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Bill Miner

Ezra Allen (Bill) Miner, hors‑la‑loi (né vers 1847 à Bowling Green, dans le Kentucky, aux États‑Unis; décédé le 2 septembre 1913 à Covington, en Géorgie, aux États‑Unis). Bill Miner est considéré comme ayant été le premier voleur de train au Canada; toutefois, 30 ans avant son arrivée au Canada, le 13 novembre 1874, d’autres bandits avaient assailli un train de la Great Western Railway en Ontario. Mais c’est bien lui qui a été le premier à s’attaquer au Chemin de fer du Canadien Pacifique (CP), devenant ainsi un héros hors-la-loi du folklore canadien. Il a été surnommé « The Grey Fox » (le renard gris) et le « Gentleman Bandit » (bandit gentilhomme) en raison de ses bonnes manières lors des attaques à main armée qu’il perpétrait. On lui a également attribué la paternité de l’expression « Hands up! » (Haut les mains).

Bill Miner

Jeunesse

On sait peu de choses de la jeunesse de Bill Miner qui aurait travaillé en Californie comme cow‑boy et comme courrier de la poste avant d’embrasser une carrière criminelle. Sa réputation de brigand de grand chemin naît dans la foulée de nombreuses attaques de diligence. Il est incarcéré, en raison de ses crimes, à la prison d’État de San Quentin, en Californie, en 1866, 1871, 1872 et 1881. En 1881, il est condamné à 25 ans d’emprisonnement.

Détrousseur de train

Bill Miner est libéré de prison en 1902. Après avoir travaillé honnêtement pendant une courte période, il reprend ses activités criminelles en dévalisant, cette fois, des trains, les diligences ayant alors pratiquement disparu. Pour ses attaques, il adopte la façon de faire mise au point par d’autres bandits tristement célèbres comme Butch Cassidy et The Wild Bunch. Généralement, profitant d’un endroit isolé où le train doit s’arrêter ou ralentir, il monte à bord avec ses complices et prend possession de la locomotive. Là, il décroche le wagon à colis express contenant les expéditions d’or, de devises et d’envois postaux, contraignant le mécanicien à conduire le reste du train quelques kilomètres plus loin. Il ne lui reste plus qu’à piller le contenu du wagon dont il s’est emparé, quitte à en faire exploser les portes à la dynamite si les cheminots à bord ne se montrent pas suffisamment coopératifs.

Le 23 septembre 1903, Bill Miner et deux hommes de main échouent lamentablement dans leur tentative de dévaliser un train en Oregon. L’un des bandits est tué, un autre blessé et le dernier arrêté. Bill Miner réussit à s’échapper les mains vides.

Voler le CP

Bill Miner passe en Colombie‑Britannique en 1904. Là, sous le nom de George Edwards, un éleveur semi‑retraité, il s’établit près de Kamloops. Il recrute alors Thomas « Shorty » Dunn, un homme de main américain. Le 10 septembre 1904, il attaque, avec sa bande, l’express transcontinental no 1 du CP quelques kilomètres à l’ouest de Mission. Les bandits réussissent à s’enfuir en ayant mis la main sur de la poussière d’or valant 6 000 $, sur 900 $ en devises et sur 50 000 $ d’obligations américaines.

Le CP ainsi que les gouvernements fédéral et provincial offrent, en vain, des récompenses d’un montant total de 11 500 $ pour l’arrestation des pillards. Pendant un an et demi, Bill Miner vit discrètement dans la peau de George Edwards, un vieil homme, apprécié de la population locale, que personne n’a jamais suspecté d’être un criminel. En novembre 1905, la police américaine le soupçonne d’avoir participé à l’attaque d’un train dans l’État de Washington; toutefois, il ne sera jamais officiellement accusé de ce crime (voir également Crime organisé au Canada).

Avis de récompense pour Bill Miner
Avis de récompense pour la capture de Bill Miner, envoyé aux services de police, à la presse et aux agences de détectives privés.
(avec la permission de Bibliothèques et Archives Canada)

Chute

Le 8 mai 1906, la bande de Bill Miner donne l’assaut à l’express transcontinental no 97 du CP non loin de la gare de Duck (aujourd’hui Monte Creek), 24 km à l’est de Kamloops. À cette époque, Bill Miner a recruté Lewis Colquhoun, un criminel originaire de l’Ontario. Une nouvelle fois, les détrousseurs de train vont rater leur coup et s’enfuir avec seulement 15 $ et quelques comprimés pour le foie. Les autorités sont convaincues que c’est la même bande qui a commis cette attaque et celle, beaucoup plus fructueuse, du train de 1904. Les récompenses annoncées pour leur capture s’élèvent à un montant total de près de 15 000 $. La chasse à l’homme qui s’ensuit est la plus importante jusqu’à ce jour ayant eu lieu en Colombie‑Britannique. Outre la police provinciale et la Police à cheval du Nord‑Ouest, l’ancêtre de la Gendarmerie royale du Canada, des cow‑boys, servant d’auxiliaires bénévoles, des pisteurs autochtones, des chiens limiers et des policiers américains exerçant des deux côtés de la frontière sont également mobilisés dans le cadre de cette traque exceptionnelle. Ce dispositif est épaulé par un train que le CP met à disposition pour transporter les hommes et les différentes fournitures requises.

Pendant plusieurs jours, les hors‑la‑loi réussissent à s’échapper, pour être finalement capturés, le 14 mai, dans un campement à proximité de Douglas Lake. Thomas Dunn s’empare d’un pistolet et tente de fuir avant d’être touché d’un tir aux jambes. Bill Miner et Lewis Colquhoun se rendent sans opposer de résistance. Les prisonniers sont jugés à Kamloops, où un responsable des services pénitentiaires américains identifie le chef de la bande comme étant Bill Miner. Les trois hommes arrêtés sont reconnus coupables par le tribunal, Bill Miner étant condamné à la prison à vie.

« Bill Miner – last of the train robbers. »

Article paru dans le journal The Province du 18 janvier 1958, intitulé : « Bill Miner – last of the train robbers. »

(avec la permission de Bibliothèques et Archives Canada)

Évasion et importance

Bill Miner s’échappe du pénitencier de la Colombie‑Britannique le 8 août 1907. Le premier ministre Wilfrid Laurier exprime alors sa colère qu’un « criminel dangereux […] pensant pouvoir, en toute impunité, répéter, dans ce pays, les bouffonneries criminelles perpétrées de l’autre côté de la frontière […] ait pu s’échapper de ce pénitencier ». Toutefois, Bill Miner a de nombreux sympathisants en Colombie‑Britannique qui n’hésitent pas à le soutenir et à espérer qu’il pourra s’en sortir. Une anecdote, très appréciée du public, affirme que quelqu’un aurait dit : « Oh, Bill Miner n’est pas si mauvais! Il ne vole le CP qu’une fois tous les deux ans. Nous, le CP nous vole tous les jours. »

Bill Miner
Photos d’identité de Bill Miner au début de sa peine au pénitencier de la Colombie‑Britannique.
(avec la permission de Bibliothèques et Archives Canada)

Bill Miner réussit à s’enfuir du Canada et il semble qu’il n’y soit jamais revenu. Il poursuit sa carrière de bandit jusqu’en 1911, date à laquelle il est arrêté pour avoir attaqué et pillé un train en Géorgie. Il est alors incarcéré au pénitencier d’État dont il s’échappe à deux reprises. Après sa deuxième évasion, il est retrouvé caché dans un vieux wagon couvert dans un marais. On le ramène en prison où il décèdera.

Une mythologie à la Robin des bois se met en place autour de l’histoire de Bill Miner. Elle intègre notamment un élément que l’on retrouve dans de nombreux récits de « héros hors‑la‑loi » dans lesquels le bandit au grand cœur paye l’hypothèque d’une pauvre veuve, puis vole, en retour, l’argent du banquier sans pitié. On attribue également à Bill Miner la paternité de l’expression « Hands up! » (Haut les mains).

Un long‑métrage canadien de 1982, The Grey Fox, réalisé par Phillip Borsos avec en vedette l’acteur américain Richard Farnsworth, est basé sur les exploits criminels de Bill Miner au Canada. En 1978, une capsule animée d’une minute de l’Office national du film du Canada raconte l’histoire de l’échec du vol du CP en 1906.