Agnes
Campbell Macphail, politicienne, réformatrice (née le 24 mars 1890, à Proton
Township, comté de Grey, en Ontario; décédée le 13 février 1954, à Toronto, en Ontario). Agnes Macphail a été
la première femme élue à la Chambre des communes (1921-1940) et elle a été l’une
des deux premières femmes élues à l’Assemblée législative de l’Ontario
(1943-1945, 1948-1951). Elle a également été la première femme membre de la
délégation canadienne auprès de la Société des Nations. Agnes Macphail a été membre
fondatrice de la Co-operative Commonwealth Federation (précurseur du Nouveau Parti démocratique). Elle était une pacifiste
reconnue et une défenseure de la réforme des prisons. En tant que membre de la
législature de l’Ontario, elle a défendu la première loi de l’Ontario sur la
parité salariale (1951).
Enfance et carrière
Agnes Macphail
est née dans le comté de Grey, en Ontario
(au sud de la baie Georgienne
), dans une famille d’agriculteurs
de descendance écossaise
. Jeune fille, elle déteste les
tâches ménagères et elle préfère aider son père à s’occuper du bétail. Elle
rêve d’une vie en dehors de l’agriculture
. Elle est donc heureuse de réussir
son examen d’entrée à l’école
secondaire à l’âge de 14 ans. Cependant, ses parents veulent qu’elle les
aide à la ferme. Il lui faut deux ans pour parvenir à obtenir leur permission pour
poursuivre ses études. En 1906, Agnes Macphail quitte la ferme pour fréquenter
le Owen Sound
Collegiate School, et par la suite
l’école normale
pour enseignantes à Stratford
, en Ontario (1908-1910). Après
avoir obtenu son diplôme, Agnes Macphail enseigne dans plusieurs écoles de l’Ontario
et de l’Alberta
.
Politique agricole
Agnes
Macphail occupe son dernier poste d’enseignante à l’école Pegg près de Sharon,
en Ontario. Alors qu’elle se trouve à Sharon, elle s’implique de plus en plus
dans le mouvement coopératif
agricole de l’Ontario. Elle se
joint aux organisations agricoles locales et aux Fermiers unis de l’Ontario
(FUO), une organisation
politique, éducative et sociale d’agriculteurs formée en 1914. En 1919, la FUO
remporte une victoire écrasante lors des élections provinciales de l’Ontario.
Deux ans plus tard, Agnes Macphail est nommée pour représenter la
circonscription du comté de Grey sud-est à la Chambre des communes
, en tant que membre du Parti progressiste
, auquel la FUO est alors affiliée.
Première femme députée au
Parlement
Agnes
Macphail est la seule femme élue au Parlement
en 1921,
lors de la première élection
fédérale
au cours de laquelle les femmes ont le droit
de vote.
Elle est députée
de la circonscription de Grey sud-est jusqu’à sa défaite lors de l’élection de
1940. Agnes Macphail a des alliés et des admirateurs à la Chambre
des communes. Mais elle fait également face aux critiques de ses collègues
députés (et journalistes)
qui s’opposent à sa position sur les questions sociales et politiques. Initialement,
elle est entrée en politique pour représenter les agriculteurs de sa région.
Tout au long de sa carrière politique, elle défend également les droits des
mineurs, des immigrants, des prisonniers, des femmes, ainsi que d’autres
groupes marginalisés. Certaines critiques suggèrent que son soutien pour ces
groupes est influencé par le communisme
; d’autres laissent entendre que son
jugement est affecté par sa « nature douce » et sa « sympathie féminine. »
Lorsqu’elle ose critiquer le militarisme et l’impérialisme,
elle est même accusée de trahison
.
Championne de la classe
ouvrière
Agnes
Macphail travaille sans relâche pour ses électeurs ruraux. Elle dénonce les tarifs
élevés qui représentent un avantage pour les manufacturiers
aux dépens des agriculteurs. Toutefois, sa sympathie ne vise pas seulement les travailleurs
ruraux. Elle se bat pour plusieurs autres groupes désavantagés. Ne reculant pas
devant les accusations de communisme, elle critique le gouvernement pour ses
subventions à la British Empire Steel Corporation alors qu’il reste indifférent
au sort des miniers de Nouvelle-Écosse
, qui souffrent de très bas salaires
et de conditions de vie médiocres.
Les
mauvaises conditions et la précarité des circonstances de la classe
ouvrière poussent Agnes Macphail et certains de ses collègues à promouvoir
un mouvement
coopératif protégeant les intérêts des agriculteurs et des travailleurs
industriels. En 1924, avec des collègues albertains (dont Robert Gardiner),
elle quitte le Parti progressiste pour former le Ginger Group
.
Lorsque le
gouvernement libéral
et le gouvernement conservateur
se montrent incapables de faire face à la Crise des années 1930
, le Ginger Group s’allie à la League for Social Reconstruction
et à divers groupes agraires, ouvriers
et socialistes.
Ils créent une nouvelle organisation, la Co-operative Commonwealth Federation
(CCF). Celle-ci préconise la nationalisation
des industries clés. Elle fait également appel à la création d’un État providence
qui fournirait des pensions
, de l’assurance-maladie
et de l’assurance-chômage
universelles. (Voir aussi Nouveau Parti démocratique
.)
Agnes Macphail est membre fondatrice de la CCF. Cependant, lorsque les Fermiers unis de l’Ontario se retirent de la CCF en 1934 (par peur d’influence communiste), Agnes Macphail est forcée de partir également. Cependant, elle continue de s’associer aux membres de la CCF. En 1938, elle commence à assister aux réunions du caucus. Elle se joint à nouveau à la CCF dans les années 1940 et représente le parti à l’Assemblée législative de l’Ontario.
Réforme des prisons
L’une des
plus grandes réalisations d’Agnes Macphail est sa contribution à la réforme du
système carcéral canadien. En 1923, les détenus du Kingston Penitentiary déclenchent
une émeute. Ceci incite Agnes Macphail à faire enquête sur les conditions dans
la prison
. Ce qu’elle y voit la choque et
l’entraîne à lancer sa campagne pour la réforme pénitentiaire.
Pendant des
années, Agnes Macphail milite en faveur du changement. Elle fait valoir que les
détenus devraient être réformés et éduqués, et que le châtiment corporel
devrait être réduit. Elle recommande plus de temps à l’extérieur et plus
d’exercice, une formation obligatoire aux détenus illettrés (voir Alphabétisme),
l’introduction du travail en milieu carcéral, et la nomination de surintendants
et de médecins qualifiés respectivement en pénologie et en psychologie
.
Bien qu’elle ait plusieurs partisans, ses efforts sont bloqués par le gouvernement conservateur au pouvoir à l’époque. Cependant, lorsque les Libéraux arrivent au pouvoir en 1935, ils créent une commission royale d’enquête sur le système pénal du Canada. En 1939, un projet de loi sur les pénitenciers recommande 88 changements au système carcéral, bien qu’aucun ne soit mis en œuvre avant 1945.
Guerre et paix
Comme un
bon nombre de ses collègues du Ginger Group
et de la CCF
, Agnes Macphail est pacifiste
pendant presque toute sa
carrière. En tant que membre de la Ligue internationale de femmes pour
la paix et la liberté
, elle conteste les dépenses militaires, le Collège militaire royal du Canada
, la formation des cadets et la
glorification de la guerre et de l’Empire.
En 1929, Agnes
Macphail devient la première femme nommée à la délégation canadienne de
la Société des Nations
. Elle est initialement affectée à
un comité traitant de la santé et du bien-être des femmes et des enfants. Mais
elle insiste pour siéger au Comité sur le désarmement.
Malgré son engagement en faveur de la paix, en 1939, elle vote à contrecœur
pour l’implication du Canada dans la Deuxième Guerre mondiale
, car « le fait de ne pas s’opposer
à Hitler semble pire que la guerre elle-même. »
Droits des femmes
Première députée
du Canada, Agnes Macphail s’autoproclame féministe.
En plus de son soutien vocal envers les agricultrices et les travailleuses en
général, elle fonde la Société
Elizabeth Fry du Canada, qui soutient les femmes aux prises avec la loi (voir
aussi Femmes
et loi). Amie de la suffragette Nellie McClung
, elle admire aussi Thérèse Casgrain
, qui fait campagne pour le droit de
vote des femmes au Québec
et qui soutient les Cinq femmes célèbres de l’Alberta
qui luttent pour le droit des
femmes de siéger au Sénat
(voir Affaire
« personne »). Agnes Macphail est une ardente défenseure de l’égalité des
sexes et elle s’efforce de faire disparaître la discrimination légale contre
les femmes, et de faire modifier les motifs de divorce.
Elle continue à soutenir les droits des femmes lorsqu’elle devient députée
provinciale de l’Ontario, en 1943.
Députée provinciale de
l’Ontario
En 1940,
Agnes Macphail perd son siège à la Chambre des communes
au profit de Walter Harris, un
candidat du Parti
libéral. Pendant les années suivantes, elle a du mal à gagner sa vie. Elle
donne des conférences au Canada et aux États-Unis, elle écrit pour le Globe and Mail
et fait campagne en faveur de
la CCF
de l’Ontario.
En 1943, Agnes
Macphail fait un retour en politique. Elle remporte la circonscription
provinciale de York East
à Toronto
en tant
que membre représentative de la CCF de l’Ontario. Elle et Rae Luckock sont les deux premières
femmes élues à l’Assemblée législative de l’Ontario. Agnes Macphail perd son
siège aux élections de 1945, comme plusieurs de ses collègues du CCF. Mais elle
est réélue en 1948. En tant que députée provinciale
, elle continue de soutenir les
agriculteurs, les travailleurs industriels, les détenus et
les femmes.
Son ultime
réussite politique est l’adoption, en 1951, de la première législation sur la
parité salariale de l’Ontario, la Female Employees Fair Remuneration
Act (loi concernant la rémunération équitable des femmes au travail).
Elle fait longtemps pression pour une législation sur l’égalité de
rémunération. Malgré les limites de cette loi, qu’Agnes Macphail critique
d’ailleurs, il s’agit d’un pas important en termes de législation sur
l’égalité. Cependant, peu de temps après ce succès, elle perd son siège lors de
l’élection provinciale de 1951. Elle continue à s’impliquer dans les projets
qui lui tiennent à cœur, comme la rédaction d’un rapport sur le statut des
femmes en Ontario. Mais elle souffre de problèmes de santé et de revenus
limités. Agnes Macphail meurt en février 1954, peu de temps avant que le premier ministre
Louis St-Laurent
ne lui offre une nomination au
Sénat.
Voir
aussi : Mouvements
de femmes au Canada; Début
des mouvements de femmes au Canada : 1867-1960; Organisations
féminines; Condition
féminine; Justice
sociale.