Alan Alexander Kay a servi dans le Royal Indian Army Engineers pendant la Deuxième Guerre mondiale. Lisez et écoutez le témoignage d'Alan Alexander Kay ci-dessous.
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Transcription
Et bien, le nom c’est Alan Kay. J’ai servi durant la, Deuxième Guerre mondiale avec l’armée indienne en Birmanie, pendant la campagne de Birmanie. J’ai été nommé officier en Angleterre, dans le Royal Engineers, le British Army Royal Engineers. Et puis j’ai été affecté, envoyé rejoindre la Royal Indian Army Engineers, qui était à ce moment-là commandée par l’armée britannique. Je suis arrivé à Bombay fin 43 début 44 et j’ai débarqué à Bombay. Et ensuite on nous a emmené au poste de commandement réglementaire dans le nord de l’Inde, à un endroit appelé Roorkee, où au début de mon séjour là-bas, j’ai eu un accident de cheval parce que les officiers devaient monter à cheval à la parade. J’étais en retard pour le défilé, j’ai poussé le cheval et le cheval a trébuché et je suis tombé et je me suis cassé la colonne vertébrale.
J’ai passé trois ou quatre mois à l’hôpital et j’ai finalement atterri à Pune, un endroit appelé Pune près de Bombay dans l’hôpital principal de l’armée. Après être sorti du plâtre, nous, comme d’habitude, on a attrapé toutes sortes de maladies et l’une d’entre elles c’était l’hépatite. Et j’étais à l’hôpital avec une hépatite et à ce moment précis, je me souviens d’un des moments les plus gênants pour moi. On était dans la salle commune et on nous avait dit que Lady Mountbatten allait venir nous rendre visite. A cette époque elle était à la tête de la Croix-Rouge. Juste avant l’heure prévue de son arrivée dans la salle, j’ai eu besoin de, j’ai eu besoin d’un flacon si vous voyez ce que ça veut dire. J’ai appelé l’aide-soignant pour avoir un récipient et il a dit non, il a dit : « L’infirmière en chef va me tuer si je vous en donne un. » J’ai répondu : « Et moi je vais te tuer si tu ne m’en apportes pas un. » Alors il a apporté le récipient et juste quand j’étais prêt à me soulager, Lady Mountbatten est apparue au pied de mon lit et m’a demandé avec des mots charmants, comment j’allais et où j’avais été. Juste quelques minutes. Et pendant qu’on parlait, évidemment, il y a des choses qui se passaient dont jamais, vous ne deviez pas en parler. Et elle a continué et après mon visage cramoisi a repris une couleur normale. Ça a été une expérience assez intéressante.
Quand je suis arrivé en Birmanie au début, on avait un bateau de Calcutta à Rangoon, et on était sur l’un des premiers bateaux à entrer dans Rangoon après que Rangoon ait été prise par l’armée britannique. Ensuite on est montés au nord jusqu’à une ville pas très loin de Mandalay, juste au sud de Mandalay et c’était juste après la campagne de Meiktila quand – c’était la dernière campagne importante, alors j’ai eu de la chance de ne pas avoir vu les pires moments, mais ça a été un moment intéressant.
Et puis on nous a placé à un endroit appelé Waw, W-A-W, c’est juste à 80 kilomètres environ au sud de Mandalay sur la grande route entre Mandalay et Rangoon. Et aussi là-bas on avait un terminal ferroviaire, pour le chemin de fer c’était, il se termine dans cette ville là mais nous, ensuite nous avons bougé jusqu’au front à une quinzaine de kilomètres à l’est de ce petit village. Et il nous a fallu construire un pont-rail flottant. C’était le premier, à ma connaissance, c’était le seul pont de chemin de fer que nous, il faisait un mètre d’épaisseur. Et nous, les, nous, au lieu d’utiliser des locomotives, parce qu’on n’arrivait pas en trouver une seule qui fonctionne, ils ont transformé des jeeps en locomotives. Autrement dit, très simplement, ils enlevaient les roues des jeeps et leur posaient des roues de chemin de fer à la place. Et ces jeeps tiraient le train de marchandises tout entier jusqu’au front. De cette façon on a pu approvisionner le front, par voie de chemin de fer.
Notre boulot dans le Génie, on devait construire des tours de repérage par éclats. C’était des tours qui, pour que les gens des troupes de repérage de l’artillerie puissent monter dessus et repérer les éclats du feu des japonais. Et je me souviens d’un incident quand on devait construire une, une plateforme de repérage par éclats au sommet d’une pagode. Les pagodes en Birmanie étaient des pagodes en maçonnerie. Elles étaient à 10, 13, 15 mètres du sol. Et on était là avec rien d’autre que des rizières devant nous. Et les obus japonais qui nous arrivaient dessus et heureusement pour moi, parce qu’on était plantés en haut de cette pagode, on était plantés comme un, vous savez, vous pouviez la voir à des kilomètres à la ronde. Heureusement pour moi, les japonais ne visaient pas du tout mais pas du tout juste, et ils envoyaient des obus tout autour de nous mais jamais ils n’arrivaient à atteindre leur cible, heureusement. Et puis à peu près, oh quelques semaines après qu’on ait fait ce travail, la guerre s’est arrêtée.
Un incident, j’étais à Rangoon à essayer de récupérer du bois et du matériel pour ces tours et j’étais dans l’un des mess des officiers et il y avait un vieux colonel là-bas et on venait juste d’entendre les nouvelles à propos de la bombe atomique tombée sur Nagasaki. Et ce vieux gars m’a toujours rappelé, tout le temps, quand je repense au colonel, le célèbre Colonel Blimp (personnage de bandes dessinées) qui disait : « Juste ciel, il disait, ce n’est pas des manières de faire la guerre, ce n’est pas comme ça qu’on joue une partie de cricket, pas comme ça du tout. » Vous savez. Et il a dit que 100 000 personnes avaient été tuées d’un seul coup. Alors ça c’est un petit souvenir que j’ai de quelques personnes qui, même dans notre camp qui n’aimaient pas beaucoup l’idée de ce genre de guerre.
On a arrêté de travailler parce qu’on avait entendu que la, que la guerre était terminée mais ça a pris au moins une semaine ou plus, une dizaine de jours après la capitulation officielle avant que les japonais soient de l’autre côté de la rivière Salouen, à environ trois kilomètres de notre position. On regardait du côté des rizières et un officier, un des officiers du, qui était dans l’artillerie est venu vers moi et il a dit : « Viens par là et jette un coup d’œil, il y a un petit groupe avec un drapeau blanc. » Alors le petit groupe d’officiers et de soldats – à peu près six ou sept, je crois qu’il y avait seulement un major ou un capitaine à leur tête – ils venaient pour se rendre. Il avait du sel tout prêt à partir et c’était intéressant d’ailleurs parce que c’était la première reddition en Birmanie.
Et l’officier qui avait le commandement à ce moment-là devait rappeler le brigadier au téléphone. Et il lui a demandé de venir vite fait et il a regardé ces gars – ce brigadier était vraiment, oh mon Dieu, son nom c’était, Smeeton, Brigadier Smeeton – Et il a regardé ces gens et il a dit : « Êtes-vous général, vous n’êtes que major ou capitaine, je ne me souviens plus exactement de ce qu’il a dit, je ne vous parle pas à vous, allez me chercher votre général. Et le jour suivant, le général est venu et on était là et c’était un peu cérémonieux mais ce Brigadier Smeeton c’était un gars immense. Il faisait 1m 90 et vous pouvez l’imaginez en train de se pencher vers ce petit capitaine qui mesurait à peine un mètre soixante-cinq et qui était terrifié par lui je suppose, et ils sont repartis la queue entre les jambes jusqu’à leurs lignes et ont finalement ramené leur général.