Albert John Park (source primaire) | l'Encyclopédie Canadienne

Project Mémoire

Albert John Park (source primaire)

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Albert John Park a servi dans l’armée pendant la Deuxième Guerre mondiale. Lisez et écoutez le témoignage d’Albert John Park ci-dessous.

Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.

Albert Park
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Albert Park en chemin vers un match de hockey à Calgary en 1944.
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Albert Park (à gauche) et son frère jumeau à Moosejaw, Saskatchewan, lors d'une permission.
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Albert Park épousa Doroth Dewson, soldatr du ATS britannique, à Aberdeen en Ecosse le 15 mai 1946.
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Photo du peloton no. 4 de la compagnie D du South Saskatchewan Regiment prise à Calgary en mars 1944, juste avant le départ outre-Atlantique. Albert Park est dans la rangée du milieu, le 3ème à gauche.
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Entraînement en formation de convoi avec le Corps royal de l'intendance de l'Armée canadienne à Red Deer, Alberta.
Albert Park
J'ai dû utiliser mon fusil-mitrailleur Bren et cela fut l'un des moments les plus difficiles de ma vie, [...] c'est ainsi que les guerres se résolvent ou sont résolues, par l'homme qui tue l'homme.

Transcription

J’ai participé à trois ou quatre batailles importantes, comme on dit. À un endroit appelé le Pimple et qui s’appelait Kalkar [Kalkar sur le Rhin, Allemagne, février 1945]. C’est là que j’ai vécu véritablement ma plus grande aventure dans les zones de guerre. Et j’ai survécu à toutes les opérations auxquelles j’ai participé.

Ce soir-là, nous étions visés par des tirs de lance-flammes et d’artillerie. C’était comme être en enfer. On peut imaginer à quoi ressemble l’enfer, et nous y étions, ça ne pouvait pas être pire. Nos chars sur le terrain ont reçu une averse de tirs de 88 [le canon antiaérien et antichar allemand de 88 mm] des forces allemandes et de « moaning minnies » [faisant référence à une série d’armes allemandes généralement appelées les Nebelwerfer, qui sont des lance-roquettes multiples] qui paraissait tout simplement irréelle. Nous avions l’impression que des feux d’artifice explosaient inlassablement autour de nous, tandis que nous nous calions dans les chars pour franchir ce passage. C’était une brèche ouvrant sur la dernière tranche de la résistance des forces allemandes avant qu’elles ne doivent évacuer les lieux et se replier pour regagner l’autre rive du Rhin [fleuve]. On l’appelait le Pimple.

Pour y arriver, nous avons dû abandonner les chars et gravir une pente abrupte sur le flanc de la colline. Les lance-flammes continuaient d’arroser certaines zones, là où des poches de forces ennemies embusquées soutenaient les tirs pour, bien entendu, empêcher l’envahissement de leur nation. Quoi qu’il en soit, j’étais dans la force d’élite et j’ai remonté à pied cette grande pente jusqu’au sommet de la colline, le Pimple, en transportant la mitrailleuse Bren [une mitrailleuse légère d’infanterie britannique]. Du haut du sommet, je devais d’abord observer cette grande ravine boisée. J’ai pu y apercevoir un bataillon de soldats ennemis descendant un large chemin. Je dirais qu’ils étaient 200 soldats allemands. Dans notre peloton, nous étions seulement environ 15. Quinze soldats en marche derrière moi, bien sûr, chacun avec ses carabines. Nous marchions les uns derrière les autres, peut-être à une distance de quatre ou cinq pieds. Nous étions tous dans ces chars la veille.

Et j’ai dit à mon sergent : « Regardez sergent, des Gerries. » Je ne me souviens pas exactement des mots qu’il a utilisés, mais il a répondu : « Dieu du ciel, utilise ta puissance de feu pour nous couvrir. » Bien entendu, j’ai dû mettre en action ma mitrailleuse Bren. Si je ne l’avais pas fait, si nous avions laissé ce bataillon de, je dirais, 200 soldats descendre cette vallée, et regagner le sommet de la colline où nous étions, nous aurions été anéantis avant même d’avoir soupiré.

Toujours est-il, comme je l’ai dit, que j’ai dû utiliser ma Bren. Ça a été l’un des moments les plus difficiles de ma vie, devoir utiliser la Bren contre les soldats qui approchaient. Ils ne nous avaient pas aperçus, bien sûr, et fort heureusement. Mais quoi qu’il en soit, cette nuit-là et deux jours plus tard, avec l’artillerie et quelques chars que nous avions commandés, nous les avons déroutés. Ils ont brandi des drapeaux blancs pour se rendre. Et nous avons capturé, j’en avais un relevé, je l’avais fait consigner par écrit, nous avons fait 90 prisonniers et si je me souviens bien, 80 autres soldats avaient été tués. Ce sont des événements qui nous reviennent à l’esprit. Parfois, quand vous dormez et que vous vous réveillez en pleine nuit, et que vous pensez aux horreurs qui ont été commises, vous vous dites que les guerres ne peuvent cesser ou être résolues autrement, malheureusement, que par l’homme qui tue l’homme. Ça a été vraiment une partie étrange de ma vie. Une partie que je n’aurais pas vraiment voulu manquer à une époque, mais avec le recul, je ne recommanderais jamais à mes garçons d’y aller et d’y prendre part. Je ne me serais jamais enrôlé moi-même si j’avais su l’enfer qui m’attendait.