Chaque année, approximativement 470 Canadiens sont infectés par la bactérie E. coli, qui peut engendrer de sérieux troubles, voire être fatale dans une petite minorité de cas. L’affection a parfois été nommée « maladie du hamburger », car provenant à l’occasion de galettes de bœuf haché contenant la bactérie responsable – E. coli –, mais elle peut être transmise par l’absorption de divers autres aliments ou d’eau non traitée et par contact avec les matières fécales de personnes ou d’animaux infectés. Plusieurs épisodes très médiatisés d’infection à E. coli sont survenus au Canada depuis les années 1980. Ils ont entraîné une prise de conscience accrue du public et motivé des modifications des règlements et des pratiques sanitaires.
Qu’est-ce qu’E. coli?
Escherichia coli (plus connue sous le nom d’E. coli) désigne un vaste groupe de bactéries qui ont été identifiées pour la première fois en 1885. Ce groupe comprend de nombreuses souches inoffensives d’E. coli qui résident dans les intestins de tous les mammifères.
Ce n’est qu’en 1982, lorsque des troubles en série surviennent parmi les clients de la restauration rapide aux États-Unis, qu’E. coli est reconnue comme un agent pathogène responsable de troubles associés aux aliments. Lors de ces épidémies, les chercheurs parviennent à identifier une souche d’E. coli baptisée O157:H7. D’autres souches pathogènes existent, mais O157:H7 demeure la cause la plus commune des infections à E. coli en Amérique du Nord.
LE SAVIEZ-VOUS?
Escherichia coli porte le nom du pédiatre germano-autrichien Theodor Escherich, qui l’identifie pour la première fois en 1885.
Comme l’infection à E. coli est-elle transmise?
E. coli O157:H7 est présente dans les matières fécales des bovins, des chèvres, des moutons et d’autres mammifères. Elle est la plupart du temps associée à de la viande de bœuf hachée pas assez cuite, mais on l’a détectée dans d’autres produits d’origine animale tels que le salami sec, le bœuf rôti ainsi que le lait et le yogourt non pasteurisés.
La bactérie peut également être présente dans les fruits et les légumes crus ainsi que dans les jus à base de fruits non pasteurisés (p. ex., le jus de pomme brut). Lorsque c’est le cas, il se peut que les cultures aient été irriguées avec de l’eau contaminée par des matières fécales ou directement souillées par des matières fécales provenant d’animaux laissés en pâture dans les champs. La bactérie E. coli peut aussi contaminer l’eau non traitée et peut infecter un hôte par contact direct avec des matières fécales animales ou humaines.
Symptômes et effets sur la santé
Les personnes infectées par E. coli O157:H7 peuvent souffrir de crampes abdominales aiguës, de diarrhée, de diarrhée sanglante et de vomissements. La plupart des personnes qui présentent ces symptômes se rétablissent en moins de deux semaines, sans avoir recours à un quelconque traitement.
Pour une faible proportion des patients, l’infection peut engendrer un syndrome hémolytique et urémique (SHU) au cours duquel les reins peuvent être sérieusement affectés, au moins temporairement. C’est une toxine, la vérotoxine (également connue sous le nom de vérocytotoxine ou toxine de Shiga), produite par cette souche d’E. coli, qui provoque le SHU. Dans certains cas, les personnes qui développent le SHU peuvent souffrir à long terme de difficultés rénales, nécessiter des soins intensifs et des séances régulières de dialyse. Dans certains cas rares, cette infection peut entraîner la mort du patient.
Épisodes notables au Canada
L’épisode de SHU qui a touché 14 enfants dans la région de Toronto en 1980 est aujourd’hui reconnu comme la première infection E. coli O157:H7 répertoriée en Amérique du Nord. Treize des enfants affectés ont été traités à l’Hôpital pour enfants malades de Toronto. Le quatorzième est mort subitement chez lui. Cet épisode très inhabituel a motivé plusieurs enquêtes par des spécialistes canadiens de la recherche médicale. Au cours des quatre années qui suivirent, ils parvinrent à lier l’infection à du jus de pomme non pasteurisé qui contenait E. coli. Cette découverte est venue s’ajouter aux travaux de plusieurs chercheurs américains qui, en 1982, ont réussi à établir un lien entre les troubles ressentis par des clients de certains restaurants à service rapide de l’Oregon et du Michigan à la présence d’E. coli dans des hamburgers qui n’avaient pas été suffisamment cuits. Le troisième épisode sérieux de 1982 a touché 31 résidents d’un foyer de soins infirmiers à Ottawa.
En 1985, à London, en Ontario, 73 personnes parmi les résidents et le personnel d’un foyer de soins infirmiers ont été infectées par E. coli et 19 résidents en sont morts. La source de cette infection semble avoir été de la viande crue présente dans des sandwiches.
En 1991, dans les Territoires du Nord-Ouest, 521 résidents inuits de six communautés sont tombés malades en l’espace de quelques mois; 22 ont développé le SHU et deux sont décédés. On pense que la source de l’infection était probablement de la viande de bœuf et de la viande de caribou contaminées.
En 1999, un épisode causé par du salami sec contaminé a infecté 143 personnes en Colombie-Britannique.
La plus grande épidémie d’E. coli au Canada a eu lieu à Walkerton, en Ontario, en 2000. De l’eau potable contaminée par du fumier avait alors entraîné des troubles chez plus de 2 300 personnes. Sept personnes sont décédées. Une enquête judiciaire a conclu que ce désastre « évitable » résultait de la négligence de responsables locaux de la distribution de l’eau et de coupes budgétaires opérées par le gouvernement provincial progressiste-conservateur de Mike Harris.
En 2014, 119 Albertains sont tombés malades après avoir consommé des produits à base de porc contaminés. Les agents de la santé publique ont alors signalé que le public devrait être également sensibilisé aux pratiques de manutention salubre des aliments à base de porc, car les gens associent généralement les troubles liés à E. coli au bœuf.
Contrôle des infections
Au Canada, la fréquence des intoxications alimentaires par E. coli — qui a atteint près de 1 200 cas par an — a chuté depuis 2001 et ne dépasse plus à l’heure actuelle 500 cas par an. Diverses interventions et initiatives dans différents secteurs ont permis d’obtenir cette réduction.
Malgré des épisodes antérieurs ayant eux aussi mis en jeu le pronostic vital des patients, c’est l’épisode de 1993 survenu dans plusieurs États des États-Unis qui a suscité l’attention de la communauté internationale pour cette maladie. Onze lots de hamburgers vendus par une chaîne de restauration rapide dans les États de l’Ouest ont infecté plus de 700 personnes. La plupart de ceux qui souffrent d’une défaillance rénale (environ 50) et les 4 qui décéderont étaient de jeunes enfants. L’émoi est tel après l’accident que de nouvelles politiques et de nouveaux systèmes en matière de salubrité des aliments sont introduits.
PulseNet, un réseau électronique permettant aux scientifiques d’identifier rapidement les épisodes d’intoxication alimentaire, a été créé aux États-Unis après l’épisode de 1993. Ce réseau est mis en œuvre au Canada en 2000. Depuis, des progrès au niveau des ateliers de préparation de la viande de bœuf ont également joué un rôle clé pour limiter les infections à E. coli.
Les organismes fédéraux ont ajusté leurs politiques afin de réduire le risque d’infection à E. coli associée à d’autres aliments, notamment les jus de fruits non pasteurisés. En 1998, l’Agence canadienne d’inspection des aliments a par exemple introduit son Code d’usages pour la production et la distribution de jus de pomme et de jus d’autres fruits non pasteurisés au Canada.
Des initiatives de sensibilisation, telles que la campagne « À bas les BACtéries! » lancée en 1998 par le Partenariat canadien pour la salubrité des aliments, ont permis à la population de mieux prendre conscience des pratiques de manutention salubre des aliments.
L’épisode de Walkerton, en 2000, et l’enquête judiciaire qui a suivi ont entraîné la refonte des pratiques de gestion de l’eau en Ontario et souligné la nécessité d’assurer la salubrité de l’eau potable à l’échelle nationale. Cependant, dans certaines communautés, la contamination de l’eau demeure un problème. Des avis de faire bouillir l’eau sont souvent émis pour les réserves des Premières Nations d’un bout à l’autre du pays. Le gouvernement libéral de Justin Trudeau s’est engagé à améliorer la qualité de l’eau dans ces communautés en finançant l’installation de nouveaux systèmes de distribution.
Voir aussi : Intoxication alimentaire; Maladies d’origine hydrique; Élevage des bovins à viande; Traitement de l’eau; Législation sur les aliments; Politique de l’agriculture et de l’alimentation.