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Marie-Marguerite d'Youville

Marie-Marguerite d’Youville, née Dufrost de Lajemmerais (née le 15 octobre 1701 à Varennes, au Québec; morte le 23 décembre 1771 à Montréal, au Québec). Marguerite D’Youville a été la fondatrice des Sœurs de la Charité de l’Hôpital Général de Montréal, aussi connu sous le nom de Sœurs grises. Elle est la première personne née au Canada à devenir une sainte, ayant été canonisée par le pape Jean-Paul II en 1990.

Marie-Marguerite d'Youville
Sainte Marie-Marguerite d'Youville, fondatrice des Sœurs de la Charité, a été la première personne née au Canada à être canonisée.

Jeunesse : vie familiale et éducation chez les Ursulines

Marguerite est la fille de Christophe Dufrost de Lajemmerais et Marie-Renée Gaultier de Varennes. Son père meurt alors qu’elle a sept ans, laissant la famille dans l’indigence. Grâce à son arrière grand-père maternel, Pierre Boucher de Boucherville (ancien gouverneur de Trois-Rivières), Marguerite peut se rendre à Québec et recevoir l’enseignement religieux des Ursulines de 11 à 13 ans. Après son retour à Varennes, Marguerite, l’aînée de six enfants, entreprend l’éducation de ses frères et sœurs tout en aidant sa mère veuve.

Le saviez-vous?
L’oncle de Marguerite était le célèbre explorateur, officier militaire et marchand de fourrures Pierre Gaultier de Varennes et de La Vérendrye. À peu près à l’époque où Marguerite entreprend ses œuvres caritatives, dans les années 1730, son oncle Pierre cartographie l’ouest du Manitoba et construit des postes de traite du lac Supérieur au lac Winnipeg pour étendre la traite des fourrures (voir aussiFrancophones du Manitoba).

Mariage de la mère de Marguerite, Marie-Renée, à Timothée Sylvain

Vers 1718, Timothy Sullivan, fils de médecin né en Irlande, arrive en Nouvelle-France en qualité de capitaine d’un régiment de dragons, désireux d’entreprendre une vie nouvelle. Il s’intègre rapidement à sa patrie d’adoption et adopte peu à peu une variante française de son nom, se faisant appeler Timothée Sylvain. Vers 1720, âgé de 24 ans, Timothée épouse la mère de Marguerite, Marie-Renée, alors veuve depuis plus de 10 ans et âgée de 38 ans. Le mariage a lieu dans une église paroissiale, loin de la maison familiale de Varennes. Selon les conventions sociales de l’époque, le mariage de Marie-Renée avec un roturier est considéré comme une mésalliance, et entraîne l’annulation du mariage prévu de Marguerite avec un noble, Louis-Hector Piot de Langloiserie. La famille déménage à Montréal en 1721, où Marguerite épouse François d’Youville en 1722.

Mariage de Marguerite et François d’Youville

Marguerite et François emménagent avec la mère de ce dernier. François a la réputation d’un mari indifférent, s’intéressant plus à ses affaires qu’à la vie familiale. Il est rarement à la maison, et les relations de Marguerite avec sa mère sont difficiles. Pour compliquer les choses, bien que François soit négociant de fourrures, on prétend qu’il pratique le commerce illégal de l’alcool, ce qui contribue à entacher la réputation du couple. Ils ont ensemble six enfants, dont quatre meurent en bas âge. François meurt en 1730. À ce moment, âgée de 29 ans, Marguerite a perdu son père, son mari et quatre de ses enfants. Ses deux enfants survivants deviendront prêtres.

Selon les recherches de l’historien Marcel Trudel, il semble que Marguerite d’Youville possédait des esclaves. Bien que peu répandue, la pratique de posséder des esclaves pour le service domestique était commune à presque tous les niveaux de la société canadienne de l’ère coloniale. On ne sait pas exactement si les esclaves appartenaient en propre à Marguerite ou si elle les a hérités de François d’Youville, et on ignore si elle a continué à posséder des esclaves après son renouveau religieux et la fondation de son œuvre de charité.

Renouveau religieux et vocation à une vie de foi

Malgré les dures épreuves qui ont marqué sa jeunesse, Marguerite maintient son engagement dans des œuvres religieuses et caritatives, entrepris en 1727, alors qu’elle est âgée de 26 ans. Un profond éveil religieux l’amène à consacrer sa vie aux œuvres de charité. Le 31 décembre 1737, Marguerite et trois collègues fondent une association pour aider les pauvres, et ouvrent une maison pour les accueillir. Cette association, les Sœurs de la Charité, deviendra par la suite les Sœurs grises.

Le saviez-vous?
Les membres de leur association étaient parfois appelées « les grises » parce qu’on les soupçonnait de tirer profit du commerce d’alcool.

Les Sœurs de la Charité

Au début, les efforts de Marguerite sont consacrés à secourir les femmes ayant des besoins urgents, car il n’existe à l’époque aucune institution ou service à cette fin à Montréal. En 1747, les Sœurs grises obtiennent la charge de l’Hôpital Général de Montréal, fondé en 1747 par François Charon de La Barre (aussi appelé hôpital Charon), qui est en faillite. L’institution est transformée en refuge, entre autres, pour les hommes et femmes âgés, les infirmes, les enfants trouvés, les orphelins et les « femmes perdues ». En 1750, les autorités civiles et ecclésiastiques décident de le fusionner avec l’Hôpital Général de Québec, mais les Sulpiciens intercèdent à Paris, et le 3 juin 1753 Louis XV octroie à la communauté son statut légal et le titre de l’hôpital. C’est vers cette époque que les Sœurs grises commencent à porter l’habit gris qui deviendra le signe reconnaissable de leur communauté jusque dans les années 1960.

En 1755, les femmes entreprennent enfin une nouvelle vie en tant que Sœurs de la Charité de l’Hôpital Général de Montréal. Pour financer leurs œuvres, elles lancent de nombreuses entreprises, dont des fermes, un verger, un moulin et une boulangerie. Destiné au départ au soin des personnes indigentes, leur hôpital devient, durant l’épidémie de variole de 1755 et la guerre de Sept ans, un établissement médical plus complet. Malgré la destruction de l’hôpital par un incendie en 1765 et la mort de Marguerite en 1771, l’ordre religieux qu’elle a fondé continue à croître et à jouer un rôle de premier plan dans l’histoire de Montréal, du Québec et du Canada.

La première sainte née au Canada

Beaucoup de personnes ont attesté les dons prophétiques et les pouvoirs de guérison miraculeux de Marguerite. Par exemple, en 1978, une jeune femme atteinte de leucémie myéloblastique aiguë affirme avoir été miraculeusement guérie grâce à son intercession. Bien des années après sa mort, sa spiritualité et sa vie sacrificielle ont été officiellement reconnues à Rome. En 1959, Marie-Marguerite d’Youville a été béatifiée par le pape Jean XXIII, et elle a été canonisée par le pape Jean-Paul II en 1990, ce qui fait d’elle la première personne née au Canada à devenir sainte.

Le saviez-vous?
Le 16 octobre est la fête catholique de Sainte Marie-Marguerite d’Youville.