Joseph Howe, journaliste, éditeur, homme politique, premier ministre de la Nouvelle‑Écosse, lieutenant‑gouverneur de la Nouvelle‑Écosse (né le 13 décembre 1804, à Halifax, en Nouvelle‑Écosse; décédé le 1er juin 1873, à Halifax, en Nouvelle‑Écosse). Joseph Howe était bien connu à son époque comme un ardent défenseur de la liberté de la presse et de la liberté d’expression, et était également un champion du gouvernement responsable. Il était une figure marquante du mouvement opposé à la Confédération, bien qu’il ait joué, ultérieurement un rôle important, à titre de ministre du Cabinet fédéral, pour obtenir l’entrée du Manitoba dans la Confédération.
Jeunesse et formation
Joseph Howe, fils des loyalistes John Howe et Mary Edes Austen, voit le jour dans la région du bras Northwest, dans ce qui est aujourd’hui la Municipalité régionale d’Halifax. Il est particulièrement proche de son père, qu’il aurait décrit comme étant « [son] seul maître, [son] compagnon de jeu et, pour ainsi dire [son] ami de tous les jours ». Autodidacte, il s’adonne avec voracité à la lecture, bien qu’une relative pauvreté ne lui permette pas de lire suffisamment à son goût. Il est décrit comme un fin observateur du monde qui l’entoure, cette qualité lui permettant d’acquérir de nombreuses connaissances. À 13 ans, il assiste déjà son père dans ses fonctions de maître général des Postes et d’imprimeur du roi; cependant, n’étant pas l’aîné, il n’héritera pas de ces responsabilités une fois adulte.
Le père de Joseph Howe, qui aurait été le seul loyaliste de sa famille, transmet à son fils son amour de la Grande‑Bretagne et de l’Empire britannique dès son plus jeune âge, des sentiments qui ne cesseront de se renforcer tout au long de sa vie. En dépit de ses efforts pour l’obtention d’un gouvernement responsable (c’est à dire, un gouvernement émanant d’une assemblée législative élue responsable devant l’électorat local), il n’en est pas moins un défenseur engagé de l’Empire britannique. (Voir Impérialisme.)
Carrière d’éditeur
Joseph Howe débute sa carrière dans l’édition au début de 1827, lorsqu’il achète, avec un associé, un journal nommé le Weekly Chronicle, qui est alors rebaptisé l’Acadian. Toutefois, moins d’un an après, il reprend le Novascotian, dont il devient rédacteur en chef et dont il fait rapidement le journal dominant de la province.
En 1828, Joseph Howe épouse Catherine Susan Ann McNab, dont il aura dix enfants, seuls cinq d’entre eux ayant survécu. À titre de rédacteur en chef du Novascotian, il rend fréquemment compte des débats à l’Assemblée législative et de ses lectures quotidiennes des journaux, des revues, des brochures, de la correspondance et de tous les autres périodiques qui s’accumulent sur son bureau, décrivant aussi ses nombreux déplacements dans toute la province. Il publie de la littérature néo‑écossaise originale qui comprend souvent des œuvres de son cru.
Procès en diffamation
Le 1er janvier 1835, une lettre anonyme, publiée dans le Novascotian, prétend que la magistrature et la police de la ville auraient, depuis 30 ans, extorqué 30 000 £ aux citoyens par le biais de divers artifices. Bien que Joseph Howe ne soit pas lui‑même l’auteur de cette lettre, signée « The People » (le peuple), il se lance dans une campagne pour attirer l’attention sur différents épisodes de corruption survenus localement tout au long de l’année précédente, ce qui a le don de fortement contrarier les élites politiques locales. En tant qu’éditeur et rédacteur en chef du journal, il est accusé d’écrits diffamatoires séditieux, un chef d’accusation très grave à l’époque. En outre, il n’est pas en mesure de se défendre en faisant simplement valoir que ce qui avait été rapporté était la vérité, une défense de ce type n’étant pas considérée comme adéquate à l’époque. Aucun avocat ne se proposant pour le défendre, il choisit d’assurer lui‑même sa propre défense, estimant qu’il pourra persuader un jury de l’acquitter.
C’est au cours de sa défense que Joseph Howe démontre les compétences oratoires qui le rendront célèbre et le conduiront finalement dans l’arène politique. En dépit des instructions du juge demandant au jury de déclarer l’accusé coupable, c’est plutôt ce dernier qui réussit à convaincre les jurés de l’acquitter, une décision à laquelle ils aboutissent en moins de 10 minutes. Après son acquittement, il proclame : « La presse de la Nouvelle‑Écosse est libre! » Tout au long de sa défense, il dresse une liste d’exemples de fraude, d’incompétence et de corruption de la part de politiciens, de magistrats, de policiers et d’autres fonctionnaires locaux, certains de ceux dont il a mentionné le nom démissionnant dans la foulée de cet acquittement exceptionnel. L’année suivante, il est élu pour la première fois.
Gouvernement responsable
Joseph Howe est élu à l’Assemblée législative de la Nouvelle‑Écosse, en 1836, comme représentant de Halifax. Il devient conseiller exécutif en 1840, un poste qu’il occupe jusqu’en 1843 lorsqu’il démissionne. Au cours de cette période, il fait campagne pour le gouvernement responsable. L’émergence de ce concept et l’adhésion croissante qu’il rencontre au Canada dans la première moitié du 19e siècle ouvrent la voie à la Confédération qui voit le jour en 1867. Grâce à ses efforts, les assemblées de 1836 et de 1840 comptent une majorité de candidats élus se réclamant du mouvement réformiste, c’est‑à‑dire favorables au gouvernement responsable. Cette situation irrite les élites politiques en place jusqu’au point où John Halliburton, fils du juge en chef Brenton Halliburton, celui‑là même qui avait présidé le procès en diffamation contre Joseph Howe, provoque ce dernier en duel, en 1840. John Halliburon rate son tir et Joseph Howe choisit de tirer en l’air.
Joseph Howe devient président de l’Assemblée en 1841 et ayant décidé de concentrer ses efforts entièrement sur la politique, vend, la même année, le Novascotian. De 1844 à 1846, il revient à ses activités de rédacteur en chef, aussi bien pour le Novascotian que pour le Weekly Chronicle. Il se montre extrêmement critique vis‑à‑vis du lieutenant‑gouverneur de la Nouvelle‑Écosse, lord Falkland, conduisant finalement à la démission de ce dernier en 1846, ce qui va permettre l’installation d’un gouvernement responsable dans la colonie. Joseph Howe ne tire aucun avantage de cette évolution, bien qu’il en ait été l’un des principaux partisans, du fait, au moins partiellement, de son hostilité et de sa désapprobation publiques vis‑à‑vis de ceux qui s’opposaient à la réforme politique. Alors que le gouvernement responsable s’installe, il travaille comme secrétaire provincial en vue d’intégrer les institutions de la province dans la nouvelle forme de gouvernement.
Chemins de fer
Au début des années 1850, Joseph Howe s’intéresse de près à des projets de construction de nouvelles lignes de chemin de fer, à l’intérieur de la Nouvelle‑Écosse et pour relier Halifax aux principaux ports voisins, notamment Québec et Portland, dans le Maine, aux États‑Unis. Plusieurs tentatives sont nécessaires pour obtenir les fonds en vue de la mise en œuvre de son plan ferroviaire et, en 1854, il démissionne de son poste de secrétaire provincial pour diriger une commission bipartite sur les chemins de fer. Même s’il rêve à la construction, sous sa houlette, d’une ligne entre Québec et Halifax, ce sont finalement des liaisons entre Halifax, d’une part, et Windsor et Truro, d’autre part, en Nouvelle‑Écosse, qui voient le jour. Il considère ces projets ferroviaires comme faisant partie d’un plan général plus vaste d’expansion de l’Empire britannique, un programme impliquant la construction de nouvelles lignes de chemin de fer afin d’ouvrir l’Amérique du Nord britannique à l’installation de citoyens britanniques faisant partie des couches les plus pauvres de la population.
En 1855, il embrasse la cause du recrutement pour l’armée britannique et la Royal Navy, puis se mêle de la guerre de Crimée. Cette mission le conduit aux États‑Unis, à la recherche de volontaires, et le pousse plus profondément encore dans un conflit avec la population de la Nouvelle‑Écosse d’origine irlandaise qui s’oppose à la guerre. Ces initiatives de Joseph Howe provoquent au bout de compte une rupture avec les électeurs catholiques, conduisant au renversement du gouvernement réformiste en 1857.
Premier ministre de la Nouvelle‑Écosse
Joseph Howe occupe les fonctions de premier ministre de la Nouvelle‑Écosse de 1861 à 1863, une période durant laquelle son administration sera en permanence entravée par une majorité précaire et par les attaques constantes de son rival et futur premier ministre conservateur, sir Charles Tupper. Joseph Howe avait accepté le rôle de chef du Parti libéral lorsque le premier ministre élu William Young avait été nommé juge. En 1863, il donne une suite favorable à une invitation à devenir commissaire impérial des pêches, un rôle qu’il conservera jusqu’en 1866. Cette même année 1863, il dispute les élections qui voient le Parti libéral être sévèrement battu, mettant ainsi fin à son rôle de premier ministre.
Opposition à la Confédération
De 1866 à 1869, Joseph Howe prend la tête des forces qui s’opposent à la Confédération en Nouvelle‑Écosse et devient une voix de tout premier plan de ce mouvement. Il se dresse contre la Confédération en partie parce qu’il estime que le processus qui prévaut à sa mise en place n’implique pas la population dans son ensemble, mais également parce que cette solution entre en conflit avec sa vision idéale de l’avenir de l’Empire britannique, à savoir des populations coloniales jouissant, sur un pied d’égalité, de droits identiques à ceux des populations vivant en Grande‑Bretagne. Il craint, en outre, que la Confédération ne conduise à la ruine économique de la Nouvelle‑Écosse et à la perte de son indépendance; ces deux prévisions semblent s’être réalisées dans les années qui suivent immédiatement 1867.
Joseph Howe dirige une délégation en Angleterre, en 1866 et en 1867, d’opposition à la Confédération. En dépit de sa participation au premier parlement du Dominion, il séjourne en Angleterre, de février à juillet 1868, à la tête d’une délégation prônant l’abrogation de la Confédération. Joseph Howe n’obtient finalement qu’une seule concession – un examen des politiques en matière de pêche, de commerce et de fiscalité et de leurs effets sur la Nouvelle‑Écosse –, le désintérêt britannique pour les affaires nord‑américaines le laissant profondément déçu par ce même Empire qu’il tenait autrefois en si haute estime.
Politique après la Confédération et décès
Joseph Howe abandonne ses efforts pour abroger la Confédération et se consacre de nouveau au gouvernement du dominion nouvellement créé. Au début de 1869, lui et un autre député concluent une entente avec le ministre fédéral des Finances pour assurer une meilleure situation économique à la province. Fin janvier, il intègre le Cabinet à titre de président du Conseil privé. Cet hiver‑là, il reprend le combat politique et remporte une élection partielle qui le laisse toutefois dans un mauvais état de santé chronique. En novembre 1869, il devient secrétaire d’État aux provinces et participe à l’intégration du Manitoba dans la Confédération (voir Le Manitoba et la Confédération). En décembre, il est également nommé surintendant général des Affaires indiennes. En mai 1873, il devient lieutenant‑gouverneur de la Nouvelle‑Écosse, mais décède trois semaines après son entrée en fonction.