Project Mémoire

Alfred Bunts Carpenter (source primaire)

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Alfred Bunts Carpenter a servi dans la Marine royale pendant la Deuxième Guerre mondiale. Lisez et écoutez le témoignage d'Alfred Carpenter ci-dessous.

Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.

L'Institut Historica-Dominion
L'Institut Historica-Dominion
M. Alfred Carpenter, le 9 janvier 2010.
L'Institut Historica-Dominion
Alfred Carpenter
Alfred Carpenter
Alfred H. Carpenter, à l'âge de 19 ans, 1946.
Alfred Carpenter
Alfred Carpenter
Alfred Carpenter
Alfred Carpenter durant une marche des anciens combattants de la Marine.
Alfred Carpenter
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Alfred Carpenter
Image d'un bâteau descendu alors qu'il est en train de draguer des mines.
Alfred Carpenter
Et ces bateaux-là ce sont comme des bouchons de liège dans une baignoire et ça vous balance dans tous les sens.

Transcription

Je voulais être marin quand j’étais jeune, mais mon père était dans l’armée de terre, sergent dans l’armée de terre et il voulait que je sois dans l’armée comme lui dans son régiment. Je disais : « Papa, je voudrais être marin. » « Oh, non, non, non, tu ne veux pas être marin, tu veux aller dans mon régiment. » Alors quoiqu’il en soit, il est mort quand j’avais 12, donc, l’armée de terre n’étant plus à l’ordre du jour, je pouvais faire ce que je voulais et m’ engager dans la marine dès que j’aurai l’âge requis. Et je me suis donc engagé dans la marine parce que les filles aiment bien les marins. Je suis d’abord allé dans les cadets de la marine et j’ai appris le sémaphore et le morse et quelques rudiments sur les pavillons, les pavillons internationaux et autres. Mais à ce moment là on m’a transféré dans les matelots 2ème classe de la marine royale. Je me suis porté volontaire pour le dragage des mines parce qu’on recevait un schilling supplémentaire par jour, un schilling en plus pour draguer les mines et à cause du danger et un schilling supplémentaire pour être à la dure, parce qu’on n’avait pas de hamacs, on avait des lits superposés, et comme on était sur des petits bateaux, souvent on était quasiment projetés hors du lit quand la mer était très agitée. Alors on nous donnait un schilling de plus par jour en plus, pour ça. Ca fait à peu près 25 centimes en argent canadien. Bon, le dragage de mines ça concerne tous les genres de mines, et il y a principalement trois sortes, dans l’ensemble. Il y a la mine ordinaire, qui est ancrée au fond et c’est, si vous touchez les cornes, elle explose. Et ça c’est avec la drague mécanique divergente et une autre sorte de mine c’est la mine magnétique, qui montait attirée par le champ magnétique du bateau. Et donc si les bateaux lui passent au dessus. Et puis l’ennemi ou les allemands était malins, et il faisaient en sorte que ce ne soit pas le premier bateau qui explose, ça pouvait le cinquième ou le sixième bateau qui explosait. Ils avaient un compteur dessus, alors… Voyez, on avait, quand on draguait des mines, quand on savait que c’était des mines magnétiques, on devait aller en arrière et en avant quatre ou cinq fois avant qu’elles explosent, vous voyez. Et c’était fait par ce qu’ils appellent la dragage latéral double. Ils appellent ça le dragage latéral parce que c’était juste des longs câbles derrière le bateau, deux câbles et en général deux ou trois bateaux et dans les différentes formations que vous avez, dépendant du nombre de bateaux qui sont en train de draguer les mines. Et on allumait la boucle électrique et ça faisait exploser les mines. Alors quand on passait au dessus d’elles, les mines explosaient. Et la drague mécanique divergente qu’on avait, elle coupait les mines, et vous aviez un long filin et il va sous l’eau avec un pendeur de flotteur au bout et un autre truc appelé un divergent, qui le faisait aller à une certaine profondeur. Donc pendant qu’on draguait, les mines allaient, la mine qui émergeait tout droit comme ça, et elle se prenait dans le filin et on la suivait et on pouvait faire du bruit sous l’eau. Et sur le filin, il y avait des trucs là qui coupaient le câble et la mine remontait en surface. Et ensuite on prenait nos armes et on tirait sur la mine et elle coulait parce qu’elle se remplissait d’eau très vite. Mais ces mines font dans les soixante centimètres de diamètre, énormes. Alors vous imaginez ce truc rempli de dynamite, quel qu’il soit, ça peut vraiment faire du dégât. Si un de nos bateaux explosait, j’avais une photo de ça, il ne restait rien du bateau, rien du tout. C’est juste comme tous les bouts de bois, la plupart à l’extérieur des ports, parce que c’est là qu’ils mettaient les mines. Il n’y avait aucune raison de les installer là où il n’y avait pas de bateaux, alors ils savaient où étaient les ports, l’ennemi savait où étaient les ports. Alors c’était surtout à un moment, c’était juste pour la défense. Puis ils sont devenus plus judicieux et ils les ont utilisées pour attaquer. Et nous aussi on a déposé des mines dans les ports français et dans les ports allemands, nous aussi on a fait ça. Alors on était aussi mauvais qu’eux. Et souvent, on draguait la zone et puis l’avion ennemi venait, et déposait d’autres mines pendant la nuit. Et je sais que dans la Tamise, ils les ont mises à l’extérieur de la Tamise à Londres, on avait des guetteurs là-bas à la recherche des avions, quand ils jetaient le parachute, les parachutes sur le, en descente, et ils repéraient les parachutes, alors ils connaissaient l’endroit où ils les larguaient. Un de mes souvenirs c’est le dragage du Grand Canal à Venise. Ouais. Et aucun bateau ne pouvait entrer là à cause de toutes les mines qui se trouvaient dans le Grand Canal. Et on a fait sauté toutes les mines dans le Grand Canal et je me souviens des mines qui sautaient et aussi les bateaux, petits bateaux, les italiens qui sortent avec leurs petits bateaux et prennent les poissons parce qu’ils étaient assommés. Donc les poissons remontaient à la surface. Alors on criait « Via ! Via casa ! » Ca veut dire rentrez chez vous. Parce que c’était dangereux parce il fallait qu’on y aille deux ou trois fois avant qu’elles commencent à exploser. On avait souvent une mer agitée en Méditerranée, mais je crois que la mer la plus démontée que j’ai eue c’était en Irlande du nord, dans l’Atlantique là-bas. Et je sais qu’on ne draguait pas, alors on devait rester dehors et nous faire des signaux les uns aux autres et je n’arrivais pas à voir l’autre bateau parce qu’on allait, on attendait jusqu’à ce qu’on soit en haut d’une vague pour le voir. Ou bien quelquefois j’attrapais la lumière d’un nuage et je lisais sur le nuage. Alors c’était, c’était sans doute la tempête la plus grosse que j’ai vue de toutes ces grosse tempêtes. Je ne sais pas, cinquante pieds de haut je crois. Un peu effrayant. Et ces bateaux-là ce sont comme des bouchons de liège dans une baignoire et ça vous balance dans tous les sens. Non, je ne me souviens pas de la fin de la guerre, parce qu’on était en train de déminer. Quand je vois des photos maintenant des gens en train de célébrer, je pense, je n’arrive même pas à me souvenir de quel jour c’était, parce qu’on était des démineurs comme n’importe quel autre jour.