Article

Stanley G. Grizzle

Stanley George Sinclair Grizzle, C.M., O. Ont, juge de la citoyenneté, politicien, fonctionnaire, syndicaliste (né le 18 novembre 1918 à Toronto, en Ontario; décédé le 12 novembre 2016 à Toronto, en Ontario). Stanley Grizzle mène une grande carrière en tant que bagagiste, soldat, fonctionnaire, juge de la citoyenneté et militant pour les droits des Canadiens noirs.
Stanley Grizzle
Citizenship Judge Stanley Grizzle

Jeunesse

Fils de Theodore Grizzle et de Mary Sinclair Grizzle, Stanley Grizzle voit le jour à Toronto. Il a trois sœurs et trois frères. Ses parents, ayant tous deux immigré au Canada de la Jamaïque en 1911, se rencontrent et se marient à Toronto. À leur arrivée, Mary travaille comme servante, tandis que Theodore décroche un emploi comme chef cuisinier pour le Grand Trunk Railway. Theodore met plus tard sur pied une entreprise de taxi prospère, mais est confronté à des temps durs avec l’arrivée de la crise économique des années 1930.

En 1938, Stanley Grizzle participe à la fondation de la Young Men’s Negro Association of Toronto, ce qui marque ses débuts en tant que défenseur des droits des Canadiens noirs.

Dans son mémoire, My Name’s Not George (1998), Stanley Grizzle raconte une enfance épanouie passée à écouter de la musique jazz avec sa famille, à participer à des activités organisées par son église et sa communauté, à faire du sport dans des clubs locaux et à célébrer annuellement le Jour de l’émancipation.

Bagagiste et dirigeant syndical

Bien que les parents de Stanley Grizzle l’encouragent à poursuivre ses études après le secondaire, ils peinent à trouver l’argent nécessaire pour l’envoyer, ainsi que ses six frères et sœurs, à un collège ou à une université.

En juin 1940, à l’âge de 22 ans, il commence donc à travailler comme bagagiste dans un wagon-lit pour le chemin de fer du Canadien Pacifique (CP), le seul emploi qu’il peut à l’époque décrocher en tant qu’homme noir. Il devient alors « substitut », c’est-à-dire un remplaçant des bagagistes en congé de maladie. Dans le cadre de son travail, il accomplit plusieurs tâches, notamment celles de faire les lits, de laver les toilettes et de cirer les chaussures. Pour les hommes noirs canadiens, un des aspects humiliants de cet emploi est le fait que bien des passagers blancs les appellent « George » d’après George Pullman, inventeur du wagon-lit Pullman, plutôt que par leur vrai prénom. Ce sera seulement après que la Fraternité des porteurs de wagons-dortoirs ait négocié avec le Canadien Pacifique que les bagagistes réussiront à obtenir deux porte-noms en plastique pour encourager les passagers à s’adresser à eux en utilisant leur prénom.

Stanley Grizzle travaille comme bagagiste pour le chemin de fer du Canadien Pacifique pendant 20 ans. Au cours de ses années de service, il milite et négocie pour de meilleures conditions de travail pour les membres de sa profession. En 1946, il est élu président du département de la Fraternité responsable du Canadien Pacifique à Toronto.

Au début des années 1950, Stanley Grizzle devient membre du Joint Labour Committee to Combat Racial Intolerance. Il joue également un rôle clé pour permettre à des groupes de rencontrer les dirigeants provinciaux et fédéraux pour discuter de lois antidiscriminatoires envers les Canadiens noirs. Il s’exprime régulièrement à la télé et à la radio, expliquant les différents enjeux auxquels est confrontée la communauté noire au Canada.

Carrière militaire

En 1942, Stanley Grizzle est appelé sous les drapeaux et s’enrôle dans l’armée canadienne. Même s’il comprend les raisons justifiant la Deuxième Guerre mondiale, il est irrité par le fait que le Canada se batte pour la démocratie en Europe alors qu’il n’accorde pas cette même démocratie, la justice et l’égalité aux Canadiens noirs vivant sur son propre territoire.

Stanley G. Grizzle à la Base Borden
À la Base Borden, de gauche à droite : Stanley G. Grizzle, Mel Evans, Sgt. Ball, Russell Grundy, Al Henderson.

Lors de son service en Angleterre, Stanley Grizzle devient un « ordonnance », soit un soldat responsable de cirer les chaussures et de nettoyer les quartiers des officiers. Il refuse alors les tâches qui lui sont assignées, les déclarant humiliantes et racistes (les soldats noirs se voient souvent, à l’époque, attribuer de telles tâches). Plusieurs années plus tard, il se rappelle avoir un jour affirmé à son supérieur : « Monsieur, je comprends que tous les hommes noirs que vous ayez jamais rencontrés aient été des serviteurs, mais je crains que cela ne soit pas très démocratique. » Puni pour son refus, on l’assigne à l’entretien des latrines, ce qui le mène à déclencher une grève. Après avoir affirmé son point de vue, il est réassigné, puis promu au rang de caporal.

En février 1946, Stanley Grizzle revient à la maison et est libéré de ses obligations militaires. Il retourne travailler en tant que bagagiste et s’inscrit à des cours traitant du marché du travail, des sciences économiques et d’expression orale en public à l’Université de Toronto.

Carrière politique

Après son service militaire, Stanley Grizzle poursuit sa lutte pour les droits des Canadiens noirs. À l’époque, la politique d’immigration canadienne restreint, et dans certains cas interdit, l’attribution du statut d’immigrant aux requérants du Commonwealth britannique provenant des Caraïbes, de la Guyane britannique (Guyana), de l’Inde, du Pakistan, du Ceylan (Sri Lanka) et des pays africains et cherchant à immigrer au Canada et à obtenir la citoyenneté (voir Politique d’immigration canadienne). Le Canada désire alors recevoir seulement des requérants provenant du Royaume-Uni, de la Nouvelle-Zélande, de l’Australie ou de l’Afrique du Sud.

Le 27 avril 1954, Stanley Grizzle prend part à la première délégation de Canadiens noirs envoyée pour rencontrer les membres du Cabinet fédéral dans le but de discuter des procédures d’immigration discriminatoires du Canada.

Quelques années plus tard, en 1959, Stanley Grizzle et un autre homme, Jack White, deviennent les premiers Canadiens noirs à se présenter pour obtenir un siège au Parlement ontarien. Bien qu’il ne reçoive qu’un peu plus de 9 000 votes en tant que candidat pour le parti Co-operative Commonwealth Federation (CCF), Stanley Grizzle termine en troisième place dans sa circonscription.

Au début des années 1960, Stanley Grizzle est embauché comme commis à la Commission des relations de travail de l’Ontario, ce qui fait de lui le premier Canadien noir à travailler au ministère du Travail de l’Ontario. Il est plus tard promu à un poste de dirigeant.

Il demeure employé de la Commission des relations de travail jusqu’à ce que le premier ministre Pierre Trudeau le nomme comme juge de la citoyenneté. Il devient ainsi le premier Canadien noir à pourvoir ce poste.

Vie personnelle

Lors de son service militaire, Stanley Grizzle rencontre Kathleen (Kay) Victoria Toliver, originaire de Hamilton, en Ontario, et au nombre des fondateurs de la Canadian Negro Women’s Association. Il l’épouse en septembre 1942, alors qu’il profite d’un congé militaire de deux semaines. 

Le couple a par la suite six enfants et en adopte un septième. Stanley Grizzle aura plus tard 14 petits-enfants et de nombreux arrière-petits-enfants.

Héritage et importance

En 1998, Stanley Grizzle publie son autobiographie, My Name’s Not George: The Story of the Brotherhood of Sleeping Car Porters in Canada, Personal Reminiscences of Stanley G. Grizzle.

En 2007, il fait don à Bibliothèque et Archives Canada de tous ses documents personnels, ce qui inclut des coupures de journaux, des discours, des photos et d’innombrables documents variés traitant de l’histoire des Canadiens noirs.

La même année, un parc de l’est de Toronto est nommé en son honneur (2007). Puis, en 2018, une allée lui est également dédiée.

Prix et distinctions

  • Ordre de l’Ontario (1990)
  • Temple de la renommée syndicale du Canada (1994)
  • Membre de l’Ordre du Canada (1995)
  • Récipiendaire, Médaille du Jubilé de la reine Elizabeth II, gouvernement du Canada (2002)
  • Prix pour l’ensemble des réalisations, Prix Harry Jerome (2010)
  • Récipiendaire, Médaille du Jubilé de diamant de la reine Elizabeth II, gouvernement du Canada (2012)