Edwin Albert Baker, C.C., Officier de l’Ordre de l’Empire britannique, CM, cofondateur de l’Institut national canadien pour les aveugles (INCA) (né le 9 janvier 1893 dans le canton d’Ernestown, en Ontario; décédé le 7 avril 1968 à Collins Bay, en Ontario). Soldat durant la Première Guerre mondiale, Edwin Baker y perd la vue. Il cherche à mettre en place des occasions d’emploi et de formation destinées aux personnes atteintes de cécité ou de perte de la vue (voir Cécité et amblyopie). Il participe à l’établissement de l’INCA, un organisme d’envergure nationale. En tant que directeur général, Edwin Baker défend les droits des personnes aveugles, en plus d’accroître la recherche et la sensibilisation relatives à la cécité. Son travail est reconnu par des personnalités importantes des quatre coins du monde.
Première Guerre mondiale
Edwin Albert Baker voit le jour en 1893 dans le canton historique d’Ernestown (près de la ville actuelle de Kingston, en Ontario). Diplômé de l’Université Queen’s en génie électrique, il s’enrôle dans la 6e compagnie de campagne du Corps du génie royal canadien pour participer à la Première Guerre mondiale. Peu de temps après son arrivée à l’étranger, Edwin Baker perd la vue, touché par la balle d’un tireur d’élite alors qu’il se trouve dans une tranchée du mont Kemmel, en Belgique. Promu au grade de lieutenant au sein du Corps du génie royal canadien, Edwin Baker relate cet événement dans les années 1960, au cours d’une entrevue réalisée par l’écrivaine Marjorie Wilkins Campbell : « Un obus éclairant de l’armée allemande illumine le paysage désolé… Alors que je regarde la scène, une balle me traverse l’arête du nez et me laisse à la merci de l’obscurité et de mes amis. »
Il récupère au St. Dunstan’s Hostel for Blind Soldiers and Sailors (foyer St. Dunstan’s pour les soldats et les marins aveugles) à Londres, en Angleterre. Sa rencontre avec le fondateur du foyer, sir Arthur Pearson, lequel souscrit à une philosophie d’autonomie, lui inspire une idée inédite à l’époque. Selon Arthur Pearson, les soldats et les marins aveugles peuvent profiter de la vie et devenir des membres actifs de la société en ayant recours à divers types de formation en vue de recouvrer leur autonomie. Au foyer St. Dunstan’s, Edwin Baker apprend diverses compétences, dont le braille, l’administration des affaires, l’escrime, le piano et l’aviron.
Edwin Baker et la fondation de l’INCA
À son retour à Toronto en 1916, Edwin Baker travaille comme audiotypiste au sein de la Commission de l’énergie hydroélectrique de l’Ontario. (Voir aussi Sir Adam Beck.) Il reporte toutefois son attention sur la défense des anciens combattants aveugles, dont les choix en matière d’emploi et de formation sont restreints. Edwin Baker épouse cette cause, prenant régulièrement la parole à l’occasion d’activités de financement et de ralliements au profit d’obligations de la Victoire (voir Emprunts de la Victoire). Il travaille à titre bénévole au sein de la Canadian Free Library for the Blind (bibliothèque publique pour les aveugles du Canada) et se joint à son conseil d’administration.
Le 6 décembre 1917, un événement inattendu encourage Edwin Baker et d’autres personnes à agir concrètement pour venir en aide aux personnes souffrant de cécité. Ce jour-là, un vaisseau français qui transporte des munitions entre en collision avec un autre navire et explose dans le port de Halifax (voir L’explosion de Halifax et l’INCA). Cet accident entraîne la mort de nombreuses personnes, ainsi que la perte de la vue chez des centaines d’autres. Encore une fois, les choix en matière de réadaptation qui s’offrent aux personnes aveugles sont inadaptés, et le besoin de ressources et d’options supplémentaires destinées à venir en aide aux personnes aveugles se fait sentir au Canada. Sept membres du conseil d’administration de la Canadian Free Library for the Blind, y compris Edwin Baker, s’unissent pour mettre sur pied un organisme national. En 1918, l’Institut national canadien pour les aveugles (INCA) est fondé à Toronto. L’objectif de cet organisme philanthropique et sans but lucratif est de « venir en aide aux personnes aveugles du Canada et de prévenir la cécité. » (Voir aussi Cécité et amblyopie.)
Défense des intérêts
En 1918, le gouvernement canadien embauche Edwin Baker comme consultant auprès des aveugles de guerre. De 1920 à 1962, il agit également en qualité de directeur général de l’INCA. Sous sa direction, une étude de grande envergure est menée auprès des écoliers de Toronto, qui conduira à la création de classes destinées à prévenir la cécité chez les enfants qui souffrent de déficiences visuelles et sont à risque de détérioration visuelle. Le lieutenant-colonel honoraire à la retraite fait en sorte que les personnes autochtones vivant dans des régions éloignées puissent profiter d’un examen de la vue. Il fabrique lui-même des lunettes de neige, faites de bois et de feutre, pour les offrir aux résidents de l’Arctique. Edwin Baker encourage également le gouvernement canadien à traiter les personnes souffrant de conjonctivite gonococcique, une infection bactérienne qui touche les nouveau-nés.
Eugénisme
Le soutien d’Edwin Baker à l’égard de la stérilisation volontaire des individus souffrant de maladies congénitales (héréditaires) de l’œil est un volet plus controversé de sa vie. Dans son ouvrage de 2005 intitulé Journey to Independence : Blindness, the Canadian Story, Euclid Herie, ancien président-directeur général de l’INCA et auteur, examine les éléments probants de la position d’Edwin Baker quant à la stérilisation. Dans les années 1930, A. F. Kaufman, du Parents’ Information Bureau (bureau d’information parentale), exerce des pressions sur Edwin Baker et l’INCA relativement à la stérilisation volontaire. Des extraits d’une lettre de 1938 révèlent qu’Edwin Baker s’oppose fermement à la stérilisation générale des personnes aveugles, mais qu’il « soutient fortement » la stérilisation « de toute personne aveugle dont la perte de la vue est confirmée sur le plan ophtalmologique comme découlant de maladies héréditaires ou d’une maladie sociale qui pourrait, d’une façon ou d’une autre, être transmise aux descendants. » Euclid Herie indique que, dans l’année suivant la rédaction de cette lettre, Edwin Baker autorise l’INCA à « couvrir les frais de stérilisation de quatre hommes aveugles. »
Edwin Baker (et A. F. Kaufman) ne sont pas les seuls à appuyer la stérilisation. L’eugénisme, un ensemble de croyances et de pratiques visant à améliorer la population humaine en contrôlant la reproduction, influence l’opinion publique et l’adoption de lois sur la stérilisation sexuelle en Amérique du Nord au 20e siècle (voir Eugénisme au Canada). En 1928 et en 1933, l’Alberta et la Colombie-Britannique promulguent respectivement des lois sur la stérilisation sexuelle. D’autres provinces du Canada déposent des projets de loi sur la stérilisation sexuelle, qui ne seront toutefois pas adoptés par le gouvernement.
Impact mondial
Le travail d’Edwin Baker est reconnu au Canada et à l’étranger. Durant la visite royale de 1939, Edwin Baker est présenté au roi George VI dans le cadre de l’inauguration du Monument commémoratif de guerre du Canada, à Ottawa. Dans les années 1940, Edwin Baker figure parmi les principaux défenseurs des personnes aveugles dans le monde. Lorsqu’une nouvelle résidence pour les soldats aveugles de guerre ouvre ses portes à Toronto en 1944, elle est nommée « Baker Hall » en son honneur. Edwin Baker joue également un rôle clé dans l’établissement de l’Organisation mondiale pour la promotion sociale des aveugles (OMPSA). Il reçoit la bénédiction du pape Jean XXIII pour ses nombreuses années de travail en tant que président de l’OMPSA. Cette organisation devient ensuite l’Union Mondiale des Aveugles, ayant son siège à Toronto. En 1956, le nouveau siège social de l’INCA ouvre ses portes à Toronto, sur l’avenue Bayview. Il porte le nom de « BakerWood », en l’honneur d’Edwin Baker et de Lewis Wood, un de ses anciens présidents.
Liens avec les États-Unis
L’influence d’Edwin Baker est si importante que ce dernier est élu président de l’Association américaine des amis des aveugles et occupe cette fonction de 1939 à 1941. Pendant un certain temps, il agit en qualité d’administrateur de la Fondation américaine pour les aveugles. Le 12 juin 1951, la militante aveugle Helen Keller remet à Edwin Baker la médaille Migel pour service distingué aux aveugles. Cette distinction de la Fondation américaine pour les aveugles rend hommage à « ceux dont le dévouement et les accomplissements ont amélioré, de façon importante, la vie de personnes ayant perdu la vue. » En remettant ce prix à Edwin Baker, Helen Keller prononce un discours et lui déclare qu’il « fait partie des guerriers du cerveau voyant » qui sont les « étoiles-guides de l’humanitarisme. » Dix ans plus tard, Edwin Baker devient le premier récipiendaire du prix international Helen Keller pour service distingué aux aveugles, décerné par l’American Foundation for Overseas Blind (fondation américaine pour les aveugles de l’étranger). À la suite de la Deuxième Guerre mondiale, Edwin Baker est également nommé membre du comité consultatif honoraire de l’armée américaine.
Il s’éteint le 7 avril 1968 à son domicile de Collins Bay, en Ontario. On rapporte que, dans un article nécrologique de 1968, A.N. Magill, le directeur général de l’INCA, déclare qu’Edwin Baker est « un homme qui a su transformer une déficience en réussite. » Une plaque commémorative de la Fiducie du patrimoine ontarien figure près du lieu de naissance d’Edwin Baker. Plusieurs décennies après sa mort, Edwin Baker est intronisé en 2002 au Hall of Fame of the Leaders and Legends of the Blindness Field (Ordre du mérite des chefs de file et des légendes du domaine de la cécité) de l’American Printing House for the Blind (Imprimerie américaine pour les aveugles) située à Louisville, dans le Kentucky.
Prix et distinctions
- Croix militaire
- Croix de Guerre (1916)
- Officier de l’Ordre de l’Empire britannique (1935)
- Médaille Migel pour service distingué aux aveugles, American Foundation for the Blind (1951)
- Prix international Helen Keller pour service distingué aux aveugles, American Foundation for the Blind (1960)
- Compagnon de l’Ordre du Canada (1967)
- Hall of Fame of the Leaders and Legends of the Blindness Field, American Printing House for the Blind (2002)
- Intronisé au Loyalist Hall of Honour de l’United Empire Loyalists’ Association of Canada (2020)