En 2009, le Projet Mémoire a interviewé William Hitchon, un ancien combattant de la Deuxième Guerre mondiale. L’enregistrement (et la transcription) qui suit est un extrait de cette entrevue. William Hitchon est né le 27 mai 1922 à Belleville, en Ontario, et il s’est enrôlé dans Forces armées à l’âge de 18 ans. Il a servi dans le 15e Régiment d’artillerie de campagne pendant la guerre. Après sa formation à Petawawa, en Ontario, et à Debert, en Nouvelle-Écosse, il est envoyé au Royaume-Uni. Il a également servi en Italie et en Afrique du Nord. Dans ce témoignage, William Hitchon évoque ses fonctions à l’étranger, notamment la protection de la famille royale en 1943. Il relate également les bombardements en Angleterre, ainsi que le fait d’avoir marché sur une mine terrestre active, mais défectueuse. William Hitchon a servi de 1940 à 1945, puis, après la guerre, il est retourné au Canada et s’est finalement installé à Trenton, en Ontario. Il est décédé le 14 mars 2012 à l’âge de 89 ans, à Quinte West, en Ontario.
Prenez note que les sources primaires du Projet Memoire abordent des temoignages personnels qui refletent les interpretations de l'orateur. Les temoignages ne refletent pas necessairement les opinions du Projet Memoire ou de Historica Canada.
Transcription
Je me suis engagé dans l’armée en juillet 1940. J’ai essayé d’y entrer l’année d’avant, mais ils m’ont dit que j’étais trop jeune. Alors on s’est engagés à Belleville [Ontario]. On est allé de là jusqu’à Kingston et on était à Kingston, à ce moment-là on était dans le 15ème régiment d’artillerie de campagne. Puis ils nous ont envoyés à Petawawa [Ontario] et à Petawawa, ils nous ont fait passer du 15ème régiment d’artillerie de campagne au 5ème régiment d’artillerie anti-aérienne légère. A l’automne 1941, on est partis à Debert en Nouvelle Ecosse. On y a seulement passé une semaine et on est partis pour l’Ecosse. C'est-à-dire, on a embarqué sur le NCSM Pasteur. On est arrivé en Ecosse et ils nous ont envoyé à Colchester en train. Pendant l’été 1943, on a été choisis, la batterie dont je faisais partie, a été choisie pour assurer la protection anti-aérienne pendant les vacances de la famille royale à Sandringham. On est allés là-bas et on est arrivés la veille du jour où ils devaient eux-mêmes arriver, et j’avais une bicyclette et j’ai fait une sortie à bicyclette. Et j’ai vu deux fillettes et un type debout sur le bord de la route. Ils avaient des bicyclettes et je leur ai demandé : « Vous avez un problème? » Ils ont répondu : « Oui, il y a une chaine de vélo qui a déraillé. » « Et bien, ce n’est pas un problème. » Ai-je dit. Je l’ai remise en place, ils m’ont remercié et j’ai repris ma route. Et cette nuit-là, la reine est venu jusqu’à l’endroit où on logeait, au dessus des écuries royales et elle voulait remercié le soldat qui avait remis la chaine du vélo de la princesse Elizabeth en place. Et Evert Fairman, qui était notre capitaine a dit : « Etes-vous certaine que c’était un de nos gars? » Et elle répond : « Oui, il était canadien, il était grand et roulait en bicyclette. » Et Evert a dit : « Il n’y a qu’un seul de nos gars qui a un vélo et il est grand. » Alors après que la reine soit partie il m’a appelé et a dit : « Est-ce que tu t’es occupé de la chaine de vélo d’une fillette? » J’ai répondu : « Oui. » «Est-ce que tu sais qui c’était? » J’ai dit : « Non. » « Bon, c’était la princesse Elizabeth. Et c’était son père et sa sœur qui étaient avec elle. » Je suis descendu voir des amis qui étaient dans le PLDG [Princess Light Dragon Guards], et suis arrivé là-bas juste avant l’heure du dîner, alors je ne voulais pas aller les voir, c’était à Worthing. Et je descendais la rue et il y avait un défilé de la force aérienne en bas de la rue, à deux cents mètres. Et les avions arrivent et ils ont largué deux bombes sur la queue du défilé. Et elles ont tué, je ne sais pas combien de gens elles ont tué, mais il y a eu 21 blessés. Et ils ont mitraillé la rue en rafale, j’avais un pied sur le trottoir et l’autre sur la chaussée et je n’arrivais pas à bouger. Je ne croyais pas qu’il était possible d’avoir tellement peur que vous ne pouvez plus faire le moindre mouvement. Le lendemain, les avions sont revenus et je me trouvais un peu plus haut dans la rue, et ce jour-là je me suis caché derrière une borne à incendie. J’ai pu bougé cette fois-ci. Un autre truc bizarre s’est passé. On était en Italie et ils nous avaient déplacés, on avait une permission d’un mois au retour du front, et ils nous ont mis pile devant l’artillerie lourde anglaise. Et quand ces canons tiraient ils vous soulevaient de terre d’au moins deux centimètres et demi si vous étiez allongé sur le sol. Les allemands essayaient évidemment de détruire ces gros calibres, alors on essuyait des tirs plutôt nourris. Et Léo Darache et moi-même on était en train de jouer aux cartes. Et il devait se rendre aux toilettes. Et il est sorti et il venait juste de passer la porte que je l’ai rappelé. Il a demandé « Qu’est-ce que tu veux? » J’ai dit : « Où est-ce que tu serais si je ne t’avais pas appelé? » Et il s’est retourné et est ressorti et 30 secondes après il rentrait et a dit : « Je serais mort. » Il a dit : « Il vient juste d’y avoir un tir sur les latrines. » Et je ne saurai jamais pourquoi je l’ai rappelé. Juste quelque chose qui m’a dit de le rappeler. Je ne saurai jamais pourquoi. Une autre fois j’ai marché sur une mine et on était trois à traverser ce champ et j’ai entendu le déclic sous mon pied et je leur ai dit : « Foutez le camp, j’ai dit, je viens de marcher sur une mine. » Et ils se sont pas mal éloignés, je me suis jeté sur le sol, je croyais qu’elle allait m’explosé dessus et c’était un raté, elle n’a pas explosé. Bigre, je crois bien que je n’avais pas un fil de sec sur moi.