Article

Institut national canadien pour les aveugles (INCA)

Depuis sa fondation en 1918, l’Institut national canadien pour les aveugles (INCA) crée des programmes, offre des services et milite au nom des Canadiens aveugles ou malvoyants (voir Cécité et amblyopie). Cet organisme à but non lucratif a été fondé et incorporé par un groupe de sept hommes canadiens (dont plusieurs sont d’anciens combattants), en réponse à l’augmentation du taux de cécité causée par l’explosion d’Halifax et le retour des soldats blessés pendant la Première Guerre mondiale.

Avant l’INCA

Edgar Robinson est l’une des premières personnes à caresser le rêve d’aider la population canadienne souffrant de cécité. Né en 1872 à Stouffville (voir Whitchurch-Stouffville), en Ontario, il reçoit en 1890 un diplôme de l’Ontario Institution for the Education of the Blind (institut ontarien pour l’éducation des personnes aveugles). Il poursuit ensuite ses études et devient la première personne aveugle à obtenir un diplôme d’une université canadienne (il décroche un baccalauréat au Trinity College en 1893 et une maîtrise au même endroit dix ans plus tard). Edgar Robinson est également l’auteur du livre The True Sphere of the Blind (1896), qui traite de l’éducation des personnes aveugles au Canada. Déplorant le fait que la plupart des bibliothèques pour les personnes aveugles sont destinées aux jeunes élèves, Edgar Robinson rêve d’offrir à plus de lecteurs adultes un meilleur accès à des livres imprimés en relief. En 1906, il fonde donc la Canadian Free Library for the Blind (bibliothèque canadienne gratuite pour les personnes aveugles) dans la maison de son père, à Markham, en Ontario.

Après le décès d’Edgar Robinson le 7 novembre 1908, la bibliothèque est relocalisée en 1911 sur la rue Annette, à Toronto. La bibliothèque commence alors à offrir aux Canadiens aveugles différents types de documents, comme de la musique, des livres imprimés en relief, des cartes à jouer et du papier braille. Toutefois, lorsque se font ressentir les répercussions de la Première Guerre mondiale, une plus grande mission voit le jour.

Première Guerre mondiale

Pendant la Première Guerre mondiale, bon nombre de soldats canadiens subissent des blessures aux yeux alors qu’ils combattent outre-mer. Celles-ci sont notamment causées par des bombes, des explosions d’obus et une exposition au gaz moutarde. Plusieurs blessés reçoivent des soins avancés de réadaptation au refuge St. Dunstan d’Angleterre pour les soldats et les marins rendus aveugles, mais ceux qui reviennent au Canada ne reçoivent généralement pas de soins adéquats. En effet, les formations pour apprendre le braille ou un métier spécialisé sont rares, et les écoles pour les personnes malvoyantes sont généralement destinées aux jeunes.

Explosion d’Halifax

Le 6 décembre 1917, un navire de munitions français percute un autre bateau et explose dans le port d’Halifax (voir L’explosion d’Halifax; L’explosion d’Halifax et l’INCA). En plus de causer de nombreux décès, l’accident entraîne des blessures aux yeux chez 5 923 personnes, et cause la perte de la vue chez des centaines d’entre elles. Les éclats de verre rendent 41 personnes aveugles. Une fois de plus, les services de réadaptation pour les personnes devenues aveugles s’avèrent insuffisants.

Mise sur pied d’un organisme national

En 1917, la bibliothèque fondée par Edgar Robinson, qui porte désormais le nom de Canadian National Library for the Blind (bibliothèque nationale canadienne pour les aveugles), offre aux Canadiens aveugles de la formation sur plusieurs sujets, comme la lecture et l’écriture de texte en relief, ainsi que des services d’aide à l’emploi. Toutefois, la bibliothèque a seulement une portée locale et ne parvient pas à offrir des services à toutes les personnes aveugles au Canada. De plus, la croyance selon laquelle la cécité est synonyme de faiblesse physique et mentale est encore très répandue à l’époque. Ainsi, le chômage et la pauvreté sont monnaie courante pour les personnes aveugles. Confrontés à cette réalité, les sept membres du conseil d’administration de la bibliothèque se donnent comme objectif de propager la mission de leur institution.

Parmi ces membres, on retrouve notamment Edwin A. Baker, qui a perdu la vue sur un champ de bataille pendant la Première Guerre mondiale et qui occupe le poste de directeur général de l’INCA de 1920 à 1962. On y retrouve également Sherman Swift, un poète accompli devenu aveugle alors qu’il était enfant, après un accident impliquant de la poudre à canon.

L’Institut national canadien pour les aveugles (INCA) est fondé en mars 1918, plusieurs mois avant la signature de l’Armistice (voir aussi Jour du Souvenir au Canada). L’objectif de cet organisme à but non lucratif est alors de « servir les personnes aveugles au Canada et prévenir la cécité ». (Voir aussi Cécité et amblyopie.) Peu de temps après, l’INCA loue une propriété au 186, rue Beverley, à Toronto, où il met en place des logements et des salles de formation.

Débuts de l’INCA

Leçon donnée en braille, menée par le Dr Charles Carruthers, vers 1918.

La même année, la Canadian National Library for the Blind (CNLB) fusionne avec l’INCA. Les soldats de retour de la guerre visitent notamment la bibliothèque pour recevoir des formations sur de nombreux sujets, y compris la lecture et l’écriture en braille, la vannerie et la massothérapie. En 1920, l’INCA offre ses services en Ontario, dans les provinces de l’Atlantique et dans certaines régions de la Colombie-Britannique, de l’Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba (voir Provinces de l’Atlantique). Environ à la même période, l’organisme cherche à étendre ses services aux personnes aveugles dans les régions éloignées du centre et du nord du Canada. Dans les années 1920, l’Institut met sur pied un service de placement qui est parmi les premiers du genre à exister sur le continent. L’INCA crée également des occasions d’emploi, comme la fabrication de balais, l’accordage de pianos, le tressage de paniers et la vente de journaux.

L’INCA milite également pour offrir une indemnisation aux employés ayant perdu la vue en raison d’une maladie ou d’une blessure causée au travail. Il réussit notamment à atteindre son objectif en 1931, lorsque la Loi sur les accidents de travail des aveugles est adoptée en Ontario. (Voir aussi Loi sur les accidents du travail; Maladies professionnelles.) En 1937, après de nombreuses années de militantisme de l’INCA, la Loi des pensions de vieillesse (voir aussi Pension de vieillesse) est modifiée pour inclure des dispositions pour les personnes aveugles à l’âge de 40 ans. En 1939, l’INCA met sur pied un comité de recherche pour évaluer les besoins des musiciens et des accordeurs de piano ayant perdu la vue au Canada. Les conclusions du comité mènent à la création d’une division musicale de l’INCA.

Années 1950 et après

En 1955, l’INCA, la Société canadienne d’ophtalmologie et l’Université de Toronto fondent une banque oculaire à la suite de la vague de cécité cornéenne causée par les armes chimiques de la Deuxième Guerre mondiale. De telles banques existent partout au Canada depuis ce temps. On y stocke les tissus oculaires destinés aux greffes de cornées. (Voir aussi Ophtalmologie.)

En 1956, l’INCA ouvre un nouveau siège social d’envergure nationale au 1929, avenue Bayview, à Toronto.

BakerWood, ancien siège social de l’INCA

En 1961, l’INCA lance le Club du Hibou Vigilant du Canada, un programme de prévention ayant pour mission de promouvoir la sécurité au travail. Des cliniques ophtalmologiques mobiles de l’INCA sont ensuite créées pendant la décennie suivante pour offrir des examens ophtalmologiques en Ontario, à Terre-Neuve et, plus tard, au Québec. Au même moment, l’INCA, emporté par une vague d’innovation technologique, commence à offrir des livres audio sur cassette dans sa bibliothèque. Pour souligner son 75e anniversaire en 1993, l’INCA lance le Technibus, qui voyage partout au Canada pour permettre aux personnes aveugles et malvoyantes d’en apprendre plus sur les dernières technologies dans le domaine.

Années récentes

En 2014, l’INCA aide à mettre sur pied le Centre d’accès équitable aux bibliothèques (CAEB), en partenariat avec des bibliothèques publiques. Le CAEB offre des livres et d’autres documents de formats variés aux Canadiens incapables de lire les imprimés (en raison d’un trouble d’apprentissage ou d’un handicap physique ou visuel). En 2015, l’Institut se joint à des leaders en santé oculaire pour dévoiler la Charte canadienne des droits et responsabilités en matière de soins oculovisuels, qui promet une expérience plus positive pour les patients. En avril 2017, l’organisme lance le Programme de chiens-guides d’INCA, conçu pour élever et entraîner des chiens-guides destinés uniquement aux personnes atteintes de cécité. (Voir aussi Chiens au Canada.)

L’INCA aujourd’hui

L’INCA est un organisme sans but lucratif qui s’est donné comme mandat de « changer ce que cela veut dire que d’être aveugle par des programmes novateurs et des initiatives de défense des droits dynamiques afin de permettre aux Canadiens touchés par la cécité de vivre leur vie comme ils l’entendent ». Un réseau national de bénévoles, de donateurs et de partenaires appuie les programmes et les services de l’organisme.