Éditorial

Bataille de Hong Kong

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Près de 2 000 soldats canadiens mal préparés combattent courageusement pour défendre la colonie britannique contre une imposante force d’invasion japonaise. Le jour de Noël, il y a aujourd’hui 75 ans, le combat prend fin… mais la lutte pour la survie ne fait alors que commencer.

Pourquoi Hong Kong?

Bien que le Canada fasse son entrée dans la Deuxième Guerre mondiale contre l’Allemagne en 1939, ses soldats ne voient que peu d’action durant les premières années. Le premier ministre William Lyon Mackenzie King hésite à envoyer des troupes au combat à l’étranger, ce qui pourrait nécessiter d’instituer la conscription et attiser à nouveau le conflit qui oppose Canadiens français et anglais.

En 1941, le Canada anglais exhorte King à en faire plus. Ottawa accepte d’appuyer le gouvernement britannique en envoyant des troupes pour aider à renforcer la petite colonie de Hong Kong. Des bataillons de deux unités mal préparées au combat, les Grenadiers de Winnipeg et les Royal Rifles of Canada (de Québec), sont ainsi dépêchés en novembre pour ce qui ne devrait être qu’un simple devoir de garnison dans un bastion paisible de l’Empire.

La guerre dans le Pacifique

Menant une guerre en Asie de l’Est depuis la fin des années 1930, le Japon avait jusque-là évité d’amorcer les hostilités contre l’Occident. Cependant, le 7 décembre 1941, trois semaines après l’arrivée des Canadiens à Hong Kong, le Japon stupéfie le monde entier en attaquant la flotte navale américaine mouillant à Pearl Harbor. Le jour suivant, les troupes aguerries de la 38 e Division japonaise attaquent Hong Kong avec une force écrasante.

Quatorze jours de combat

Les troupes canadiennes, britanniques et indiennes luttent avec acharnement pour résister à l’agression japonaise. Le 11 décembre, les hommes de la compagnie «  D  » des Grenadiers de Winnipeg deviennent les premières troupes de l’ Armée canadienne à s’engager dans le conflit. Les réserves d’eau et de munitions diminuent rapidement, et les soldats sont pilonnés par l’artillerie supérieure et les pilotes aériens experts de l’ennemi; qu’à cela ne tienne, les défenseurs résistent pendant 14 jours, refusant obstinément les demandes de capitulation des Japonais. Le jour de Noël, le gouverneur britannique décide finalement de rendre les armes, abandonnant des milliers de soldats alliés et les 1,6 million d’habitants de la colonie à la merci des Japonais.

Au bout de ces deux semaines de combat, 293 soldats canadiens sont tués et 493 sont blessés.

Actes de bravoure

Pendant les combats, les actes de bravoure individuelle ne manquent pas.

Le 19 décembre, le sergent-major de compagnie John Osborn, des Grenadiers de Winnipeg, se jette sur une grenade lancée par les Japonais en direction de ses hommes. Il est tué sur le coup. Son geste sauve toutefois la vie de plusieurs soldats canadiens. John Osborn recevra à titre posthume la Croix de Victoria.

Le même jour, le quartier général du brigadier John Kelburne Lawson est encerclé par des attaquants japonais qui tirent presque à bout portant dans son bunker. Le brigadier Lawson déclare alors, un pistolet dans chaque main, qu’il sort pour «  affronter  » l’ennemi. Les Japonais souligneront plus tard l’héroïsme de sa mort.

Minute de patrimoine : Osborn de Hong Kong

Prisonniers de guerre

L’histoire d’un ancien combattant : George MacDonell

«  J’ai passé la première année environ à Hong Kong, puis on m’a envoyé au Japon. On était à Yokohama au Japon, dans un camp appelé 3B; on travaillait dans le plus grand chantier naval du Japon, une industrie de guerre vitale qui construisait la plupart des cargos et des vaisseaux dont la marine avait tant besoin.

«  Dans le but de contrecarrer les Japonais, ces deux jeunes hommes, le sergent d’état-major Clark et le soldat Cameron, y sont allés d’un sabotage par incendie. Et ils ont fait ça en mettant le feu sous l’atelier des plans, là où les maquettes en bois des bateaux sont réalisées (aussi appelé “atelier des modèles”). Et comme à cette époque il n’y avait pas de sauvegarde électronique des informations, une fois brûlés les plans et les modèles faits à partir des plans, il devenait impossible de construire un bateau ou de faire quoi que ce soit dans le chantier naval.  »

L’histoire d’un ancien combattant : Larry Edward Stebbe

«  Lorsque nous avons été capturés la première fois [après que les positions alliées furent saisies le 25 décembre 1941], nous avons réintégré nos casernes à Hong Kong. Puis, quelques mois plus tard, nous avons été transférés vers un autre camp de l’île, du nom de North Point Camp. La nourriture était l’aspect le plus vital dans tout cela. Or, nous en manquions tout le temps. La maladie n’a pas tardé à s’installer, sous forme de diarrhée et de dysenterie d’abord, puis de grandes plaies sur les jambes causées par la malnutrition. Je porte encore des cicatrices sur les jambes, et bien d’autres traces de la malnutrition dont j’ai souffert. Je ne sais pas trop... je suppose que certains des prisonniers qui étaient là avec nous ont tout simplement baissé les bras et choisi la mort.  »

L’histoire d’un ancien combattant : Jean-Paul «  JP  » Dallain

«  [Devenir prisonnier de guerre], c’est un peu comme une maladie ou un accident. On ne prévoit pas, on ne sait pas. On vit au jour le jour. Une fois là-bas, la première année, il y a beaucoup de maladies et de mortalités par la dysenterie.

«  Éventuellement, les Japonais ont envoyé une première corvée de prisonniers canadiens au Japon. “Vous allez être bien là-bas.” C’était pire. On faisait toujours allusion à l’empereur. Il y avait plusieurs camps au Japon où les Canadiens étaient captifs. On dit souvent dans les écrits que [le camp de] Niigata était le pire pour la mortalité. Je ne veux pas dire que les autres camps étaient des pique-niques non plus.  »

La libération

En août 1945, près de quatre ans après la chute de Hong Kong, le bombardement atomique d’Hiroshima et de Nagasaki entraîne la fin de la guerre dans le Pacifique. À ce moment-là, on compte 264 Canadiens décédés comme prisonniers de guerre, tandis que 1 418 survivants libérés finissent par rentrer au Canada, bon nombre d’entre eux rendus profondément amers par la cruauté subie aux mains de leurs ravisseurs japonais.

Le gouvernement d’Ottawa nomme une commission royale pour faire enquête sur les circonstances de la participation du Canada aux combats de Hong Kong. Le Cabinet et les hauts commandants militaires sont toutefois exonérés de tout blâme.

Aujourd’hui, les Canadiens décédés au combat à Hong Kong et dans les camps de prisonniers sont honorés par un monument à tous les défenseurs du territoire. Des centaines de soldats canadiens reposent dans des cimetières militaires à Hong Kong et au Japon.