En 2011, le Projet Mémoire s’est entretenu avec David Campbell, ancien combattant de la guerre de Corée. L’enregistrement et la transcription qui suivent proviennent de cet entretien. David Campbell a servi dans la Marine canadienne pendant 20 ans et a combattu sur la côte ouest de la Corée et sur le fleuve Taedong pendant la guerre de Corée. Né à Shanghai en Chine le 21 août 1928, il a grandi à Victoria, Colombie-Britannique, et s’est enrôlé dans la marine en 1946, à 17 ans. Dans ce témoignage, il décrit certaines de ses expériences de combat en Corée en tant que soutier. Il raconte les combats aux côtés des États-Uniens ainsi que plusieurs anecdotes humoristiques qu’il a vécues pendant son service. Il décrit également la participation de son équipage à l’évacuation d’Inchon, une ville portuaire coréenne. Il est décédé le 15 décembre 2016 à Victoria.
Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.
Transcription
Ce qu’on faisait, on s’occupait de surveiller les avions, on suivait un porte-avions au cas où un avion américain plonge dans l’océan. On allait récupérer l’équipage. On inspectait les jonques (navire côtier de petit tonnage) qui montaient et descendaient le long la côte pour voir s’ils étaient nord ou sud coréens. Et ce n’était pas possible de savoir de toute façon car dès qu’ils nous voyaient ils arboraient un pavillon de complaisance qu’ils avaient. Et on était là au moment de l’évacuation de Inchon et ensuite on est remontés, en fait, alors que les Chinois descendaient, nous on est remontés jusqu’à la rivière Taedong pour bombarder et permettre aux Américains d’avoir un peu plus de temps pour se retirer. Et le NCSM Athabasca et le NCSM Caguya sont montés là-haut sans problème, il y avait une balise de jour et ce gros câble s’est enroulé autour de notre hélice à tribord. Et alors il fallait qu’on parte de là, donc on a fait machine arrière.
Et après on a été, voyons voir, à peu près trois jours, il y avait un croiseur anglais là-bas, j’ai oublié son nom, ils ont envoyés des plongeurs là dessous, ils n’arrivaient pas à couper le câble et c’était redoutable pour eux. Et ils ont finalement réussi à en couper une partie, c’était une balise de jour et je travaillais sur les évaporateurs à faire de l’eau fraiche et le chef des machines était sur les commandes, on faisait machine arrière, ou on allait en avant plutôt, et puis il y a eu ce gros bang, bang sur le côté du bateau. Et le chef des machines a dit : « Bon sang, c’est une de ces foutues mines. » Et il est remonté du pont du sol de la salle des machines là où se trouvaient les manettes, il est remonté à travers deux ponts à travers une trappe de cette taille sur le pont supérieur et moi je me suis retrouvé là en train de dire, mais bon sang qu’est-ce qui lui prend. Parce que si ça avait été une mine, on n’aurait plus été là, vous savez. Alors moi je faisais mon eau et ce gars, Tommy Bly qui était chef des machines, il était aux commandes et on a fait machine arrière et ensuite il ne restait plus qu’à attendre jusqu’à ce qu’on vienne nous aider.
On s’est fait tirer dessus par des armes de petit calibre du genre des canons de calibre 40, 50, des canons de 40mm comme des Bofors. Mais vous pouviez les voir, c’était des traceuses mais elles n’arrivaient même pas jusqu’à nous. Beaucoup de mines, on a fait sauter beaucoup de mines, c’était des vieilles mines datant de la Deuxième Guerre mondiale mais vous savez, leurs câbles avaient cédé après plusieurs années et elles flottaient alentour.
Ce que le capitaine faisait, il disait, quelqu’un veut tirer sur les mines, alors on s’emparait chacun d’un fusil (Enfield calibre) 303 et on allait les canarder. Personne ne touchait quoi que ce soit. Et puis il y avait un artilleur, Davey Marsh. Bon sang, je n’ai pas réussi à me souvenir de son nom pendant des années. Il servait les Bofors, 40 mm, un coup, boum, et il a réussi à l’avoir à travers le sabord.
On était à Inchon quand ils évacuaient Inchon, on a accompagné là-bas parce que les Américains brulaient tout pour que les Chinois ne puisse pas mettre la main sur grand-chose. Une histoire drôle c’est qu’on avançait avec et ils ont dit : « Les gars si vous voulez de l’épicerie, arrêtez-vous, on a des barges remplies, on vous donne tout ce que vous voulez. » Alors cette barge s’est approchée et il y avait du saumon en boite. De la conserverie Todd, qui se trouvait à Victoria, du saumon en conserve. Des boites de pêches et de poires, elles sont toutes parties dans le mess des chauffeurs, on a eu les bons trucs. Et puis ce chef, il était magasinier, Van Haff il s’appelait, je crois qu’il vient juste de mourir. Et il y avait des boites de viande congelée qui arrivaient et c’était écrit mouton sur le côté. Alors au fur et à mesure que ces boites montaient à bâbord, elles passaient par dessus bord à tribord. Ils ne voulaient pas de mouton, ils les faisaient juste passer par dessus bord.