Le navire canadien de Sa Majesté (NCSM) Niobe était un croiseur protégé de classe Diadem de 11 000 t, initialement mis en service au sein de la Royal Navy britannique. En 1910, la Grande‑Bretagne vend le bâtiment au Canada, où il devient l’un des deux premiers navires de guerre de la Marine royale canadienne nouvellement créée. Le Niobe ne reste que quelques années en service, incluant une brève période pendant la Première Guerre mondiale. En 1915, en raison de sa détérioration, le navire est amarré à l’arsenal naval d’Halifax, où il est utilisé comme navire‑dépôt.
NCSM Niobe
Le NCSM Niobe était un croiseur légèrement blindé de11 000 tonnes de la classe Diadem, qui est devenu l’un des deux premiers navires de guerre de la Marine royale canadienne.
(avec la permission de la Bibliothèque du Congrès)
Service dans la Marine royale
Le Niobe est construit par Vickers Limited, à Barrow‑in‑Furness, en Angleterre, avant d’être lancé le 20 février 1897. Il entre en service en tant que navire de guerre de la Royal Navy (RN), en 1898. Il s’agit de l’un des huit navires de la classe Diadem de la marine britannique. Il fait tout d’abord partie de l’escadron de la Manche, puis il escorte des navires transportant des troupes venues en renfort, lorsque la Seconde Guerre d’Afrique du Sud éclate, à la fin de 1899. Il reprend ses fonctions dans la Manche après la guerre, tout en continuant à escorter des navires jusqu’aux confins de l’Empire britannique.
Caractéristiques du NCSM Niobe
Déplacement |
11 126,5 t |
Longueur |
142 m |
Maître‑bau (largeur) |
21 m |
Creux |
8 m |
Vitesse |
15 à 17 kn |
Équipage |
705 marins |
Armement |
16 canons de 16 po et 12 canons de 12 lb 5 canons de 3 lb et 2 tubes lance‑torpilles de 18 po |
L’équipage du NCSM Niobe
Les recrues du premier groupe, de la Nouvelle‑Écosse, devant embarquer sur le NCSM Niobe, posent dans leurs nouveaux uniformes, vers 1910.
(avec la permission du Musée naval d’Halifax)
Service dans la Marine royale canadienne
Après plusieurs années de débats au Canada et de discussions avec les autorités britanniques, le Service naval du Canada est créé le 4 mai 1910. Un an plus tard, en août 1911, la nouvelle entité est rebaptisée Marine royale canadienne (MRC). Le Canada achète ses deux premiers navires de guerre à la Grande‑Bretagne, avant même la création officielle de sa marine. Le Rainbow est acquis en novembre 1909, pour la côte Ouest. En janvier 1910, le Canada achète, pour un montant de 215 000 £, un autre navire, beaucoup plus récent et beaucoup plus grand, le Niobe, un bâtiment de la classe Diadem, pour la côte Est. La RN britannique accepte également de prêter au Canada 50 officiers et plus de 500 marins pour exploiter ces croiseurs et former des recrues canadiennes.
Le NCSM Niobe arrive au port de Halifax le 21 octobre 1910, un jour connu sous le nom de Trafalgar Day dans la RN, escorté par deux vaisseaux de protection des pêches du gouvernement canadien. Paré de drapeaux et de banderoles (dans le langage de la marine, on dit qu’un tel bâtiment est « pavoisé »), le Niobe tire des coups de canon pour saluer son nouveau port d’attache. Les canons montés sur les remparts de la Citadelle, la forteresse surplombant le port, tirent, à leur tour, pour accueillir le navire.
NCSM Niobe
Le NCSM Niobe entre dans le port d’Halifax, lors du Trafalgar Day, le 21 octobre 1910.
(avec la permission du Musée naval d’Halifax)
Le saviez‑vous?
Le Trafalgar Day marque l’anniversaire de la victoire, en 1805, d’une flotte de la Royal Navy, commandée par l’amiral Horatio Nelson, sur les flottes française et espagnole réunies. Cette bataille a eu lieu au large du cap Trafalgar sur la côte sud‑ouest de l’Espagne pendant les guerres napoléoniennes. La victoire a établi la suprématie navale britannique et elle a mis fin aux projets de Napoléon d’envahir l’Angleterre. L’arrivée du NCSM Niobe à Halifax a été soigneusement programmée pour coïncider avec le 105e anniversaire de la célèbre bataille.
NCSM Niobe
Exercice d’une équipe de tir à bord du NCSM Niobe, vers 1911. Le lieutenant contrôlant cet entraînement a adopté une position commode pour observer la chute du tir et diriger les hommes qui manipulent le canon.
(avec la permission du Musée naval d’Halifax)
Louis‑Philippe Brodeur, ministre de la Marine et des Pêches, annonce que l’arrivée du croiseur constitue, pour le Canada, « l’aube d’une époque d’autonomie ». Il poursuit sa rhétorique dans une veine toujours aussi fleurie, en ajoutant que le Niobe « plantera l’étendard du progrès et de la véritable grandeur nationale canadienne sur les pentes vierges d’un avenir glorieux qui déroule, aujourd’hui, ses splendides proportions à nos yeux. »
Heureusement que la RN a accepté de prêter des marins à la MRC, car l’effectif total de la marine canadienne se limite, à l’époque, à 350 officiers et hommes d’équipage. La carrière du nouveau navire de guerre canadien manque de peu de connaître une fin sans gloire, lorsqu’il s’échoue sur des bordures de récifs dangereuses, au large du cap de Sable, à la pointe sud‑ouest de la Nouvelle‑Écosse, dans la nuit du 30 au 31 juillet 1911. Le navire passe alors tout près d’être perdu, avant que des efforts de sauvetage ne réussissent à le libérer et à le remettre à flot. Il faudra attendre la fin de 1912, avant que les dommages causés par cet épisode ne soient réparés.
Le NCSM Niobe en cale sèche
Le NCSM Niobe en cale sèche, à Halifax, où il doit être réparé et entretenu.
(avec la permission du ministère de la Défense nationale)
Première Guerre mondiale
Avant le déclenchement de la Première Guerre mondiale, en août 1914, le Niobe est employé dans le cadre de patrouilles côtières, mais des pannes récurrentes l’obligent à rester au port à Halifax, pour de longues périodes d’entretien et de réparation. Au début de la guerre, le Canada transfère le contrôle opérationnel du Niobe à la RN. Pour préparer le navire à prendre la mer, des marins supplémentaires sont nécessaires. Ces derniers sont rapidement transférés, en provenance d’autres bases, une centaine d’entre eux étant dépêchés de la réserve de la RN à St. John’s, à Terre‑Neuve.
La première mission opérationnelle du Niobe consiste, en septembre, à escorter un navire de transport de troupes, avec, à son bord, le Royal Canadian Regiment, d’Halifax aux Bermudes, où il doit s’installer en garnison. Plus tard, pendant l’automne, le bâtiment rejoint le 4e escadron de croiseurs de la RN, basé aux Bermudes. Il contribue au blocus de 38 navires marchands allemands qui avaient cherché protection dans le port américain neutre de New York.
Service religieux sur le NCSM Niobe en cale sèche
Service religieux du dimanche à bord du NCSM Niobe, durant la période où il a contribué à faire respecter le blocus de la ville de New York, 1914. On voit un navire marchand passer en arrière‑plan.
(avec la permission du Musée naval d’Halifax)
Cette tâche répétitive consiste à arrêter chaque navire commercial tentant de rentrer en Allemagne pour contribuer à l’effort de guerre, à monter à son bord et à le fouiller à la recherche de marchandises destinées à l’Allemagne ou à des citoyens allemands. Tous les 16 jours, le Niobe revient à son port d’attache pour charger des provisions fraîches et du charbon. En juillet 1915, l’état du navire s’est détérioré et il doit retourner à Halifax.
Une importante remise en état est alors nécessaire pour que le croiseur puisse à nouveau naviguer; cependant, il est déjà trop ancien pour que de telles réparations soient rentables. Il ne reprendra plus jamais la mer et restera amarré à l’arsenal naval, où il servira de navire‑dépôt pour les logements et les bureaux.
NCSM Niobe en cale sèche
Le NCSM Niobe a été utilisé, comme navire‑dépôt, à Halifax lorsqu’il ne pouvait plus prendre la mer.
(avec la permission du Musée naval d’Halifax)
L’explosion d’Halifax
À 8 h 45, le 6 décembre 1917, le navire de munitions français Mont‑Blanc entre en collision avec le cargo norvégien Imo dans la partie la plus étroite du port d’Halifax. Le choc provoque un incendie sur le pont du Mont‑Blanc qui, rapidement abandonné par son équipage, dérive vers le quai no 6. Des marins sur le Niobe repèrent l’incendie; le capitaine décide alors d’envoyer sa pinasse à vapeur, faisant partie de la drome du navire, avec sept volontaires à son bord, pour porter assistance au Mont‑Blanc.
À 9 h 5, le Mont‑Blanc explose, provoquant la plus grande explosion non nucléaire d’origine humaine de l’histoire. La force de l’explosion souffle la pinasse du Niobe et son équipage, qui sont littéralement pulvérisés. Les deux marins responsables du navire recevront la médaille Albert à titre posthume. L’explosion endommage également gravement le Niobe, qui sera toutefois réparé et poursuivra sa carrière de navire‑dépôt. En 1920, il est vendu à la ferraille et démoli, à Philadelphie, deux ans plus tard. (Voir L’explosion d’Halifax).
Le NCSM Niobe et l’explosion d’Halifax
L’explosion d’Halifax du 6 décembre 1917 a dévasté l’arsenal naval de la ville et gravement endommagé le NCSM Niobe, que l’on voit, sur la droite de la photographie, produisant de la fumée.
(avec la permission du Musée naval d’Halifax)
Commémoration
Le 21 octobre, le Trafalgar Day, est la commémoration annuelle la plus importante de la RN, qui a également été célébrée par la MRC. Depuis 2014, le Trafalgar Day est connu au Canada sous le nom de Journée du Niobe pour refléter les racines de la MRC. En 2010, Postes Canada émet un timbre représentant une peinture du HMCS Niobe pour commémorer le centenaire de la Marine royale canadienne.
La cloche de bord du Niobe est détenue par le Musée naval d’Halifax et est utilisée lors d’occasions spéciales. Une ancre de 900 kg, découverte dans l’arsenal naval d’Halifax, en 2014, a été identifiée comme l’une des ancres du Niobe à l’époque où il servait de navire‑dépôt. En 2016, le Musée canadien de la guerre a acquis une roue du Niobe d’un musée de Camden, dans le New Jersey, aux États‑Unis.