Marguerite Marie « Marge » Plante (Source primaire) | l'Encyclopédie Canadienne

Project Mémoire

Marguerite Marie « Marge » Plante (Source primaire)

Marguerite Marie « Marge » Plante a quitté l’Alberta pour rejoindre le Service féminin de l’Aviation royale canadienne, travaillant comme chronométreuse et dactylographe lors de la Deuxième Guerre mondiale. Lisez et écoutez alors qu’elle explique son engagement, la mort de son frère en Italie, ses interactions avec des prisonniers de guerre, et les célébrations du jour de la Victoire en Europe.

Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.



Transcription

Je m’appelle Margaret Marie Plante, et mon nom de jeune fille c’est Margaret Marie St Germain. Et je suis née à Peace River en Alberta le 28 août 1922. De Edmonton je suis allée à Rockcliffe en Ontario pour faire mes classes. Il y avait beaucoup de filles dans ce train la nuit où nous sommes partis d’Edmonton. Et mon amie avait un jour de retard, alors elle n’est pas venue avec moi, donc j’étais toute seule dans ce train, sans connaître qui que ce soit. Et pendant que le train traversait les grandes plaines de l’ouest, je regardais et vous savez, tout ça m’était complètement étranger. Je n’avais même jamais vu de ville. Et j’ai commencé à me sentir infiniment triste en regardant les grandes plaines et il n’y avait pas un arbre et après le soleil s’est couché et c’était le début de l’hiver. Et je me suis dis, dans quoi est-ce que je me suis embarquée et où est-ce que je vais. Et je me sentais tellement seule à ce moment-là que je me suis assise et j’ai pleuré, là dans le train. Et ils m’ont donné une affectation : la 3ème Ecole d’instructeurs de vol à Arnprior en Ontario. Bien-sûr, je ne connaissais cet endroit ni d’Eve ni d’Adam.

Je suis allée dans le bâtiment de l’administration le lendemain matin pour aller voir l’officier du service féminin, elle voulait faire connaissance avec moi. Elle a dit, demain matin à 8 heures, a-t-elle dit, vous vous présentez à l’escadrille D, comme chronométreuse. Et j’ai demandé, qu’est-ce que c’est que ça ? Elle a dit, ça consiste à marquer le temps du lieutenant pilote. Elle m’a dit, vous allez travailler dans les hangars. Et j’ai ouvert la porte pour entrer et le long des murs des deux côtés, il y avait tous, ils étaient assis, tous ces hommes. Oh, j’étais tellement gênée. J’étais tellement timide et aussi rétro, vous savez, une fille de la campagne. Quoiqu’il en soit, je les ai regardés, et ils commencent à me siffler et oh, et puis ça n’a fait qu’empirer.

Et alors en février 1944, j’ai été envoyée outre-mer. Et les filles n’étaient pas obligées de partir outre-mer si elle ne voulaient pas. Donc, je suis allée voir l’officier du service féminin et je lui ai dit, j’ai dit, je crois que je ne veux pas partir outre-mer parce que mon frère est là-bas ; il était avec la 1ère division d’infanterie canadienne, il est parti là-bas en 1939 avec le Loyal Edmonton Regiment. Et il m’a dit de ne pas venir en Angleterre, à cause de ces bombardements d’enfer. Et il disait, ce n’est pas très sympa ici, il disait, je suis à plus de cent- trente kilomètres de Londres. Et il disait, je sers ce canon antiaérien tout le temps, il disait, et les avions volent. Je regarde les combats tournoyants très souvent. Alors il a dit, tu restes au Canada, il a dit, ne viens pas ici, il a dit, c’est dangereux de venir par la mer il y a des u-bootes dans l’océan. Alors j’ai dit, ça m’est égal de mourir, je n’ai pas peur de mourir mais je ne veux pas me noyer. Elle a dit, pas de problème. Elle a dit, il y aura d’autres filles qui prendront votre place. Et il y en avait, il y avait d’autres filles qui voulaient partir outre-mer. Mais je l’ai un peu regretté, vous savez, dans un sens, après que ça soit fini. J’aurais pu voir mon frère, parce qu’il n’est jamais rentré à la maison, il a été tué dans la campagne d’Italie le 12 décembre 1944.

On était toutes en poste à Lachine au Québec. Il y avait beaucoup de travail de dactylographie à faire là-bas : des piles de papiers, des rangées et des rangées de noms d’hommes qui revenaient d’outre-mer pour être rendus à la vie civile et vous savez, c’était des numéros et grade et nom et combien d’argent ils allaient toucher. Et vous savez, les premiers qu’on a faits c’était, il y avait environ 1500 prisonniers de guerre qui étaient de retour, qui avaient passer toutes ces maudites années dans les forces aériennes comme prisonniers de guerre, dont l’avion avait été descendu en territoire ennemi et autres endroits. Et en fait, on est vraiment allées rencontrer ces gars quand ils sont arrivés dans la salle d’exercices. Ils étaient en très, la confusion pour beaucoup d’entre eux, ils venaient juste de sortir des hôpitaux en Angleterre, ils n’étaient pas au courant des nouveautés et ils n’avaient pas été bien nourris. Alors on les a bombardés de nourriture, hors d’œuvres et des mets qui sortaient de l’ordinaire et on a fait le tour en leur distribuant tout ça. Et ça en a rendu malade beaucoup d’entre eux. Et puis notre commandant, le commandant Dawes – c’était la Brasserie Dawes. C’était notre commandant à Lachine. Et il leur a donné à tous des caisses de bières gratuites. Et ils n’avaient plus l’habitude de la bière non plus. Alors certains d’entre eux ont été très malades.

L’autre contingent de prisonniers qui est arrivé, ils n’ont plus fait ça après. Ils ne leur ont pas donné de bière et leur ont donné juste des sandwiches ordinaires, rien d’extravagant. Je distribuais de la nourriture à un de ces gars et il a attrapé le plateau tout entier et il s’est assis là et s’est mis à pleurer. Il a pleuré, pleuré, pleuré et je dirais que c’était un homme de 25, 26 ans. Il y avait vraiment quelque chose qui n’allait pas chez lui. Alors on avait quelques préposés aux soins et différents, des gens du corps médical là-bas. Alors j’ai été cherché l’un d’entre eux, j’ai dit, ce gars là-bas, il est vraiment très mal en point. J’ai dit, il pleure et ne peut plus s’arrêter, je crois qu’il est, qu’il y a quelque chose qui ne va pas chez lui. Alors ils sont venus le chercher et l’ont emmené hors de la salle, pour aller à l’hôpital je suppose.

Ensuite, mai 1945, mon amie et moi-même étions en ville, on est allées voir ce film « Rhapsodie en bleu », c’était un film tout récent, une première, et c’était là-bas dans un grand cinéma sur Sainte Catherine. Alors on a eu la journée, je ne sais pas, ça devrait être un samedi, et je ne sais pas ce que c’était que le 5 mai 1944 [8 mai]. Mais c’était le jour de la Victoire en Europe. Alors quand on est sorties de cette projection qui avait lieu en matinée, il y avait des papiers qui volaient partout. J’ai dit, qu’est-ce qu’il se passe par ici bon sang. Et il y avait des voitures qui klaxonnaient, des gens qui montaient et descendaient la rue en courant. Il y avait juste un, c’était comme un zoo. Et, oh, mon amie dit, la guerre est finie. J’ai dit, et bien, on ferait mieux de repartir à la caserne. On était à une quinzaine de kilomètres de Lachine, on devait prendre un bus. Mais on ne pouvait pas prendre de bus, les voitures étaient bloquées, tout était bloqué. Alors on a couru jusqu’au coin, quelqu’un a attrapé mon chapeau, a pris mon chapeau, je n’avais pas de chapeau. Et ensuite quelqu’un d’autre a coupé la cravate de mon amie, et elle a sacrément lutter avec eux, il lui a coupé sa cravate. J’ai dit, on ferait mieux de déguerpir, ils vont nous prendre nos uniformes.

Alors cette nuit-là, le commandant a organisé un grand bal de la victoire. A ce bal, je portais une robe noire, une petite robe noire avec des manches bouffantes et avec une ceinture dorée. Et je portais des chaussures avec des talons de 5 cm de haut pour aller avec. Et on avait des bas en nylon. Ils étaient tellement fins et vous deviez avoir cette couture droite. J’ai toujours porté une gaine, vous n’aviez pas le droit de porter des jupons vous savez. Vous n’aviez pas le droit de porter de combinaison avec votre uniforme. Alors vous receviez un porte-jarretelles, vous savez, un porte-jarretelles. J’ai toujours porté une gaine si je pouvais en avoir une.

Alors je portais les bas, un collier de perles, c’était des fausses perles que je portais avec ça. Je, oh, on a passé un bon moment. C’était le bal le plus sympa auquel j’ai jamais assisté. La guerre était finie.

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