James Williamson Galloway (« Jock ») Macdonald, artiste (né le 31 mai 1897 à Thurso, en Écosse ; décédé le 3 décembre 1960 à Toronto, en Ontario). Jock Macdonald a joué un rôle déterminant dans la création du Calgary Group en 1947, il a également été l’un des membres fondateurs du Groupe des Peintres canadiens et du Groupe des Onze, un influent collectif de l’Ontario, et il a été actif dans la plupart des sociétés d’art canadiennes. On se souvient surtout de lui pour ses aquarelles fluides et abstraites, et les peintures souvent majestueuses de ses dernières années.
Débuts
Après avoir terminé ses études secondaires, Jock Macdonald suit les traces de son père architecte en faisant un apprentissage de dessinateur à Édimbourg, en Écosse. Lorsque la Première Guerre mondiale éclate, il s’engage et devient artilleur dans le 14e régiment des Highlanders d’Argyll et de Sutherland. Il est blessé en France et passe un an de convalescence à l’hôpital. En 1919, il s’inscrit au Edinburgh College of Art, et fait une spécialisation en design. Il obtient son diplôme en design et un certificat spécialisé en enseignement de l’art en 1922. Après avoir obtenu son diplôme, il commence à travailler comme concepteur au siège social de Morton Sundour Fabrics à Carlisle, en Angleterre. Il y crée des conceptions pour chaque type de tissu, incluant les textiles, les tapisseries et les tapis. En 1925, Jock Macdonald quitte Morton Sundour Fabrics pour devenir directeur du design à la Lincoln School of Art, à Lincoln en Angleterre. Un an plus tard, en 1926, il accepte un poste à la Vancouver School of Decorative and Applied Arts (aujourd’hui Emily Carr University of Art and Design) et il déménage à Vancouver en Colombie-Britannique, où il demeure pour la majeure partie du reste de sa vie.
Artiste de la côte ouest
La création de la Vancouver School of Decorative and Applied Arts joue un rôle central dans l’évolution d’une scène et d’une sensibilité artistiques distinctes à Vancouver. Deux collègues de Jock Macdonald, le portraitiste et paysagiste Frederick Varley, membre du Groupe des sept, et le photographe innovateur John Vanderpant, ont une profonde influence sur la direction de son art.
Il partage un studio avec Frederick Varley, et avec ce dernier comme mentor, Jock Macdonald décide qu’il a besoin d’adopter des techniques plus audacieuses que l’aquarelle et la tempera qu’il a utilisées jusqu’alors. Les premières peintures de paysages de Jock Macdonald ont la sensualité immédiate et la lumière souvent hallucinatoire des meilleures peintures du Groupe des sept. Sa toile The Black Tusk, Garibaldi Park, B.C (1934), créée lors d’une expédition organisée par Frederick Varley, dépeint le sommet d’une montagne noire et escarpée en contre-plongée, et des nuages qui s’agitent dans le ciel en arrière plan. Par ailleurs, sa peinture In the White Forest (1932) présente un point de vue à travers des troncs d’arbres sur une pente enneigée. Baignées dans une chaude lumière, les congères ondulantes ont un aspect étrange et presque abstrait, évoquant le sens de la spiritualité d’un monde naturel.
En 1933, au milieu de la crise des années 1930, la Vancouver School of Decorative and Applied Arts réduit considérablement les salaires des professeurs. Jock Macdonald et Frederick Varley démissionnent de leurs fonctions et fondent immédiatement le British Columbia College of Arts. Basé en partie sur la vision de monde spiritualiste du philosophe autrichien et théoricien de l’éducation Rudolf Steiner, le British Columbia College of Arts est à la fois multidisciplinaire et centré sur les dernières tendances de l’art moderne. C’est durant cette période d’expérimentation que le travail de Jock Macdonald commence à évoluer vers l’art abstrait. Formative Colour Activity (1934), par exemple, est composée d’un centre de jaillissement brillant de formes colorées ancrées à une tige à deux épines acérées, les fleurs se déployant en couches de plus en plus abstraites pour devenir des formes organiques difficilement identifiables. Tout comme certains aspects des œuvres d’Emily Carr et de sa contemporaine américaine Georgia O’Keeffe, Jock Macdonald tente dans cette peinture d’explorer la dynamique profonde et sous-jacente du monde naturel.
En 1935, en raison d’un manque de fonds, le British Columbia College of Arts se voit dans l’obligation de fermer ses portes, laissant Frederick Varley et Jock Macdonald à la recherche de ce qu’ils peuvent ensuite faire.
Intermède sur l’île Nootka et immersion totale dans l’art abstrait
En juin 1935, après l’échec du British Columbia College of Arts, Jock Macdonald et sa famille déménagent sur l’île Nootka, au large de la côte ouest de l’île de Vancouver, là où les peuples autochtones de la Colombie-Britannique ont rencontré les Européens pour la première fois. L’intention de Jock Macdonald est d’explorer la spiritualité dans la nature et de créer une colonie d’artistes. Il ne reste sur l’île que 18 mois, dont 7 mois en compagnie de Frederick Varley, néanmoins durant cette période, sa vision de son art va de l’avant, et il exécute certaines de ses œuvres les plus importantes. Par exemple, dans Departing Day (1936), on peut voir une lune auréolée d’un jaune brillant sur un fond de ciel bleu éclaboussé d’étoiles, et en dessous se trouve une planète noire traversée d’une branche d’arbre rouge ; en arrière-plan, un soleil se couche dans un brouillard de lumière. Alors que sa toile Formative Colour Activity se préoccupe du monde organique vivant et de ses formes, sa toile Departing Day aborde, quant à elle, des processus et des cycles cosmiques plus vastes. Ces deux peintures concernent davantage le monde intérieur que celui de l’extérieur ; les formes et les dynamiques du monde vivant et du monde cosmique reflètent notre nature spirituelle intérieure.
De retour à Vancouver, Jock Macdonald enseigne à temps partiel à l’Institut de l’art canadien, et à temps plein (après avoir rempli les critères d’un certificat d’enseignement) pour la Commission scolaire de Vancouver, au Templeton Junior High, puis au Vancouver Technical Secondary School. Son investissement dans l’art abstrait s’approfondit. Il montre ses œuvres à son vieil ami et collègue, le photographe John Vanderpant, qui a lui-même exploré la forme abstraite en photographie, ainsi qu’à Emily Carr. Les peintures de Jock Macdonald ont de nombreuses affinités avec les plus récents paysages d’Emily Carr, et il en est un grand admirateur. Il fait même l’acquisition de sa superbe et presque abstraite peinture Young Pines in Light (1935) pour sa collection personnelle. Lorsque Lawren Harris déménage à Vancouver en 1940, Jock Macdonald trouve en lui un compagnon pour parler régulièrement d’art et de spiritualité, et pour aller faire des excursions pour dessiner. Cette même année, il donne une conférence, Art in Relation to Nature, à la Vancouver Art Gallery, lors de laquelle il décrit sa vision et sa philosophie de l’art.
Toujours dans les années 1940, Jock Macdonald se lie d’amitié avec l’artiste et psychiatre Grace Pailthorpe et son partenaire, l’artiste et poète Reuben Mednikoff. Avec eux, il découvre le concept surréaliste du dessin, de la peinture et de l’écriture automatiques. L’idée de l’automatisme est initialement adoptée par l’écrivain français André Breton, fondateur du surréalisme, et elle influence ensuite les automatistes de Montréal autour de la même époque. Le principe de l’automatisme repose sur l’idée qu’en dessinant, en peignant ou en écrivant spontanément et sans intention consciente, on arrive à exprimer de façon immédiate les processus profonds de l’inconscient. C’est dans cette optique que Jock Macdonald produit une série d’aquarelles, exposée en 1946 à la Vancouver Art Gallery. Sa toile Russian Fantasy (1946), par exemple, consiste en un réseau de formes et de gribouillis emboîtés les uns dans les autres, certains rappelant des oiseaux, d’autres des microbes grossis au microscope. Fish Playground (1946) est composé de formes plus audacieuses, plus fluides et plus épanouies qui montent du bas de la toile, comme si elles montaient du fond de la mer, et des silhouettes de poisson rudimentaires flottent au-dessus et en dessous.
Dernières œuvres
En 1946, Jock Macdonald est nommé à la tête du Provincial Institute of Technology and Art, à Calgary, en Alberta. Après avoir passé un an seulement à Calgary, où il modernise le programme archaïque de l’institut vers une direction plus expérimentale, et lors duquel il fonde le Calgary Group (un collectif d’artistes progressistes), il se voit offrir un poste d’enseignant au Ontario College of Art and Design (aujourd’hui l’Université de l’École d’art et de design de l’Ontario) à Toronto.
À Toronto, Jock Macdonald continue d’explorer le processus de l’automatisme qu’il a commencé à utiliser à Vancouver et à Calgary, mais maintenant avec la peinture à l’huile plutôt que l’aquarelle. Il crée des œuvres comme Ocean Legend (1947) qui sont plus denses, plus compactes que ses aquarelles fluides antérieures.
En 1948, il se rend, avec Alexandra Luke, une future membre du Groupe des onze, et d’autres artistes, à Provincetown au Massachusetts, pour travailler avec le légendaire peintre et professeur allemand Hans Hofmann. Ce dernier souligne que l’automatisme de Jock Macdonald est limité par le fait qu’il est basé sur les lignes et il lui suggère plutôt de baser ses compositions sur la couleur. Dans ses œuvres qui s’ensuivent, Jock Macdonald commence à utiliser des techniques de gouttes et de taches, éliminant essentiellement le rôle manifeste de la représentation dans ses œuvres. L’aquarelle Scent of a Summer Garden (1952), par exemple, est composée de formes fines, flottantes et superposées de jaune, de violet et de noir, le tout créant une œuvre somptueuse et atmosphérique.
En 1953, Jock Macdonald participe à des discussions avec d’autres artistes d’art abstrait de Toronto comme Harold Town, Jack Bush et William Ronald, à propos de la possibilité de fonder un collectif d’artistes se concentrant sur la peinture abstraite. Il en résulte la création du Groupe des onze. En 1954, il reçoit une bourse de la Société royale du Canada pour l’année académique 1954-1955, afin de travailler en France, où il fait la rencontre du grand artiste Jean Dubuffet. En 1957, de retour à Toronto, Jock Macdonald et les autres membres du Groupe des onze invitent l’influent critique d’art new-yorkais, Clement Greenberg, à venir visiter Toronto et faire une critique de leurs œuvres. Apparemment, le critique est particulièrement touché par les œuvres les plus récentes de Jock Macdonald.
Les dernières années de Jock Macdonald en tant que peintre sont largement perçues comme ses années les plus accomplies. Rust of Antiquity (1958) est constituée de bandes blanches tachetées de bleu qui s’élèvent sur un fond brun de terre ; en haut de la toile, les bandes deviennent d’un bleu poudré sur un fond de bleu ciel nocturne plus profond et plus dur. Growing Serenity (1960), quant à elle, se veut plus introspective et lyrique, des formes d’un blanc doux, jaune et bleu pâle ondulent les unes sur les autres, comme dans un paysage.
Au printemps de 1960, en reconnaissance de sa réussite, le Musée des beaux-arts de l’Ontario organise une rétrospective des œuvres de Jock Macdonald. Il s’agit de la première exposition du genre dédiée à un artiste n’appartenant pas au Groupe des sept.