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Transcription
Relativement au jour J, la partie du sud de l’Angleterre n’était pas accessible aux civils, personne ne pouvait aller dans la partie sud de l’Angleterre pendant plusieurs mois. Et nous attendions d’être déployés. Et nous ne savions pas si c’était vrai ou non, mais nous avions une bonne idée parce qu’avant de quitter l’Angleterre, nous avions été interviewés par Churchill, le premier ministre, le roi (George VI) et Montgomery (le maréchal Bernard Law Montgomery a commandé toutes les forces terrestres des Alliés pour l’opération Overlord (bataille de Normandie)) et Eisenhower (commandant suprême de la Force expéditionnaire alliée), ils sont tous venus nous rencontrer. Ils voulaient voir qui étaient ces Canadiens assez fous pour essayer cela. Parce que nous avions essayé à Dieppe (raid du 19 août 1942 sur la ville, les régiments canadiens ont subi d’énormes pertes) et nous avions échoué, ça avait été un désastre.
Nous n’avons pas beaucoup dormi, et beaucoup d’hommes ont été malades. Je n’étais pas malade, j’étais un bon matelot. J’aurais même dû être dans la Marine. Chaque fois que nous faisions des débarquements ou quelque chose du genre, ou que nous traversions en bateaux, j’étais bien. Beaucoup d’hommes étaient malades. C’était très difficile.
Il n’y avait pas beaucoup de conversations. Un des sergents dont je me souviens, nous avions reçu une lettre d’Eisenhower disant que nous étions à la veille de commencer cette grande croisade et je me souviens que ce sergent avec qui j’étais est devenu très excité. Il se préparait depuis deux ans, et maintenant c’était vrai. Je n’étais pas très excité, j’appréhendais cette chose, je n’avais rien fait de tel auparavant.
Tout le monde avait peur, car nous ne savions pas ce qui nous attendait. Nous embarquions sur ce qu’ils appelaient une péniche-tank de débarquement (navire d’assaut amphibien utilisé pour débarquer des tanks sur les plages). C’était une péniche qui transportait approximativement quatre transporteurs de mitrailleuse Bren (ou transporteur universel, un véhicule blindé léger à chenilles) ou deux tanks. Nous avons accosté avec la porte ouverte, et nous avons conduit à l’extérieur. Heureusement pour nous, nous étions la deuxième vague, notre débarquement n’a pas été trop mauvais.
Naturellement, on apprend beaucoup de choses pendant une bataille qui ne se trouvent pas dans les livres d’entraînement. Je creusais une tranchée la première nuit, et l’officier est venu et m’a dit: « Mais que fais-tu! ». J’ai dit: « Je creuse une tranchée ». Il m’a dit: « Mets-toi sous ces arbres », parce que nous étions supposés creuser sous les arbres pour être camouflés afin qu’ils ne sachent pas où nous étions. Mais nous avions l’avantage dans les airs, nous n’avions pas à nous soucier de cela. Et sous un arbre était le pire endroit où creuser. Si l’obus frappait la cime d’un arbre, celui-ci allait nous écraser. Nous avons donc rapidement appris à ne pas creuser le long d’un mur ou sous un arbre.
Rommel avait dit: « Si nous ne les arrêtons pas aux plages, nous ne les arrêterons pas du tout ». Donc il voulait vraiment nous arrêter aux plages, et a donc utilisé tout ce qu’il avait contre nous.
Tu essaies tout le temps de te protéger. Souvent, j’entends les gars dire qu’ils se souviennent de ci, ou de ça… je ne me souviens pas de grand-chose. Je sais que j’avais extrêmement peur, comme tout le monde. Mais c’est pour ça que j’aime Bob, Bob Gardner était mon meilleur ami. Il était dans notre peloton de mortier. Bob n’a jamais démontré d’anxiété. J’aimais être à ses côtés, car il me relevait toujours le moral. Il était comme ça, n’a jamais fait preuve de peur jusqu’à ce que nous participions à ce débarquement dans l’estuaire de Scheldt (Belgique et les Pays-Bas, 2 octobre au 4 novembre 1944, opérations menées pas la 1re Armée canadienne afin de libérer les îles de l’estuaire des défenses allemandes). Nous sommes partis dans des Buffalos, des véhicules amphibiens, et Bob était assis là et frottait sa bague. Je me souviens qu’il m’a montré la bague que sa blonde lui avait donnée, il y avait une petite croix dessus. Il était assis là et la frottait. Ce n’était pas son genre. J’ai dit: « Qu’est-ce qui se passe? ». Il a dit: « Je n’aime pas ça ». J’ai dit: « Bof! On a vu pire ». Bien sûr, si un gars a le moral à plat, tu le remontes. J’ai dit: « Non, on a vu bien pire que ça ». Mais il a dit: « Je n’aime pas ça ». J’ai regardé le Buffalo d’à côté, et le brigadier s’y trouvait. J’ai dit: « Voyons! Si le brigadier est là, ça ne peut pas être si pire ». Mais c’était si pire.
Nous avons installé nos mortiers derrière la grange. Bob et moi nous étions battus toute la nuit, c’était une très mauvaise nuit. Nous ne nous sommes pas couchés avant huit heures du matin ou quelque chose du genre. Mais vers onze heures, un obus a atteint le toit de notre grange, et des éclats d’obus et de la poussière sont tombés. Le mot s’est passé, y avait-il des blessés? Blackie a dit qu’il avait été touché au genou. J’ai donc brassé Bob, et j’ai dit: « Bob. Blackie a été touché. ». Et alors, Bob a roulé sur le côté. Il avait un tout petit morceau d’obus sur sa tête, un tout petit morceau, il y avait à peine de sang. Il était mort.
C’était très difficile. Je n’ai jamais été le même. J’étais à bout de nerfs. Je suis sorti sur la route, et ils amenaient des prisonniers allemands le long de la route et j’ai saisi leur mitrailleuse Bren, et j’allais tous les tirer. J’étais si fâché. J’ai quand même fait mon travail par la suite, s’ils demandaient des tirs de mortier, j’étais là. Mais je ne prenais plus autant de risques, je ne dormais plus à l’étage dans les maisons, j’allais dans le sous-sol. Je prenais plus de précautions. J’ai fait mon travail, mais j’étais vraiment à bout de nerfs.