Formation médicale
De nos jours, la formation médicale canadienne se fait en plusieurs étapes. La première partie du processus administratif dans la plupart des universités canadiennes consiste à passer le Medical College Admissions Test (MCAT) qui évalue la capacité de résoudre des problèmes, la pensée critique, les compétences d'écriture et la compréhension de concepts scientifiques. La façon dont le test est effectué dépend des écoles. Un diplôme de premier cycle universitaire est nécessaire pour l'admission à la plupart des écoles de médecine du Canada, mais quelques-unes, comme l'Université de la Saskatchewan, ne demandent que deux années de niveau baccalauréat. Les étudiants s'inscrivent ensuite dans une école médicale où ils acquièrent les connaissances de base, les compétences et les attitudes nécessaires à la pratique de la médecine. Après l'achèvement de leurs études médicales, ils obtiennent un diplôme en médecine.
Pour obtenir le permis de pratiquer, tous les diplômés en médecine doivent faire au moins une année d'internat dans un hôpital ou une clinique où ils sont supervisés. Ils acquièrent ainsi une expérience pratique et on leur donne progressivement la responsabilité des patients. Beaucoup de diplômés s'inscrivent dans un programme de formation d'au moins deux ans qui conduit à l'accréditation du Collège des médecins de famille du Canada et deviennent ainsi des médecins de famille; d'autres choisissent un programme de quatre ou cinq ans dans l'une des 44 spécialités médicales reconnues par le Collège Royal des médecins et chirurgiens du Canada et deviennent ainsi des médecins spécialistes. Certaines spécialités, la neurochirurgie ou la médecine des adolescents par exemple, demandent encore une formation additionnelle de deux années.
Depuis peu, la tendance est à l'éducation permanente. Elle inclut des programmes d'études indépendantes ou supervisées grâce auxquels le praticien se tient au courant des derniers développements du domaine médical dans lequel il travaille. La formation médicale permanente est importante en médecine préventive, car elle permet aux praticiens de se tenir au courant des nouveaux traitements et des nouvelles méthodes de gestion des soins thérapeutiques.
La formation universitaire de premier cycle et de spécialisation n'est offerte que dans 17 facultés de médecine au Canada. Seules huit provinces ont des écoles de médecine. Le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard, quant à elles, aident à subventionner les écoles médicales des provinces avoisinantes. La formation permanente est offerte par les facultés de médecine ainsi que par de nombreuses sociétés professionnelles nationales, régionales et locales, par les hôpitaux et les compagnies pharmaceutiques et par d'autres agences et regroupements.
Histoire de la formation médicale au Canada
Le premier programme de formation médicale au Canada voit le jour en 1824 à la Montreal Medical Institution qui, cinq ans plus tard, devient la Faculté de médecine de l'Université McGill. Au tournant du siècle, il y a des écoles de médecine à l'Université de Toronto, à l'Université Laval (qui possède des écoles de médecine à Québec et à Montréal; cette dernière deviendra la Faculté de médecine de l'Université de Montréal), à l'Université Queen's, à l'Université Dalhousie, à l'Université de Western Ontario et à l'Université du Manitoba. Une huitième école est ouverte en 1913, celle de l'Université de l'Alberta à Edmonton. En 1950, on compte des écoles à l'Université de la Saskatchewan, l'Université d'Ottawa et l'Université de la Colombie-Britannique, et la filiale montréalaise de l'Université Laval est devenue une école indépendante.
Au début du XXe siècle, deux événements modifient profondément la qualité de la formation médicale au Canada. Le premier est la publication, en 1910, de Medical Education in the United States and Canada par la Fondation Carnegie pour l'avancement de l'éducation. Écrite par Abraham Flexner et basée sur sa tournée des 155 écoles de médecine du Canada et des États-Unis, cette publication propose que toute école de médecine acceptable ait des critères d'admission exigeants, soit assujettie aux mêmes standards académiques rigoureux que toute université, fasse reposer les programmes de formation sur une approche scientifique de la médecine et encourage la recherche académique au sein de leur faculté.
L'impact du rapport Flexner est si profond que, au cours des quinze années suivant sa parution, la plupart des écoles (près de la moitié), ne satisfaisant pas aux standards établis, ferment leurs portes. Même si aucune école canadienne ne ferme, les nouveaux standards sont rehaussés.
La mise sur pied du Conseil médical du Canada en 1912 contribue aussi à définir la qualité de la formation médicale. Le conseil établit un examen standard pour les diplômés de toutes les écoles de médecine du Canada, qui est finalement accepté comme critère d'obtention du droit d'exercer par toutes les autorités provinciales responsables de remettre les permis de pratiquer. La qualité de la formation médicale dispensée à travers le pays s'uniformise et, fait tout aussi important, les diplômés en médecine sont maintenant libres de s'établir partout au pays en étant assurés que leurs qualifications seront reconnues et acceptées où qu'ils aillent.
En 1964, la publication du rapport de la Commission royale d'enquête sur les services de santé a également un impact sur la formation médicale. La commission, présidée par Justice Emmett Hall, est mise sur pied pour enquêter sur les soins de santé dispensés. Elle conclut que le nombre de praticiens qui sortent des douze écoles est insuffisant pour répondre aux besoins du pays, de sorte qu'il faut continuer à compter sur un haut taux d'immigration de praticiens formés dans d'autres pays. Cette constatation conduit presque aussitôt à la fondation de nouvelles écoles à l'Université McMaster, à l'Université de Calgary et à l'Université Memorial, ainsi qu'à la fondation de l'école de l'Université de Sherbrooke.
Le nombre d'étudiants de première année en médecine au Canada varie d'une année à l'autre. Au début des années 1980, le nombre d'inscriptions culmine à près de 1900. Mis à part une recrudescence de 1988 à 1991 et en 1993, le nombre d'étudiants en médecin tombe à environ 1575 en 1997. Par la suite, l'inscription augmente de façon significative pour passer à 2569 étudiants en 2008.
Différentes approches de la formation médicale
Avant la Deuxième Guerre mondiale, le programme des facultés de médecine au Canada a évolué à partir de celui mis en place lors de la fondation de la première école médicale à McGill, lui-même inspiré du modèle d'Édimbourg. Dans les années 1880, William OSLER insiste particulièrement sur l'enseignement au chevet des malades. Le programme consiste alors en deux années de cours magistraux et de travaux de laboratoire (dont l'importance varie) en anatomie, physiologie, biochimie, bactériologie, pathologie et pharmacologie, suivies de deux années de formation clinique dans des unités d'hôpital. La tradition de Flexner, qui insiste sur une base théorique en sciences médicales fondamentales, oriente l'enseignement des sciences de base. À l'opposé, l'enseignement clinique met l'accent sur l'aspect pratique des soins médicaux et se base presque exclusivement sur l'exposition des étudiants aux patients des hôpitaux.
Les connaissances scientifiques, dont la plupart sont mises au service de la pratique médicale, augmentent considérablement pendant et après la Deuxième Guerre mondiale. Le programme d'études médicales, déjà chargé, s'en trouve encore alourdi. À peu près à la même époque, une nouvelle classe d'enseignants cliniques fait son apparition dans les écoles de médecine. Attirés par le soutien croissant dont bénéficie la recherche et par les possibilités de faire carrière comme chercheur en médecine, les étudiants des deux sexes ne se satisfont plus d'une simple formation dans les disciplines cliniques et veulent asseoir leurs connaissances sur des bases théoriques plus larges et plus profondes dans une ou plusieurs des sciences fondamentales. Ce sont les précurseurs de la nouvelle génération d'enseignants cliniques et scientifiques qui exerce aujourd'hui une très grande influence dans toutes les facultés de médecine.
À la fin des années 1950 et au début des années 1960, les facultés de médecine canadiennes ont peine à intégrer au programme d'études alors en vigueur la masse des connaissances qui ne cesse de s'accroître. Les étudiants en médecine protestent de plus en plus contre le volume de connaissances qu'ils doivent assimiler et dont la pertinence n'est pas toujours évidente. Pour corriger la situation, la plupart des écoles décident de mettre les étudiants en présence des patients dès la première année plutôt qu'en troisième année, pour les mettre immédiatement dans le cadre où s'inscrivent les sciences fondamentales qu'ils doivent encore apprendre. En contrepartie, les cours pratiques en laboratoire sont moins nombreux, voire supprimés.
Beaucoup d'écoles adoptent des programmes d'études intégrés, ou « systémiques », où l'on initie les étudiants par modules aux caractéristiques fondamentales et cliniques des appareils cardiovasculaire, locomoteur, respiratoire et digestif. Les étudiants étudient dans un ordre logique les sciences fondamentales qui correspondent à l'appareil particulier dont ils apprennent à connaître les modalités d'extériorisation, le diagnostic clinique et le traitement. On espère que cette méthode donnera aux étudiants un cadre conceptuel sur lequel ils pourront s'appuyer pour poser un diagnostic et prescrire un traitement. Dans ce « nouveau » programme, la formation ne repose plus essentiellement sur les cours magistraux et les cours pratiques en laboratoire, mais aussi sur les séminaires et le tutorat. Pour faire face à la masse croissante de connaissances qui doivent être assimilées, les écoles encouragent les étudiants à assumer davantage la responsabilité de leur propre formation et à développer leurs aptitudes à résoudre des problèmes.
L'Université McMaster adopte un nouveau programme audacieux qui retient l'intérêt du monde entier et repose sur la formule de « l'apprentissage par problèmes ». Selon cette formule, les étudiants, par petits groupes et sous la supervision d'un professeur, recueillent des données dans des livres et des revues spécialisées ou auprès de conseillers pédagogiques et les regroupent pour résoudre les problèmes imaginés pour eux par les professeurs. Cette démarche insiste sur la collaboration entre les étudiants et le corps enseignant. Ce dernier n'a pas la prétention de fournir à l'étudiant des connaissances médicales encyclopédiques, mais suppose qu'après avoir suivi un programme d'apprentissage par problèmes, ces étudiants auront acquis l'habileté et l'autonomie nécessaires pour résoudre les problèmes cliniques qu'ils rencontreront dans l'exercice de leur profession.
Les détracteurs de ce programme soutiennent que ses diplômés obtiennent régulièrement des résultats inférieurs à la moyenne de ceux des autres écoles canadiennes et que leur taux d'échec est plus élevé. Par contre, des diplômés de McMaster sont admis dans certains programmes de formation postdoctorale les plus prestigieux de l'Amérique du Nord et y obtiennent d'excellents résultats. Les programmes offerts à McMaster et à Calgary comprennent trois années d'études de premier cycle entrecoupées par seulement un mois de vacances par an. Le programme de cinq ans de l'Université de Montréal est conçu pour offrir aux étudiants plus d'occasions de s'épanouir dans leur rôle de futur praticien. Les autres écoles de médecine ont un programme de quatre ans, comme la plupart des écoles de médecine en Amérique du Nord.
Accréditation des écoles de médecine
Depuis 1934, les écoles canadiennes sont normalement agréées par un organisme américain qui porte aujourd'hui le nom de Liaison Committee on Medical Education. Avec l'avènement du régime universel d'assurance-maladie au Canada en 1970, les contextes respectifs des États-Unis et du Canada en matière de soins médicaux et d'exercice de la médecine commencent à diverger, et le Canada doit adopter un système d'accréditation mieux adapté aux besoins du pays. Par conséquent, le Comité d'agrément des facultés de médecine du Canada est créé en 1979. Cet organisme indépendant supervise les cours offerts dans les écoles canadiennes de médecine et en atteste la qualité. Les écoles de médecine canadiennes sont maintenant accréditées par ces deux organismes et on a ainsi l'assurance qu'elles répondent aux critères du pays.
Nouveaux défis
La rapidité des changements technologiques et des avancées scientifiques de la fin du XXe siècle et du début du XXIe siècle oblige le corps professoral médical à adapter ses méthodes d'enseignement au contexte dans lequel les praticiens évoluent. Les progrès techniques réalisés dans certains domaines, tels que la TRANSPLANTATION d'organes, la dialyse, le GÉNIE GÉNÉTIQUE et la reproduction vont permettre à un plus grand nombre de personnes de vivre à un âge avancé, et pour qui le coût des soins de santé est également plus élevé. Non seulement les étudiants doivent-ils apprendre les nouvelles technologies, mais ils doivent également comprendre les implications sociales et éthiques des soins aux patients. Les étudiants de demain devront être en mesure de fournir aux autres dispensateurs de soins et aux législateurs des avis sur les coûts économiques et sociaux des nouvelles technologies et sur l'intégration des progrès médicaux au régime de soins de santé exceptionnel du Canada. Par ailleurs, les futurs étudiants en médecine devront posséder de plus en plus de connaissances poussées en informatique dans le cadre de leur formation et comme atout au moment du diagnostic, du pronostic et des soins à dispenser au patient.
L'épidémie mondiale du Syndrome d'immunodéficience acquise (voir SIDA) souligne le besoin d'élargir l'enseignement médical en ÉPIDÉMIOLOGIE et virologie. Les éducateurs doivent exploiter les connaissances de ces deux domaines, non seulement pour le SIDA, mais également pour d'autres maladies virales comme la GRIPPE et le rhume, dont les coûts associés à la baisse de productivité humaine sont énormes.
La médecine préventive constitue la préoccupation majeure du XXIe siècle. Elle a pour principe d'éviter la maladie par la vaccination et d'éviter la propagation exponentielle de maladies comme l'asthme en réduisant l'exposition aux éléments déclencheurs comme les allergènes et la fumée secondaire. La médecine préventive suppose des praticiens qui travaillent avec les patients dans le but d'enrayer la maladie et de favoriser la santé. L'augmentation des coûts des soins de santé et les problèmes d'accès, tels que la pénurie de médecins, rendent la prévention d'autant plus importante. Le traitement adéquat des maladies infectieuses constitue un autre aspect de la médecine préventive. La RÉSISTANCE AUX ANTIBIOTIQUES de plus en plus fréquente de certaines souches de bactéries pose des difficultés supplémentaires et fait augmenter les coûts du traitement. Quand la médecine est utilisée à bon escient, elle aide à réduire le développement de bactéries résistantes aux médicaments. Les médecins, de par leur formation médicale, connaissent les souches de bactéries et de virus actifs et cherchent à améliorer l'efficacité du traitement.
La pénurie de médecins au Canada, tant de médecins de famille que de spécialistes, est préoccupante. L'une des raisons de cette pénurie est la croissance démographique, spécialement dans les centres urbains comme Toronto, Vancouver et Calgary. La diminution du nombre d'étudiants dans les écoles de médecine dans les années 1990 a eu pour conséquence une diminution du nombre de médecins diplômés au Canada. De plus, quelques médecins formés au Canada émigrent vers les États-Unis après leurs études. En 2002, la Commission sur l'avenir des soins de santé au Canada, aussi connue sous le nom de Commission Romanow, enquête et fait des recommandations concernant les principaux problèmes du système de soins de santé canadien. Le rapport final de la commission détermine que, malgré des coûts de plus de 100 milliards de dollars par année, le système de soins de santé manque de lignes directrices en matière d'imputabilité. Aucun gouvernement n'a vraiment réussi à mettre en œuvre les principes jugés essentiels. Pour améliorer la responsabilisation du système de soins de santé face au public, le rapport recommande que l'imputabilité soit le 6e principe de la Loi canadienne sur la santé, auquel s'ajoutent l'universalité, la portabilité, l'accessibilité, la représentativité et la gestion publique.
Même si nous ne pouvons prévoir précisément les besoins médicaux de l'avenir, nous savons que les intervenants du système de soins de santé devront être préparés à faire face à l'imprévu. Parmi les préoccupations de demain figurent les problèmes médicaux dus à l'évolution de notre style de vie, comme l'abus d'alcool ou d'autres drogues, l'obésité et le diabète de type II. Les engouements et les modes comportementales se développent souvent rapidement et de façon imprévue, et certains d'entre eux peuvent engendrer des problèmes de santé qui nécessiteront des actions médicales ou politiques tout aussi rapides.