchiste de renommée mondiale, Emma Goldman a consacré sa vie à l’activisme antiguerre et à l’organisation de la justice sociale. Ses conférences sur l’anarchisme ont attiré des milliers de personnes et contribué à l’émergence de réseaux communautaires dédiés. Elle a été expulsée des États-Unis en 1919 en raison de son activisme antiguerre et a vécu en exil pendant plus de 20 ans. Elle a habité plusieurs années à Toronto, où elle était étroitement surveillée par la GRC. À Toronto, son influence durable se reflète dans la participation continue de la ville aux mouvements sociaux progressistes. En 2025, le Museum of Toronto la désigne comme l’une des 52 femmes qui ont façonné la ville.

Cet article a été créé en collaboration avec le Museum of Toronto.

Jeunesse et carrière

Emma Goldman naît en 1869 dans une famille juive d’un pays qui est correspond aujourd’hui à la Lituanie. Elle grandit dans le village de Papile, en Lituanie, à Kaliningrad, en Russie, et à Saint-Pétersbourg. Selon l’Encyclopédie Universalis, « elle reçoit une éducation formelle limitée, mais lit énormément et noue des relations avec un cercle d’étudiants anarchistes à Saint-Pétersbourg ».

Carrière aux États-Unis

Pour fuir les pogroms en Europe, Emma Goldman immigre aux États-Unis en 1885. Elle travaille dans des usines textiles à Rochester, dans l’État de New York, et à New Haven, dans le Connecticut. C’est là qu’elle s’imprègne davantage des idéologies anarchistes et socialistes. En 1889, elle s’établit à New York, où elle fait la connaissance du plus célèbre anarchiste américain, Alexander Berkman. Ils deviennent des amis pour la vie, et parfois même des amants.

En 1893, elle est emprisonnée pendant 10 mois pour avoir incité, par un discours enflammé, plusieurs ouvriers au chômage à déclencher une émeute. Après sa libération en août 1894, elle devient une conférencière notoire et effectue des tournées aux États-Unis et en Europe. En septembre 1901, elle prononce à Cleveland, en Ohio, une allocution qui incite l’un des participants, Leon Czolgosz, à assassiner le président William McKinley. À cette époque, cependant, elle réfute publiquement le recours à la violence à des fins politiques.

Alexander Berkman sort de prison en 1906 et, en 1907, Emma Goldman l’engage comme rédacteur à la revue anarchiste qu’elle vient de fonder, Mother Earth. Présentée comme « un magazine mensuel consacré aux sciences sociales et à la littérature », Mother Earth constitue un organe clé de la gauche dite radicale aux États-Unis. On y publie des intellectuels américains et européens, comme Ben Hecht, Eugene O’Neill, Leo Tolstoy et Margaret Sanger.

En 1909, on lui révoque sa citoyenneté américaine par naturalisation. L’année suivante, elle publie Anarchism and Other Essays (1910), un ouvrage qui, dans les années 1970, devient un favori des chercheuses féministes. En 1916, elle est brièvement emprisonnée pour s’être prononcée en faveur de la régulation des naissances.

En juillet 1917, elle est condamnée à deux ans de prison pour ses activités de propagande contre la conscription. Au moment de sa libération, en septembre 1919, peu après la révolution russe, les politiciens américains sont en proie à la première « peur rouge ». Emma Goldman, surnommée « Emma la Rouge » par la presse, est déclarée étrangère subversive. En décembre 1919, elle est déportée en Union soviétique avec Berkman et deux cent quarante-sept autres « révolutionnaires ».

Carrière en exil

Emma Goldman appuie la révolution d’octobre 1917 en Russie, qui porte le parti bolchevique au pouvoir. Cependant, ses expériences en Union soviétique la font changer d’avis. Elle est particulièrement horrifiée par la violente réaction bolchevique à la révolte des marins de Cronstadt en mars 1921. Après son départ de l’Union soviétique, elle publie My Disillusionment in Russia (1923; trad. Ma désillusion en Russie, 1925).

Par la suite, elle s’exile successivement en Suède, en Allemagne, en Angleterre et en France, où elle poursuit ses activités de conférencière. Elle écrit aussi l’autobiographie Living My Life (1931; trad. Vivre ma vie : une anarchiste au temps des révolutions). Pendant la guerre civile espagnole (1936-1939), elle se rend en Espagne pour appuyer les forces antifascistes.

Carrière au Canada

Pendant ses années d’exil, Emma Goldman fait trois séjours au Canada. Elle vit à Toronto de 1926 à 1928, de 1933 à 1935, puis de 1939 jusqu’à sa mort en 1940. En décembre 1927, elle déclare au Toronto Daily Star qu’elle trouve Toronto « mortellement ennuyeuse ». Malgré cela, elle persiste. Ses talents d’oratrice favorisent le dynamisme du mouvement anarchiste. Elle encourage les anarchistes locaux à s’organiser, ce qui mène à la formation de la section torontoise du Groupe libertarien. Ce groupe organise des manifestations antifascistes, soutient les réfugiés de la guerre civile espagnole et anime des débats politiques hebdomadaires. Tout au long de ses séjours au Canada, la GRC surveille de près ses agissements.

Autres activités

Outre ses conférences sur l’anarchisme et sur la justice sociale, Emma Goldman est également reconnue comme une sommité dans le domaine de la dramaturgie européenne. Elle prononce de nombreuses conférences sur les pièces d’Henrik Ibsen, d’August Strindberg et de George Bernard Shaw, entre autres, qu’elle publie par la suite dans son livre The Social Significance of the Modern Drama (1914).

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