Owen William Steele, vendeur, soldat et officier (né le 28 avril 1887, à St. John’s, à Terre‑Neuve‑et‑Labrador; décédé le 8 juillet 1916, près d’Englebelmer, en France). Owen Steele était un officier du Newfoundland Regiment qui a servi pendant la Première Guerre mondiale. En juillet 1916, ce régiment a subi des pertes terribles lors de la bataille de la Somme (voir Le Newfoundland Regiment à Beaumont‑Hamel). Owen Steele est surtout connu pour le journal détaillé qu’il a tenu de son enrôlement à son décès en France en juillet 1916. Ce journal et les lettres qu’il a écrites depuis le front permettent de mieux comprendre les expériences et les impressions des soldats terre‑neuviens pendant la guerre.
Jeunesse et début de carrière
Owen Steele naît le 28 avril 1887, à St. John’s, à Terre‑Neuve‑et‑Labrador. Son père, Samuel, a quitté le Royaume‑Uni dans les années 1880 et s’est installé à Terre‑Neuve, où il a épousé Sarah Blanche Harris, la nièce d’un quincaillier local. Le couple a eu dix enfants, dont Owen.
Owen Steele grandit à St. John’s et fait sa scolarité au Bishop Feild College. À l’école, c’est un passionné d’athlétisme qui excelle à la marche athlétique. Il finira par remporter une course sur 21 milles, à l’occasion des Highland Games, organisés par le St. Andrew’s Club. Après avoir obtenu son diplôme en 1902, il commence à travailler dans l’entreprise familiale pour vendre de la vaisselle. Il intègre également les Newfoundland Highlanders, un groupe paramilitaire local, établi par l’Église presbytérienne, à St. John’s.
Newfoundland Regiment
Le 13 septembre 1914, environ six semaines après la déclaration de guerre à l’Allemagne de la Grande‑Bretagne, Owen Steele s’enrôle dans le Newfoundland Regiment et commence son entraînement à Pleasantville, à St. John’s. Il impressionne rapidement les chefs du régiment et est promu sergent, le 21 septembre. Le 3 octobre, avec les autres soldats faisant partie du groupe dit des « 500 premiers », il embarque à bord du vapeur Florizel, à St. John’s. Le groupe fait route vers le Royaume‑Uni, où il doit suivre un entraînement supplémentaire avant d’être déployé sur la ligne de front. Sur le navire, le natif de St. John’s est, une nouvelle fois, promu, au grade de sergent fourrier. Au début de 1915, il est rejoint par son frère cadet James, qui s'etait enrôlé lui aussi dans le Newfoundland Regiment.
Owen Steele excelle à l’occasion de son entraînement, en Angleterre et en Écosse. En Écosse, il est nommé brigadier de gendarmerie militaire, avec comme mission de maintenir la discipline parmi les soldats, à la caserne et en dehors. En avril 1915, il est promu au grade de sous‑lieutenant du Newfoundland Regiment. Le 20 août 1915, le 1er Bataillon du Newfoundland Regiment quitte l’Angleterre à destination de la péninsule de Gallipoli.
Campagne de Gallipoli
Le Newfoundland Regiment arrive sur les plages des Dardanelles, le 20 septembre 1915. À l’instar de celui des autres soldats de son régiment, le séjour d’Owen Steele à Gallipoli est marqué par l’ennui, l’inconfort, la maladie et le danger constant. Les conditions épouvantables régnant à Gallipoli font des ravages parmi les combattants du Newfoundland Regiment. Le 18 octobre, il ne reste plus que 760 des 1 070 Terre‑Neuviens ayant débarqué à Gallipoli. Le peloton d’Owen Steele, lui‑même touché par les conditions météorologiques particulièrement froides et humides, qui comptait plus de 50 hommes au départ, n’en comprend plus que 23. Fin octobre, Owen Steele souffre de dysenterie et de maux de gorge. En dépit de son état de santé, il refuse de passer une visite médicale, craignant d’être éloigné de la ligne de front et envoyé dans un hôpital de campagne.
Cependant, les choses empirent, le 26 novembre, quand une tempête de pluie inonde les tranchées du régiment, détruisant les abris, emportant le matériel et laissant les soldats totalement trempés. Le lendemain, une chute spectaculaire des températures entraîne la formation de plusieurs centimètres de glace à la surface de l’eau stagnante dans les tranchées. Dans la foulée de cette inondation, le commandant de la Compagnie « A » est porté disparu. Le sous‑lieutenant Steele est nommé commandant intérimaire, un poste habituellement occupé par un capitaine. Cent cinquante soldats du régiment sont envoyés à l’hôpital, essentiellement pour des brûlures dues au gel. Le nouveau commandant par intérim attribue le faible nombre de victimes à la résistance naturelle des soldats terre‑neuviens.
Les Alliés lancent l’évacuation de Gallipoli, en décembre 1915. Owen Steele se voit confier un contingent de soldats dont la mission consiste à couvrir l’évacuation des plages des combattants restants. Les 8 et 9 janvier, il est l’un des derniers à partir, avec ses hommes. En attendant de monter à bord du navire, le major‑général F.S. Maude, accompagné d’un groupe de soldats, retourne sur une autre plage pour récupérer sa valise. Le groupe ne revenant pas, Owen Steele reçoit l’ordre de les retrouver, seulement 30 minutes avant que les magasins britanniques ne soient détruits après avoir été piégés. Il retrouve le major‑général et ses hommes, pris dans des barbelés, et les ramène au bateau quelques minutes avant l’explosion. Avant même qu’ils n’aient la possibilité de partir, le magasin explose, les aspergeant de débris.
Bataille de la Somme
Suite à l’évacuation de Gallipoli, le Newfoundland Regiment est envoyé à Marseille, puis sur la ligne de front pour la bataille de la Somme. Le 1er juillet, régiment se lance à l’assaut, à Beaumont‑Hamel. En 30 minutes, il est pratiquement anéanti. Sur les quelque 8 008 soldats ayant participé à la bataille, 710 sont tués, blessés ou portés disparus. Faisant partie des 10 % d’hommes gardés en réserve dans les cantonnements, Owen Steele ne prend pas part aux combats. Cela ne l’empêche pas d’être grièvement blessé, le 7 juillet, par un éclat d’obus allemand perdu. Il est évacué vers un hôpital de campagne, mais décède, le lendemain, lors d’une opération d’amputation de la jambe. Son frère James est grièvement blessé pendant la bataille de Beaumont-Hamel mais survit à la guerre et retourne à St. John’s, à Terre-Neuve.