Rudy Deutsch (source primaire) | l'Encyclopédie Canadienne

Project Mémoire

Rudy Deutsch (source primaire)

Ce témoignage fait partie de l’archive du Projet mémoire

Rudy Deutsch a servi avec le corps médical de l’armée canadienne pendant la Deuxième Guerre mondiale.


Prenez note que les sources primaires du Projet Mémoire abordent des témoignages personnels qui reflètent les interprétations de l'orateur. Les témoignages ne reflètent pas nécessairement les opinions du Projet Mémoire ou de Historica Canada.

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Rudy Deutsch
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Char utilisé pour récupérer les soldats blessés, Pays-Bas.
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Carnet de service de Rudy Deutsch, 4 janvier 1943.
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Certificat d'identité de la Croix-Rouge Convention de Genève de Rudy Deutsch, 8 septembre 1943. A Achterveld, aux Pays-Bas, pendant les derniers jours de la guerre, M. Deutsch et son sergent conduisaient dans un territoire désert, puis accidentellement dans le territoire allemand pour aider une femme hollandaise blessée. Alors que M. Deutsch et son sergent étaient en train de transporter cette femme sur un brancard, les allemands qui étaient cachés dans une maison voisine sont apparus et ont pointé leurs armes sur M. Deutsch. Les allemands espéraient les prendre tous les deux comme prisonniers. Ca a été la première et seule fois que M. Deutsch a sorti sa carte d'identité de la Croix Rouge Convention de Genève et que les allemands les ont laissé partir. Ils ont ainsi pu rapidement retourner dans leur poste régimentaire, et le Major Fairfield, l'officier médical, a sauvé la vie de l'hollandaise. La carte de la convention de Genève est un accord mondial pour protéger le personnel de la Croix Rouge et des Premiers Secours. Quand quelqu'un a cette carte, il ne peut pas porter d'armes, et les allemands respectaient aussi cet accord.
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Prospectus de propagande lancé par les allemands en Italie, 1944.
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Déclaration de gratification de service de guerre, 6 décembre 1945.
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Mais il y a eu de nombreux livres écrits qui parlaient de la ligne Hitler et de la Vallée de Liri, mais ils n’ont pas vraiment raconté toute l’histoire parce que c’était tellement épouvantable.

Transcription

Donc après avoir terminé notre entraînement de base à Charmouth [Angleterre], on nous laissait choisir dans quelle unité on voulait aller, il y avait l’Ordonnance et il y avait l’infanterie et il y avait les Transmissions et toutes ces différentes unités. Et j’ai choisi d’aller dans le corps médical de l’armée canadienne. C’était quand ils nous ont bougé pour aller dans les différentes unités et je suis allé à Toronto pour me former là-bas à des fins médicales. Et c’est comme ça que je suis devenu brancardier.

C’était mouvementé. Chaque jour, il y avait la peur de ne pas survivre et être encore là le lendemain à cause de l’intensité des combats et tout ce qui s’ensuit. J’ai rejoint l’unité à la rivière Moore, traversant à la rivière Moore, c’était avec la Prince of Patricia’s [Princess Patricia’s Canadian Light Infantry] à ce moment-là. Après la traversée de la rivière Moore, il y avait un profond ravin, une de mes premières expériences, on transportait ce gars qui était blessé, on était quatre, pour transporter ce gars blessé hors du ravin. J’étais à la tête du brancard et je n’étais pas tout à fait en parfaite forme physique, vous savez, un peu comme mon appendicite, J’ai dit aux autres gars, « Il faut qu’on pose le brancard » J’ai dit « Je ne peux pas aller plus loin. » Et on l’a posé juste sur une mine, une mine allemande, et il a sauté. C’était l’une de nos premières mauvaises expériences.

Le deuxième jour, on était en rang à midi, pour notre déjeuner et j’attendais le nez en l’air, j’ai regardé dans le ciel et il y avait trois avions qui sont apparus du côté du soleil. Je ne savais pas qu’il s’agissait de Messerschmitt allemands et ils avançaient en zigzag tout autour. Et je me suis mis au beau milieu de la rue pour les voir et regarder où ils allaient. Et l’un deux est arrivé droit sur la rue et a fait feu. Et il m’a loupé et tous ces gars qui se essayaient de se cacher et de s’échapper, du sang et des tripes partout autour. Particulièrement un type qui avait eu la jambe flinguée vraiment moche, et je mettais un bandage ou un pansement de combat sur lui pour essayer d’arrêter le sang. Et l’officier médecin était arrivé et il dit «Rudy, dépêche-toi, sort ton canif. » Alors je sors mon canif et je commence à couper les jambes de son pantalon pour découvrir sa jambe. Il a dit « Non, coupe-lui la jambe. » Alors je lui ai coupé la jambe avec un canif. Bon, je vous le dis, je n’ai pas mangé pendant trois jours après ça. C’était, j’étais complètement en état de choc et tout ça.

Mais il y a eu de nombreux livres écrits qui parlaient de la ligne Hitler et de la Vallée de Liri, mais ils n’ont pas vraiment raconté toute l’histoire parce que c’était tellement épouvantable. Comme pour la 2ème brigade qui a fait une percée dans la ligne, ils les ont envoyés là, c’était au milieu des barbelés et des mines et ainsi de suite. Ils devaient passer à travers en coupant les fils qui étaient reliés aux mines et ainsi de suite. Et ils ont réussi à se frayer un passage, en coupant à travers et ont coupé des fils avec une ruche. Ils avaient un long tube qu’ils enduisaient d’explosif, et ils l’enfonçaient dans les barbelés et ils faisaient un trou dans les barbelés, comme ça ils pouvaient passer à travers. C’était tellement intense et tant de vies ont été perdues. On a perdu, je dirais, entre 40 et 60% de la brigade, des Pats, les Seaforth [Highlanders] et les Eddies [Loyal Edmonton Regiment]. Et quand vous passez à travers les barbelés, il y avait des bunkers allemands et des canons et leurs chars, des 88 mm étaient enterrés et nos avions et notre artillerie n’arrivaient pas à les trouver et ils… Certains des gars étaient empilés devant les bunkers allemands comme du bois cordé. C’était tout simplement incroyable.

Trois jours plus tard, après avoir fait une percée dans la ligne, et ceux qui étaient en avant, le reste des unités a avancé sur Pontecorvo, ils devaient pousser les blessés et les tués avec des bulldozers sur le côté pour pouvoir avancer. Et on n’en parle jamais, mais je l’ai vu de mes propres yeux. Et après trois jours de rassemblement des morts et des blessés, les corps ont commencé à sentir, alors les bulldozers sont arrivés, ont creusé un trou et les a poussés dans ce trous et les a enterrés. Avec les allemands, les animaux et tout le reste. C’était tout simplement incroyable. Mon cousin Charlie, a été tué là. Je l’ai ramassé, il avait une blessure de balle qui lui travaersait la tête.