Anthony Baschak a servi dans l'Armée canadienne pendant la Deuxième Guerre mondiale.
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Transcription
Nous avons pris notre position près de Trun (France). Puis nous avons continué jusqu'à Falaise. Caen était déjà presque libérée, mais elle était dans un grand désordre, on ne pouvait pas la traverser. Il fallait prendre un bouteur et faire une route parce que tous les bâtiments étaient en ruine. Mais comme je l'ai dit, nous sommes alors arrivés à Falaise. C'était une bataille difficile parce que les Allemands étaient encerclés, et tout ce que nous avions à faire était de continuer à tirer pour qu'ils ne s'échappent pas.
À la poche de Falaise, notre travail consistait à tirer non pas des centaines, mais des milliers d'obus sur une certaine zone, et les obus devaient tomber à deux ou trois secondes d'intervalle afin que les Allemands ne puissent pas s'échapper. Pour autant que nous le sachions, nous en avons massacré des milliers. Et ça a duré un bon moment parce qu'il y avait une armée polonaise, britannique et canadienne, et ils (les Allemands) étaient tous encerclés, et il n'y avait qu'une seule route principale pour sortir. Quand on a terminé, avant de pouvoir arriver à cette route, il fallait prendre un bouteur pour vider la route pleine de chevaux et d'Allemands morts et d'autres choses. Les Allemands avaient volé les chevaux des Français pour transporter du matériel. C'était en août (1944) et on ne pouvait pas respirer tellement la puanteur était forte. Quoi qu'il en soit, le bouteur déplaçait tous les animaux morts et les Allemands dans les fossés et nous avons commencé à y aller avec nos tracteurs de tir et nos fusils, et nous nous arrêtions à tous les quelques mètres ou pieds, puis nous sortions de la piste de tir et allions à la recherche de Luger. Tout le monde voulait un Luger en souvenir, ces pistolets automatiques allemands. Il fallait retourner les corps des Allemands pour les trouver. Aujourd'hui, quand j'y pense, je me dis que nous avons fait quelque chose d’horrible.
Ce qui se démarque dans mon esprit c'est qu'à Falaise, nous avons été victimes d'un tir ami, comme vous l'avez peut-être lu. La première semaine, les Américains nous ont bombardés par erreur et une semaine plus tard, le 14 août 1944, 700 Liberators (B-24) se sont approchés du ciel, ont ouvert leurs trappes à bombes et nous ont bombardés. Ils ont ensuite volé en rond et pendant ce temps, nous avions tous ces fumigènes, ces signaux de fumée jaunes pour leur faire savoir que nous étions des amis, ils ont tourné en rond et ont lâché l'autre moitié de leurs bombes. Et nous avions un de ces petits avions Auster pour l'observation et le pilote a monté et a essayé, on ne pouvait pas avoir de communication radio avec eux, mais il a essayé de leur signaler qu’ils bombardaient leurs propres troupes. Finalement, ils ont fait un autre tour et ils nous ont mitraillés. Pendant ce temps, notre canon a été touché par des fragments de bombe et un pneu a éclaté. J'ai crié à l'équipage de courir et de me suivre parce qu’entre-temps j'avais trouvé une grande fosse que les Allemands avaient creusée pour dormir, de la place pour six ou sept gars, alors nous avons sauté dedans. C'est ce qui nous a sauvés. Mais il y a eu beaucoup de pertes. Il y avait une armée polonaise à côté de nous, je ne sais plus quelle division, et ils ont perdu plus de la moitié de leur équipement. Beaucoup de gars ont été touchés.