L’Iran,
appelé jadis la Perse, est le berceau de l’une des plus anciennes civilisations
du monde. Les Iraniens constituent une communauté relativement nouvelle au
Canada et en pleine croissance. Leur immigration au Canada s’amorce dans les
années 1980, dans la foulée de la révolution iranienne de 1979. En 2016,
on dénombre 170 755 personnes d’origine iranienne au pays et 39 650 autres
personnes ayant des origines multiples, dont des origines iraniennes (pour un
total de 210 405 Canadiens). De 2011 à 2016, le Canada a accueilli 42 070
immigrants iraniens. L’Iran est d’ailleurs l’un des dix principaux pays de
naissance des immigrants récents au Canada, se classant en quatrième place
après les Philippines, l’Inde et la Chine.
Aperçu
L’Iran, appelé jadis la Perse, est le berceau de l’une des plus anciennes civilisations du monde. Les Iraniens, ou Perses, qui étaient de confession zoroastrienne, se convertissent à l’Islam après la conquête arabo-musulmane au 7e siècle. Pays de l’Asie du Sud-Ouest dont la population dépasse 75 millions d’habitants, l’Iran abrite plusieurs groupes ethniques et nationaux, dont les Fars (la majorité), les Azéris, les Kurdes, les Arabes, les Arméniens, les Assyriens, les Lurs, les Turkmènes et les Baloutches. La langue officielle est le farsi, ou persan.
Les Iraniens sont majoritairement des musulmans chi’ites, mais il y a chez eux différentes religions minoritaires, dont des musulmans sunnites, des chrétiens de diverses confessions (voir Christianisme) et particulièrement des Arméniens, des Juifs, des zoroastriens et des baha’is (voir Baha’isme). L’intolérance religieuse en Iran fait diminuer le nombre de citoyens ayant une affiliation religieuse. Par exemple, les données statistiques du gouvernement font état de 12 700 Juifs en Iran en 1996, mais ce chiffre passe à 8 756 en 2011. Comme les zoroastriens continuent à émigrer de l’Iran, leur nombre passe de 27 900 à 25 200 au cours de la même période. On ne trouve aucune donnée statistique sur les Iraniens baha’is puisque le gouvernement iranien ne reconnaît pas cette religion. Comme d’autres nations, l’Iran regroupe un nombre considérable de citoyens laïques.
Histoire migratoire et peuplement
Les Iraniens constituent une communauté relativement nouvelle au Canada. À l’époque de la Deuxième Guerre mondiale, on ne dénombre au pays qu’une douzaine d’Iraniens. L’immigration demeure très basse dans les années 1950 et 1960. Après la révolution iranienne de 1979, qui renverse la monarchie en portant au pouvoir un gouvernement islamique, les chiffres de l’immigration augmentent sérieusement. Au cours des années 1980 et durant la majeure partie des années 1990, plusieurs milliers d’Iraniens arrivent au Canada chaque année, et cette tendance se maintient jusqu’à maintenant.
Avant les années 1970, c’est surtout pour étudier, pour profiter de l’économie ou pour investir que les Iraniens immigrent au Canada. Mais la plupart de ceux qui arrivent plus tard, surtout dans les années 1980, fuient les persécutions politiques et religieuses, la répression socioculturelle imposée par la République islamique d’Iran, ou encore la guerre Iran-Irak. Au début du 21e siècle, en plus des Iraniens qui fuient les persécutions politiques, culturelles et religieuses du régime, un nombre croissant de personnes affiliées au gouvernement iranien arrivent au Canada.
En grande majorité, les immigrants iraniens viennent de zones urbaines, en particulier de grandes villes ou de villes de moyenne importance. Au Canada, ils continuent à vivre dans les principaux centres urbains. Selon le recensement canadien de 2016, il y aurait 170 755 Iraniens au Canada (pour un total de 210 405 Canadiens ayant déclaré des origines iraniennes et d’autres origines ethniques). Plus de 90 % des personnes d’origine iranienne vivent en Ontario, au Québec et en Colombie-Britannique, principalement dans le Grand Toronto, le Grand Vancouver et la Région métropolitaine de Montréal.
Vie économique
Parce qu’ils ont un niveau d’instruction assez élevé, les Iraniens prennent part à un grand nombre d’activités économiques, allant des petites entreprises autogérées aux moyennes et grandes entreprises. Bien que les échanges commerciaux entre le Canada et l’Iran soient relativement limités, des entreprises œuvrent dans l’import-export d’articles comme les tapis persans, qui sont devenus populaires au Canada. Un nombre croissant d’investisseurs iraniens choisissent le marché immobilier canadien et plusieurs d’entre eux sont des promoteurs de premier plan dans les régions de Toronto et Vancouver. Les Ghermezian, une famille juive iranienne arrivée au Canada dans les années 1960 a bâti un empire immobilier et développé certains des plus grands centres commerciaux au monde, dont le West Edmonton Mall en Alberta.
Les tensions politiques résultant de l’assassinat de Zahra Kazemi, une photojournaliste canadienne tuée dans une prison iranienne en 2003, et les sanctions imposées à l’Iran par l’Organisation des Nations unies pour son programme nucléaire compromettent ses relations économiques et commerciales avec le Canada. En 2007, les deux pays ont réduit le niveau de leur représentation à celui de chargé d’affaires. Des sanctions supplémentaires sont imposées à l’Iran en 2010, prolongeant un embargo sur son commerce d’armes et des sanctions économiques pour freiner la prolifération de ses activités délicates. En septembre 2012, le Canada a suspendu l’ensemble de ses relations diplomatiques avec l’Iran en fermant les portes de son ambassade à Téhéran et par l’expulsion de tous les diplomates iraniens en poste à Ottawa (voir Représentation diplomatique et consulaire). De nouvelles sanctions ont été imposées en mai 2013 dont l’interdiction d’importer des marchandises en provenance d’Iran et d’en exporter vers ce pays. Ces événements ont bien entendu un impact négatif sur les entreprises détenues par des Irano-canadiens qui commercent avec l’Iran. Bien que la plupart de ces derniers s’opposent au régime islamique de l’Iran, une vaste majorité d’entre eux sont contre ces sanctions, car elles affectent les conditions de vie du peuple iranien.
En février 2016, le gouvernement de Justin Trudeau a annoncé la levée d’une partie des sanctions économiques à l’égard de l’Iran afin de permettre aux entreprises canadiennes d’y faire des affaires. Toutefois, les restrictions sur l’exportation de marchandises, de services et de technologies considérés comme critiques sont maintenues.
Vie communautaire et culturelle
En tant que groupe d’immigrants relativement nouveaux aux héritages variés en ce qui a trait à la classe sociale, l’ethnie, la religion ainsi que l’orientation politique et idéologique, la communauté iranienne manque de cohésion. Bien que les Iraniens aient en commun la fierté de leur culture et de leur histoire, ils ne forment pas un groupe homogène, mais plutôt un mélange vibrant de sous-communautés partageant une langue commune.
La passion des Iraniens pour la poésie et la littérature donne lieu à des rencontres régulières dans différentes villes où des poètes et des écrivains iraniens, visiteurs autant que résidants, récitent leurs textes. De plus, certains clubs de lecture invitent périodiquement des auteurs iraniens canadiens et étrangers. La communauté iranienne apprécie les mêmes activités que bien d’autres groupes ethniques au Canada, entre autres les concerts, les pièces de théâtre, les projections de films, les sports, les expositions d’œuvres d’art et le bénévolat dans des organismes. Il existe plusieurs journaux hebdomadaires de langue farsie (persane), dont le Shahrvand, qui est le plus important hebdomadaire farsi en Amérique du Nord et qui a des bureaux et des partenaires dans plusieurs villes. À mesure que grossit la communauté iranienne et que d’autres Canadiens se découvrent un goût pour la cuisine persane, des cafés et des restaurants persans, ainsi que les populaires « chelo-kebabis », font leur apparition dans les grandes villes.
En plus des institutions familiales, les musulmans iraniens pratiquants fréquentent les mosquées et les institutions islamiques établies par la grande communauté musulmane du Canada ainsi que plusieurs mosquées chi’ites construites spécifiquement à l’intention de cette communauté. Quelques-unes sont indépendantes et d’autres entretiennent des liens avec le gouvernement iranien. Comparativement aux autres communautés venant de pays à majorité musulmane, la communauté iranienne est généralement plus laïque. Ainsi, une étude récente réalisée par des chercheurs de l’Université York démontre que, comparativement aux Pakistanais, aux Afghans et aux Palestiniens, plus de 80 % des Irano-Canadiens affirment qu’ils ne sont pas pratiquants et qu’ils « tendent vers la laïcité ».
Vie politique
La participation des Iraniens au processus électoral, autrefois limitée, est en hausse, et de plus en plus d’Iraniens y participent dans tous les ordres de gouvernement. Aux élections provinciales de 1997, en Ontario, deux candidats iraniens figurent parmi les candidats du Nouveau Parti Démocratique (NPD), et plusieurs autres se présentent au conseil scolaire. En 2018, deux Iraniens siègent à des assemblées législatives provinciales : le Dr Reza Moridi comme député libéral (circonscription de Richmond Hill) en Ontario et le Dr Amir Khadir comme député de Québec solidaire (circonscription de Mercier) à l’Assemblée nationale du Québec. En 2013, le Dr Moridi a fait son entrée dans le conseil ministériel de l’Ontario à titre de ministre de la Recherche et de l’Innovation. Chambre des communes, Ali Ehsassi (circonscription de Willowdale) et Majid Jowhari (circonscription de Richmond Hill) pour le Parti libéral du Canada.
Mis à part la politique canadienne, beaucoup d’Iraniens, dont plusieurs ont demandé l’asile au Canada en tant que réfugiés politiques, s’intéressent à la politique iranienne. Outre les groupes d’opposition politique, il existe une multitude d’organismes humanitaires qui défendent la cause des femmes, des prisonniers et des réfugiés politiques. Depuis les élections présidentielles de 2009, l’activisme politique mené contre le gouvernement iranien est un élément rassembleur de plus en plus fort auprès de la diaspora iranienne. De plus, certains Iraniens sont accusés d’entretenir des liens avec la République islamique et des organisations-écrans au service du gouvernement iranien sont dévoilées dans les médias canadiens.
Vol PS752 d’Ukraine International Airlines
Le 8 janvier 2020, un missile sol-air iranien s’abat sur l’avion effectuant le vol 752 d’Ukraine International Airlines pendant qu’il survole Téhéran. Toutes les personnes à bord de l’appareil sont décédées. Des 176 victimes, on compte 57 Canadiens et 29 résidents permanents du Canada. Nombre d’entre eux étaient étudiants ou membres du corps professoral à l’université qui revenaient au Canada après avoir rendu visite à leurs proches en Iran pendant le mois de décembre.
La tragédie retentit sur tout le pays. Les victimes avaient des relations dans de nombreuses provinces canadiennes, dont la Nouvelle-Écosse, le Québec, l’Ontario, le Manitoba, l’Alberta et la Colombie-Britannique. Le désastre touche Edmonton en particulier. Environ 27 habitants de la ville se trouvaient à bord de l’avion, et au moins 10 de ce chiffre étaient étudiants ou membres du corps professoral de l’Université de l’Alberta.
Le gouvernement canadien réclame une enquête approfondie et transparente sur les faits de la tragédie. L’Iran reconnaît sa responsabilité dans la tragédie, mais déclare qu’il s’agit d’une « erreur humaine non intentionnelle ». Le 14 janvier, une équipe internationale comptant des enquêteurs canadiens effectue sa première visite du site de l’écrasement.
Cohésion du groupe
Même si les liens familiaux sont très forts dans les foyers iraniens, les réalités de l’immigration et de l’exil mettent les familles à l’épreuve. Comme celles des autres communautés, les familles iraniennes vivent des conflits, à la fois au sein du couple et entre parents et enfants. Ayant obtenu l’indépendance économique et l’accès à des institutions sociales qui les appuient, beaucoup d’Iraniennes remettent en question l’autorité patriarcale, réclamant de plus en plus de changements dans les relations familiales traditionnelles. Ces nouvelles réalités peuvent conduire au resserrement des liens familiaux dans certains cas, et au divorce dans d’autres. Une tension se fait également sentir entre la première et la seconde génération d’Iraniens, qui sont éduqués dans un système de valeurs différent.
Il existe un grand nombre d’organismes d’aide à la communauté iranienne et les associations iraniennes des grandes villes canadiennes procurent des services aux nouveaux immigrants, organisent des cours et gèrent des bibliothèques persanes. On compte aussi plusieurs organismes d’aide à la famille ainsi que des associations de femmes qui traitent de la famille et des questions qui concernent les femmes. Afin de conserver l’héritage linguistique persan, les principaux centres urbains du Canada ont des écoles persanes où des cours de langues sont offerts. En 2016, selon les données du recensement, 225 155 personnes ont le farsi comme langue maternelle au Canada. Le farsi est d’ailleurs la onzième langue immigrante en importance au pays (voir Langues en usage au Canada).