Ewing Hunter Harrison III, PDG de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada de 2003 à 2009 et du Chemin de fer du Canadien Pacifique de 2012 à 2017 (né le 7 novembre 1944 à Memphis, au Tennessee; décédé le 16 décembre 2017 à Wellington, en Floride). Surtout connu comme principal promoteur de l’exploitation ferroviaire précise, Hunter Harrison a passé plus d’un demi-siècle dans l’industrie ferroviaire et dirigé quatre chemins de fer de catégorie I cotés en bourse. Les deux plus grandes compagnies de chemin de fer du Canada, sous sa direction, ont grandement amélioré leur efficacité et leur rentabilité.
Cliquez ici pour obtenir la définition des termes clés utilisés dans cet article.
Hunter Harrison dans sa résidence de Floride en janvier 2017, alors qu’il signe les papiers qui officialisent sa démission en tant que PDG du Chemin de fer du Canadien Pacifique.
Jeunesse et éducation
Ewing Hunter Harrison, qui utilise surtout son deuxième prénom, est le fils aîné de Dorothy Harrison et d’Ewing Hunter Harrison Jr, un policier de Memphis. Enfant unique jusqu’à l’âge de six ans, il devient plus tard l’aîné de quatre sœurs, Mary, Sydney, Diane et Helen. En 1962, il termine ses études secondaires à l’école Kingsbury et, l’année suivante, il épouse Jeannie Day, originaire de Memphis. Le couple divorce en 1969, puis se remarie un an plus tard.
Débuts professionnels
Hunter Harrison décroche son premier emploi sur les chemins de fer en décembre 1963 comme wagonnier-huileur dans un dépôt de rails de Memphis. Il est responsable d’ajouter l’huile qui lubrifie les boîtes d’essieu des wagons de la St Louis–San Francisco Railway Co, plus tard achetée par Burlington Northern (aujourd’hui BNSF Railway). Muni seulement d’un diplôme d’études secondaires, le jeune homme réussit à gravir les échelons de l’entreprise. Il se démarque alors par son habileté étonnante à déplacer les wagons de manière plus efficace que les autres (il compare la logistique ferroviaire à une partie de dames jouée à grande vitesse), ce que la direction remarque et récompense par plusieurs promotions. Au cours de sa carrière, il en vient à changer de ville une vingtaine de fois.
Carrière à l’Illinois Central
À la fin des années 1980, la carrière de Hunter Harrison ne progresse plus chez Burlington Northern. En 1989, la compagnie de chemin de fer Illinois Central, à Chicago, l’embauche comme vice-président et chef des transports. L’entreprise, tout juste achetée par un groupe d’investisseurs, cherche alors à se remettre sur pied.
On confie à Hunter Harrison le mandat de rendre plus efficace le chemin de fer en améliorant son ratio d’exploitation (dépenses divisées par les revenus). Il en vient à enregistrer des résultats records grâce à son approche d’exploitation ferroviaire précise, qui mesure tous les aspects de la performance, allant du temps d’inspection nécessaire pour les wagons au prix des actifs, comme les rails et les locomotives. Au cours des décennies précédentes, les chemins de fer destinés aux marchandises ne respectaient aucun horaire et engendraient des pertes financières. Hunter Harrison apporte alors des modifications visant à améliorer la vitesse, la fiabilité et la tarification. En février 1993, il devient PDG d’Illinois Central. Il réussit à en faire le grand chemin de fer (de catégorie I) le plus efficace des États-Unis et du Canada.
Le saviez-vous? L’Illinois Central est l’un des premiers chemins de fer à profiter de « concessions de terres » aux États-Unis. Une concession du gouvernement fédéral d’environ 12 000 km2 (3 millions d’acres) permet à l’entreprise d’entrer en activité en 1851. Elle forme ainsi ce qui deviendra plus tard l’importante voie ferrée qui longe le fleuve Mississippi de Chicago jusqu’à la Nouvelle-Orléans. Aux débuts du chemin de fer, Abraham Lincoln (le président américain en poste pendant la guerre de Sécession) est l’un des avocats de l’entreprise.
Carrière au CN
En 1998, l’Illinois Central est acheté par les Chemins de fer nationaux du Canada (CN) dans le but de créer un chemin de fer pour profiter du nouvel Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA). D’abord hésitant à se joindre au CN, Hunter Harrison accepte finalement d’en devenir le chef de l’exploitation. Il occupe ce poste de mars 1998 à décembre 2002, jusqu’à ce que le PDG, Paul Tellier, quitte l’entreprise pour intégrer l’équipe de Bombardier. Hunter Harrison accepte alors le poste de PDG du CN en janvier 2003. Pendant son mandat à la tête de l’entreprise, celle-ci devient le chemin de fer de catégorie I le plus efficace en Amérique du Nord. L’homme, peu enclin à apprendre le français malgré le fait qu’il gère une entreprise basée au Québec, est aussi connu pour avoir commencé une réunion par « Bonjour y’all ».
Hunter Harrison quitte avec regret le CN à la fin de 2009, à l’âge de 65 ans, alors que l’entreprise dit ne plus avoir besoin de lui. Il fait toutefois la une des journaux en 2012 grâce à un retour spectaculaire aux côtés de William Ackman, un investisseur militant américain reconnu, fondateur du Pershing Square Capital Management (Pershing). Pershing est alors le plus important actionnaire du Chemin de fer du Canadien Pacifique (CP) et est déterminé à effectuer un redressement de l’entreprise, qui génère un rendement nettement inférieur à celui de ses pairs. La stratégie de Pershing est orientée autour du remplacement du PDG actuel par Hunter Harrison. L’opposition du CP mène à une course aux procurations publique et amère entre l’investisseur américain et la compagnie canadienne emblématique. Pershing l’emporte finalement lors d’un vote des actionnaires organisé pendant l’assemblée générale annuelle de mai 2012. Hunter Harrison devient le PDG de l’entreprise le mois suivant.
Carrière au CP et au CSX
Nombre de gens jugent drastiques les mesures de Hunter Harrison; ses partisans n’en demeurent pas moins nombreux. Le dirigeant réussit également à changer rapidement la destinée du CP. Lorsqu’il quitte l’entreprise en janvier 2017, l’efficacité du CP est au même niveau que celle du CN. À 72 ans, après avoir redressé trois compagnies, Hunter Harrison refuse d’arrêter de travailler malgré sa santé qui se détériore. Une fois de plus, il se joint à un investisseur militant américain, Mantle Ridge LP, une entreprise gérée par Paul Hilal, qui faisait auparavant partie de Pershing. Les deux hommes ciblent alors un important chemin de fer américain au rendement peu satisfaisant, la CSX Corporation. Pendant son passage au CP, Hunter Harrison avait tenté, sans succès, de fusionner son entreprise avec la CSX. Le 6 mars 2017, Hunter Harrison devient PDG de la CSX, poste qu’il conservera jusqu’à son décès, en décembre de la même année.
Héritage
Grâce aux quatre redressements effectués par Hunter Harrison, les actionnaires enregistrent des gains d’environ 50 milliards de dollars américains. Depuis son décès, en plus du CN, du CP et de la CSX, tous les autres chemins de fer de catégorie I en Amérique du Nord, sauf un, ont adopté l’approche d’exploitation ferroviaire précise ou un système qui en est inspiré.
Hunter Harrison dans son bureau de la CSX à Jacksonville, en Floride, en juillet 2017, six mois avant son décès.