Project Mémoire

Belmont Joseph Shannon (source primaire)

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.


Belmont Shannon
Belmont Shannon
Belmont Shannon
Belmont Shannon
Belmont Shannon
Belmont Shannon
Belmont Shannon en uniforme, Edimbourg, Écosse, 1946.
Belmont Shannon
Belmont Shannon
Belmont Shannon
Photo contemporaine de M. Belmont Shannon.
Belmont Shannon
Quand j’y repense aujourd’hui, j’étais sans doute plus terrifié que je ne l’avais jamais été et que je ne le serai jamais.

Transcription

C’était derrière des barbelés dans les docks de East India à Londres, vous aviez des rouleaux de fil de fer barbelé en hauteur et vous étiez, je dirais, vous étiez à huit, dix, douze mètres de la population la plus proche, ils vous gardaient à distance des civils. Alors tous les jours, vers quatre heures ou cinq heures de l’après-midi, ils vous faisaient marcher au pas jusqu’aux quais, vous faisaient monter sur une péniche de débarquement et on partait sur la Tamise. Alors quand elle faisait demi-tour, ils vous disaient, quand vous débarquerez, vous allez débarquer en territoire étranger. On a fait ça toutes les nuits pendant peut-être trois semaines. Mais je vais vous dire, la nuit du débarquement pour de vrai, ils n’ont pas eu besoin de nous le dire parce que le ciel était rempli d’avions et ils y avait des navires de guerre partout, et on a su alors qu’on allait quelque part. On ne savait pas où. Alors, le lendemain matin, on monte sur un plus gros bateau et on était à peu près à deux milles du rivage, je pense, mais c’était au large à une certaine distance du rivage, et on est descendus par, ils avaient mis des filets de corde sur le côté du bateau, on passait dessus, pour descendre dans la péniche. Ils appelaient ça un péniche de débarquement pour l’infanterie, ces bateaux-là allaient jusqu’au rivage, l’avant du bateau se rabattait sur le sol. Evidemment ils nous poussaient, ils vous disaient : « Quand ça descend, vous courrez, vous courrez, vous courrez. » Ils disaient aussi : « Descendez, vous savez, si votre copain est touché, vous ne vous arrêtez pas pour l’aider, vous continuez à avancer, vous continuez à avancer. » Quand vous avez 18 ans, je suppose que, peut-être, vous faites tout ce qu’on vous dit, on vous exerce à faire ça jour et nuit. Ils nous avaient donné une petite carte, à peu près 7,5 par 10 cm et c’était une carte du village où on débarquait. On est arrivé à Bernières-sur-mer, je crois que c’était, Bernières-sur-mer. Sur cette carte, il y avait un pont dessiné à l’intérieur des terres à environ un kilomètre et demi je crois, deux kilomètres. Et c’est là qu’on devait se trouver ce soir-là, je ne sais pas, à 5 heures,6 heures, 7 heures, peu importe. Après avoir couru toute la journée, vous alliez là-bas et on s’est tous retrouvés ensemble et on a creusé nos tranchées et creusé un trou dans le sable et on s’est mis dans le trou pour la nuit. Bon, il y avait les raids aériens évidemment. Quand on était là-bas, il y avait des gens qui vous tiraient dessus. Alors vous étiez, je ne dirais pas que vous étiez brave ou quoique ce soit de ce genre, parce que vous étiez sûrement, quand j’y pense aujourd’hui, j’étais probablement effrayé comme jamais dans ma vie avant ça ou depuis ça. Mais on a creusé le trou dans le sol et on est restés là et ensuite on a commencé à faire ce qu’on nous avait entraînés à faire, à installer des lignes téléphoniques pour l’infanterie, pour l’artillerie, pour qui que ce soit qui en avait besoin, depuis notre quartier général. Et puis évidemment, dans l’autre sens jusqu’à notre quartier général. Ces lignes de téléphone n’étaient pas comme celles d’aujourd’hui. Aujourd’hui, ils les attachent à des poteaux, mais à cette époque on avait juste un rouleau de fil et c’était sur le sol et on prenait ça et ça marchait avec ça. Et si on venait à manquer de fil, on mettait les fils ensemble et on les attachait les uns aux autres avec un nœud et un petit morceau d’adhésif et ensuite on continuait avec le suivant et on allait jusque là où on devait aller. Et ensuite vous colliez un téléphone au bout du fil. Et le téléphone se trouvait dans un sac en jute et il avait une manivelle dessus, et on tournait la manivelle pour appeler, vous étiez en ligne. Si vous, si vous n’aviez pas la tonalité, ça voulait dire que la ligne était coupée ou qu’un char ou un camion ou autre chose avait roulé sur le fil. Alors vous deviez repartir, pour trouver où c’était cassé et réparer à nouveau. Et c’était à peu près tout ce qu’on faisait. Et vous faisiez ça, et ce n’était pas exactement comme un pique-nique.