L’Accord
général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) est un accord de commerce
international. En 1947, il est signé par 23 pays, dont le Canada, et entre
en vigueur le 1er janvier 1948. Il est affiné à l’occasion
de huit cycles de négociations, qui ont mené à la création de l’Organisation
mondiale du commerce (OMC). Celle-ci remplace finalement le GATT le 1er janvier 1995.
Le GATT porte essentiellement sur le commerce des marchandises. Il vise également
à libéraliser les échanges en réduisant les tarifs
douaniers et en éliminant les quotas imposés aux pays membres. Chaque
membre du GATT doit ouvrir ses marchés de la même manière à chaque autre nation
membre en éliminant toute discrimination commerciale. Les ententes négociées
dans le cadre du GATT réduisent les tarifs douaniers moyens sur les produits
industriels de 40 % (1947) à moins de 5 % (1993). C’est un premier
pas vers la mondialisation
économique.
Raison d’être du GATT
Le GATT est
mis en place en 1948 pour réguler le commerce international. Il vise à accélérer le
redressement économique après la Deuxième Guerre mondiale
en réduisant ou en éliminant
les tarifs douaniers, les quotas et les subventions.
Durant
la Crise des années 1930, la dégradation des relations internationales
et la prolifération des réglementations commerciales contribuent à affaiblir
encore plus les conditions économiques. Ces facteurs facilitent le déclenchement
de la Deuxième Guerre mondiale. Après la guerre, les Alliés pensent que
l’instauration d’un cadre multilatéral pour le commerce international
permettrait de desserrer les politiques protectionnistes
caractéristiques des années 1930.
Par ailleurs, ce cadre créerait une interdépendance économique susceptible
d’encourager les partenariats et de réduire les risques de conflit. L’idée est
d’adopter un code de conduite permettant de libéraliser progressivement
le commerce international (en éliminant ou en réduisant les
restrictions y afférents). Ce code de conduite prévoit que les nations membres
se consultent au sujet des problèmes commerciaux pour les résoudre
collectivement. De plus, elles recueilleraient et partageraient les données sur
les caractéristiques et sur les tendances du commerce mondial.
Le GATT est
mis en place plus d’un an avant la création de l’Organisation du traité de
l’Atlantique Nord
(OTAN), une alliance militaire occidentale. L’accord joue un rôle
important durant la Guerre froide, qui débute peu après la fin de la
Deuxième Guerre mondiale. Il aide notamment l’Occident capitaliste, emmené par
les États-Unis, à propager son influence en libéralisant les échanges grâce à
des ententes multilatérales. Ces ententes permettent à l’Occident, sur lequel
s’aligne le Canada, de se faire de nouveaux alliés économiques. Son influence
planétaire s’en trouve renforcée face au bloc communiste de l’Est, mené par
l’Union soviétique. La Guerre froide prenant fin avec l’effondrement de l’Union
soviétique en 1991, le GATT évolue alors pour donner naissance à une
organisation vraiment mondiale, l’OMC. Les pays de l’ancien bloc
communiste comme la République tchèque, la Pologne et la Roumanie y sont admis.
Négociations liées au GATT
Le GATT est
discuté pour la première fois lors de la Conférence des Nations Unies sur le
commerce et l’emploi à La Havane, à Cuba, en 1947. C’est là qu’est lancée
l’idée de créer une Organisation internationale du commerce (OIC). (Voir Organisation des Nations Unies.) On espère à l’époque que l’OIC
pourra agir de concert avec la Banque mondiale et le Fonds monétaire international
(FMI) afin de promouvoir la
coopération économique internationale. Alors que plus de 50 pays négocient
la création de l’OIC et de sa charte fondatrice, plusieurs séances
préparatoires sont tenues pour discuter du GATT. Plusieurs discussions sont
engagées. Par la suite, le Canada et 22 autres nations signent le GATT le 30 octobre 1947
à Genève, en Suisse. L’accord entre en vigueur le 1er janvier 1948.
Dès ses
débuts, il est perçu comme une entente provisoire devant être à terme remplacée
par l’OIC. Lorsque les États-Unis se retirent de l’OIC en 1950, le GATT revient
au premier plan. (Voir aussi Mondialisation.) Les États membres participent
régulièrement à des négociations commerciales traditionnelles. Huit cycles (ou
« round ») de négociations sont organisés entre 1947 et 1994 sous la
forme de conférences commerciales multilatérales (voir Commerce international). Le GATT est établi à l’issue du
premier cycle, en 1947. Les cycles suivants se tiennent à Annecy, en France
(1949) et à Torquay, en Angleterre (1951). Tous les autres cycles se tiendront
à Genève : en 1956, entre 1960 et 1962 (cycle de Dillon), entre 1964 et
1967 (cycle de Kennedy), entre 1973 et 1979 (cycle de Tokyo) et entre 1986 et
1994 (cycle d’Uruguay).
Négociations bilatérales
Au cours
des travaux préparatoires, les 23 pays signataires mènent entre eux des
négociations visant à réduire certains tarifs douaniers et d’autres barrières
commerciales. Le Canada négocie avec sept d’entre eux; toutefois, ses
discussions avec les États-Unis s’avèrent les plus importantes de toutes. Le
Canada avait déjà négocié en 1935 et en 1938 des accords commerciaux avec les
États-Unis. Cependant, après la signature du GATT, celui-ci devient l’accord de
base régissant les relations commerciales entre les deux pays en remplacement
de celui de 1938. (Voir Relations économiques
canado-américaines.)
Selon les
règles du GATT, tout pays membre doit accorder à tous les autres membres les
mêmes privilèges en matière de tarifs douaniers ou de politiques commerciales
que ceux qu’il accordait à la nation la plus favorisée (NPF) avec laquelle il
négociait. C’est le « principe NPF ». Il est mis en place pour
éliminer toute discrimination commerciale.
Groupes commerciaux
multilatéraux
Le Canada
fait à l’époque partie de plusieurs groupes commerciaux multilatéraux qui
œuvrent de concert avec le GATT. Ceux-ci incluent notamment l’Organisation de
coopération et de développement économiques (OCDE); la Quadrilatérale; et le
Groupe de Cairns des nations engagées en faveur d’échanges commerciaux
équitables. En intégrant chacun de ces groupes, le Canada se donne la
possibilité de peser sur l’orientation des négociations commerciales.
Le groupe
le plus influent est la Quadrilatérale (la « Quad »). Ce groupe
informel se forme dès les débuts du GATT. Il réunit le Canada, le Japon, les États-Unis
et l’Union européenne, à l’époque les quatre plus grandes entités commerciales
du monde. C’est la Quad qui introduit la plupart des réductions réciproques de
tarifs douaniers formulées dans le GATT. Ces mesures permettent d’abaisser les
tarifs appliqués entre tous les pays membres du GATT conformément au principe
NPF. La Quad devient une alliance plus officielle lors du sommet du G7 de 1981
à Montebello, au Québec. Elle joue un rôle prépondérant
durant le cycle d’Uruguay (1986-1994), au cours duquel elle donne la priorité
aux négociations portant sur le secteur agricole et se fait la championne de la
création de l’OMC.
Le Canada a-t-il bénéficié
d’avantages particuliers?
Certaines
exemptions au principe NPF sont permises et le Canada bénéficie de plusieurs
d’entre elles. Les États-Unis obtiennent une dérogation au principe NPF afin de
conclure l’Accord canado-américain sur les
produits de l’industrie automobile
en 1965. À l’époque, le Canada n’a pas
besoin d’obtenir d’exemption des droits de douane, car l’accord permet aux
firmes de n’importe quel pays de participer, à condition d’adhérer aux règles
en vigueur. Le Canada, comme d’autres pays industrialisés, obtient aussi des
dérogations lui permettant d’accorder aux pays en développement des tarifs
douaniers préférentiels sur certains produits régis par le Système généralisé
de préférences. Il fait également partie de l’Arrangement multifibres (AMF).
Celle-ci permet aux pays industrialisés d’imposer des restrictions sur les
quantités de textile
importées
des pays en développement. (Cette
entente est remplacée en 1995 par l’accord de l’OMC sur les textiles et les
vêtements).
Finalement, la signature d’accords de libre-échange entre pays membres du GATT est autorisée. Cette autorisation entraîne l’établissement, entre autres, de l’Accord commercial Canada–États-Unis en 1989 et de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) en 1994. (Voir aussi Accord Canada–États-Unis–Mexique.)
Subventions à
l’importation et à l’exportation
Les restrictions
quantitatives sur les subventions à l’exportation
ou à l’importation
sont généralement interdites
par le GATT, sauf dans certaines circonstances. Les deux exceptions les plus
importantes pour le Canada sont l’AMF et les arrangements concernant les
produits agricoles.
Ces derniers produits sont exclus du cadre de la libéralisation du commerce
prévu par le GATT, principalement sous l’insistance des États-Unis. Le Canada
et d’autres grands pays exportateurs de produits agricoles protestent alors
vigoureusement. (Voir Agriculture et produits alimentaires.) Le Canada s’oppose aussi à la
dérogation particulière accordée en 1955 aux États-Unis pour leur permettre de
restreindre les importations de produits laitiers, même si le pays n’a aucune
mainmise sur sa production intérieure. Par la suite, l’Allemagne et la Suisse
obtiennent, après bien des controverses, d’autres dérogations leur permettant
de limiter les importations de produits agricoles.
Le Canada
obtient lui aussi sa part de restrictions concernant les importations de céréales, de produits laitiers et de volaille, ainsi que des subventions à
l’exportation pour les produits laitiers et les œufs, afin d’écouler ses stocks
excédentaires. Les premières exclusions et dérogations du GATT donnent ainsi
lieu à une pléthore de restrictions sur les importations agricoles et de
subventions à l’exportation. Celles-ci nuisent depuis à la production mondiale
et aux échanges commerciaux liés à l’agriculture. (Voir Protectionnisme.)
Le GATT
condamne aussi le dumping, c’est-à-dire la vente à l’étranger de produits à un
prix inférieur à celui pratiqué dans le pays exportateur. Des droits antidumping
peuvent être imposés aux pays ayant recours à cette pratique si elle nuit à des
industries, les menace ou les empêche de s’établir.
Cycle d’Uruguay
Le cycle de
négociations le plus important des négociations du GATT est le cycle d’Uruguay.
Il débute en septembre 1986 et se termine le 15 avril 1994,
après presque huit ans de négociations. Ses dispositions entrent en vigueur le
1er janvier 1995. Le document détaillé qui en découle
comporte les modifications importantes apportées à la version du GATT qui
résultait des sept séries de négociations précédentes. Il présente aussi de
nombreuses autres ententes concernant : 1) les sujets non visés auparavant
par les règles générales du GATT, comme les mesures concernant les
investissements et le commerce, le commerce des services, les droits liés à
la propriété intellectuelle, l’agriculture,
le textile et les vêtements
; 2) les questions examinées d’une
manière sommaire au cours des négociations précédentes (p. ex., les règles
d’origine, le dumping, les subventions, les garanties et les procédures de
règlement des différends).
À la fin du
cycle d’Uruguay, 128 nations font partie du GATT.
Création de l’Organisation
mondiale du commerce
L’entente
obtenue à la fin du cycle d’Uruguay prévoit également la création de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), une nouvelle
institution administrative qui a pour vocation de remplacer ou d’intégrer le
GATT. L’OMC englobe tous les accords et arrangements conclus au cours du cycle
d’Uruguay. Le GATT est officiellement conclu à la fin du cycle d’Uruguay, le 15 avril 1994.
L’OMC naît officiellement le 1er janvier 1995. Le GATT
reste néanmoins l’accord-cadre de l’OMC pour ce qui est du commerce des
marchandises. Les pays désireux de devenir membres de l’OMC doivent d’abord
terminer les négociations leur permettant de devenir membres contractuels du
GATT. En octobre 2020, 164 pays étaient membres de l’OMC et 23 autres
pays étaient observateurs (en voie d’adhésion).
Voir
aussi : Réciprocité;
Politique
nationale; Libre-échange;
Stratégie
industrielle.