Les histoires orales jouent un rôle essentiel dans les cultures autochtones. Elles permettent de partager des traditions, des histoires et des enseignements importants avec les nouvelles générations. Les histoires orales, un type de source primaire, permettent aux peuples autochtones d’enseigner leur culture dans leurs propres mots. Les autres types de sources primaires, comme les artéfacts de communautés d’autrefois, transmettent également des connaissances sur les traditions et les modes de vie autochtones. Les chercheurs et les conservateurs de musée utilisent de telles sources pour mettre en valeur les points de vue autochtones.
Un aîné autochtone raconte une histoire.
Qu’est-ce qu’une histoire orale?
L’Oral History Association définit l’histoire orale comme une méthode servant à recueillir, à préserver et à interpréter les points de vue et les souvenirs des peuples, des communautés et des participants des événements du passé. Il s’agit de la plus ancienne manière de raconter des événements historiques.
Les récits oraux jouent un rôle essentiel dans la culture des peuples autochtones du Canada, soit les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Parfois regroupés sous le nom de « tradition orale », ils sont pendant des millénaires la manière fondamentale de transmettre les histoires, les leçons et enseignements spirituels, les chansons, les poèmes, les prières et les moyens de survie.
Histoire orale chez les peuples autochtones
Dans plusieurs communautés autochtones, des personnes respectées, comme les aînés ou les chefs héréditaires, sont responsables de partager et de conserver les récits oraux. Il leur incombe aussi d’adapter les histoires selon le message à transmettre à leur auditoire. Cette façon de partager les récits oraux joue un rôle fondamental pour plusieurs générations d’Autochtones, puisque les aînés transmettent des renseignements essentiels aux plus jeunes.
Dans certains cas, les récits oraux ne peuvent être transmis qu’à des moments et à des endroits précis, par et pour des personnes précises. Par exemple, chez les Mowachaht et les Kwakwaka’wakw, comme dans d’autres communautés dotées de chefs héréditaires, les chefs possèdent des privilèges comme l’accès à certains récits oraux et pratiques culturelles. De même, chez certains peuples des Plaines, quelques récits sont seulement racontés en hiver pour éviter que les esprits, qui dorment à ce moment de l’année, ne puissent les entendre et se mettre en colère. (Voir aussi Autochtones : religion et spiritualité.)
Colonisation et réappropriation des histoires orales
L’histoire orale autochtone a été menacée par la colonisation. Pendant des années, la croyance occidentale selon laquelle l’écriture est plus fiable que la parole menace et compromet les méthodes traditionnelles de transmission du savoir. Les lois coloniales visant à assimiler les peuples autochtones ont également des effets dévastateurs. Des politiques comme la Loi sur les Indiens et la création de pensionnats indiens empêchent la tradition orale et les coutumes, ce qui cause un traumatisme et des répercussions à long terme pour les peuples autochtones. Encore aujourd’hui, les communautés autochtones réclament les traditions et les récits oraux qui ont été perdus ou menacés par la colonisation.
Hors des communautés et des cultures autochtones, le recours aux récits oraux aide à décoloniser l’histoire canadienne, c’est-à-dire réintégrer les histoires qui ont autrefois été oubliées ou ignorées et reconnaître les effets néfastes de la colonisation sur les peuples autochtones. De plus en plus, les chercheurs et les conservateurs de musée utilisent et mettent en valeur les récits oraux pour fournir des connaissances et des témoignages sur les modes de vie et les perspectives autochtones. Différents programmes et politiques de musée, comme le Rapport du Groupe de travail sur les musées et les Premières Nations (Tourner la page : forger de nouveaux partenariats entre les musées et les Premières Nations; 1992) encouragent l’inclusion du point de vue autochtone. De même, la demande pour une meilleure inclusion des récits oraux est reconnue dans le rapport de 1996 de la Commission royale sur les peuples autochtones et dans le rapport Honorer la vérité, réconcilier pour l’avenir, émis en 2015 par la Commission de vérité et de réconciliation. Au cours des dernières années, certains musées ont également cherché à rendre les artéfacts autochtones à leurs communautés respectives dans un effort de réconciliation. (Voir aussi Rapatriement d’artéfacts.)
Le saviez-vous?
Les récits oraux sont parfois au cœur d’affaires judiciaires portant sur les droits des Autochtones. Lors de l’affaire Delgamuukw (1997), la Cour suprême juge que les récits oraux constituent un type de preuve essentiel que les tribunaux doivent mettre sur un pied d’égalité avec les autres types de preuves. Cette décision a des répercussions sur des affaires ultérieures portant sur les titres et les droits autochtones, notamment l’affaire Tsilhqot’in (2014).
Sources primaires dans la recherche autochtone
En plus des récits oraux, d’autres sources primaires, comme les vêtements, les armes, les accessoires et d’autres artéfacts, permettent de décoloniser l’histoire du Canada. Plutôt que de se fier seulement aux renseignements fournis par les collectionneurs (vraisemblablement d’origine européenne), les chercheurs peuvent recueillir des renseignements importants sur le patrimoine autochtone directement à partir des artéfacts. Par exemple, analyser une paire de mocassins autochtones, comme le matériau utilisé, la présence ou l’absence de perles et le mode de fabrication, permet de déterminer l’époque de création et la communauté autochtone à laquelle elle appartient. Cette étude des cultures matérielles permet aux chercheurs d’en apprendre plus sur la relation entre les peuples et leurs biens. Ce type d’étude, qui s’applique à de nombreux objets, peut révéler de nouveaux détails sur les histoires, les cultures et les modes de vie autochtones.
Les renseignements trouvés dans les documents historiques eurocanadiens, comme les archives, les carnets, les journaux, les lettres ou les photos de missionnaires et de colons, peuvent aussi être utiles pour comprendre le passé. Comme dans tous les cas, le point de vue de l’auteur de la source doit être pris en compte : bon nombre de ces sources ont été créées par des employés de gouvernements coloniaux ou des partisans potentiels de la colonisation. (Voir aussi Sources historiques.)