Winifred Field a servi dans le service auxiliaire territorial britannique pendant la Deuxième Guerre mondiale.
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Transcription
C’était soit l’hôpital, les munitions ou l’armée de terre. On ne nous appelait pas sous les drapeaux mais il ne se passait pas grand-chose. Et il y avait de nombreux postes supplémentaires, comme chauffeur. Et j’ai pensé, oh oui, j’aimerais beaucoup conduire une voiture. Je me voyais bien conduire les généraux et tout ça. Je n’étais pas assez grande. Vous deviez faire un mètre soixante-deux et moi je ne faisais que un mètre cinquante-cinq. Et en tout cas, bien sûr je m’étais engagée, alors il fallait que j’aille quelque part. Alors j’ai dit, l’armée de terre je suppose. Donc c’est comme ça que ça s’est passé. Et c’était bien, vraiment. Comme disaient mon père et ma mère, et bien si c’est vraiment ce que tu veux, parce que je crois que j’avais 17 ans et vous deviez avoir 18 ans mais je crois que j’avais 17 ans.
Mais, oh, le premier jour où on est arrivés et qu’on est allé au camp, ils nous ont fait trois piqûres de vaccin et on était sur des bancs et vous n’avez jamais vu autant de femmes et de filles malades de toute votre vie. C’était terrible. On avait trois vaccins, un pour la rage je crois, je ne sais pas à quoi ils servaient, mais ça nous a rendues malades. Et c’était l’artillerie royale ; nous (les femmes du service auxiliaire territorial) on était leurs auxiliaires et c’était une force de combat. Parce que vous aviez, c’était un camp fixe et il était entouré de cinq ou six gros, bon, ils de pistolets tireurs de petit-pois aujourd’hui, mais c’était des gros canons à l’époque, c’était des calibres 94 et 112,5 (mm), ce qui en faisait de gros canons de campagne. Et il y en avait cinq ou six. Et puis au milieu vous aviez vos canons qui étaient placés tout autour comme ça et puis au milieu, vous aviez votre pointeur automatique (une machine destinée à cibler les canons antiaériens) et puis vous aviez votre balise radar ici et puis votre météo là et je ne me souviens plus de ce qu’il y avait ici. Mais quand on recevait, par exemple l’information qu’il y avait un avion, évidemment on se précipitait sur le site et le radar le repérait et la météo nous donnait les conditions météo, vous savez, à 25 000 pieds d’altitude, et puis c’était relayé par de gros câbles jusqu’au pointeur automatique et on mettait tout ça ensemble et ensuite ça partait vers les canons. Donc à ce moment-là, et quand vous en entendiez six exploser, je vous le dis, ça faisait mal aux oreilles.
Sur le pointeur radar on était protégés, en fait, par un muret et puis on a été, je ne sais pas à quel point c’était vrai, mais on était censés avoir été descendus, par un Dornier 17 (bombardier allemand) je crois. Et comme et j’ai fait une interview, j’ai été dans une émission culinaire à Toronto avec, parce que ma fille habite là-bas, et l’interview, il y avait des questions à propos de la guerre et alors je lui ai dit, j’ai dit, et bien, vous n’avez jamais rien vu d’aussi beau parce que, que d’avoir un avion, pris dans les lumières d’une série de projecteurs, parce que vous êtes comme ceci, comme ça et ils, c’est comme une toile, une toile d’araignée. Et il est en plein dedans et il ne va pas pouvoir s’en sortir. Et bien sûr, tout le monde est en train de le viser. Et il est, maintenant souvenez-vous, l’interviewer (David Gale) il m’a demandé, qu’est-ce que vous avez ressenti ? Vous sentiez-vous désolée pour lui ? Et j’ai dit, et pourquoi diable aurais-je dû ? J’ai dit, il venait juste de nous bombarder comme un beau diable. Ceci s’est passé récemment évidemment et ce n’était pas pendant la guerre. J’ai dit, pourquoi devrais-je, j’ai dit, il nous en avait fait tellement voir avec ces bombardements. J’ai dit alors c’était à notre tour de l’avoir. Autrement, il nous aurait bombardés encore plus.
La manière dont on voyait les choses c’était, vous ne pouviez pas vous permettre d’avoir de la pitié, parce que je pense que c’était un peu l’aversion qu’on ressentait qui nous permettait de tenir. Je ne vais pas lui laisser faire ça, je ne vais pas le laisser prendre le meilleur de moi-même et tout le reste, alors.