Evelyn Dick, née MacLean, meurtrière (née le 13 octobre 1920 à Beamsville, en Ontario). Evelyn Dick a joué un rôle central dans l'un des meurtres les plus sordides commis au Canada.
Jeunesse
Evelyn Dick est la fille unique de Donald et Alexandra MacLean, deux immigrants écossais. Un an après la naissance de leur fille, la famille MacLean déménage à Hamilton, en Ontario, où Donald travaille pour l'entreprise Hamilton Street Railway (HSR). Les MacLean vivent au-dessus de leurs moyens. Ils envoient notamment Evelyn à la Loretto Academy, une école catholique privée pour filles. Donald, un alcoolique violent, vole de l'argent dans le coffre-fort de la HSR pour arrondir ses fins de mois.
Alors que la petite Evelyn devient une jeune femme attirante, Alexandra l'encourage à utiliser ses atouts physiques pour séduire les hommes afin qu'ils la couvrent de cadeaux dispendieux, comme des bijoux et des fourrures. Parmi les amants d'Evelyn, on compte de nombreux Hamiltoniens riches et influents.
En juillet 1942, Evelyn donne naissance à une fille, qu'elle confie aux soins de sa mère. Une deuxième grossesse se solde par l'accouchement d'un mort-né. En septembre 1944, Evelyn donne naissance à un garçon qu'elle prénomme Peter. Elle quitte l'hôpital sans son bébé et allègue qu'elle l'a confié à la société d'aide à l'enfance pour adoption, car son père ne veut pas d'un autre enfant dans la maison.
Mariage et séparation
Au cours de l'été 1945, Evelyn rencontre John Dick, un immigrant russe qui travaille comme conducteur de tramway. Âgé de 39 ans, il est de 15 ans son aîné, mais Evelyn croit à tort qu'il dispose d'un revenu suffisant pour soutenir son style de vie princier. Evelyn affirme à Dick qu'elle est la veuve d'un officier de la marine canadienne dénommé White, mort lors de la Deuxième Guerre mondiale. À peine quelques semaines après leur rencontre, Evelyn et Dick se fiancent. Les parents d'Evelyn désapprouvent son choix; ils n'assistent pas au mariage intime qui a lieu le 4 octobre 1945.
Dès qu'Evelyn se rend compte que Dick n'est pas bien nanti, elle l'abandonne et renoue sa liaison avec un homme nommé Bill Bohozuk. Néanmoins, Dick croit que lui et Evelyn peuvent sauver leur mariage et la convainc d'emménager avec lui dans une maison. Leur relation est houleuse, surtout en raison des relations qu'Evelyn entretient avec Bohozuk et ses autres amants. Dick quitte rapidement la maison, dont l'acte de vente est au nom d'Evelyn, et loge chez un cousin.
Dick demande l'aide de Donald MacLean, père d'Evelyn, afin qu'il exhorte sa fille à se conduire en bonne épouse. Lorsque MacLean refuse de l'aider, Dick menace de dénoncer les vols qu'il perpètre contre la HSR. Evelyn lui avait en effet révélé ce secret de famille. MacLean menace de tuer Dick, ce que Dick s'empresse de signaler à la police de Hamilton.
Dick disparaît la première semaine de mars 1946. Il est vu en vie pour la dernière fois le 6 mars dans un restaurant de Hamilton.
Le torse
Le 16 mars 1946, des enfants en randonnée le long d'un sentier sur la montagne Hamilton (qui fait partie de l'escarpement du Niagara) découvrent un torse humain atteint à la poitine par deux balles. Les restes humains sont rapidement identifiés comme étant ceux de John Dick.
La police interroge Evelyn, mais cette dernière dit tout ignorer du sort de Dick. Alors qu'elle est interrogée, des enquêteurs fouillent sa maison. Dans le grenier, ils découvrent une valise contenant le corps d'un bébé coulé dans le béton. Le corps est identifié plus tard comme étant celui de Peter, fils d'Evelyn.
Des fouilles supplémentaires dans la maison d'Evelyn et de ses parents permettent de découvrir des os humains calcinés et des morceaux de tissu provenant d'un uniforme de la HSR. Les détectives trouvent aussi une voiture dont les sièges sont maculés de sang et une cravate identifiée au nom de John Dick.
Evelyn, les MacLean et Bohozuk sont accusés du meurtre de Dick. De plus, Evelyn et Bohozuk sont accusés d'infanticide et Donald MacLean est accusé d'avoir dérobé des milliers de dollars à la HSR. Evelyn fait plusieurs déclarations stupéfiantes et contradictoires, dont une où elle affirme qu'un gangster italien a tué Dick.
Procès et prison
Les avocats d'Evelyn font pression pour qu'elle soit jugée séparément de Bohozuk et Donald MacLean, car ils désirent qu'elle projette devant le jury l'image d'une jeune femme belle et naïve incapable de commettre un meurtre. La longue série de procès commence le 7 octobre 1946 au palais de justice du comté de Wentworth, à Hamilton.
Alexandra MacLean, mère d'Evelyn, accepte de témoigner contre sa fille pour la couronne, obtenant en échange l'immunité. Elle affirme qu'Evelyn avait été absente de la maison pendant une période prolongée le 6 mars, soit la dernière où John Dick avait été aperçu. Elle déclare aussi que le 8 mars, elle avait demandé à Evelyn si quelque chose était arrivé à John. Selon Alexandra, Evelyn a répondu qu'il ne reviendrait plus. Au cours de son témoignage, Alexandra mentionne aussi que son mari posséde un pistolet et un grand couteau de boucher.
Bien que les preuves qui incriminent Evelyn soient principalement circonstancielles, le jury la déclare coupable du meurtre de John Dick. Le juge la condamne à mort, mais ses avocats appellent la décision avec succès. La cause d'Evelyn est reprise par John J. Robinette, avocat plaidant chevronné et célèbre pour les stratégies de défense qu'il emploie lors de procès. Robinette insiste auprès du jury sur le fait qu'il est fort possible que Donald MacLean ait tué Dick. Cette fois-ci, le jury déclare Evelyn non coupable.
Lors du procès pour le meurtre du bébé Peter, Robinette appelle à la barre un psychiatre qui témoigne qu'Evelyn a vécu une enfance traumatisante, et qu'elle a donc l'intelligence émotionnelle d'une enfant de 13 ans. Le jury charge Evelyn d'une accusation réduite d'homicide et le juge la condamne à la prison à vie.
Donald MacLean est reconnu coupable de complicité de meurtre et est condamné à cinq ans de prison. Il est aussi condamné à cinq autres années pour vol. Bohozuk est acquitté des accusations qui pesaient contre lui.
Libération conditionnelle et intérêt du public
Après avoir passé 11 ans derrière les barreaux du pénitencier de Kingston, Evelyn Dick bénéficie d'une libération conditionnelle en 1958. Sous une nouvelle identité, elle tombe dans l'oubli. Elle doit régulièrement se rapporter à la GRC, qui respecte sa vie privée. Evelyn obtient le pardon en 1985 et son dossier est mis sous scellé de façon permanente.
Le meurtre de John Dick n'a jamais été officiellement résolu. L'affaire a inspiré la pièce de théâtre How Could You, Mrs. Dick? (1989), la série dramatique Torso: The Evelyn Dick Story (2002), le film noir musical Black Widow (2005), et plusieurs livres.
L'affaire a aussi inspiré une gamme de produits controversée. En 2014, Chris Farias, artiste et designer originaire de Hamilton, élabore des produits inspirés d’Evelyn et les vend au festival annuel Spercrawl tenu dans la ville. La gamme comprend des t-shirts, des sacs fourre-tout et des verres à shooters sur lesquels sont inscrits des slogans comme « The fastest way to a man’s heart is through his torso » et « Love you to pieces ». La réaction du public est mitigée. Alors que l'Association canadienne pour l'égalité, un groupe de Toronto dédié à la défense des droits des hommes, affirme que la marchandise glorifie la violence contre les hommes, d'autres se portent à la défense de Farias.