John « Jake » Pope Beer a servi dans l’armée canadienne pendant la Deuxième Guerre mondiale et raconte ses expériences du JourJ.
Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.
Transcription
La chose la plus impressionnante qui me soit jamais arrivée, c’est d’avoir débarqué en Normandie [France] le Jour J [6 juin 1944]. Je ne vois pas comment on peut surpasser ça. Vous savez, c’est le plus grand débarquement amphibie [forces débarquant de la mer] jamais réalisé en temps de guerre de tous les temps. Ça ne se reproduira plus jamais à cause des bombes atomiques. C’est ce qui s’impose à mon esprit. Quatre années d’entraînement en Angleterre avant de prendre part au combat, c’est très, très long. Ça fait beaucoup d’entraînement, non? Et nous avons participé comme toutes les autres unités canadiennes, toutes les divisions, pas seulement la 3 e [Division de l’infanterie canadienne]. Dans des exercices à différentes échelles, certains d’entre eux dirigés par le Général [Sir (qui deviendra Lord et Maréchal ) Bernard Law] Montgomery lui-même quand il était commandant [en chef] du Commandement sud [ 21e Groupe d’armée britannique] en Angleterre, nous faisions de l’entraînement amphibie, nous nous entraînions à débarquer sur les plages et ce genre de choses. La quantité d’entraînement que nous faisions était extraordinaire. Vous savez, après quatre ans d’entraînement, vous en avez vraiment assez. Vous vous dites : « Quand est-ce qu’on va enfin se battre? » Ensuite, vous combattez et en fait, ce n’est pas aussi drôle que ce que vous imaginiez. C’est un drôle de monde. Et bien sûr, pendant cette période de quatre ans, on m’a envoyé prendre d’autres cours en Grande-Bretagne, donc j’ai vraiment eu beaucoup de formation. Certains de ces cours étaient donnés par l’Armée britannique et d’autres par l’Armée canadienne. À cette époque, j’étais commandant adjoint d’une batterie de huit pièces. Il y avait un major qui assurait le commandement et j’étais le commandant adjoint. L’effectif d’une batterie était juste en dessous de 200 personnes. Il y avait deux troupes, chacune avec quatre canons et le Jour J, pendant le débarquement initial, nos canons et ceux des autre régiments dans la 3e Div[ision] - c’était la seule division canadienne qui participait au débarquement le Jour J - ils tiraient sur terre à partir du bâtiment d’assaut pendant qu’on emmenait les canons par barge sur terre. Tout cela faisait partie du bombardement préliminaire le jour en question. En fait, je n’étais pas membre d’une de ces troupes. J’étais dans l’administration, comme capitaine de batterie, commandant adjoint d’une batterie. J’étais chargé de l’élément administratif de la batterie. J’ai débarqué le Jour J mais j’étais dans le deuxième échelon [formation de troupes, navires, aéronefs, etc., en rangées parallèles qui s’élargissaient progressivement [de chaque côté] l’une derrière l’autre], pas dans le premier. Ça ne me dérange pas de vous raconter ma première mission qui a été plutôt gênante. Je suis allé trop loin – de l’endroit où nous avons débarqué sur la plage, j’étais sensé monter jusqu’à la première position d’artillerie, là où se trouvait les canons parce que j’avais toutes les munitions supplémentaires, la nourriture, le carburant et tout ce dont ils avaient besoin. J’étais en haut de cette route et [j’étais sensé] tourner sur la gauche mais j’ai manqué le tournant et j’ai continué à monter. J’ai fini par me retrouver sur les lignes d’attaques où se trouvait toute l’infanterie. Un officier du corps des blindés m’a vu avec toute cette grande file de véhicules sur la route et il m’a dit : « Vous sortez de là, pardon, vous me sortez ces maudits véhicules de là! C’est la ligne de défense avant! » Alors on a dû faire demi-tour avec tous les véhicules, retourner sur nos pas et sur le chemin du retour j’ai trouvé l’emplacement des pièces d’artillerie de l’infanterie. C’était très gênant, mais on apprend beaucoup en se trompant.