Mr. Aleksander Bogdan est né en Pologne et fut déporté en Sibérie en 1941 où il passa plusieurs mois dans les goulags. Ayant été libéré avec des milliers d'autres prisonniers polonais, il joignit les rangs des forces polonaises en Russie en mars 1942 et se retrouva sous commandement britannique cette même année lorsque le nouveau corps d'armée polonais traversa la frontière soviéto-perse. Il servit au Moyen-Orient en 1942 et 1943, puis en Italie de mars 1944 à mars 1945. M. Bogdan participa aux batailles de Monte Cassino et d'Ancona avec le 11e Bataillon de Signaleurs du 2e Corps d'armée polonais.
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Transcription
Après la chute de la Pologne [à la suite de l’invasion de la Pologne par les Allemands en septembre 1939], chez moi on a d’abord été sous occupation allemande et ensuite russe [après l’invasion de la Pologne par les Russes qui commença le 17 septembre]. Quand les Russes ont rouvert les écoles, je suis retourné à Grajewo [Pologne], mais pas pendant très longtemps. J’ai été arrêté et déporté de Pologne en Sibérie à un endroit qui s’appelait Khanty-Mansiysk. J’y suis resté jusqu’à l’amnistie en 1941, et j’ai été relâché [selon les termes de l’accord militaire russo-polonais signé le 14 août 1941] et envoyé à un endroit qui s’appelait Tioumen [Sibérie].
Début 42, j’ai quitté Tioumen pour aller à un endroit qui s’appelait Lujavog en Ouzbékistan, je crois, où l’armée polonaise a été formée. J’ai été enrôlé dans le régiment polonais des transmissions [le 11e bataillon de transmissions attaché au QG du 2e Corps polonais]. On a quitté la Russie pendant l’été 42 et on est allés en Iraq en passant par l’Iran, où on a reçu l’équipement adéquat et suivi une solide formation militaire. On est arrivés en Palestine en 1943, et pendant l’été cette année-là, les autorités polonaises organisèrent une école secondaire à un endroit appelé […] près de […] en Palestine. J’ai été accepté dans cette école et j’y suis resté jusqu’en mars 1944, où j’ai réussi mon examen de fin d’études.
On m’a renvoyé dans mon régiment en Italie, qui à ce moment-là avançait en direction de Monte Cassino [début 1944]. Ma spécialité de radio télégraphiste avec le QG du 2e Corps polonais a été utilisée à Monte Cassino et aussi pendant la campagne de l’Adriatique après quoi j’ai réussi le Collège militaire pour les transmissions et j’ai été promu au rang d’élève officier. Ensuite, on m’a renvoyé dans le régiment où j’ai été instructeur.
En Russie, notre régiment était appelé le 1er régiment, régiment n° 1, et on projetait d’avoir environ 2000 personnes. Mais en Iraq, on s’est rendu compte qu’il y avait beaucoup de personnes demandées par Londres pour le service dans cette brigade de parachutistes ou la marine ou l’armée de l’air. Leur nombre a considérablement diminué. On n’avait pas assez de personnel pour constituer un régiment complet. Donc, on était le 11e bataillon, attaché au QG [2e Corps polonais], pour servir au quartier général avec la 3e division [d’infanterie des Carpates], 5e division [d’infanterie des Confins (Kresowa)], les brigades de l’armée et les transmissions et les bataillons du génie et ainsi de suite. Alors vous voyez, au QG, on avait 11 stations radio, chacune d’elle était affecté à un certain nombre d’unités pour leur procurer des moyens radio au cas où les lignes téléphoniques ne fonctionnent plus. Alors dans notre bataillon, il y avait des gens formés à être radio opérateurs ou téléphonistes et ils s’occupaient des réparations de l’équipement, parce que très souvent les stations radio ne marchaient pas.
Alors on a pris la direction du Mont Cassin, à la demande de Lord Alexander.* Trois batailles de Monte Cassino avaient déjà eu lieu, sans succès. Vous voyez, lors de la dernière bataille, quand on est arrivés au Mont Cassin, la route de Rome était ouverte. Parce que la ville de Cassino contrôlait la vallée du Liri et la route de Rome du sud au nord ou du nord au sud. Et les Allemands étaient là depuis environ six mois, ils étaient extrêmement précis à tirer sur tout ce qui bougeait. Donc le 11 mai [1944], environ 2000 canons ont fait feu. Pas seulement les Polonais, mais, bien sûr, on faisait partie de la 8e Armée.
Avant l’attaque, on ne pouvait rien faire, on est restés silencieux. On ne voulait pas que les Allemands sachent où on se trouvait. Les téléphones ne marchaient pas parce que, vous voyez, avec des téléphones, disons que vous avez les fils en haut de la colline ou n’importe où, il faut les installer là où les patrons voulaient les avoir. Mais avec ça, ce n’était pas si facile. Surtout disons l’opérateur […] faisait son travail, c’était le numéro 9, c’était […]. Et on avait un Chevrolet, je crois que c’était fabriqué à, Chevrolet c’était canadien à l’origine, c’était de l’équipement lourd, c’était les batteries et autres, vous savez. Alors vous ne pouviez pas simplement porter le sac. Or, les unités dans les différents régiments et ainsi de suite, elles avaient la station radio n° 12, qui était […] par […] les poignées pour porter les lignes de téléphone jusqu’au sommet des collines et ainsi de suite, c’était l’enfer. Et les mines dans le coin, il y en avait tellement, c’était incroyable. Et disons qu’on avait le génie, trois bataillons. Dans un bataillon, il ne restait plus grand monde, 18 personnes seulement. Et dans les zones montagneuses comme ça, les chars ne peuvent aller nulle part. Mais pour en revenir à mon opération, c’était l’enfer d’écouter tous les comptes-rendus, vous voyez, des gens tués, des gens tués, des gens tués, des gens tués, vous savez. Vous trouviez vos copains et ainsi de suite, qui avaient été tués et ainsi de suite. Alors ce n’était pas marrant du tout.
* Field Marshal Harold Alexander, Comte Alexander de Tunis, commandant du 15e groupe d’armées en Italie