Gerry Edward « Mac » Macdonald a servi dans l'armée canadienne pendant la Deuxième Guerre mondiale. Voir ci-dessous ses souvenirs du Jour J, l'invasion Alliée de la Normandie le 6 juin 1944.
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Transcription
Je vais vous raconter à propos du jour J, c’était, ça a été une sale journée évidemment c’était vous savez, et ça a été annulé là-bas pour deux jours à cause du temps vous savez, reporté. Et ils ont annulé le truc – autre époque – et tout le monde sait aujourd’hui ce qui était en train de se passer. Alors ils ne pouvaient pas faire machine arrière dans une guerre alors il fallait qu’on prenne des risques. Donc, allant de l’avant j’étais dans un de ces gros navires de transport de troupes et à environ 10 milles de la Normandie, un endroit qui s’appelait St Aubin sur Mer c’était la plage, deux plages, Bernières sur Mer et St Aubin sur Mer. Mais moi j’étais avec le North Shore Regiment, Compagnie C, le jour J, alors on est allés à St Aubin sur Mer. Et on est arrivé là-bas tôt le matin, très tôt le matin. Et j’avais le mal de mer, évidemment, comme tout le monde, je suppose. Alors quand on a atteint la plage et ensuite je descendais du LCI, LCT, LCA, peu importe le nom que vous leur donnez. Et alors que je descendais, après qu’on soit descendus, on a été heurtés par un obus de mortier et ça a fait remonter la rampe d’un coup dans notre figure, tout le monde s’est retrouvé par terre comme ça. Après ils ont presque réussi à nous éliminer. Et c’est arrivé la deuxième fois, on est descendu sans problème mais évidemment, ces allemands ils nous tiraient dessus, juste là vous savez. Mais vous n’aviez jamais le temps, j’avais le mal de mer de toute façon, alors ça ne faisait pas de différence pour moi. Mais vous ne pensez pas à ces choses. Et quand vous êtes jeune, c’est complètement différent de toute façon. Ça ne m’a pas fait peur sur le moment, mais plus tard, quand tout ça vous frappe, vous savez, vous dîtes. En fait, pendant dix jours avant ça – je n’ai su ça qu’un an plus tard – j’étais dans un hôpital en Belgique à cause de la diphtérie, le 18 mars (1945). Et ma sœur m’a écrit et elle m’a raconté au sujet de mon pauvre frère, Ronny, il était avec les Cape Breton Highlanders. Et ce qui s’est passé, elle m’a raconté, elle a dit, Ron a été tué le 26 mai 1944, et il avait 23 ans à ce moment-là. Vous voyez, je ne savais pas. Et c’était le même jour que le décès du Président Roosevelt (Président américain Franklin Delano Roosevelt est décédé le 12 avril 1945). Ça faisait deux celui là là-bas et Ron, mon frère préféré, évidemment. Toutes ces choses ça arrive. Mais vous n’avez pas le temps d’y penser. Trop excitant, c’est trop, il se passe tellement de choses. Difficile de se souvenir de toutes ces choses. Mais le temps passant, ces choses là vous reviennent. Et vous pensez que vous n’allez jamais oublier, les gens, vous devriez oublier ces choses, mais vous ne pouvez pas les oublier. Et plus tard, c’est là que vous avez le traumatisme des bombardements qui se ressent. Or vous ne savez pas que vous êtes commotionné. Je disais, bon, je ne voulais pas, j’étais commotionné. Je crois que je le suis toujours. Je pense que le temps le plus long où j’ai porté mes brodequins ça a été pendant une semaine, je n’ai pas dormi pendant environ une semaine. Et ce qui c’est passé là-bas, je me suis endormi en quelque sorte, c’était juste en dehors de Caen (Normandie, France) là-bas. Et on était en haut d’une colline comme ça pas très loin de Caen. Et on avait une tente installée là haut. Alors en tout cas, je ne sais pas pendant combien de temps j’ai dormi mais, je me suis réveillé et quand je me suis endormi ce n’était rien, c’était l’heure du diner par là et une belle journée et j’étais, c’était tout noir. Je ne savais pas où j’étais. Je me suis réveillé et ça m’est revenu vous savez. Et j’étais reparti dans cette tente là où se trouvent tous ces cadavres et j’étais juste au milieu. Alors en tout cas, il a fallu que je marche sur ces gars et tout le reste à l’extérieur à l’heure du diner à peu près aussi, je me souviens qu’ils avaient l’habitude de faire différentes choses comme ça. Et quand je suis sorti, des gars me voient, ils ont dit, ils m’ont regardé et ont dit, ça va ? On t’a presque enterré ; j’aurais pu être enterré vivant. Et c’est arrivé d’autres fois je pense. On a quatre ou cinq jours sans dormir. Mais ils auraient pu me prendre et creuser un trou et me mettre dedans. Et le temps passant, les années passant, ces choses vous reviennent.