Andrew Carswell a servi dans l'Aviation royale canadienne (ARC) pendant la Deuxième Guerre mondiale. Lisez et écoutez le témoignage d'Andrew Carswell ci-dessous.
Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.
Transcription
Nous sommes montés à environ 20 000 pieds au-dessus de l'Angleterre, puis nous avons survolé le Danemark et la mer Baltique. Il y avait beaucoup de mauvais temps dans cette région, jusqu'à ce que nous arrivions plus ou moins au nord de Berlin. Puis nous nous sommes dirigés vers le sud, au-dessus de la mer Baltique. Pour une raison ou une autre, nous nous sommes retrouvés un peu à l'est de la trajectoire que nous aurions dû suivre et nous sommes passés au-dessus d'une ville appelée Magdebourg. Magdebourg est une ville industrielle de bonne taille. En fait, elle existe toujours. Et nous avons reçu une bonne quantité de « flack » (munitions antiaériennes) et peu après, le moteur droit a pris feu et a commencé à brûler. Nous avons essayé de mettre le moteur en drapeau et d’éteindre l’incendie.
En plus, les commandes ne fonctionnaient pas correctement. Il s'est passé quelque chose au niveau de la gouverne de direction et de la gouverne de profondeur, et l'avion est descendu en piqué. Il y avait là deux problèmes. L'avion était hors de contrôle et quelque chose était arrivé aux commandes. L'aile était en feu et il y avait environ 1 000 gallons d'essence à l'intérieur de l'aile, nous devions sortir de là rapidement. J'ai donc donné l'ordre de sortir de l'avion. J'ai marché toute la nuit après que mon appareil ait été abattu à 9 heures du soir par un temps de 20 degrés sous zéro, vous savez, le temps typique de l’Ontario. Finalement j'ai décidé que j'avais le choix entre mourir de froid dans les bois ou trouver une maison quelque part.
J'ai donc monté les marches d'une ferme en titubant. J'ai frappé à la porte et j'ai provoqué une grande agitation. Un petit vieux est sorti, faisant le tour de l’allée du côté avec un gros fusil de chasse qu'il a pointé sur moi. J'ai dit: « Ne tirez pas ». Puis sa femme, ou sa mère, ou une femme d'âge moyen qui se trouvait à la fenêtre de l'étage a dit quelque chose en allemand qui, je l'aurais juré, ressemblait à « laisse entrer ce pauvre enfant ».
Ils m’ont fait entrer dans leur salon et m'ont installé sur un sofa de type chesterfield sur lequel je me suis immédiatement endormi. J'avais marché toute la nuit, depuis 9 heures du soir. Quand je me suis réveillé, la pièce était remplie de gens, de policiers, de fermiers et d’enfants. Un petit garçon s'est approché, a regardé mon épaule et m'a dit: « Ah, le Canada! » Et j'ai répondu: « Oui. » Bien sûr, ils pensaient tous que je parlais allemand et j'ai répondu que non. Ensuite, ils ont dit quelque chose en allemand et m'ont regardé rapidement pour voir si je comprenais. Mais ils avaient évidemment téléphoné à la police et à l’armée et peu après, une voiture est arrivée avec deux policiers à bord. Ils m'ont fait monter dans la voiture et m'ont emmené à l'hôtel de ville.
Mon livre raconte la vie dans un camp de prisonniers de guerre. J'y suis resté deux ans, trois mois et quelques heures. Pendant ce temps, je me suis évadé deux fois et j'ai été capturé deux fois. J'ai passé du temps dans une prison de la Gestapo (police secrète nazie) à Stutthof, au bord de l'océan Baltique. J'ai également passé un certain temps avec un autre camarade en Tchécoslovaquie dans une prison située dans une ville appelée Brno, B-R-N-O. Mais cela m'a permis d'acquérir de l'expérience. Et j'ai appris un peu d’allemand: du mauvais allemand, des jurons et des choses comme ça.
Au début du mois de janvier 1945, alors que la guerre touchait à sa fin, nous étions dans un camp de prisonniers en Pologne, le Stalag VIII-B, à Lamsdorf. Les Russes n’étaient pas très loin et sur le point d'entrer dans la région, ils ont donc décidé de faire évacuer notre camp. C'était la fameuse « marche de la mort ». Ils nous ont donné trois heures de préavis et nous ont tous évacués du camp. C'était à la mi-janvier, par une température d'environ 20 degrés sous zéro, et nous étions assez bien habillés. Nous avions reçu des uniformes de la Croix-Rouge et, heureusement pour nous, les Allemands étaient signataires de la Convention de Genève. Nous avons donc reçu nos colis de la Croix-Rouge et ce genre de choses.
En gros, nous avons marché vers l'ouest et certaines personnes ont prétendu s'être échappées pendant cette marche, mais il n'y avait pas beaucoup d'intérêt à essayer de s'échapper: nous allions dans la bonne direction, vers les Américains et les Britanniques. Quoi qu'il en soit, nous avons marché. Nous avons passé le mois suivant à marcher et finalement, ils nous ont amenés dans un camp appelé Fallingbostel (Stalag 11-B), qui était un camp de prisonniers de guerre situé non loin de Hanovre en Allemagne. Nous y sommes restés environ un mois, jusqu'à ce que les Alliés arrivent et que la 2e armée du maréchal britannique Bernard Montgomery passe par là et libère un grand nombre d'entre nous.
Date de l’entrevue: 13 septembre 2010