Louis XIV, roi de France (né le 5 septembre 1638 à Saint-Germain-en-Laye, en France; décédé le 1er septembre 1715 à Versailles, en France). Son règne, d’une durée de 72 ans (de 1643 à 1715), est le plus long de l’histoire de l’Europe et du Canada, soit près de deux ans de plus que le règne de la Reine Elizabeth II qui a duré 70 ans. En 1663, Louis XIV a pris le contrôle direct de la Nouvelle-France en en faisant une colonie de la Couronne, en parrainant un programme d’immigration (voir Filles du Roi), en réglementant la traite des fourrures et en renforçant la présence militaire française dans la région (voir Régiment de Carignan-Salières). Malgré cela, les efforts militaires et diplomatiques de Louis XIV, notamment les guerres répétées avec les Haudenosaunee (Iroquois), ainsi que la Guerre de la Succession d’Espagne et le Traité d’Utrecht, ont modifié l’équilibre des pouvoirs en Amérique du Nord. Cela a créé les conditions nécessaires à la conquête de la Nouvelle-France par les Britanniques, avec le soutien des Iroquois, au cours de la guerre de Sept Ans de 1756‑1763.
Accession au trône
Le futur roi Louis XIV naît à la résidence royale de Saint-Germain-en-Laye (aujourd’hui le Musée d’Archéologie nationale), aux portes de Paris; il est l’aîné des deux fils de Louis XIII, roi de France, et d’Anne d’Autriche. Anne est la fille de Philippe III, roi d’Espagne, et de Marguerite d’Autriche, tous deux membres de la puissante dynastie autrichienne des Habsbourg. Le petit prince est baptisé Louis-Dieudonné en raison de sa naissance attendue pendant plus de 20 ans qui est considérée comme un don du ciel. Pendant les premières années de sa vie, Louis est le Dauphin, c’est-à-dire l’héritier du trône de France. En 1643, Louis XIII meurt de la tuberculose et son fils de quatre ans et demi, le Dauphin Louis, succède au trône sous le nom de Louis XIV, avec sa mère comme régente.
Le début du règne de Louis XIV est caractérisé par un désordre politique connu sous le nom de Fronde. Il s’agit d’une série de soulèvements et de guerres civiles, d’abord menés par des fonctionnaires locaux puis par la noblesse, qui remettent en cause la centralisation croissante de l’État français et le pouvoir des intendants (agents du monarque) d’annuler les décisions juridiques rendues par les parlements locaux (tribunaux). Le jeune roi est contraint de fuir Paris à deux reprises alors qu’il est enfant, ce qui a peut-être façonné sa détermination ultérieure à déplacer sa cour à Versailles et à régner en monarque absolu. Louis XIV atteint l’âge de régner de plein droit sans régent le 7 septembre 1651, bien qu’il continue d’être conseillé par sa mère et son propre conseiller, le cardinal Jules Mazarin, au cours des années 1650. Le couronnement de Louis XIV a lieu à la cathédrale de Reims le 7 juin 1654.
Mariage et enfants
Le 9 juin 1660, Louis XIV épouse sa double cousine germaine Marie-Thérèse d’Espagne (également connue sous le nom de Marie-Thérèse d’Autriche). Marie-Thérèse est la fille de l’oncle maternel de Louis XIV, le roi Philippe IV d’Espagne, et de sa tante paternelle Elisabeth de France. Louis XIV et Marie-Thérèse ont six enfants, dont un seul, Louis (dit le Grand Dauphin), survit jusqu’à l’âge adulte. Louis XIV a également plus d’une douzaine d’enfants hors mariage. Il légitime plus tard deux de ses enfants avec Louise de La Vallière et six de ses enfants avec Françoise Athénaïs de Rochechouart de Mortemart, marquise de Montespan. Après la mort de Marie-Thérèse en 1683, il épouse secrètement la gouvernante de ses enfants, Françoise d’Aubigné, marquise de Maintenon.
Absolutisme et Empire
Louis XIV, monarque absolu, déclare « L’État, c’est moi » en réponse à une contestation de son autorité par les parlements. Au cours des célébrations qui suivent la naissance de son héritier, Louis XIV prend pour emblème le soleil, ce qui lui vaut l’appellation de « Roi-Soleil ». En 1661, il destitue et fait arrêter son superintendant des finances, Nicolas Fouquet, et prend lui-même en charge la gestion de la trésorerie, nommant des intendants pour percevoir des revenus et mettre ses politiques en œuvre dans toute la France. Les efforts de centralisation du roi se butent toutefois à de solides cultures et langues locales dans les régions telles que la Provence et la Bretagne, ainsi qu’à la difficulté à faire appliquer ses édits dans les régions rurales reculées de France.
Louis XIV se préoccupe également de l’empire français d’outre-mer et tente d’amener de nouveaux territoires sous le contrôle direct de la couronne plutôt que de compagnies privées de marchands et de négociants français. En 1682, René-Robert Cavelier de La Salle, remonte le Mississippi et en revendique le bassin pour la France, nommant cette région Louisiane en l’honneur du roi.
Versailles
En 1682, Louis XIV déplace sa cour et son gouvernement au château de Versailles, à quelque 22 km au sud-ouest de Paris. Versailles abrite un pavillon de chasse sous le règne de Louis XIII. Inspiré par le château de Vaux-le-Vicomte de l’ancien ministre des Finances Fouquet, Louis XIV reconstruit Versailles pour en faire un spectaculaire palais baroque doté d’un vaste réseau de jardins ornementaux et de fontaines. Ce château demeure l’une des attractions touristiques les plus populaires au monde et devient un site du patrimoine mondial de l’UNESCO en 1979.
Versailles devient un centre politique et culturel et influence l’architecture d’autres palais à travers l’Europe, notamment le palais de Peterhof à Saint‑Pétersbourg et le château de Schönbrunn à Vienne. Versailles permet à Louis XIV de concentrer le pouvoir à sa cour, la noblesse française se rendant à Versailles pour servir le monarque plutôt que de conserver ses propres centres de pouvoir dans ses domaines ruraux. Versailles est également le théâtre de réceptions d’ambassadeurs étrangers, projetant l’image de l’autorité royale française au monde entier. Parmi les ambassadeurs qui visitent Versailles figure une délégation du peuple huron-wendat, dont Kondiaronk fait peut-être partie.
La défense de la Nouvelle‑France
Louis XIV craint que la population de la Nouvelle-France ne croisse pas au même rythme que les colonies britanniques en plein essor sur le littoral est, les États-Unis actuels. En 1661, Pierre Boucher, ancien gouverneur de Trois-Rivières, se rend en France pour demander au roi un plus grand soutien militaire français pour défendre la Nouvelle-France contre les Iroquois (Haudenosaunee). La population européenne de la Nouvelle‑France est assiégée, beaucoup sont tués dans des raids iroquois entre 1645 et 1665, et l’avenir de la colonie est incertain.
En 1663, Louis XIV dissout la Compagnie des Cent-Associés et fait de la Nouvelle‑France une colonie de la couronne, nommant un gouverneur (Daniel de Rémy de Courcelle) intendant (Jean Talon) et un commandant militaire (Alexandre de Prouville, marquis de Tracy). Ils relèvent directement du roi, organisent la défense de la colonie, réorganisent l’administration locale, réglementent la traite des fourrures et favorisent le développement de l’agriculture et de l’industrie.
En 1665, le roi envoie quatre compagnies du Régiment de Carignan-Salières pour défendre la Nouvelle‑France contre les Iroquois. Elles sont composées de 1 200 soldats ayant participé aux campagnes françaises contre l’Empire ottoman. On offre des seigneuries aux officiers militaires et on ordonne aux soldats de rester en Nouvelle-France. Louis XIV décrète : « Le roi désire que les soldats du régiment de Carignan demeurent dans le pays, offrant à chacun d’eux les moyens de s’établir et même de l’aider à se procurer quelques terres défrichées. ».
L’arrivée des troupes est bien accueillie en Nouvelle-France. Marie de l’Incarnation, fondatrice de l’ordre religieux des Ursulines au Canada, écrit à son fils Claude, un moine bénédictin : « Tous les vaisseaux sont arrivés et nous ont amené le reste de l’armée avec les personnes les plus distinguées que le roi a envoyées pour sauver le pays. ».
Les Français collaborent étroitement avec leurs alliés, les Hurons-Wendats, contre les Iroquois. La distribution de médailles à l’effigie de Louis XIV aux chefs hurons-wendats souligne l’importance des relations personnelles entre le monarque français et ses alliés autochtones pour le développement de la Nouvelle-France. Le conflit avec les Iroquois se poursuit jusqu’à la Grande Paix de Montréal, 1701.
Les Filles du Roi
En 1666, la population européenne de la Nouvelle-France se compose aux deux tiers d’hommes, principalement des soldats, des commerçants de fourrures et des membres du clergé. L’émigration de la France est faible. Le principal groupe désireux de s’établir à l’étranger, les Huguenots, sont des protestants français expulsés à la suite de la révocation de l’Édit de Nantes par Louis XIV en 1685. Il leur est toutefois interdit de s’établir en Nouvelle‑France, et sont plutôt relocalisés aux Pays-Bas, en Grande-Bretagne, en Prusse et dans les Treize colonies. Pour augmenter la population de la Nouvelle‑France, Louis XIV accorde des dots à plus de 770 jeunes femmes qui émigrent de France entre 1663 et 1673 et qui épousent des colons en Nouvelle‑France. Ces jeunes femmes sont connues sous le nom de Filles du roi, car la tradition veut qu’un père fournisse une dot pour le mariage de sa fille. En 1670, l’intendant Jean Talon rapporte au roi que cet effort est couronné de succès : « Les filles envoyées l’année dernière sont mariées et presque toutes sont enceintes ou ont eu des enfants. ».
La Guerre de la Succession d’Espagne
Louis XIV passe une grande partie de son règne en guerre contre d’autres puissances européennes, un enjeu aux conséquences durables sur son empire d’outre-mer, y compris la Nouvelle-France. En 1700, le dernier monarque des Habsbourg d’Espagne, le roi Charles II, meurt sans enfant. Sa mère et son épouse ayant été toutes deux des princesses des Habsbourg d’Espagne, Louis XIV désigne son petit-fils, le duc d’Anjou, comme successeur de Charles II qui devient Philippe V d’Espagne. Bien que ce dernier soit le deuxième des trois fils de Louis (le Grand Dauphin) et qu’il ne soit donc pas censé succéder au trône de France, le gouvernement anglais s’oppose à ce que la France et l’Espagne soient gouvernées par des membres de la maison française de Bourbon. L’Angleterre appuie plutôt un candidat des Habsbourg d’Autriche, l’archiduc Charles (le futur empereur du Saint Empire romain, Charles VI). Ce conflit débouche sur la guerre de la Succession d’Espagne, qui dure de 1701 à 1713, jusqu’à la signature du Traité d’Utrecht.
En Amérique du Nord, le conflit est connu sous le nom de deuxième guerre contre les Français et les Indiens, ou « guerre de la reine Anne », du nom de la principale adversaire de Louis XIV, la reine Anne, monarque britannique. Les Britanniques s’emparent de Port-Royal, aujourd’hui la Nouvelle-Écosse, à l’issue d’un siège en 1710 et rebaptisent la colonie Annapolis Royal en l’honneur de la reine Anne.
Le Traité d’Utrecht, qui met fin à la guerre de la Succession d’Espagne, reconnaît le petit-fils de Louis XIV, Philippe, duc d’Anjou, comme roi Philippe V d’Espagne, à condition qu’il renonce à sa place dans l’ordre de succession au Trône de France. Mais le traité cède également à la Grande-Bretagne un important territoire dans les empires français et espagnol, ce qui façonnera le cours de l’histoire du Canada. La France perd ses colonies à Terre-Neuve et en Acadie au profit de la Grande-Bretagne, mais conserve l’île du Cap-Breton, qui deviendra le site de la forteresse de Louisbourg.
Décès
Louis XIV survit à son fils Louis (le Grand Dauphin), décédé de la variole en 1711, ainsi qu’à ses petits-fils Louis, duc de Bourgogne, mort en 1712, et Charles, duc de Berry, mort dans un accident de chasse en 1714, et à son arrière-petit-fils, Louis, duc de Bretagne, mort de la rougeole en 1712. Louis XIV meurt de la gangrène en 1715, quatre jours avant son 77e anniversaire, après avoir donné sa bénédiction à son arrière-petit-fils de cinq ans, Louis, duc d’Anjou, le seul fils survivant du défunt Louis (connu sous le nom de Petit Dauphin). Louis, duc d’Anjou, accède au trône sous le nom de roi Louis XV, le monarque qui perdra la Nouvelle-France au profit de la Grande-Bretagne pendant la guerre de Sept Ans (1756‑1763).
Héritage au Canada
La Place Royale de Québec, lieu d’un marché hebdomadaire du XVIIe au XIXe siècle, doit son nom à Louis XIV. Un buste du roi est érigé en son centre en 1686 par l’intendant Jean Bochart de Champigny, mais il est retiré parce que les marchands locaux se plaignent qu’il perturbe la circulation sur la place du marché. Dans les années 1930, un nouveau buste de Louis XIV est installé sur la Place Royale devenue une attraction touristique populaire. Louisbourg sur l’île du Cap-Breton, qui doit son nom à Louis XIV, devient le site de la forteresse de Louisbourg construite sous le règne de son successeur, Louis XV. Une grande partie de la population canadienne-française du Québec actuel est issue des Filles du roi parrainées par Louis XIV.